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02/10/2019 | BELGIQUE | N°P.19.0579.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 02 octobre 2019, P.19.0579.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0579.F
L.V., V., M., G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, et ayant pour conseil Maître Shirley Franck, avocat au barreau de Liège,

contre

1. M. A.,
2. D.A. R.,
3. P. J.,
4. THOMAS & PIRON, société anonyme, dont le siège est établi à Opont, rue de la Besace, 14,
5. B. S.,


6. M. C.,
parties civiles,
défendeurs en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dir

igé contre un arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moye...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.19.0579.F
L.V., V., M., G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, et ayant pour conseil Maître Shirley Franck, avocat au barreau de Liège,

contre

1. M. A.,
2. D.A. R.,
3. P. J.,
4. THOMAS & PIRON, société anonyme, dont le siège est établi à Opont, rue de la Besace, 14,
5. B. S.,

6. M. C.,
parties civiles,
défendeurs en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 25 avril 2019 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le président chevalier Jean de Codt a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

A. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique exercée à charge du demandeur :

Sur le moyen :

1. Le moyen est pris notamment de la violation de l'article 51 du Code pénal.

Selon le demandeur, les juges d'appel ne pouvaient pas, légalement, le condamner du chef de tentative de meurtre après avoir constaté seulement qu'il avait accepté mais non recherché les conséquences mortelles potentielles de l'acte auquel il a participé.

Il fait valoir qu'en déclarant la prévention établie, l'arrêt le punit non seulement pour ce qu'il a voulu faire mais aussi pour le résultat prévisible de son action, lequel ne s'est toutefois pas produit, s'agissant d'une tentative.

2. Parmi les éléments de fait déclarés constants par les juges du fond, figurent les circonstances suivantes.

V.L.et son fils J. sont arrivés en état d'ébriété à un bal de village organisé en plein air, à Assenois. Le demandeur est tombé. Quelqu'un a voulu l'aider. Il s'est cru agressé et a appelé son fils. Une rixe en a suivi. Le demandeur et son fils ont quitté les lieux à bord de leur véhicule. Ils sont revenus quelques instants plus tard. Le véhicule a foncé dans la foule et blessé grièvement quatre personnes avant de prendre la fuite. V. L. occupait le siège du passager avant tandis que son fils conduisait.

3. La participation punissable à une tentative de meurtre suppose que le coauteur se soit associé sciemment et volontairement au dessein criminel de l'auteur, à savoir l'intention de tuer.

La mort d'autrui est un résultat qui peut être voulu, désiré, escompté ou accepté comme étant une conséquence normale et prévisible de la violence déployée.

Le fait que la victime ait survécu à ses blessures ou échappé à l'attentat qui la visait, en dépit des actes perpétrés contre elle par les auteurs, est une circonstance qui, indépendante de la volonté de ceux-ci, n'abolit pas en soi l'intention homicide.

En tant qu'il soutient que la tentative de meurtre ne peut pas être déclarée établie dans le chef d'un participant qui n'a fait qu'accepter les conséquences mortelles prévisibles de la violence à laquelle il s'est délibérément associé, le moyen manque en droit.

4. L'intention homicide peut se déduire, notamment, de l'instrument utilisé, de l'acharnement de l'auteur, de son attitude ou de ses paroles avant, pendant et après l'action.

Le fait de percuter volontairement un piéton à l'aide d'un véhicule à moteur peut, en fonction des circonstances, révéler une intention homicide, même si la victime échappe à la mort.

5. L'arrêt attaqué relève que

- le conducteur de la Jeep a effectué plusieurs manœuvres en déviant sa trajectoire, en se dirigeant droit vers les victimes, en effectuant au moins une marche arrière avant de foncer à nouveau vers l'endroit où se trouvait une de celles-ci, qu'il avait failli écraser lors d'un premier passage.
- Le véhicule s'est éloigné pour revenir ensuite à la charge, prendre de l'élan afin d'atteindre des personnes.
- R. D. A. a été percuté à une vitesse située entre quarante et cinquante-cinq kilomètres à l'heure. Projeté en l'air, il a été touché à la colonne vertébrale et à la tête. S. B. a été happé par le véhicule alors qu'il portait secours à d'autres personnes. C. M., renversée par le véhicule et que les policiers ont retrouvée hurlant de douleur, s'est vue coincée contre la façade de la salle des fêtes, sous une porte arrachée, et elle a encouru une double fracture de la jambe et du bassin. A. M. s'est retrouvé avec la tête sous la voiture et n'a dû son salut qu'à l'intervention de plusieurs participants.
- Le conducteur de la Jeep se souvient « avoir vu une fille se faire écraser contre le mur de la salle ». D'après un témoin, il avait le visage blême et le regard mauvais. D'après un autre, il riait.
- J. L. a déclaré que la décision de retourner vers les lieux du bal avait été prise par les trois occupants de la Jeep. Malgré son état d'ébriété, V. L. n'était pas incapable de comprendre ce qui se passait. Il a précisé que le retour à Assenois devait permettre de voir qui étaient « ses agresseurs ».
- Selon la déclaration d'A. F., le troisième occupant du véhicule, c'est V. L. qui a décidé de faire effectuer un demi-tour au véhicule, afin de « choper » ou de « massacrer » les gens du bal.
- Se trouvant à l'avant du véhicule, à côté du conducteur, V.L. disposait d'une visibilité suffisante pour évaluer la situation.

- C'est en connaissant les conséquences de son geste que V.L. a incité son fils, sur lequel il exerçait un ascendant manifeste, à retourner au village en fête pour se venger de l'affront qu'il croyait y avoir subi.

Les juges d'appel en ont conclu que le comportement du prévenu J.L. était de nature à entraîner des conséquences mortelles qui n'ont été évitées qu'en raison d'éléments extérieurs à sa volonté, précisant que la scène était d'une durée non négligeable et avait suscité chez les témoins l'avis unanime que le conducteur cherchait effectivement à supprimer ceux qui se trouvaient face à son véhicule.

Ainsi, les juges d'appel ont pu, sans violer l'article 51 du Code pénal, déduire que le demandeur s'est associé, de manière répréhensible, à une tentative de meurtre. Ils ont dès lors régulièrement motivé et légalement justifié leur décision.

A cet égard, le moyen ne peut être accueilli.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

B. En tant que le pourvoi est dirigé contre les décisions qui, rendues sur les actions civiles exercées par les défendeurs, statuent sur

1. le principe de la responsabilité :

Le demandeur n'invoque aucun moyen spécifique.

2. l'étendue des dommages :

Le demandeur se désiste, sans acquiescement, de son pourvoi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Décrète le désistement du pourvoi en tant qu'il est dirigé contre les décisions qui, rendues sur les actions civiles exercées par les défendeurs, statuent sur l'étendue des dommages ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de huit cent nonante-trois euros septante-deux centimes dont deux cent trente-neuf euros trente et un centimes dus et six cent cinquante-quatre euros quarante et un centimes payés par ce demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, président, Benoît Dejemeppe, président de section, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du deux octobre deux mille dix-neuf par le chevalier Jean de Codt, président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.19.0579.F
Date de la décision : 02/10/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-10-02;p.19.0579.f ?

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