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09/01/2019 | BELGIQUE | N°P.18.0622.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 09 janvier 2019, P.18.0622.F


N° P.18.0622.F
T. N.
prévenue,
demanderesse en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Hamid El Abouti, avocat au barreau de Bruxelles, et Ronan Vilaine, avocat au barreau du Luxembourg,

contre

L. D.
partie civile,
défenderesse en cassation.






I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 25 avril 2018 par le tribunal correctionnel du Luxembourg, division Neufchâteau, statuant en degré d'appel.
La demanderesse invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en co

pie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a...

N° P.18.0622.F
T. N.
prévenue,
demanderesse en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Hamid El Abouti, avocat au barreau de Bruxelles, et Ronan Vilaine, avocat au barreau du Luxembourg,

contre

L. D.
partie civile,
défenderesse en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 25 avril 2018 par le tribunal correctionnel du Luxembourg, division Neufchâteau, statuant en degré d'appel.
La demanderesse invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LES FAITS

Par jugement du tribunal de police du 20 mars 2017, la demanderesse a été reconnue coupable de deux préventions, soit, étant usager de la route, pour avoir le 5 septembre 2013 provoqué un accident de la circulation dont il est résulté la mort de N. L. et, à l'occasion du même accident, involontairement causé des coups ou fait des blessures à A. M..

Cette décision condamne la demanderesse à une amende et à la déchéance à temps du droit de conduire, ces peines étant en partie assorties du sursis et, statuant sur l'action civile, elle la condamne à indemniser la défenderesse.

Par jugement rectificatif du 29 mars 2017, le tribunal de police, après avoir constaté que la première décision avait omis de mentionner, au dispositif, la condamnation de la demanderesse à une peine d'emprisonnement de quatre mois, assortie du sursis, a réparé cette erreur.

Le 18 avril 2017, le conseil de la demanderesse a déclaré interjeter appel du jugement du 29 mars 2017 et a déposé un formulaire de griefs ainsi qu'une requête contenant ses moyens. Le formulaire de griefs visait la décision rendue sur l'action publique, relative respectivement à la déclaration de culpabilité du chef des deux préventions, au taux de la peine infligée et au refus d'octroi d'une mesure de faveur, ainsi que la décision rendue sur l'action civile, relative au lien causal entre l'accident et le dommage et à l'évaluation de ce dernier.
Le même jour, le procureur du Roi a interjeté appel contre le même jugement, appel limité au taux de la peine prononcée.

Le 15 novembre 2017, la demanderesse a interjeté appel contre le jugement du 20 mars 2017. Le formulaire de griefs joint à cette déclaration mentionnait, outre les griefs déjà visés le 18 avril 2017, la qualification des infractions et la recevabilité de l'action civile.

La décision attaquée constate que l'appel de la demanderesse, du 18 avril 2017, eu égard aux termes de la déclaration d'appel, ne visait que le jugement rectificatif du 29 mars 2017, de sorte que le tribunal n'est pas saisi d'un recours contre le jugement du 20 mars 2017. Examinant ce recours limité, le jugement attaqué confirme la première de ces décisions et déclare l'appel formé le 15 novembre 2017 contre la seconde, irrecevable en raison de sa tardiveté.

III. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

Pris de la violation des articles 149 de la Constitution, 203 et 204 du Code d'instruction criminelle, 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 14.1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le moyen reproche au jugement de ne pas répondre aux conclusions de la demanderesse qui, d'une part, en présence d'une requête d'appel contenant des ratures non approuvées, soutenaient que cette dernière devait être lue avec ses mots biffés et, d'autre part, indiquaient que la demanderesse avait précisé, dans sa requête d'appel, vouloir attaquer le jugement du 20 mars 2017 et non celui, rectificatif, du 29 mars 2017, dont elle ignorait du reste l'existence. Ce faisant, selon la demanderesse, le tribunal a omis de se prononcer sur l'imputabilité des modifications apportées à la requête d'appel et, partant, sur la force majeure qui pourrait justifier tant la mention erronée figurant dans la déclaration d'appel du 18 avril 2017, en ce qu'elle vise le jugement du 29 mars 2017 au lieu de celui du 20 mars 2017, que la tardiveté de la seconde déclaration d'appel du 15 novembre suivant.
Après avoir relevé que la date de la décision entreprise, mentionnée dans la requête d'appel, avait manifestement été modifiée, le tribunal a toutefois considéré que cette circonstance était sans incidence sur la détermination de sa saisine.

