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17/01/2019 | BELGIQUE | N°F.16.0130.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 janvier 2019, F.16.0130.F


N° F.16.0130.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,

contre

Louis DERMINE, avocat, agissant en qualité de curateur à la faillite de la société anonyme I. O.,
défendeur en cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l&apos

;arrêt rendu le 16 mars 2016 par la cour d'appel de Mons.
Le 26 décembre 2018, le premier avoca...

N° F.16.0130.F
ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,

contre

Louis DERMINE, avocat, agissant en qualité de curateur à la faillite de la société anonyme I. O.,
défendeur en cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 16 mars 2016 par la cour d'appel de Mons.
Le 26 décembre 2018, le premier avocat général André Henkes a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Martine Regout a fait rapport et le premier avocat général André Henkes a été entendu en ses conclusions.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

En vertu de l'article 70, § 1erbis, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, quiconque a déduit indûment ou abusivement la taxe encourt une amende égale au double du montant de cette taxe.
Suivant l'article 84, alinéa 3, de ce code, dans les limites prévues par la loi, le montant des amendes fiscales proportionnelles est réduit selon une échelle dont les graduations sont déterminées par le Roi.
L'article 1er, dernier alinéa, de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987 fixant le montant des amendes fiscales proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée dispose que l'échelle de réduction des amendes fiscales proportionnelles n'est pas applicable en cas d'infractions commises dans l'intention d'éluder ou de permettre d'éluder la taxe.
Si, aux termes de l'article 9 de l'arrêté du Régent n° 78 du 18 mars 1831 organique de l'administration des finances, le ministre des Finances statue sur les réclamations ayant pour objet la remise d'amendes et d'augmentations de droits à titre d'amendes, autres que celles prononcées par le juge, il ne s'ensuit pas qu'à défaut d'un tel recours, le juge puisse exercer de telles prérogatives en fixant l'amende proportionnelle pour fraude fiscale en deçà du tarif légal.
Le droit d'accès à un juge garanti par l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas pour effet de conférer ce pouvoir au juge.
L'arrêt constate que la demande originaire tendait à entendre « déclarer nulle et de nul effet la contrainte [...] décernée le 13 décembre 2010 à charge de [la société I. O.], visée et rendue exécutoire le 14 décembre 2010 par [le] directeur régional ad interim de la taxe sur la valeur ajoutée à Mons, tendant au paiement d'[...] une somme de 105.340,54 euros à titre d'amendes dues en vertu de l'article 70, § 1erbis, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée ».
L'arrêt considère que, la défenderesse « ayant obtenu indûment la déduction de la taxe, [le demandeur] a appliqué, par une motivation adéquate en droit (par référence aux règles légales applicables) et en fait, une amende de 105.340,54 euros égale au double de la taxe conformément à l'article 70, § 1erbis, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, sans application de l'échelle de réduction des amendes prévue au tableau H de l'annexe de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987, s'agissant d'infractions commises dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt ».
Après avoir énoncé que « les amendes en matière de taxe sur la valeur ajoutée [...] constituent une sanction à caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales [...] ; qu'en conséquence, le juge doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration », l'arrêt considère « que le contrôle de pleine juridiction doit permettre au juge de réduire ou de supprimer l'amende au même titre que le ministre des Finances ou son délégué en vertu de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831 » et que, « dans la mesure où le ministre des Finances ou, par délégation, le directeur régional de la taxe sur la valeur ajoutée dispose du pouvoir de remettre ou de réduire les amendes fiscales infligées par leur administration dans le cadre du recours prévu par l'article 9 de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831, le juge saisi doit pouvoir apprécier la proportionnalité de la sanction à la gravité de l'infraction et, par voie de conséquence, supprimer ou réduire l'amende infligée ».
Par ces considérations, d'où il ne ressort pas que le ministre des Finances ou son délégué a été saisi par la société I. O. d'un recours sur la base de l'article 9 de l'arrêté du Régent n° 78 du 18 mars 1831, l'arrêt ne justifie pas légalement sa décision que, « même si l'assujetti est de mauvaise foi, il y a lieu de tenir compte [...] de la hauteur de la sanction déjà infligée en matière d'impôts sur les revenus et de ramener l'amende fiscale en matière de taxe sur la valeur ajoutée à 100 p.c. de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort à reverser au trésor ».
Le moyen, en cette branche, est fondé.
Et il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs, qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il réduit les amendes dues en vertu de l'article 70, § 1erbis, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée et qu'il statue sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Martine Regout, les conseillers Michel Lemal, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-neuf par le président de section Christian Storck, en présence du premier avocat général André Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont A. Jacquemin S. Geubel
M. Lemal M. Regout Chr. Storck


