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16/10/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0608.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 octobre 2019, P.19.0608.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0608.F
I. R.E. B.,
ayant pour conseil Maître Pascal Rodeyns, avocat au barreau de Liège,
II. M. B., ayant pour conseils Maîtres Maxim Toller, avocat au barreau de Liège, et Jean-Philippe Mayence, avocat au barreau de Charleroi,
III. M.S., ayant pour conseils Maîtres Mathieu Simonis, avocat au barreau de Liège, Wahib El Hayouni et Joachim Meese, avocats au barreau de Gand,
prévenus,
demandeurs en cassation.




I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le

16 mai 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le troisième demandeur invoque ...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0608.F
I. R.E. B.,
ayant pour conseil Maître Pascal Rodeyns, avocat au barreau de Liège,
II. M. B., ayant pour conseils Maîtres Maxim Toller, avocat au barreau de Liège, et Jean-Philippe Mayence, avocat au barreau de Charleroi,
III. M.S., ayant pour conseils Maîtres Mathieu Simonis, avocat au barreau de Liège, Wahib El Hayouni et Joachim Meese, avocats au barreau de Gand,
prévenus,
demandeurs en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 16 mai 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le troisième demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

A. Sur les pourvois d'E.B.R. et de B.M.:

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et les décisions sont conformes à la loi.

B. Sur le pourvoi de S.M. :

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

Le demandeur reproche aux juges d'appel d'avoir violé la foi due au jugement entrepris, en énonçant que le premier juge n'a pas eu égard aux déclarations de C.A. pour asseoir sa conviction. Selon le moyen, le premier juge a eu égard, notamment à la page 40 du jugement entrepris, aux dires de ce témoin, dès lors qu'il y a constaté que les propos de ce dernier incriminent plusieurs prévenus, dont le demandeur.

Le jugement entrepris se borne à faire état, à la page 40, d'un élément de fait consistant dans l'existence d'un interrogatoire du témoin précité qui incrimine le demandeur, parmi d'autres prévenus, sans toutefois élever ce témoignage au rang d'une preuve qui a emporté la conviction du tribunal quant à la culpabilité des personnes accusées.

L'énonciation critiquée ne donne pas de cet acte, une interprétation inconciliable avec ses termes.

Le moyen ne peut être accueilli.

Quant à la deuxième branche :

Le moyen reproche à l'arrêt de se contredire en énonçant, d'une part, que les juges d'appel n'ont pas pris en considération les déclarations de C.A. et, d'autre part, en renvoyant aux motifs du jugement entrepris, lequel prend appui sur ce témoignage pour conclure à la culpabilité du demandeur.

Contrairement à ce que le moyen soutient, en ce qui concerne le demandeur, l'arrêt attaqué se borne à renvoyer aux seuls motifs du premier juge repris aux pages 75 à 77, 106 et 107 du jugement, lesquelles ne se réfèrent à aucun moment aux déclarations de C.A..

Reposant sur une lecture erronée de l'arrêt attaqué, le moyen manque en fait.

Quant à la troisième branche :

Le moyen est pris de la violation des articles 6.1 et 6.3.d, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le demandeur reproche aux juges d'appel d'avoir refusé d'entendre à l'audience, de manière contradictoire, le témoin à charge C. A. et les témoins dont il dit avoir sollicité l'audition, alors qu'ils ont eu égard aux dires du premier et qu'ils n'ont fait état d'aucune circonstance justifiant leur refus ni offert aucune garantie compensatoire des difficultés ainsi causées à la défense.

En tant qu'il critique le refus de procéder à l'interrogatoire « des témoins demandés par le demandeur », alors qu'il ne ressort d'aucune pièce à laquelle la Cour peut avoir égard que le demandeur ait sollicité, devant les juges d'appel, l'interrogatoire d'autres témoins que C.A., le moyen est nouveau et, partant, irrecevable.

En vertu de l'article 6.3.d, de la Convention, toute personne accusée d'une infraction a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge.