Il a en effet énoncé que celle-ci découle uniquement de la déclaration d'appel, laquelle est claire, précise et inconditionnelle en ce qu'elle ne vise que le jugement du 29 mars 2017, tandis qu'elle avait été présentée à l'avocat de la demanderesse, qui avait pu la relire avant de l'approuver sans qu'il existât de possibilité de contestation, puisque tant la date du jugement entrepris que son numéro y étaient mentionnés.

Par ces considérations, qui rendent sans pertinence l'interrogation soulevée par la demanderesse à propos de l'identité de l'auteur des modifications apportées à la requête d'appel, le tribunal a régulièrement motivé et légalement justifié sa décision selon laquelle il était saisi d'un recours contre le seul jugement du 29 mars 2017, l'appel formé contre la décision du 20 mars 2017 étant quant à lui tardif.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

Par ailleurs, à la suite de ces motifs, les juges d'appel n'avaient plus à répondre aux conclusions, également devenues sans pertinence à cet égard, qui faisaient valoir que les mentions de la requête d'appel auxquelles avaient été apportées des modifications non approuvées devaient dès lors être lues comme si elles n'avaient pas été raturées.

À cet égard, procédant d'une lecture erronée du jugement, le moyen manque en fait.

Sur les deuxième et troisième moyens réunis :

Pris de la violation des dispositions visées au premier moyen, les moyens reprochent aux juges d'appel d'avoir décidé, à l'issue d'une interprétation déraisonnable ou fondée sur des sources doctrinales et jurisprudentielles inapplicables au cas d'espèce, qu'ils n'étaient saisis d'un appel régulier qu'à l'encontre du jugement du 29 mars 2017, alors qu'en raison de la contradiction opposant les termes de la déclaration d'appel et ceux du formulaire de griefs et de la requête d'appel, le doute quant à la portée du recours aurait dû profiter à la demanderesse et mener les juges d'appel à admettre celui-ci, y compris contre le jugement du 20 mars 2017. La demanderesse fait également grief au jugement de décider, nonobstant le silence de la loi et le doute qui aurait dû lui bénéficier, qu'un appel régulier contre un jugement rectificatif n'emporte pas la saisine des juges d'appel à l'égard du premier jugement.

Pareils griefs sont étrangers à l'article 149 de la Constitution.

Dans cette mesure, les moyens manquent en droit.

En tant qu'ils soutiennent qu'en cas de doute quant à la portée d'un appel, il y a lieu d'interpréter le recours en faveur de l'appelant, alors que le tribunal n'a exprimé aucun doute à cet égard, les moyens manquent en fait.

La déclaration d'appel est un acte authentique qui doit être rédigé de manière à faire apparaître sans ambiguïté l'objet et la portée du recours.

Dès lors, le juge d'appel ne pourrait, au motif qu'il constate une contradiction entre cet acte et d'autres, dépourvus de caractère authentique, étendre la déclaration d'appel à des décisions différentes de celle qui y est indiquée.

À cet égard, les moyens manquent en droit.

Par ailleurs, signé par le greffier, cet acte authentique fait preuve jusqu'à inscription de faux des déclarations et constatations qui y sont contenues, procédure que la demanderesse ne soutient pas avoir intentée.

Dans cette mesure, les moyens sont irrecevables.

Pour le surplus, après avoir constaté que la déclaration d'appel du 18 avril 2017 ne les avait pas saisis d'un recours contre le jugement du 20 mars 2017, au motif que le conseil de la demanderesse n'avait pu se méprendre au sujet de la portée de cette déclaration, puisque tant la date du jugement entrepris que son numéro y étaient mentionnés, les juges d'appel ont légalement décidé que l'appel interjeté le 15 novembre 2017 contre le jugement précité était tardif et, partant, irrecevable.

À cet égard, les moyens ne peuvent être accueillis.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de deux cent vingt-six euros douze centimes dont septante-quatre euros trente et un centimes dus et cent cinquante et un euros quatre-vingt-un centimes payés par cette demanderesse.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Frédéric Lugentz et François Stévenart Meeûs, conseillers, et prononcé en audience publique du neuf janvier deux mille dix-neuf par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.
T. Fenaux F. Stévenart Meeûs F. Lugentz
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.18.0622.F
Date de la décision : 09/01/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-01-09;p.18.0622.f ?

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