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03/01/2019 | BELGIQUE | N°C.18.0175.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 janvier 2019, C.18.0175.F


N° C.18.0175.F
1. A. J. et
2. C. J.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,
contre

ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de

domicile.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt ren...

N° C.18.0175.F
1. A. J. et
2. C. J.,
demandeurs en cassation,
représentés par Maître Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 106, où il est fait élection de domicile,
contre

ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Finances, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Loi, 12,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 20 juin 2016 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport.
L'avocat général Thierry Werquin a conclu.

II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

Conformément à l'article 1524, alinéa 1er, du Code judiciaire, chaque créancier opposant et muni d'un titre exécutoire en vertu duquel commandement de payer a été signifié peut se faire remettre une copie certifiée d'une saisie pratiquée précédemment, non encore levée et non attaquée en droit.
En vertu de l'article 1524, alinéa 2, de ce code, un tel créancier peut procéder au récolement des meubles et effets sur la liste des biens saisis qui lui a été remise et saisir par extension les biens omis et, si la vente n'a pas lieu à la date fixée, le saisissant par récolement et extension peut, sans former aucune demande en subrogation, faire procéder à la vente.
En vertu de l'alinéa 3 de cet article, il peut aussi bien, et sans autre action en subrogation, faire poursuivre l'exécution de son titre sur la base d'une copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement, non encore levée et non attaquée en droit, par l'entremise d'un huissier de justice qu'il désigne, pour autant que cette saisie n'ait pas plus de trois ans.
L'article 1524, alinéa 6, du code précise, en sa première phrase, que le créancier visé à l'alinéa 3 doit, dans le premier acte de fixation du jour de vente, sur la base d'une copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement, communiquer clairement au débiteur, sous peine de nullité, que la poursuite se fait sur la base d'une saisie pratiquée antérieurement, non encore levée et non contestée en droit, et est tenu de signifier la copie certifiée qui lui a été remise à cet effet sous peine de nullité.
Il s'ensuit que seul le créancier qui fait choix de poursuivre l'exécution de son titre sur la base de cette copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement doit signifier au débiteur ladite copie certifiée, mais non le créancier qui procède à la saisie par récolement et extension.
Le moyen, qui repose sur le soutènement que tout créancier agissant sur la base de l'article 1524 du Code judiciaire, dont le créancier qui procède à une saisie par récolement et extension, doit signifier la copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent trente-trois euros trente-trois centimes en débet envers les parties demanderesses.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononcé en audience publique du trois janvier deux mille dix-neuf par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont S. Geubel M.-Cl. Ernotte
M. Lemal M. Delange Chr. Storck


Requête
1er feuillet

REQUÊTE EN CASSATION


Pour : Madame A. J. et Monsieur C. J.,

Demandeurs en cassation,

Assistés et représentés par Me Ann Frédérique Belle, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est situé à 1050 Bruxelles, avenue Louise, 106, chez qui il est fait élection de domicile,

Contre : L'ETAT BELGE, service public Fédéral Finances, représenté par Monsieur le Ministre des Finances, Administration Générale de la Perception et du Recouvrement, Centre régional de Recouvrement de Bruxelles 1, poursuites et diligences de Monsieur le Conseiller-receveur du team Recouvrement Personnes Physiques Ixelles, anciennement Receveur des Contributions directes d'Ixelles 2, dont les bureaux sont situés boulevard du Jardin Botanique, 50 BP 3150 à 1000 Bruxelles ;

Défendeur en cassation.

A Monsieur le Premier Président, Mesdames et Messieurs les Présidents et conseillers composant la Cour de cassation de Belgique,

Mesdames,
Messieurs,

Les demandeurs ont l'honneur de soumettre à votre censure l'arrêt rendu contradictoirement entre les parties le 20 juin 2016, par la Cour d'appel de Bruxelles (17 ème chambre, affaires civiles ; N° de rôle 2015/AR/1573).

1. Les faits et antécédents de la cause tels qu'ils résultent des pièces auxquelles votre Cour peut avoir égard peuvent être résumés comme suit.
Les demandeurs étaient redevables à l'égard de l'Etat d'une taxe de circulation et d'une cotisation de précompte immobilier.
L'Etat a fait signifier aux demandeurs des commandements de payer le 30 octobre 2013 pour la taxe de circulation et le 20 juin 2014 pour le précompte immobilier.
Une saisie-exécution mobilière fut pratiquée à la requête de l'Etat, le 16 janvier 2014 pour récupérer la taxe de circulation.
Par la suite, le défendeur fit signifier une saisie-exécution mobilière par récolement et extension le 16 septembre 2014 afin d'obtenir le paiement d'une somme totale de 1.934,16 euro .