Requête
POURVOI EN CASSATION

POUR: L'ETAT BELGE, Service Public Fédéral des Finances, représenté par Monsieur le Ministre des Finances, dont le cabinet est établi à 1000 Bruxelles, rue de la Loi, 12, poursuites et diligences de Monsieur l'Inspecteur principal du premier bureau des recettes de la TVA de Charleroi, dont les bureaux sont établis à 6000 Charleroi, Cité administrative de l'Etat, rue Jean Monnet, 14/34,

assisté et représenté par Maître Geoffroy de FOESTRAETS, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est sis à 1000 Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile,
demandeur en cassation

CONTRE: Maître Louis DERMINE, avocat, en sa qualité de curateur de la SA I. O.,

défendeur en cassation

* * *

A Messieurs les Premier Président et Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers composant la Cour de cassation de Belgique,
* * *
Messieurs, Mesdames,

Le demandeur a l'honneur de soumettre à votre censure l'arrêt rendu contradictoirement le 16 mars 2016 par la dix-huitième chambre de la cour d'appel de Mons (Numéro de rôle: 2014/RG/694).

FAITS DE LA CAUSE ET ANTECEDENTS DE LA PROCEDURE

Le 21 novembre 2008, le demandeur adresse à la SA I. O. une notification d'indices de fraude.

Le 10 décembre 2010, un procès-verbal est dressé pour les années 2003 à 2007, selon lequel cette société a abusivement déduit le montant des TVA sur soixante-huit factures fictives.

Une contrainte TVA n°310/1210/34868 est décernée le 13 décembre 2010 à charge de la société, à concurrence d'un montant de 52.670,27 EUR à titre de TVA à reverser, et de 105.340,54 EUR à titre d'amende (200 %). Cette contrainte est visée et rendue exécutoire le 14 décembre 2010.

Sur recours de la société le tribunal de première instance de Mons, par un jugement du 17 décembre 2013, confirme la contrainte TVA décernée à charge de la SA I. O. tendant au paiement d'une somme de 52.670,27 EUR à titre de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que l'amende de 200 % infligée par l'administration sur pied de l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA.
Devant la cour d'appel, l'État belge soutient que «le caractère fictif des 'factures' litigieuses étant démontré, les amendes appliquées (200 % des taxes déduites abusivement), qui correspondent au prescrit légal, doivent également être confirmées» (arrêt attaqué, p. 5).

Statuant sur cette question, la cour d'appel considère tout d'abord que l'administration «a appliqué, par une motivation adéquate en droit (par référence aux règles légales applicables) et en fait, une amende de 105.340,54 EUR égale au double de la taxe conformément à l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA, sans application de l'échelle de réduction des amendes prévue au tableau H de l'annexe de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987, s'agissant d'infractions commises dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt» (p. 18).

Prenant acte de ce que «le premier juge a considéré qu'une amende raisonnable de 20 % [lire 200 %] de la taxe sur la valeur ajoutée due doit être appliquée en l'espèce», la cour d'appel, estimant qu'il n'est plus contesté actuellement que les amendes en matière de TVA constituent une sanction à caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et «qu'en conséquence, le juge doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration», décide de réduire l'amende fiscale à 100 % de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort, en tenant compte, au titre de l'application du principe de proportionnalité, «de la hauteur de la sanction déjà infligée en matière d'impôt sur les revenus» (p. 19).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Les dispositions légales violées

- Les articles 70, § 1er bis et 84, alinéa 3 de la loi du 3 juillet 1969 créant le Code de la taxe sur la valeur ajoutée;

- l'article 1er, spécialement alinéas 1er et 2e, de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987 fixant le montant des amendes fiscales proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée;

- l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et approuvé par la loi du 13 mai 1955;

- l'article 9 de l'arrêté du 18 mars 1831 du Régent, organique de l'administration des finances;

- le principe général du droit de la séparation des pouvoirs.

