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25/04/2019 | BELGIQUE | N°C.18.0569.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 avril 2019, C.18.0569.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.18.0569.F
D. V.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,

contre

RÉGION WALLONNE, représentée par son gouvernement, en la personne du ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine, dont le cabinet est établi à Namur, place des Célestines, 1,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Huguette Geing

er, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où i...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.18.0569.F
D. V.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,

contre

RÉGION WALLONNE, représentée par son gouvernement, en la personne du ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine, dont le cabinet est établi à Namur, place des Célestines, 1,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, où il est fait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 7 mars 2018 par le tribunal de première instance du Brabant wallon, statuant en degré d'appel.
Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.
L'avocat général Thierry Werquin a conclu.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente trois moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la seconde branche :

Celui qui, par sa faute ou par le fait des choses qu'il a sous sa garde, a causé un dommage à autrui est tenu de le réparer et la victime a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'elle a subi.
Le juge évalue in concreto le préjudice causé par un fait illicite.
Il peut recourir à une évaluation en équité du dommage à la condition qu'il indique les motifs pour lesquels il ne peut admettre le mode de calcul proposé par la victime et qu'il constate l'impossibilité de déterminer autrement le dommage.
Le jugement attaqué statue sur les conséquences d'un accident de la circulation dont le demandeur a été la victime et dont la défenderesse a été déclarée responsable sur la base tant des articles 1382 et 1383 que 1384 du Code civil.
Dans ses conclusions, le demandeur demandait, pour le dommage moral permanent passé du 1er juin 2012 au 1er juin 2016, (365 × 4) jours × 25 euros × 8 p.c., soit 2.920 euros, et, pour le dommage moral futur postérieur au 1er juin 2016, qu'il soit procédé à la capitalisation de ce dommage suivant la formule qu'il indiquait.
Le jugement attaqué énonce qu'« il ressort du rapport d'expertise que les plaintes subjectives du patient sont reprises en ces termes : ‘Douleurs d'épaule droite de façon diffuse. Impression de raideur de l'épaule. Fatigue. Les douleurs, la fatigue, la raideur peuvent être variables. Il peut y avoir au niveau de l'épaule des réveils nocturnes. Il n'y a pas de raideur matinale de mise en route. Au niveau du genou gauche, il y a également une douleur diffuse. Il n'y a pas de gonflement, pas de dérobement ni de blocage. Persistance d'une douleur qui peut être variable. Il n'y a pas de réveil nocturne ni de réveil matinal' », que « le rapport précise en outre que [le demandeur] a adapté ses activités » et que « le rapport mentionne expressément que les plaintes formulées par [le demandeur] (douleur, fatigue, réveil nocturne, ...) sont variables dans le temps, sans qu'il soit possible de déterminer le moment et l'intensité de ces variations ».
Il en déduit que « le dommage moral du [demandeur], même s'il est permanent, ne présente ni la constance ni la périodicité qu'implique la capitalisation » et qu'« il apparaît dès lors impossible, compte tenu de ces caractéristiques propres au cas d'espèce, de déterminer le dommage autrement que par le recours à une méthode forfaitaire ».
Par ces motifs, relatifs à l'existence et à la nature du dommage mais étrangers à son mode d'évaluation, le jugement attaqué, qui admet que ce dommage est permanent, ne justifie pas légalement sa décision d'indemniser ce dommage de manière forfaitaire.
Le moyen, en cette branche, est fondé.

Sur le deuxième moyen :