2. A la suite de cette saisie, les demandeurs ont introduit un recours contre l'Etat Belge devant le juge du Tribunal de première instance francophone de Bruxelles visant à :
- dire pour droit que le PV de saisie exécution mobilière du 16 septembre était irrégulier;
- suspendre la vente qui était prévue le 30 octobre 2014 ;
- et ordonner la restitution des biens emportés le 28 octobre 2014.

3. Par jugement du 17 novembre 2014, le Tribunal de première instance francophone de Bruxelles :

- a déclaré recevable mais non fondée l'action des demandeurs à l'égard du défendeur ;
- et a condamné les demandeurs aux dépens.

4. Les demandeurs ont interjeté appel de cette décision, en réitérant leurs demandes initiales à l'exception de la demande de restitution des objets qu'ils ont transformée en une demande de restitution par "équivalent à leur valeur réelle" des biens qui avaient été saisis et vendus entretemps. Ils ont également intimé la SPRL Etude V. et B.
En outre, les demandeurs demandaient également que le défendeur soit condamné à "compenser les dommages subis estimés provisionnellement à 1 euro sous réserve d'évaluation en cours de procédure."
A titre subsidiaire, les demandeurs sollicitaient la production de documents tels que la liste des objets vendus, leurs prix et la preuve de la publicité de la vente pour les objets de plus de 500 euro .

5. Par l'arrêt attaqué du 20 juin 2016, la Cour d'appel de Bruxelles a dit l'appel irrecevable en tant que dirigé contre la partie SPRL Etude V. et B., a reçu l'appel en tant que dirigé contre le défendeur mais l'a dit non fondé.

A l'encontre de cet arrêt, les demandeurs ont l'honneur de présenter le moyen unique de cassation qui suit.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Dispositions dont la violation est invoquée

- Articles 1506 et 1524 du Code judiciaire
- Article 544 du Code civil,
- Articles 1382 et 1383 du Code civil
- Articles 860 à 867 du Code judiciaire, tant avant qu'après leur modification par la loi du 19 octobre 2015.

Partie critiquée de la décision attaquée

L'arrêt qui dit l'appel des demandeurs non fondé, rejetant en conséquence la demande originaire qui tendait à constater l'irrégularité de la saisie-exécution mobilière pratiquée à la requête du défendeur le 16 septembre 2014, et à obtenir la restitution de tous les biens emportés le 28 octobre 2014, ou à défaut, un montant correspondant à leur valeur réelle, par les motifs que :
« (...) En vain les (demandeurs) reprennent devant la cour le moyen invoqué devant le premier juge ayant trait au non-respect de l'article 1506 du Code judiciaire et auquel ce dernier a adéquatement répondu dès lors qu'il s'agit en ce cas particulier d'un exploit de saisie-exécution mobilière avec récolement et extension et qu'aucune disposition légale n'impose une nouvelle description du mobilier saisi.
L'exploit de saisie du 16 septembre 2014 faisait expressément référence à la saisie du 16 janvier 2014.
L'article 1524 du Code judiciaire a été respecté.
(Les demandeurs) n'ont pas fait opposition à l'exploit de saisie-exécution mobilière du 16 janvier 2014.
La cour n'a donc pas à statuer sur la validité de cet exploit dont elle n'est pas saisie.(...) » (arrêt attaqué p. 4).