La décision attaquée

L'arrêt attaqué en ce qu'il valide la contrainte n° C.T.R.I. 310/1210/34868 décernée le 13 décembre 2010 à charge de la SA I. O. mais en réduisant les amendes dues en vertu de l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA à la somme de 52.670,27 euro .
Les motifs de la décision attaquée

« Attendu qu'il ne peut être reconnu à l'assujetti un droit à déduction de la taxe sur des factures jugées fictives par la cour, en ce sens que la réalité des prestations de services mentionnées sur ces titres de créances n'a pas été démontrée;

« Attendu qu'il est constant qu'en vertu du procès-verbal dressé le 12 novembre 2008, le troisième bureau du centre de contrôle de l'administration de la T.V.A. de Charleroi a estimé que l'appelante au principal avait déduit à tort une somme totale de 52.620,27 EUR à titre de taxe sur la valeur ajoutée entre 2003 et 2007;

« Qu'ayant obtenu indûment la déduction de la taxe, elle a appliqué, par une motivation adéquate en droit (par référence aux règles légales applicables) et en fait, une amende de 105.340,54 EUR égale au double de la taxe conformément à l'article 70, § 1er bis du Code de la T.V.A., sans application de l'échelle de réduction des amendes prévue au tableau H de l'annexe de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987, s'agissant d'infractions commises dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt.

« Que le premier juge a considéré ‘qu'une amende raisonnable de 20 % [lire 200 %] de la taxe sur la valeur ajoutée due doit être appliquée';

« Attendu qu'il n'est plus contesté actuellement, en ce qui concerne les amendes en matière de TVA, que celles-ci constituent une sanction à caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Cour Const., 15 mai 2008, n° 79/2008 et Cass., 21 janvier 2005, RG C.02.0572.N.);

« Qu'en conséquence, le juge doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration;

« Que le contrôle de pleine juridiction doit permettre au juge de réduire ou de supprimer l'amende au même titre que le Ministre des Finances ou son délégué en vertu de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831;

« Que par son arrêt du 15 mai 2008, la Cour constitutionnelle a, en effet, décidé que ‘Les amendes fiscales prévues à l'article 70 du Code de la TVA ont pour objet de prévenir et de sanctionner les infractions commises par tous les redevables, sans distinction aucune, qui ne respectent pas les obligations imposées par ce Code. Elles ont donc un caractère répressif et sont de nature pénale au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme';

« Qu'elle a décidé, par ailleurs, que ‘l'article 70 du Code de la TVA est incompatible avec les articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, s'il est interprété en ce sens qu'il ne permet pas au juge d'exercer un contrôle de pleine juridiction sur la décision administrative refusant la remise ou la réduction de l'amende fiscale. Ce contrôle doit permettre au juge de vérifier si cette décision est justifiée en fait et en droit et s'il respecte l'ensemble des dispositions législatives et des principes généraux qui s'imposent à l'administration, parmi lesquels le principe de proportionnalité. Ainsi, lorsqu'il est saisi d'un recours contre une décision prise en vertu de l'article 9 de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831, le Ministre des Finances ou son délégué, le juge doit pouvoir remettre ou réduire l'amende au même titre que le Ministre des Finances ou son délégué' (Arrêt n° 79/2008 du 15 mai 2008, B.6.2);

« Que la Cour de cassation, dans son arrêt du 24 janvier 2002, a reconnu au juge un droit de contrôle sur l'amende administrative lui permettant d'examiner si la sanction n'est pas disproportionnée à l'infraction et si l'administration pouvait raisonnablement infliger une sanction de cette importance eu égard à la gravité de l'infraction, au taux des sanctions infligées antérieurement et aux décisions rendues dans des cas similaires (Cass., 24 janvier 2002, n° C000234N, n° C000307N et n° C000599N, www.cass.be);

« Que dans la mesure où le ministre des Finances ou, par délégation, le directeur régional de la TVA, dispose du pouvoir de remettre ou de réduire les amendes fiscales infligées par leur administration, dans le cadre du recours prévu par l'article 9 de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831, le juge saisi doit pouvoir apprécier la proportionnalité de la sanction à la gravité de l'infraction et, par voie de conséquence, supprimer ou réduire l'amende infligée, de la même manière et dans les mêmes limites que celles qui sont assignées par la loi à l'administration, de telle sorte que rien de ce qui relève de l'appréciation de celle-ci ne puisse échapper au contrôle judiciaire (D. GARABEDIAN, ‘Le pouvoir d'appréciation du juge à l'égard des amendes administratives fiscales et de la cotisation spéciale sur commissions secrètes', in ‘Liber amicorum Jacques Malherbe', Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 502; M. MORIS, ‘Le pouvoir d'appréciation du juge en matière d'amendes fiscales', R.G.C.F., 2007/5, pp. 369 et suivantes);

