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25/03/2019 | BELGIQUE | N°S.17.0074.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 mars 2019, S.17.0074.F


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° S.17.0074.F
C. H.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,

contre

ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l'Agriculture et de l'Intégration sociale, dont le cabinet est établi à Saint-Gilles, avenue de la Toison d'Or, 87,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoi

re, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il ...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° S.17.0074.F
C. H.,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,

contre

ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l'Agriculture et de l'Intégration sociale, dont le cabinet est établi à Saint-Gilles, avenue de la Toison d'Or, 87,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Michèle Grégoire, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Régence, 4, où il est fait élection de domicile,

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 9 juin 2017 par la cour du travail de Bruxelles.
Le 6 mars 2019, l'avocat général Jean Marie Genicot a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat général Jean Marie Genicot a été entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente quatre moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

L'arrêt attaqué énonce que, pour satisfaire aux articles 2 et 3 de la loi du 27 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, cette motivation doit laisser apparaître les circonstances concrètes soit les éléments de fait qui ont amené l'institution à prendre la décision, qu'elle doit permettre de comprendre l'articulation du droit et du fait et ainsi de savoir pourquoi la décision a été prise, qu'elle doit être pertinente c'est-à-dire avoir trait à la décision et être sérieuse en ce sens que les raisons invoquées doivent être suffisantes pour la justifier. Il considère que la motivation de la décision du 28 janvier 2013 de la commission des dispenses de cotisations, que le demandeur n'est pas dans l'état de besoin prévu par l'article 17 de l'arrêté royal n° 38 du 27 juillet 1967 organisant le statut social des travailleurs indépendants, est suffisante et permet au demandeur de comprendre les éléments sur lesquels elle se fonde dès lors qu'elle mentionne la disposition légale pertinente et différentes circonstances de fait ayant permis de considérer que le demandeur n'était pas dans cet état de besoin, qu'aucune omission de dette ou de charge susceptible de modifier l'appréciation de la commission n'est alléguée, que la référence au montant du revenu d'intégration est pertinente et que les mentions relatives aux dettes fiscales indiquent à suffisance qu'à première vue, ces dettes prévisibles et non exceptionnelles n'ont pu être à l'origine d'un état de besoin.
Par ces énonciations, l'arrêt ne se borne pas à exiger que la motivation permette au destinataire de comprendre la raison de la décision litigieuse mais considère également qu'elle doit avoir trait à la décision et être suffisante pour la justifier, et vérifie si ces conditions sont remplies.
L'arrêt procède au contrôle marginal de la décision de la commission que les dettes fiscales prévisibles et non exceptionnelles du demandeur ne l'ont pas mis dans l'état de besoin visé à l'article 17, alinéa 1er, de l'arrêté royal n° 38, sans exclure que de telles dettes puissent selon les circonstances mettre un travailleur indépendant dans cet état.
Les motifs que ces dettes étaient prévisibles et non exceptionnelles permettent à la Cour d'exercer son contrôle, sans qu'il soit nécessaire que l'arrêt indique le montant de celles-ci.
Pour le surplus, la violation prétendue de l'article 159 de la Constitution est tout entière déduite de celle, vainement alléguée, des dispositions précitées.
Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen :

