Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.18.0322.F
Y. M., prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Cavit Yurt, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 24 novembre 2017 par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le 22 janvier 2019, l'avocat général Damien Vandermeersch a déposé des conclusions au greffe.
A l'audience du 30 janvier 2019, le président de section Benoît Dejemeppe a fait rapport et l'avocat général précité a conclu.
II. LES FAITS
Par jugement rendu le 18 mai 2011 par le tribunal de police, le demandeur est condamné par défaut à une amende de cent cinquante euros et à la déchéance du droit de conduire pendant trois mois, sa réintégration dans ce droit étant subordonnée à la réussite des examens théorique, pratique, médical et psychologique.
Le 3 août 2011, ce jugement est signifié à parquet, le demandeur étant sans domicile ni résidence connue en Belgique ou à l'étranger.
Le 30 décembre 2016, le demandeur fait opposition audit jugement.
Le 28 février 2017, après avoir considéré que la sanction infligée au demandeur était une peine de police, le tribunal de police déclare l'opposition du demandeur non recevable en raison de la prescription de la peine.
Statuant en degré d'appel, le jugement attaqué, après avoir considéré que la peine précitée était de nature correctionnelle, déclare cette opposition non recevable pour le même motif.
III. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le moyen :
Pris de la violation des articles 187 du Code d'instruction criminelle et 86 à 99 du Code pénal, le moyen soutient qu'en raison de l'interruption de la prescription de la peine, les juges d'appel n'ont pas légalement déclaré son opposition irrecevable. Il allègue que le demandeur s'est vu notifier le 14 mars 2012 un avertissement du parquet ayant pour objet la mise à exécution de la déchéance du droit de conduire infligée par le jugement rendu par défaut le 18 mai 2011 et que cet acte constitue un acte interruptif de la prescription de la peine, laquelle n'a dès lors été acquise que le 14 mars 2017, soit avant l'opposition formée le 30 décembre 2016 contre le jugement précité.
En application de l'article 38 du Code pénal, l'amende infligée au demandeur par le tribunal de police est de nature correctionnelle.
L'article 92 du même code dispose que, sauf pour les peines correctionnelles concernant les infractions définies aux articles 136bis, 136ter et 136quater, qui sont imprescriptibles, les peines correctionnelles qui ne dépassent pas trois années d'emprisonnement se prescriront par cinq années révolues, à compter de la date de l'arrêt ou du jugement rendu en dernier ressort, ou à compter du jour où le jugement rendu en première instance ne pourra plus être attaqué par la voie de l'appel.
La déchéance du droit de conduire étant une peine accessoire, elle se prescrit dans le même délai.
En vertu de l'article 96 du Code pénal, seul un acte d'exécution matérielle, volontaire ou forcée, de la peine, impliquant que le condamné commence à la subir effectivement, interrompt, en règle, la prescription de celle-ci. Il s'ensuit qu'un acte accompli pour obtenir l'exécution de la décision de condamnation n'a pas d'effet interruptif.
La prescription de la peine ne saurait dès lors être interrompue par l'avertissement émanant de l'autorité et notifié au contrevenant en vue de la mise à exécution de celle-ci, tel celui que le ministère public adresse au condamné à la suite d'un jugement infligeant une peine de déchéance du droit de conduire.
Selon le jugement attaqué, le demandeur n'a réservé aucune suite à l'avertissement que le procureur du Roi lui a adressé en vue de l'exécution de la peine de déchéance du droit de conduire. Il résulte de cette constatation que le tribunal a considéré que le demandeur n'avait pas commencé à subir sa peine.
En considérant ainsi qu'au moment où le demandeur a formé opposition, plus de cinq ans s'étaient écoulés à compter du jugement rendu par défaut et que ce recours était irrecevable en raison de la prescription de la peine, les juges d'appel n'ont pas violé les dispositions invoquées par le moyen.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante-sept euros soixante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Eric de Formanoir, Tamara Konsek, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du trente janvier deux mille dix-neuf par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
F. Gobert F. Stévenart Meeûs F. Lugentz
T. Konsek E. de Formanoir B. Dejemeppe