« Attendu que, même si l'assujetti est de mauvaise foi, il y a lieu de tenir compte, eu égard aux exigences impératives des conventions internationales auxquelles la Belgique est partie et de son droit interne, en ce compris les principes généraux du droit qui comprennent notamment le principe de proportionnalité, de la hauteur de la sanction déjà infligée en matière d'impôts sur les revenus et de ramener l'amende fiscale en matière de T.V.A. à 100% de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort à reverser au Trésor» (arrêt attaqué, pp. 17-19).

Les griefs

L'article 70, § 1er bis du Code de la TVA dispose que: «Quiconque a déduit indûment ou abusivement la taxe, encourt une amende égale au double du montant de cette taxe (...)».

L'arrêt attaqué constate qu'il est constant que la défenderesse «avait déduit à tort une somme totale de 52.670,27 EUR à titre de taxe sur la valeur ajoutée entre 2003 et 2007» (arrêt attaqué, p. 17).

La cour d'appel en conclut que la SA I. O. ayant obtenu indûment la déduction de la taxe, l'administration «a appliqué, par une motivation adéquate en droit (par référence aux règles légales applicables) et en fait, une amende de 105.340,54 EUR égale au double de la taxe conformément à l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA» et que s'agissant «d'infractions commises dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt», l'échelle de réduction des amendes prévues au tableau H de l'annexe de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987 n'était pas d'application (arrêt attaqué, p. 18).

Première branche

Mais, considérant que les amendes en matière de TVA constituent une sanction à caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que «le juge doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration» et que ce contrôle de pleine juridiction «doit permettre au juge de réduire ou de supprimer l'amende au même titre que le Ministre des Finances ou son délégué en vertu de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831» et que le Ministre des Finances ou son délégué disposent ainsi, dans le cadre du recours prévu par l'article 9 de cet arrêté du Régent «du pouvoir de réduire les amendes fiscales infligées par leur administration, de la même manière et dans les mêmes limites que celles qui sont assignées par la loi à l'administration», l'arrêt attaqué réduit l'amende à 100 % de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort par la SA I. O..

L'article 70, § 1er bis du Code de la TVA oblige l'administration à infliger une amende égale au double du montant de la taxe déduite indûment ou abusivement. La compétence de l'administration à cet égard est liée.

Le troisième alinéa de l'article 84 du Code de la TVA précise que «dans les limites prévues par la loi, le montant des amendes fiscales proportionnelles prévues par le présent Code (...) est fixé selon une échelle dont les graduations sont déterminées par le Roi».

L'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987 a ainsi fixé le montant des amendes fiscales proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée. L'article 1er indique que «L'échelle de réduction des amendes fiscales proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée est fixée (...)» de la manière prévue aux différents tableaux annexés à cet arrêté. Le dernier alinéa de cet article premier précise que «Toutefois, l'échelle de réduction prévue aux tableaux (...) de l'annexe au présent arrêté n'est pas applicable en cas d'infraction commise dans l'intention d'éluder ou de permettre d'éluder la taxe». Dans ce dernier cas, l'administration dispose donc aussi d'une compétence liée qui lui interdit d'appliquer une réduction de l'amende imposée par l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA.

L'arrêté du Régent visé en tête du moyen dispose en son article 9 que «Le [ministre des finances] statue sur les réclamations ayant pour objet la remise d'amendes et d'augmentations de droits à titre d'amendes, autres que celles prononcées par le juge, et arrête les transactions entre l'administration et les contribuables, dans les cas où elles sont autorisées par les lois».

L'article 9 précité concerne le droit de grâce du pouvoir exécutif. Il ne résulte nullement dudit article 9 que lorsque le Ministre des Finances ou son délégué n'a pas été saisi d'un recours, le juge puisse exercer de façon discrétionnaire les prérogatives de celui-ci.