Dans ses conclusions, le demandeur demandait, pour le dommage ménager permanent passé du 1er juin 2012 au 1er juin 2016, (365 × 4) jours × 25 euros × 8 p.c., soit 2.920 euros, et, pour le dommage ménager futur postérieur au 1er juin 2016, qu'il soit procédé à la capitalisation de ce dommage suivant la formule qu'il indiquait.
Le jugement attaqué énonce qu'« il ressort du rapport d'expertise que les plaintes subjectives du patient sont reprises en ces termes : ‘[le demandeur] a adapté ses activités. Il déclare être aidé pour les activités ménagères. Il évite par exemple de remplir un seau d'eau, évite la taille des haies ... Il ne monte plus sur une échelle' », qu'« il s'en déduit que [le demandeur] s'est nécessairement adapté à ses douleurs dans la réalisation au quotidien de ses tâches ménagères et qu'une nouvelle répartition des tâches s'est mise en place », qu'« au niveau des séquelles objectives, le rapport d'expertise retient ‘un très léger retard de flexion du genou gauche ainsi qu'un léger déficit à la mobilité scapulaire droite' », que « la nature des séquelles persistantes laisse augurer non seulement une certaine accoutumance dans la durée vu leur caractère léger et très ciblé mais encore de répercussions variables de jour en jour selon que [le demandeur] est amené ou non à effectuer des tâches qui nécessitent une flexion du genou gauche ou un mouvement complet de l'épaule droite » et qu'« en outre, l'activité ménagère a tendance à se réduire avec l'âge ».
Il en déduit que « le dommage ménager [du demandeur], même s'il est permanent, ne présente ni la constance ni la périodicité qu'implique la capitalisation » et qu'« il apparaît dès lors impossible, compte tenu de ces caractéristiques propres au cas d'espèce, de déterminer le dommage autrement que par le recours à une méthode forfaitaire ».
Par ces motifs, relatifs à l'existence et à la nature du dommage mais étrangers à son mode d'évaluation, le jugement attaqué, qui admet que ce dommage est permanent, ne justifie pas légalement sa décision d'indemniser ce dommage de manière forfaitaire.
Le moyen est fondé.

Sur le troisième moyen :

Dans ses conclusions, le demandeur demandait, pour le dommage économique permanent passé du 1er juin 2012 au 1er juin 2016, (365 × 4) jours × 25 euros × 6 p.c., soit 2.190 euros, et, pour le dommage économique futur postérieur au 1er juin 2016, qu'il soit procédé à la capitalisation de ce dommage suivant la formule qu'il indiquait.
Le jugement attaqué énonce qu'il n'y a « pas de perte de revenus en 2012, soit après la consolidation, compte tenu du fait que [le demandeur] exerçait déjà ses activités à mi-temps depuis septembre 2010 », que, « par ailleurs, l'impossibilité de reprendre le travail à temps plein à partir de 2012 n'est nullement objectivée par les conclusions du rapport d'expertise », qu'« en effet, le rapport d'expertise souligne que ‘le patient a repris ses activités dans le service de revalidation cardio-circulatoire' et que ‘les phénomènes algiques et les différents troubles constatés justifient une adaptation de son travail' » et que « l'expert retient au final une incapacité économique de 6 p.c., soit un pourcentage moindre que pour l'incapacité personnelle ou ménagère compte tenu des tâches dans le domaine infirmier et apparenté qui comprend ‘des travaux intellectuels et des activités plus physiques' ».
Il « admet cependant que [le demandeur] doit fournir des efforts pour maintenir son niveau de revenus » et considère que « ces efforts varieront nécessairement au fil du temps, en fonction de circonstances extérieures (l'âge [du demandeur], le type de soins prodigués, ...) ».
Il en déduit que, « vu le faible taux d'incapacité retenu et vu le caractère non constant du dommage, [...] le recours à la capitalisation ne se justifie pas ».
Par ces motifs, relatifs à l'existence et à la nature du dommage mais étrangers à son mode d'évaluation, le jugement attaqué, qui ne dénie cependant ni son existence ni son caractère permanent, ne justifie pas légalement sa décision d'indemniser ce dommage de manière forfaitaire.
Le moyen est fondé.

Sur les autres griefs :

Il n'a pas lieu d'examiner la première branche du premier moyen, qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaqué en tant qu'il statue sur les dommages moral, ménager et économique permanents du demandeur et sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant le tribunal de première instance du Hainaut, siégeant en degré d'appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du vingt-cinq avril deux mille dix-neuf par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont A. Jacquemin S. Geubel
M. Lemal M. Delange Chr. Storck


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.18.0569.F
Date de la décision : 25/04/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-04-25;c.18.0569.f ?

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