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30/10/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0647.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 octobre 2019, P.19.0647.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0647.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE LIEGE,
demandeur en cassation,

contre

P. P., T., L., G.,
prévenu,
défendeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Jacques Bailly, avocat au barreau de Verviers.





I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conf

orme.
Le 21 octobre 2019, l'avocat général Michel Nolet de Brauwere a déposé des conclusions au greffe.
A l'a...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0647.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE LIEGE,
demandeur en cassation,

contre

P. P., T., L., G.,
prévenu,
défendeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Jacques Bailly, avocat au barreau de Verviers.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 21 octobre 2019, l'avocat général Michel Nolet de Brauwere a déposé des conclusions au greffe.
A l'audience du 30 octobre 2019, le conseiller Tamara Konsek a fait rapport et l'avocat général précité a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 11, 12, 23, alinéa 2, et 33 de la loi du 8 juin 2006 sur les armes et 25 de l'arrêté royal du 20 septembre 1991 exécutant la loi sur les armes.

Il reproche aux juges d'appel d'avoir acquitté le défendeur de la prévention d'avoir sciemment fait des déclarations inexactes en vue d'obtenir une autorisation de détention d'armes à feu au motif qu'un doute subsiste quant à l'élément intentionnel de l'infraction, à savoir sciemment voulu régulariser une détention qu'il savait irrégulière.

Selon le demandeur, dès lors que les juges d'appel ont décidé, d'une part, que le prêt sur gage d'armes à feu doit faire l'objet d'un avis de cession à la date de la mise en gage des armes et qu'ils ont constaté, d'autre part, que le défendeur a indiqué dans les avis de cession des dates ne correspondant pas au moment de leur cession effective, ce qu'il ne pouvait ignorer au vu des faits constatés, la cour d'appel devait déclarer la prévention établie.

L'arrêt relève d'abord que dans le courant de l'année 2014, le propriétaire des armes a remis en gage une partie de celles-ci entre les mains du défendeur pour des prêts consentis par le second au premier et que, fin 2014, le surplus des armes, restées toutefois en possession du propriétaire, ont également servi de gage pour un autre prêt. Il constate qu'à ces occasions, les formulaires d'avis de cession d'armes à feu ont été signés en blanc par le propriétaire et qu'à la suite du non-remboursement des prêts, le défendeur a rempli lesdits formulaires en les datant respectivement du 7 avril 2015 et du 1er mai 2015 en vue de leur transmission au gouverneur de la province.

L'arrêt énonce ensuite qu'en ce qui concerne les armes à feu qui lui ont été remises, le défendeur soutient à tort qu'il n'était pas tenu d'indiquer sur les formulaires les dates de mise en gage, à défaut de transfert de propriété des armes. L'arrêt considère, en effet, qu'en les recevant à titre de prêt sur gage, il s'est vu conférer des droits de la part du propriétaire de telle sorte qu'il ne peut être considéré comme simple détenteur des armes.

L'arrêt en déduit qu'à défaut de dispositions particulières réglementant autrement le type de cession visée par le cas d'espèce, le prêt sur gage d'armes à feu par le propriétaire devait faire l'objet d'un avis de cession à dater de la mise en gage, de telle sorte que le défendeur, en le faisant ultérieurement, avait bien fait une déclaration inexacte.

L'arrêt ajoute que, toutefois, compte tenu des circonstances de la cause, dont le fait que le défendeur a lui-même révélé qu'il détenait une arme longue depuis bien avant le 7 avril 2015 alors que, selon la thèse de la partie poursuivante, il a faussé l'une des dates pour couvrir la détention illégale des armes, un doute subsiste quant au fait que le défendeur aurait agi sciemment, dans le but d'obtenir une régularisation de la situation des armes à feu visées à la prévention A.1 et qu'il en va de même en ce qui concerne les déclarations relatives aux armes à feu visées à la prévention B.2.

De ces énonciations, il ressort que la cour d'appel a considéré par une appréciation en fait qu'il n'appartient pas à la Cour de censurer, qu'il n'était pas établi à suffisance que le défendeur avait agi en connaissance de la nécessité de transmettre l'avis de cession d'armes au gouverneur de province dans l'hypothèse d'un prêt sur gage. Ainsi, l'arrêt justifie légalement sa décision.

Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le second moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 11, 12, 23, alinéa 1er, 26 et 33 de la loi du 8 juin 2006 sur les armes et 25 de l'arrêté royal du 20 septembre 1991 exécutant la loi sur les armes.

Devant la cour d'appel, le défendeur a été invité à se défendre du chef de la prévention C.4, requalifiée comme suit : « En contravention aux articles 12, 23, 26 et 33 de la loi du 8 juin 2006, étant un particulier titulaire d'un permis de chasse, avoir détenu une arme à feu sans respecter les modalités de l'enregistrement de la cession et de la détention des armes à feu établies par l'article 25 de l'arrêté royal du 20 septembre 1991 [ ... ] ».