C'est dans le cadre de ce droit de grâce que le Ministre des Finances ou son délégué peuvent, sur demande du contribuable, examiner la question de la proportionnalité de l'amende en application de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

En l'espèce, la SA I. O. n'a pas introduit pareille réclamation et la cour d'appel n'était donc pas saisie d'un recours contre une telle décision du Ministre des Finances ou de son délégué mais d'un recours contre une décision de l'administration elle-même laquelle, à la différence du Ministre ou de son délégué, dispose d'une compétence liée en ce qui concerne la réduction des amendes.

Il en résulte qu'en réduisant l'amende infligée par l'administration en considérant que le juge saisi d'un recours contre l'acte de l'administration peut exercer sur cette amende un contrôle de pleine juridiction au même titre que le Ministre des Finances ou son délégué en vertu de l'arrêté du Régent du 18 mars 1831, alors que cette disposition ne concerne que le droit de grâce du pouvoir exécutif et non le pouvoir de contrôle du juge, les juges d'appel méconnaissent le principe général du droit de la séparation des pouvoirs ainsi que cet arrêté du Régent qui ne réservent pareil droit de grâce qu'au Ministre ou à son délégué. Il en va d'autant plus ainsi lorsque, comme en l'espèce, le contribuable n'introduit pas auprès du Ministre ou de son délégué la réclamation qui aurait permis de réduire l'amende infligée au titre de ce droit de grâce, en prenant éventuellement en compte le caractère disproportionné de la sanction (violation de toutes les dispositions légales et du principe général du droit visés en tête du moyen).

Seconde branche

Il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que l'amende administrative est légalement due en raison de la fraude établie, conformément à l'article 70, § 1er bis du Code de la Taxe sur la Valeur Ajoutée.

La compétence de l'administration est liée à cet égard. Seul le Ministre ou son délégué dispose d'un droit de grâce qui leur permet de s'écarter de la stricte légalité de l'amende.

Comme l'indique l'arrêt attaqué lui-même, le juge doit pouvoir «supprimer ou réduire l'amende infligée, de la même manière et dans les mêmes limites que celles qui sont assignées par la loi à l'administration» (arrêt attaqué, p. 19).

Il en résulte que les juges d'appel ne pouvaient réduire l'amende infligée par l'administration dans une mesure dépassant les limites assignées par la loi à cette administration, sans violer toutes les dispositions légales visées en tête du moyen.

Développements

La S.A. I. O. n'avait pas introduit auprès du Ministre des Finances une «réclamation» ayant pour objet la remise ou la réduction des amendes décidées par l'administration en application de l'article 70, § 1er bis précité. Elle aurait pu le faire sur pied de l'article 9 de l'arrêté du Régent et ainsi obtenir du Ministre ou de son délégué, une réduction de l'amende infligée par l'administration.
Dans l'hypothèse ayant donné lieu à l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 15 mai 2008 à laquelle l'arrêt attaqué se réfère (p. 18), la question préjudicielle portait précisément sur les pouvoirs de contrôle du juge sur une décision du Ministre des Finances ou de son délégué statuant sur une réclamation du redevable et refusant la remise ou la réduction de l'amende prononcée à l'encontre de celui-ci. C'est dans ce contexte précis que la Cour constitutionnelle a décidé que «lorsqu'il est saisi d'un recours contre une décision prise, en vertu de l'article 9 de l'arrêté du régent du 18 mars 1831, par le Ministre des Finances ou son délégué, le juge doit pouvoir remettre ou réduire l'amende au même titre que le Ministre des Finances ou son délégué» (point B.6.3). En d'autres termes, cet arrêt ne concerne que le contrôle du juge sur «la décision administrative refusant la remise ou la réduction d'une amende fiscale» à la suite d'une réclamation du redevable mais non sur la décision de l'administration infligeant elle-même l'amende au contribuable.

La référence, par la cour d'appel de Mons, à cet arrêt du 15 mai 2008 pour fonder sa décision qu'en l'espèce le juge «doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration» n'est dès lors pas correcte, la Cour constitutionnelle n'ayant appréhendé que le pouvoir du juge sur le contrôle d'une décision du Ministre ou de son délégué sur réclamation du contribuable, laquelle n'a pas été introduite par ce dernier dans le cas présent.

