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16/09/2019 | BELGIQUE | N°S.17.0079.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 16 septembre 2019, S.17.0079.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° S.17.0079.F
COMMUNE D'ANDERLECHT, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Anderlecht, place du Conseil, 1,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

contre

D. B.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Br

as, 6, où il est fait élection de domicile.

N° S.18.0042.F
COMMUNE D'ANDERLECHT, représentée par...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° S.17.0079.F
COMMUNE D'ANDERLECHT, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Anderlecht, place du Conseil, 1,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

contre

D. B.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où il est fait élection de domicile.

N° S.18.0042.F
COMMUNE D'ANDERLECHT, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, dont les bureaux sont établis à Anderlecht, place du Conseil, 1,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

contre

D. B.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où il est fait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour
Les pourvois en cassation sont dirigés contre l'arrêt rendu le 5 juin 2015 par la cour du travail de Liège, statuant comme juridiction de renvoi ensuite de l'arrêt de la Cour du 5 mars 2011.
Par un acte déposé au greffe de la Cour le 4 juin 2018, la demanderesse se désiste du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.17.0079.F.
Le 26 août 2019, l'avocat général Jean Marie Genicot a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat général Jean Marie Genicot a été entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation
À l'appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.18.0042.F, dont la requête en cassation est jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente trois moyens.

III. La décision de la Cour

Les pourvois étant dirigés contre le même arrêt, il y a lieu de les joindre.

Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.17.0079.F :

Il y a lieu de décréter le désistement.

Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.18.0042.F :

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

En vertu de l'article 249 du Code des impôts sur les revenus 1992, l'impôt est perçu par voie de précomptes dans la mesure où il se rapporte aux revenus professionnels.
L'article 273, 1°, de ce code dispose que le précompte professionnel est exigible en raison du paiement ou de l'attribution des rémunérations imposables.
En vertu de l'article 270, 1°, du même code, sont redevables du précompte professionnel ceux qui, à titre de débiteur, paient ou attribuent en Belgique des rémunérations.
Suivant l'article 272, alinéa 1er, 1°, du même code, sauf convention contraire, ces redevables ont le droit de retenir le précompte sur ces revenus imposables.
Aux termes de l'article 296, le montant des précomptes professionnels perçus est imputé sur l'impôt.
En vertu de l'article 304, § 2, alinéa 1er, dans le chef des contribuables soumis à l'impôt des personnes physiques, l'excédent éventuel des précomptes professionnels est imputé, s'il y a lieu, sur les taxes additionnelles à l'impôt des personnes physiques et le surplus est restitué pour autant qu'il atteigne 2,50 euros.
Il ressort de ces dispositions que les précomptes professionnels constituent une partie des rémunérations dues au travailleur, retenue et versée à l'administration fiscale par l'employeur à titre d'avances à valoir sur l'impôt des personnes physiques à établir ultérieurement à charge du travailleur, dont le surplus doit être restitué à ce dernier.
Il s'ensuit que, lorsqu'un travailleur est tenu en application des articles 1235, 1376 et 1377 du Code civil de restituer des rémunérations qui ne lui étaient pas dues, les restitutions s'étendent non seulement aux rémunérations nettes mais également au montant des précomptes professionnels.
L'arrêt attaqué, qui, pour limiter aux montants nets de précompte professionnel les rémunérations indues à restituer, considère que « [le défendeur] n'est tenu qu'au remboursement des montants qu'il a perçus et qui lui ont été payés directement » et que « le précompte professionnel [retenu et payé par la demanderesse] à l'administration fiscale [...] en exécution de ses obligations légales [d'employeur doit] être [récupéré par la demanderesse], et non par [le défendeur], auprès de [cette administration] », viole l'ensemble des dispositions précitées.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fondé.

Quant à la seconde branche :

Il ressort des articles 5 et 9 de la loi du 27 juin 1969 révisant l'arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs que l'Office national de sécurité sociale est un établissement public chargé par la loi de percevoir les cotisations de sécurité sociale des employeurs et des travailleurs en vue de contribuer au financement des régimes de sécurité sociale.
L'article 23, § 1er, de cette loi dispose que la cotisation du travailleur est retenue à chaque paie par l'employeur et que celui-ci est débiteur envers l'Office national de sécurité sociale de cette cotisation comme de la sienne propre.
L'article 26, alinéa 1er, de la même loi dispose que l'employeur ne peut récupérer à charge du travailleur le montant de la cotisation de celui-ci, dont il aurait omis d'effectuer la retenue en temps utile.
En vertu de l'article 42, alinéas 1er et 2, de ladite loi, les créances de l'Office national de sécurité sociale à charge des employeurs assujettis à cette loi, de même que les actions intentées contre cet office en répétition de cotisations indues, se prescrivent par trois ans.
Il ressort de ces dispositions, d'une part, que l'action en répétition des cotisations de sécurité sociale payées indûment par l'employeur n'appartient qu'à lui et ne peut être dirigée que contre l'Office national de sécurité sociale et, d'autre part, que le travailleur ne dispose d'aucun droit sur les cotisations payées par l'employeur à cet office.
Il s'ensuit que, lorsqu'un travailleur est tenu en application des articles 1235, 1376 et 1377 du Code civil de restituer des rémunérations qui ne lui étaient pas dues, les restitutions ne s'étendent pas au montant des cotisations de sécurité sociale du travailleur.
L'arrêt attaqué, qui, pour limiter aux montants nets de cotisations sociales du travailleur les rémunérations indues à restituer, considère que « [le défendeur] n'est tenu qu'au remboursement des montants qu'il a perçus et qui lui ont été payés directement », que « les cotisations de sécurité sociale [...] personnelles [du travailleur retenues sur les rémunérations et payées par la demanderesse] à l'Office national de sécurité sociale [...] en exécution de ses obligations légales [d'employeur] doivent être [récupérées par la demanderesse], et non par [le défendeur], auprès de [cet office] » et que « le montant de 7.991,32 euros, [qui] correspond aux cotisations personnelles de sécurité sociale retenues par [la demanderesse] sur l'indemnité compensatoire de préavis et versée par ses soins à [un office de sécurité sociale], doit [...] également être récupéré par [la demanderesse], et non par [le défendeur] auprès de [cet office] », ne viole aucune des dispositions précitées.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen :

