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30/10/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0834.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 octobre 2019, P.19.0834.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0834.F
I. B. D., prévenu,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,

II. LE PROCUREUR DU ROI DE BRUXELLES,
demandeur en cassation,

contre

B. D., mieux qualifié ci-dessus,
prévenu,
défendeur en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un jugement rendu le 5 juin 2019 par le tribunal correc

tionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Les demandeurs invoquent un moyen, chacun dans un mém...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0834.F
I. B. D., prévenu,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,

II. LE PROCUREUR DU ROI DE BRUXELLES,
demandeur en cassation,

contre

B. D., mieux qualifié ci-dessus,
prévenu,
défendeur en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un jugement rendu le 5 juin 2019 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Les demandeurs invoquent un moyen, chacun dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

A. Sur le pourvoi de D.B. :

Sur le moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 29, 49, 154 et 189 du Code d'instruction criminelle, 29 et 62 de la loi relative à la police de la circulation routière, 5 et 68 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l'usage de la voie publique, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du principe général relatif à l'administration de la preuve en matière répressive.

Selon le demandeur, le tribunal aurait dû écarter le procès-verbal relatif à son excès de vitesse, dès lors que cet acte n'est pas signé par le policier qui a constaté les faits, mais par son seul rédacteur, étranger à ce constat. Le moyen soutient qu'un procès-verbal qui n'est pas signé par le verbalisateur ou, à tout le moins, un verbalisateur est frappé de nullité.

Mais aucune disposition, notamment celles visées au moyen, n'oblige les agents qualifiés ou l'un d'eux à rédiger et à signer eux-mêmes les procès-verbaux relatant leurs constatations.

À cet égard, le moyen manque en droit.

Pour le surplus, en tant qu'il invoque la méconnaissance du droit du demandeur à un procès équitable et de ses droits de la défense, sans indiquer en quoi l'absence de signature de l'agent verbalisateur aurait pu emporter une telle atteinte, le moyen, imprécis, est irrecevable.

B. Sur le pourvoi du procureur du Roi :

Le moyen est pris de la violation de l'article 38, § 6, alinéa 1er, de la loi relative à la police de la circulation routière.

Le défendeur est poursuivi pour avoir, le 23 août 2017, dans une agglomération, dépassé la vitesse maximale autorisée dans une zone marquée par le panneau C43, délit prévu par l'article 29, § 3, de la loi relative à la police de la circulation routière.

D'après la citation, le délit aurait été commis avec la circonstance que, dans les trois ans précédant sa perpétration, le défendeur avait déjà été condamné du chef de la même infraction.

À la date des faits, l'article 38, § 6, alinéa 1er, de la loi subordonnait l'aggravation de la peine qu'il prévoit, à la condition qu'une nouvelle infraction ait été commise dans les trois ans de la condamnation précédente.

Cette disposition a été modifiée par l'article 11, 6°, de la loi du 6 mars 2018 relative à l'amélioration de la sécurité routière. Dans cette version, qui n'existait ni à la date du délit ni à celle du jugement, l'aggravation de la peine n'était imposée que si le prévenu avait été, dans le délai de trois ans, condamné du chef de la nouvelle infraction.
Depuis le 12 octobre 2018, date d'entrée en vigueur de l'article 2 de la loi du 2 septembre 2018 modifiant la loi relative à la police de la circulation routière, l'article 38, § 6, subordonne à nouveau la récidive à la commission de la nouvelle infraction, et non à sa condamnation, dans les trois ans de l'antécédent spécifique.

Le jugement attaqué considère que
- la peine moins sévère est applicable même si la durée de vie de la loi plus légère se limite à une période qui a pris cours après la date de l'infraction pour se terminer avant celle du jugement ;
- les termes de cette loi sont clairs, en ce qu'ils adoucissent le régime répressif, et ne justifient pas qu'il soit recouru à l'interprétation ;
- y aurait-il lieu à interprétation, encore faudrait-il constater qu'il n'existe pas de doute possible quant à l'intention du législateur d'élire, pour second terme de la récidive, le jugement de condamnation plutôt que l'infraction qu'il punit ;
- cette intention du législateur ayant existé, fût-ce temporairement, l'obligation de prononcer une peine de déchéance d'au moins trois mois n'est pas applicable au défendeur, puisqu'il a été jugé plus de trois ans après l'antécédent.

Le moyen soutient qu'en refusant d'appliquer l'aggravation de la peine, soit la déchéance du droit de conduire minimale de trois mois, le jugement viole la disposition légale qui l'impose.

Si, en l'application des articles 2, alinéa 2, du Code pénal, 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 15.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, un fait cesse d'être punissable ou l'est dans des conditions moins sévères, notamment du point de vue de la récidive, c'est à la condition que l'intention non douteuse du législateur ait été de renoncer, selon le cas, à toute répression ou à l'aggravation de la peine telle que la loi l'imposait à la date de l'infraction.

Les travaux préparatoires de la loi du 2 septembre 2018 font apparaître qu'un réaménagement de l'article 38, § 6, susdit, a paru nécessaire au motif qu'en substituant, à la nouvelle infraction, le jugement qui la condamne, la modification précédente a obscurci la définition du second terme de la récidive.

Votée six mois après le libellé qu'elle corrige, la nouvelle loi présente le caractère d'une norme réparatrice, lequel ne permet pas de considérer que le législateur ait voulu, fût-ce pendant cette période limitée, adoucir la répression.

Décidant le contraire, les juges d'appel n'ont pas légalement justifié leur décision.

Le moyen est fondé.

La déchéance du droit de conduire est un élément de la peine principale infligée, de sorte que l'illégalité s'étend à l'ensemble de la sanction ainsi qu'à la contribution au Fonds spécial d'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence. En revanche, cette illégalité est sans incidence sur la déclaration de culpabilité.

Le contrôle d'office

Pour le surplus, les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est, sauf l'illégalité à censurer ci-après, conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur l'ensemble de la peine et sur la contribution au Fonds spécial d'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Condamne D. B. aux deux tiers des frais et réserve l'autre tiers pour qu'il soit statué sur celui-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, au tribunal correctionnel du Brabant wallon, siégeant en degré d'appel.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de deux cent quarante-six euros cinquante-deux centimes dont I) sur le pourvoi de D. B. : cent cinquante euros trente-sept centimes dus et II) sur le pourvoi du procureur du Roi de Bruxelles : nonante-six euros quinze centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du trente octobre deux mille dix-neuf par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.0834.F
Date de la décision : 30/10/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-10-30;p.19.0834.f ?

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