Dans un arrêt du 16 février 2007, Votre Cour a tout d'abord décidé que l'article 9 de l'arrêté du Régent concerne «le droit de grâce» du pouvoir exécutif et qu'il n'entre pas en ligne de compte pour déterminer l'étendue du pouvoir de contrôle du juge sur des amendes fiscales prises en application de l'article 70 précité (Pas., 2007, n° 99). Dans cette affaire, une amende fiscale avait été infligée en application de cet article 70 et il n'avait pas été fait application de l'article 9 précité. «Il ne résulte donc nullement dudit article 9 que lorsque le Ministre des Finances ou son délégué n'a pas été saisi d'un recours, le juge puisse exercer de façon discrétionnaire les prérogatives de celui-ci» (voir les conclusions de Monsieur l'avocat général Henkes avant l'arrêt du 18 avril 2013, Pas., 2013, n° 244, p. 895; contra J. Kirkpatrick et S. Nudelholc, Le contrôle judiciaire des amendes fiscales et le principe de proportionnalité, RCJB, 2002, n° 54, e), p. 651).

Dans un autre arrêt, du 18 avril 2013, Votre Cour confirme concernant l'article 9 de l'arrêté du Régent que «contrairement à ce que le moyen soutient, il ne résulte pas de cette disposition que, lorsque le Ministre des Finances ou son délégué n'a pas été saisi d'un recours, le juge peut exercer les prérogatives de celui-ci en statuant en pure opportunité» (Pas., 2013, n° 244, p. 897).

SECOND MOYEN DE CASSATION

Les dispositions légales violées

- les articles 70, § 1er bis et 84, alinéa 3 de la loi du 3 juillet 1969 créant le Code de la Taxe sur la Valeur Ajoutée;

- l'article 1er, spécialement premier et dernier alinéas, de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987 fixant le montant des amendes fiscales proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée;

- l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et approuvée par la loi du 13 mai 1955;

- l'article 9 de l'arrêté du 18 mars 1831 du Régent, organique de l'administration des finances;

- le principe général du droit de la séparation des pouvoirs.

La décision attaquée

L'arrêt attaqué en ce qu'il valide la contrainte n° C.T.R.I. 310/1210/34868 décernée le 13 décembre 2010 à charge de la SA I. O. mais en réduisant les amendes dues en vertu de l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA à la somme de 52.670,27 euro .

Les motifs de la décision attaquée

« Attendu qu'il est constant qu'en vertu du procès-verbal dressé le 12 novembre 2008, le troisième bureau du centre de contrôle de l'administration de la T.V.A. de Charleroi a estimé que l'appelante au principal avait déduit à tort une somme totale de 52.620,27 EUR à titre de taxe sur la valeur ajoutée entre 2003 et 2007;

« Qu'ayant obtenu indûment la déduction de la taxe, elle a appliqué, par une motivation adéquate en droit (par référence aux règles légales applicables) et en fait, une amende de 105.340,54 EUR égale au double de la taxe conformément à l'article 70, § 1er bis du Code de la T.V.A., sans application de l'échelle de réduction des amendes prévue au tableau H de l'annexe de l'arrêté royal n° 41 du 30 janvier 1987, s'agissant d'infractions commises dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt.

« (...)

« Attendu qu'il n'est plus contesté actuellement, en ce qui concerne les amendes en matière de TVA, que celles-ci constituent une sanction à caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Cour Const., 15 mai 2008, n° 79/2008 et Cass., 21 janvier 2005, RG C.02.0572.N.);

« Qu'en conséquence, le juge doit pouvoir exercer un contrôle de pleine juridiction sur l'amende infligée par l'administration;

« (...)

« Que la Cour de cassation, dans son arrêt du 24 janvier 2002, a reconnu au juge un droit de contrôle sur l'amende administrative lui permettant d'examiner si la sanction n'est pas disproportionnée à l'infraction et si l'administration pouvait raisonnablement infliger une sanction de cette importance eu égard à la gravité de l'infraction, au taux des sanctions infligées antérieurement et aux décisions rendues dans des cas similaires (Cass., 24 janvier 2002, n° C000234N, n° C000307N et n° C000599N, www.cass.be);

« (...)

« Attendu que, même si l'assujetti est de mauvaise foi, il y a lieu de tenir compte, eu égard aux exigences impératives des conventions internationales auxquelles la Belgique est partie et de son droit interne, en ce compris les principes généraux du droit qui comprennent notamment le principe de proportionnalité, de la hauteur de la sanction déjà infligée en matière d'impôts sur les revenus et de ramener l'amende fiscale en matière de T.V.A. à 100% de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort à reverser au Trésor» (arrêt attaqué, pp. 17-19).