Quant aux première et deuxième branches :

L'arrêt attaqué constate que la demanderesse demandait le remboursement des sommes qu'elle avait payées à l'huissier de justice du défendeur en exécution de l'arrêt cassé, soit une indemnité de préavis et 6.000 euros de dépens, constituant le montant des indemnités de procédure liquidées par l'arrêt cassé pour les deux instances, ainsi que des frais d'expédition et de signification et un droit de perception ; il condamne le défendeur à rembourser l'indemnité de préavis « à [laquelle] s'ajoutent les frais de justice, [comportant les frais d'] expédition [et de] signification [ainsi que le] droit de perception » ; il « condamne [la demanderesse] aux dépens de première instance, étant l'indemnité de procédure [de] 3.000 euros, et compense les dépens d'appel », aux motifs que la demanderesse succombe en première instance et que les parties succombent respectivement sur une partie de leurs prétentions en appel.
En refusant de compter les indemnités de procédure liquidées par l'arrêt cassé dans les sommes à restituer par le défendeur et dans « les frais de justice » qui s'y ajoutent, et en prononçant la condamnation aux dépens des deux instances, l'arrêt attaqué donne à connaître sa décision que la cour du travail, statuant comme juridiction de renvoi ensuite de l'arrêt de la Cour, n'a pas le pouvoir d'ordonner la restitution des indemnités de procédure payées en exécution de l'arrêt cassé.
Contrairement à ce que suppose le moyen, en ces branches, l'arrêt attaqué ne décide pas que le défendeur doit restituer le montant des indemnités de procédure avec toutes les autres sommes qu'il a perçues en exécution de l'arrêt cassé et il n'omet pas davantage de statuer sur la demande de la demanderesse en restitution de ces indemnités de procédure.
Le moyen, en ces branches, manque en fait.

Quant à la troisième branche :

Il n'existe pas de principe général du droit qui interdirait qu'une même personne soit condamnée à plusieurs reprises à payer la même somme ou selon lequel un arrêt de cassation imposerait la restitution de ce qui a été payé en exécution de la décision annulée.
Le moyen, en cette branche, est, comme le soutient le défendeur, irrecevable.

Sur le troisième moyen :

Sur la fin de non-recevoir opposée au moyen et déduite de la nouveauté :

N'est, en principe, pas nouveau et est, dès lors, recevable le moyen qui critique un fondement donné par le juge à sa décision.
La fin de non-recevoir ne peut être accueillie.

Sur le fondement du moyen :

Lorsque un jugement passé en force de chose jugée portant condamnation à payer une somme d'argent est annulé ensuite d'un arrêt de cassation, la partie qui a reçu le paiement en exécution de ce jugement doit rembourser conformément aux règles relatives au paiement de l'indu prévues par les articles 1235, 1376 et 1377 du Code civil.
Il s'ensuit que, lorsque cette partie a reçu le paiement de bonne foi, les intérêts sont dus à partir de la date de l'arrêt de cassation.
L'arrêt attaqué, qui condamne le défendeur à rembourser des sommes payées en exécution de l'arrêt annulé par l'arrêt rendu par la Cour le 5 mars 2011, ne décide pas légalement de calculer les intérêts en application de l'article 1153 du Code civil, partant, que les intérêts prennent cours à la sommation de payer du 28 mars 2013.
Le moyen est fondé.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les pourvois inscrits au rôle général sous les numéros S.17.0079.F et S.18.0042.F ;

Statuant sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.17.0079.F :

Décrète le désistement du pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens ;

Statuant sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.18.0042.F :

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette, jusqu'à concurrence du montant des précomptes professionnels, la demande de la demanderesse en restitution de l'indemnité compensatoire de préavis payée indûment, qu'il refuse les intérêts avant le 28 mars 2013 et décide que les intérêts seront capitalisés au 13 novembre 2014, qu'il condamne la demanderesse aux dépens de première instance, soit 3.000 euros, et qu'il compense les dépens d'appel ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail de Mons.
Les dépens taxés, dans la cause S.17.0079.F, à la somme de trois cent septante-huit euros septante-sept centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne et à la somme de quatre cent trente euros nonante-neuf centimes envers la partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte et Maxime Marchandise, et prononcé en audience publique du seize septembre deux mille dix-neuf par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Jean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.17.0079.F
Date de la décision : 16/09/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-09-16;s.17.0079.f ?

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