Le moyen fait grief à l'arrêt d'acquitter le défendeur de cette prévention au motif que l'obligation d'adresser l'avis de cession d'armes au gouverneur de province, visée à l'article 25 de l'arrêté royal précité, incombe au cédant et non au défendeur, cessionnaire de l'arme.

Selon le demandeur, il résulte de la lecture combinée des articles 11, § 1er, 12 et 23, alinéa 1er, de la loi du 8 juin 2006 ainsi que de l'article 25 de l'arrêté royal du 20 septembre 1991, que le fait, pour un individu, de détenir une arme en sachant que les formalités propres à rendre cette détention régulière ont été omises est constitutif d'une infraction, indépendamment de la question de savoir à qui incombe l'accomplissement des formalités requises. Le demandeur soutient que, eu égard aux circonstances de la cause relevées par les juges d'appel, le défendeur ne pouvait faire valoir son ignorance quant à la nécessité de l'envoi de l'avis de cession au gouverneur de province, de telle sorte que la prévention devait être déclarée établie.

L'article 11, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 8 juin 2006 est libellé comme suit :
« La détention d'une arme à feu soumise à autorisation ou des munitions y afférentes est interdite aux particuliers, sans autorisation préalable délivrée par le gouverneur compétent pour la résidence du requérant. [...] »

L'article 12 de la loi précitée dispose :
« L'article 11 ne s'applique pas :
1° aux titulaires d'un permis de chasse qui peuvent détenir des armes longues autorisées à cette fin, là où le permis de chasse est valable, ainsi que les munitions y afférentes, à condition que leurs antécédents pénaux, leur connaissance de la législation sur les armes et leur aptitude à manipuler une arme à feu en sécurité aient été vérifiés au préalable. [...] »

Il s'ensuit que les titulaires d'un permis de chasse sont dispensés, dans les conditions visées à l'article 12, 1°, précité, de l'obligation générale d'autorisation préalable.

L'article 25, § 1er, de l'arrêté royal du 20 septembre 1991 dispose :
« La cession d'armes à feu soumises à autorisation à des et entre des personnes visées à l'article 12, 1°, 2° et 4°, de la loi sur les armes ne peut être faite que sur présentation de leur carte d'identité ou passeport et de la preuve de leur qualité. Un avis de cession et une copie de celui-ci, conformes au modèle n° 9 figurant en annexe au présent arrêté, sont transmis par le cédant, dans les huit jours de la cession, au gouverneur du lieu de résidence de l'acquéreur ou, si ce dernier n'a pas de résidence en Belgique, au Registre central des armes. Le cédant conserve une copie de cet avis. L'autre copie, pourvue d'un numéro d'enregistrement, est transmise à l'acquéreur par le gouverneur. »

Selon l'article 4 de la loi du 8 juin 2006, toutes les armes à feu fabriquées ou importées en Belgique doivent être inscrites dans un registre central des armes, dans lequel un numéro d'identification unique leur est attribué.

Conformément à l'article 28, alinéa 5, de l'arrêté royal précité, pour chaque arme, le type, la marque, le modèle, le calibre et le numéro de série, ainsi que les noms et adresses des fournisseurs et de la personne qui acquiert ou détient l'arme, sont enregistrés et conservés dans le registre central des armes.

En vertu de l'article 29 de l'arrêté royal, le registre ne contient que les informations relatives aux documents qu'il énumère, dont les avis de cession d'une arme à feu soumise à autorisation.

Il résulte de ce qui précède que la transmission au gouverneur de l'avis de cession d'une arme longue au titulaire d'un permis de chasse n'est pas, comme le soutient le demandeur, « en soi et par nature une déclaration en vue d'obtenir une autorisation de détention d'une arme de chasse », mais permet également d'assurer la traçabilité d'une telle arme en cas de cession à un titulaire de permis de chasse, dispensé de l'obligation d'autorisation préalable.

Même à supposer que le fait, pour un individu, de détenir une arme en sachant que les formalités propres à rendre cette détention régulière ont été omises soit constitutif d'une infraction, indépendamment de la question de savoir à qui incombe l'accomplissement des formalités requises, le moyen ne saurait entraîner la cassation dès lors que la prévention C.4 se fonde sur les articles 11 et 12 de la loi du 8 juin 2006, visant l'obligation d'autorisation d'une arme à feu, et non la détention d'une telle arme non régulièrement enregistrée.

Partant, le moyen est irrecevable à défaut d'intérêt.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Laisse les frais à charge de l'Etat.
Lesdits frais taxés à la somme de quarante-neuf euros cinquante centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du trente octobre deux mille dix-neuf par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.0647.F
Date de la décision : 30/10/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-10-30;p.19.0647.f ?

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