Les griefs

Le juge appelé à contrôler une sanction administrative qui a un caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit examiner la légalité de cette sanction et peut contrôler en particulier si cette sanction est conforme aux exigences impératives des conventions internationales et du droit interne, y compris les principes généraux du droit.

Ce droit de contrôle doit notamment permettre au juge de vérifier si la sanction n'est pas disproportionnée à l'infraction, de sorte que le juge peut examiner si l'administration pouvait raisonnablement infliger une amende administrative d'une telle importance.

Le juge peut spécialement avoir égard à la gravité de l'infraction, au taux des sanctions précédemment infligées et à la manière dont il a été statué dans des causes similaires, mais il doit tenir compte à cet égard de la mesure dans laquelle l'administration elle-même était liée par rapport à la sanction.

En l'espèce, les juges d'appel ont constaté que la décision de l'administration d'infliger à la SA I. O. une amende correspondant au double de la taxe indûment déduite était «adéquate en droit et en fait» et que, s'agissant d'infractions commises «dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt», elle ne pouvait pas être légalement réduite (arrêt attaqué, p. 18).

Ils considèrent aussi que «l'assujetti est de mauvaise foi» (p. 19).

Mais, exerçant ensuite un contrôle de «proportionnalité», ils décident qu'«il y a lieu de tenir compte des exigences impératives des conventions internationales (...) en ce compris les principes généraux du droit» et de réduire l'amende fiscale à 100 % de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort, au seul motif «de la hauteur de la sanction déjà infligée [à la SA I. O. ] en matière d'impôt sur les revenus».

Première branche

Le droit de contrôle du juge sur l'amende administrative décidée par l'administration en matière de TVA doit permettre au juge de vérifier si cette sanction n'est pas disproportionnée à l'infraction, de sorte que l'administration ne pouvait pas raisonnablement infliger une amende administrative d'une telle importance sans méconnaître les principes généraux du droit, dont le principe de proportionnalité.

Ce droit de contrôle n'implique pas que le juge peut liquider ou réduire des amendes sur la base d'une appréciation subjective de ce qu'il estime lui-même raisonnable. C'est le caractère raisonnable de la décision de l'administration qu'il doit examiner et il doit notamment tenir compte à cet égard de la mesure dans laquelle l'administration elle-même était liée par rapport à la sanction et préciser les motifs pour lesquels l'administration aurait dû ou pu déroger à la sanction prévue par la loi. Il ne peut se borner à subroger sur appréciation subjective à la sanction qualifiée légalement.

Il en résulte qu'en estimant que l'amende fiscale en matière de TVA doit en l'espèce être réduite à 100 % de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort, au seul motif de la hauteur de la sanction déjà infligée par ailleurs à la SA I. O. en matière d'impôt sur les revenus, les juges d'appel, qui ne précisent pas pour quelle raison l'administration aurait dû ou pu déroger aux dispositions de l'article 70, § 1er bis du Code de la TVA, ne justifient par du caractère «disproportionné» de l'amende de 200 % décidée légalement par l'administration et, se bornant à subroger leur appréciation subjective à la sanction légalement décidée par l'administration, ils violent les dispositions légales ainsi que le principe général du droit visé en tête du moyen.

Seconde branche

Le manque de proportionnalité entre une sanction et les éléments d'une infraction indique un rapport objectif: il convient d'examiner la proportion entre les faits et la sanction, indépendamment des circonstances particulières propres à chaque cas individuel, sous peine de verser dans une appréciation subjective qui ne peut être prise en considération pour apprécier l'existence ou non d'un manque de proportionnalité.

En l'espèce, il est constaté par les juges d'appel, d'une part que la SA I. O. a participé activement à un mécanisme de factures fictives dont elle a obtenu indûment la déduction de la taxe, que les infractions commises par elle l'ont été dans l'intention d'éluder l'impôt ou de permettre d'éluder l'impôt et qu'elle est de mauvaise foi et, d'autre part, qu'une autre sanction importante lui a déjà été infligée en matière d'impôt sur les revenus.

Il ne peut se déduire de cette seule dernière circonstance que l'application de la sanction fixée par la loi à 200 % de la taxe éludée est objectivement disproportionnée.