L'arrêt attaqué constate que, par un premier arrêt n° 206.425 du 6 juillet 2010, le Conseil d'État a annulé une décision du 1er septembre 2009 par laquelle la commission des dispenses de cotisations refusait de dispenser le demandeur du paiement de cotisations sociales et que, par un second arrêt n° 229.113 du 12 novembre 2014, le Conseil d'État s'est dit sans compétence et a rejeté le recours du demandeur contre la décision du 28 janvier 2013 par laquelle la commission refusait à nouveau de dispenser le demandeur des mêmes cotisations.
L'arrêt dit régulière la décision du 28 janvier 2013 et rejette le recours du demandeur contre celle-ci, par les motifs visés en réponse au premier moyen.
Il décide que le demandeur « ne peut prétendre à [1.320 euros de dommages et intérêts pour] ses frais de défense dans le cadre de la procédure ayant conduit le Conseil d'État à annuler la décision du 1er septembre 2009 », au motif que « cet arrêt [d'annulation n° 206.425 du 6 juillet 2010] ne doit être considéré que comme une étape dans un processus au terme duquel, par le présent arrêt, [le demandeur] n'obtient pas gain de cause [mais] perd son procès ».
Par ce motif, l'arrêt considère que les frais de défense du demandeur constituent un ensemble qui a été exposé inutilement en raison de la régularité du refus de la dispense des cotisations et qui l'aurait été même sans les irrégularités prétendues des décisions de la commission.
Il exclut ainsi légalement le lien de causalité entre les frais de défense litigieux et l'irrégularité de la décision du 1er septembre 2009.
Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.
Le motif précité suffit à fonder le rejet de la demande du demandeur. Dirigé contre la décision qu' « il ne peut être question de retenir une faute », le surplus du moyen, qui ne saurait entraîner la cassation, est irrecevable à défaut d'intérêt.

Sur le troisième moyen :

Quant à la deuxième branche :

L'arrêt attaqué déboute le demandeur de sa demande en paiement de 1.320 euros de dommages et intérêts pour les frais de défense engagés dans le cadre de la procédure ayant conduit le Conseil d'État à rejeter, par l'arrêt n° 229.113 du 12 novembre 2014, son recours contre la décision de la commission des dispenses de cotisations du 28 janvier 2013. L'arrêt fonde cette décision sur le motif que « l'inutilité du recours ne découle pas des indications figurant sur [cette] décision mais de la régularité de cette dernière ».
Par ces énonciations, par lesquelles il considère que les frais de défense du demandeur constituent un ensemble qui a été exposé inutilement en raison de la régularité du refus de la dispense et qui l'aurait été même sans l'irrégularité prétendue de la décision, l'arrêt exclut légalement le lien de causalité entre les frais de défense litigieux et cette irrégularité.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Quant à la troisième branche :

Les énonciations citées en réponse à la deuxième branche du moyen sont étrangères à la notion de préjudice réparable.
Fondé sur une interprétation inexacte de l'arrêt, le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la première branche :

Le motif vainement critiqué par la deuxième branche du moyen suffit à fonder le rejet de la demande du demandeur. Dirigé contre la décision qu'il n'y a pas eu de faute, le moyen, qui, en cette branche, ne saurait entraîner la cassation, est irrecevable à défaut d'intérêt.

Sur le quatrième moyen :

En vertu de l'article 1017, alinéa 2, 1°, du Code judiciaire, la condamnation aux dépens est toujours prononcée, sauf en cas de demande téméraire ou vexatoire, à charge de l'autorité ou de l'organisme tenu d'appliquer les lois et règlements visés à l'article 580 en ce qui concerne les demandes introduites par ou contre les assurés sociaux personnellement.
L'alinéa 3 précise qu'il s'agit des assurés sociaux au sens de l'article 2, 7°, de la loi du 11 avril 1995 visant à instituer la charte de l'assuré social.
Ledit article 2, 7°, définit les assurés sociaux comme étant les personnes physiques qui ont droit à des prestations sociales, qui y prétendent ou qui peuvent y prétendre, leurs représentants légaux et leurs mandataires.
Il suit de ces dispositions que l'article 1017, alinéa 2, du Code judiciaire ne s'applique pas à la demande formée par un travailleur indépendant sur la base de l'article 580, 1°, de ce code, en qualité de débiteur de cotisations sociales et non de bénéficiaire de prestations, contre une décision de la commission des dispenses de cotisations lui refusant une dispense en application de l'article 17 de l'arrêté royal n° 38.
Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de trois cent trente-cinq euros sept centimes envers la partie demanderesse et à la somme de vingt euros au profit du Fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Martine Regout, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du vingt-cinq mars deux mille dix-neuf par le président de section Martine Regout, en présence de l'avocat général Jean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.17.0074.F
Date de la décision : 25/03/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-03-25;s.17.0074.f ?

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