Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0146.F
I. F. E.
II. F. E.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Patrick Thevissen, avocat au barreau d'Eupen.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Rédigés en allemand, les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu dans cette langue le 10 janvier 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Par ordonnance du 27 juin 2019, le premier président de la Cour a décidé que la procédure sera faite en français à partir de l'audience.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 2 août 2019, l'avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe.
A l'audience du 9 octobre 2019, le conseiller Tamara Konsek a fait rapport et l'avocat général précité a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
A. Sur le pourvoi formé le 15 janvier 2019 :
Le demandeur se désiste de son pourvoi.
B. Sur le pourvoi formé le 24 janvier 2019 :
Sur le moyen :
Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et 432 du Code pénal.
Quant à la première branche :
Le moyen reproche à l'arrêt de dire établie la prévention de soustraction d'un enfant mineur à la garde des personnes désignées par l'autorité compétente, sans constater que le demandeur a pris connaissance de l'ordonnance de placement pour l'avoir lue personnellement : pour qu'il y ait prise de connaissance, il ne suffirait pas que le contenu de la décision soit exposé au parent par un tiers.
L'article 432 du Code pénal réprime tout acte de nature à empêcher l'exécution d'une mesure judiciaire prise à l'égard du mineur et punit, notamment, la soustraction d'un enfant à l'exécution d'une mesure prise dans le cadre d'une procédure relative à l'aide à la jeunesse.
La culpabilité du chef de cette infraction ne requiert pas la lecture intégrale de l'ordonnance de placement par le parent. Il suffit que l'existence et le contenu de la décision soient portés à sa connaissance, au plus tard au moment où il doit s'y conformer.
Soutenant le contraire, le moyen manque en droit.
Quant à la seconde branche :
Le moyen soutient que l'arrêt ne peut déduire des éléments relevés par les juges d'appel que le demandeur a eu connaissance de l'ordonnance de placement dès lors qu'il n'en ressort pas que les policiers, qui avaient reçu la mission d'aller chercher la mineure chez son père, se soient vus remettre une copie de la décision. Selon le moyen, les policiers étaient ainsi dans l'incapacité d'en donner la lecture ou, à tout le moins, d'en résumer fidèlement le contenu.
Le moyen fait également grief aux juges d'appel de ne pas avoir répondu aux conclusions qui faisaient valoir que le demandeur n'a pas eu connaissance de la décision de placement.
Le juge apprécie en fait si le parent qui doit se conformer à une décision relative à la garde de son enfant a eu connaissance de celle-ci. Toutefois, il appartient à la Cour de vérifier si, des faits qu'il a constatés, le juge a pu légalement déduire cette connaissance.
L'arrêt relève que
- les conditions d'application de l'article 432 du Code pénal sont rencontrées lorsque le parent d'un enfant mineur empêche volontairement l'exécution d'une décision exécutoire relative à la garde de l'enfant,
- la signification de la décision exécutoire n'est pas requise et il est suffisant que le parent ait pris connaissance de la décision relative à la garde de l'enfant et empêche volontairement son exécution,
- il n'est pas davantage requis qu'il soit donné auparavant la possibilité au parent qui a volontairement empêché l'exécution de la décision de lire cette décision,
- même s'il peut être supposé que, contrairement aux constatations policières, l'ordonnance du juge de la jeunesse n'a pas été remise au demandeur et à son épouse, il ressort clairement du dossier répressif que la décision du juge de la jeunesse relative au placement immédiat de la mineure a été portée à la connaissance du demandeur,
- celui-ci a, à tout le moins partiellement, assisté à l'audience du juge de la jeunesse du 9 septembre 2015,
- avant son arrestation, il a déclaré aux policiers ne pas vouloir collaborer et ne pas leur révéler l'endroit où se trouve sa fille,
- après que les policiers lui aient fait savoir à plusieurs reprises qu'il s'agit d'une ordonnance judiciaire, le demandeur a répété qu'il ne se conformera pas à celle-ci.
De ces considérations, qui répondent aux conclusions du demandeur en les contredisant, les juges d'appel ont pu déduire qu'il est établi sans aucun doute possible que le contenu de l'ordonnance de placement a été porté à la connaissance du demandeur.
Ainsi, l'arrêt motive régulièrement et justifie légalement sa décision.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Décrète le désistement du premier pourvoi ;
Rejette le second pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de cent vingt-deux euros septante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Tamara Konsek et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du neuf octobre deux mille dix-neuf par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.
T. Fenaux F. Stévenart Meeûs T. Konsek
F. Roggen B. Dejemeppe J. de Codt