En effet, il ne peut être déduit de cette circonstance que l'amende de 200 % serait disproportionnée par rapport aux infractions commises par la SA I. O., mais uniquement, comme le constate l'arrêt attaqué, qu'elle est trop élevée eu égard à la hauteur de la sanction déjà infligée à cette société.

Il s'agit là d'une appréciation subjective de ce que le juge considère comme raisonnable dans le cas de la prévenue et non pas d'un examen objectif de la proportionnalité qui doit exister en droit pénal entre les infractions commises et les sanctions encourues.

Il en résulte qu'en réduisant à 100 % l'amende infligée par l'administration au seul motif de la hauteur de la sanction infligée par ailleurs à la SA I. O. en matière d'impôt sur les revenus, c'est-à-dire en raison d'une circonstance particulière propre à celle-ci, l'arrêt attaqué n'a pas procédé à un véritable examen de proportionnalité entre la sanction et les éléments de l'infraction (violation de toutes les dispositions légales et du principe général du droit visés en tête du moyen).

Développements
«Le juge auquel il est demandé de contrôler une sanction administrative qui a un caractère répressif au sens de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit examiner la légalité de cette sanction et peut, plus particulièrement, examiner si cette sanction est conciliable avec les exigences impératives des traités internationaux et du droit interne, y compris les principes généraux du droit. Ce droit de contrôle doit particulièrement permettre au juge d'examiner si la sanction n'est pas disproportionnée par rapport à l'infraction, de sorte que le juge peut examiner si l'administration pouvait infliger raisonnablement une amende administrative d'une telle ampleur. À cet égard, le juge peut tenir compte en particulier de la gravité de l'infraction, du taux des sanctions déjà infligées et de la manière dont il a été statué dans des causes similaires, mais il doit aussi tenir compte de la mesure dans laquelle l'administration elle-même était liée en ce qui concerne la sanction. Ce droit de contrôle n'implique pas que, sur la base d'une appréciation subjective de ce qu'il considère comme étant raisonnable, le juge puisse liquider ou réduire des amendes pour de simples motifs d'opportunité et à l'encontre des règles légales» (Cass., 13 février 2009, Pas., n° 121; voir aussi Cass., 21 janvier 2005, Pas., n° 43; Cass., 16 février 2007, Pas., n° 102; Cass., 11 mars 2010, Pas., n° 174 et n° 194; Cass., 8 avril 2011, Pas., n° 257).
«Le manque de proportionnalité entre une sanction et les éléments d'une infraction indique un rapport objectif: à cet égard, les faits doivent être examinés à la lumière de la sanction, indépendamment des circonstances particulières propres à chaque cas individuel. Une appréciation subjective de circonstances atténuantes, propres à chaque cas individuel, ne peut être prise en considération pour apprécier l'existence ou non d'un manque de proportionnalité» (voir les conlusions de Monsieur l'avocat général Thijs avant l'arrêt de la Cour de cassation du 21 janvier 2005, Pas., p. 173).

La «plénitude de juridiction» permet en effet au juge de réduire la sanction infligée lorsque celle-ci «excède les limites raisonnables de la compétence de l'administration» mais «ce droit de contrôle n'implique pas que le juge puisse liquider ou diminuer des amendes pour de simples motifs d'opportunité et à l'encontre des règles légales». «Il est en effet question d'une violation du principe de proportionnalité lorsque le choix fait par l'administration entraîne une disproportion manifeste entre l'intérêt général et l'intérêt particulier» (voir les conclusions de Monsieur l'avocat général Thijs avant l'arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2009, Pas., pp. 456 et ss.). Dans l'exercice d'une compétence liée, l'administration ne dispose d'aucun choix et l'arrêt attaqué ne tient pas compte de cet élément dans son appréciation de la «proportionnalité» de la sanction.

A CES CAUSES,

L'avocat à la Cour de cassation soussigné, pour le demandeur, conclut qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, casser et annuler l'arrêt attaqué, renvoyer la cause et les parties devant une autre cour d'appel et statuer comme de droit sur les dépens de l'instance de cassation.

Bruxelles, le 3 octobre 2016

Geoffroy de FOESTRAETS



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 17/01/2019
Date de l'import : 09/03/2020

Fonds documentaire ?: juridat.be


Numérotation
Numéro d'arrêt : F.16.0130.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-01-17;f.16.0130.f ?

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