Ce droit n'est pas absolu, le juge pouvant accepter ou refuser une telle demande selon qu'elle apparaisse ou non utile à la manifestation de la vérité et dans le respect de l'équité du procès.

Lorsqu'une audition de témoin est demandée par voie de conclusions, le juge, s'il n'y fait pas droit, doit y répondre et motiver son refus.

Pour admettre comme preuves des déclarations à charge recueillies durant l'enquête en l'absence de l'inculpé ou de son conseil, et alors que le prévenu, qui en a fait la demande au juge du fond, ne s'est pas davantage vu offrir la possibilité d'interroger leur auteur en qualité de témoin durant le procès, il y a lieu, au vœu des articles 6.1 et 6.3.d, de la Convention, de rechercher
- s'il existe un motif sérieux justifiant la non-comparution du témoin,
- si la déposition du témoin absent constitue le fondement unique ou déterminant de la condamnation,
- s'il existe des éléments compensateurs, notamment des garanties procédurales solides, permettant de contrebalancer les difficultés causées à la défense en conséquence de l'admission d'une telle preuve et pour assurer l'équité de la procédure dans son ensemble.

Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a mis en doute la crédibilité du témoin à charge C.A.. A titre subsidiaire, il a sollicité l'audition de ce dernier par la cour d'appel.

Afin de rejeter cette demande, la cour d'appel a considéré que « [si ce témoin interrogé durant l'enquête] a formulé des accusations à l'encontre du [demandeur], celles-ci n'ont été retenues ni par le tribunal ni par la cour pour asseoir leur conviction ; cette audition sous serment n'est dès lors pas utile à la manifestation de la vérité ».

Après avoir seulement eu égard aux éléments de conviction énoncés aux pages 55 à 59 de l'arrêt, tous soumis à la contradiction du prévenu, les juges d'appel ont pu considérer que le refus d'entendre C. A. à l'audience n'avait aucune incidence sur la fiabilité de la preuve du trafic de stupéfiants et sur le caractère équitable du procès.

Les juges d'appel n'avaient pas à recenser en outre des éléments compensateurs leur permettant d'apprécier équitablement la fiabilité d'accusations qui auraient été portées par le témoin précité, puisqu'ils ont estimé la preuve constituée sur la base d'éléments étrangers aux déclarations attribuées à celui-ci.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

Sur le second moyen :

Le moyen est pris de la violation de l'article 21ter du titre préliminaire du Code de procédure pénale et reproche à l'arrêt, qui constate le dépassement du délai raisonnable, de refuser d'accorder au demandeur le sursis, au motif que l'état de récidive dans lequel il se trouve lui interdit d'y prétendre. Selon le demandeur, lorsque le juge constate que le délai raisonnable pour juger le prévenu est dépassé, il peut sanctionner cette situation en faisant bénéficier l'intéressé du sursis, quand bien même ce dernier ne se trouverait plus dans les conditions pour y prétendre en raison d'une précédente condamnation.

Le sursis est une mesure qui affecte l'exécution de la peine, alors que la réduction envisagée par la loi lorsque le juge constate que le délai raisonnable pour juger le prévenu est dépassé, concerne la peine et non son exécution.

Partant, lorsqu'il constate le dépassement du délai raisonnable pour juger le prévenu, le juge n'est pas autorisé à le faire bénéficier des mesures, auxquelles son état de récidive lui interdit de prétendre, prévues par la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation.

Le moyen manque en droit.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette les pourvois ;
Condamne chacun des demandeurs aux frais de son pourvoi.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de quatre cent onze euros soixante-neuf centimes dont I) sur le pourvoi de E.B.R.: cent trente-sept euros vingt-trois centimes dus ; II) sur le pourvoi de B. M. : cent trente-sept euros vingt-trois centimes dus et III) sur le pourvoi de S.M.: cent trente-sept euros vingt-trois centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du seize octobre deux mille dix-neuf par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.0608.F
Date de la décision : 16/10/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-10-16;p.19.0608.f ?

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