Griefs

Selon l'article 1524 du Code judiciaire, « chaque créancier opposant et muni d'un titre exécutoire en vertu duquel commandement de payer a été signifié peut se faire remettre une copie certifiée d'une saisie pratiquée précédemment, non encore levée et non attaquée en droit, par l'entremise d'un huissier de justice qu'il désigne. Cette copie certifiée est délivrée par l'huissier de justice qui a pratiqué la saisie, conformément aux formalités énumérées ci-après.
(...)
Le créancier visé à l'alinéa 1er peut aussi bien et sans autre action en subrogation, faire poursuivre l'exécution de son titre par l'intermédiaire d'un huissier de justice qu'il a désigné sur la base d'une copie certifiée de la saisie pratiquée précédemment, non encore levée et non attaquée en droit, par l'entremise d'un huissier de justice qu'il désigne, pour autant que cette saisie n'ait pas plus de trois ans.
(...)
Le créancier visé à l'alinéa 3 doit, dans le premier acte de fixation du jour de vente, sur la base d'une copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement, communiquer clairement au débiteur, sous peine de nullité, que la poursuite se fait sur la base d'une saisie pratiquée antérieurement, non encore levée et non contestée en droit, et est tenu de signifier la copie certifiée qui lui a été remise à cet effet sous peine de nullité. (...) ».
Lorsque le créancier fait usage de la faculté prévue par cette disposition de pratiquer une saisie par récolement et extension, l'exploit signifié par l'huissier de justice doit non seulement préciser que la poursuite intervient sur la base de la saisie pratiquée antérieurement mais aussi comporter la signification d'une copie certifiée de l'exploit de la saisie pratiquée antérieurement.
La signification de la copie certifiée de l'exploit antérieur est prévue à peine de nullité.
Dans leurs conclusions d'appel déposées au greffe le 29 février 2016, les demandeurs contestaient la validité de la saisie litigieuse du 16 septembre 2014 pratiquée en vertu de l'article 1524 du Code judiciaire (voir notamment p. 4 de ces conclusions d'appel).
Après avoir relevé « qu'il s'agit en ce cas particulier d'un exploit de saisie-exécution mobilière avec récolement et extension », l'arrêt conclut que « l'article 1524 du Code judiciaire a été respecté » en énonçant « qu'aucune disposition légale n'impose une nouvelle description du mobilier saisi » (p. 4 de l'arrêt attaqué) et que « l'exploit de saisie du 16 septembre 2014 faisait expressément référence à la saisie du 16 janvier 2014 ».
Or, si l'article 1524 du Code judiciaire n'impose pas dans l'exploit de saisie par récolement et extension une nouvelle description du mobilier saisi comme l'exige l'article 1506 dudit Code, il exige à peine de nullité la signification d'une copie certifiée de l'exploit de saisie antérieure, qui lui, doit comporter ladite description détaillée et précise des objets saisis visée par l'article 1506 dudit Code. La simple référence à l'exploit de saisie antérieure est insuffisante.
L'arrêt ne pouvait en conséquence décider légalement que la saisie pratiquée par le défendeur le 16 septembre 2014, par récolement et extension de celle du 16 janvier 2014, respectait l'article 1524 du Code judiciaire dès lors qu'elle faisait référence à celle du 16 janvier 2014 sans constater qu'une copie certifiée de l'exploit de signification de la saisie antérieure pratiquée en janvier 2014 avait été signifiée lors de la nouvelle saisie pratiquée.
L'arrêt viole en conséquence l'article 1524 du Code judicaire et pour autant que de besoin l'article 1506 dudit Code et n'est pas légalement justifié.
Il n'a pu dès lors légalement rejeter la demande formée par les demandeurs qui tendait à voir annuler la saisie du 16 septembre 2014 irrégulièrement pratiquée, et à obtenir en conséquence soit la restitution des biens saisis, soit leur contrevaleur réelle en espèces, ainsi que l'indemnisation du préjudice subi en raison de la dite saisie irrégulière pratiquée par le défendeur. Il viole ce faisant les articles 860 et suivants du Code judiciaire visés au moyen en privant les demandeurs des restitutions qui devaient découler de l'annulation de la saisie irrégulière ainsi que les articles 544, 1382 et 1383 du Code civil, en admettant qu'il ait été porté atteinte, par cette saisie irrégulière, au droit de propriété des demandeurs sur les meubles saisis et en écartant illégalement en outre toute responsabilité dans le chef du créancier pour avoir pratiqué une telle saisie irrégulière.

Développement

Pour rejeter le moyen déduit de l'irrégularité de la saisie avec récolement et extension pratiquée en application de l'article 1524 du Code judiciaire, l'arrêt énonce que cette disposition n'impose pas une nouvelle description du mobilier saisi, et que la simple référence à la saisie antérieure est suffisante.
Selon l'article 1524, alinéa 6 du Code judiciaire, « le créancier visé à l'alinéa 3 doit, dans le premier acte de fixation du jour de vente, sur la base d'une copie certifiée de la saisie pratiquée antérieurement, communiquer clairement au débiteur, sous peine de nullité, que la poursuite se fait sur la base d'une saisie pratiquée antérieurement, non encore levée et non contestée en droit, et est tenu de signifier la copie certifiée qui lui a été remise à cet effet sous peine de nullité ».
S'il est exact que l'article 1524 du Code judiciaire ne prévoit pas une nouvelle description des biens saisis, cette disposition exige toutefois d'une part la référence à la saisie antérieure et d'autre part la signification de la « la copie certifiée qui lui a été remise à cet effet ».
Cette obligation imposée à l'huissier de justice est prévue sous peine de nullité.
Elle vise à assurer que le débiteur saisi puisse disposer d'une liste complète des biens saisis (ceux ayant déjà été saisis et les nouveaux biens figurant dans le nouvel exploit). Le respect de cette disposition s'impose d'autant plus qu'il s'agit d'une saisie avec récolement et extension.
L'arrêt décide que la saisie exécution litigieuse avec récolement et extension respecte l'article 1524 du Code judiciaire dès lors que l'exploit de saisie du 16 septembre 2014 fait expressément référence à la saisie du 16 janvier 2014. En se contentant de cette simple référence sans constater en outre que la copie certifiée de la saisie antérieure du 16 janvier 2014 avait bien été signifiée lors de cette nouvelle saisie, l'arrêt ne justifie pas légalement sa décision.

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de cassation soussigné conclut qu'il Vous plaise, Mesdames, Messieurs, de casser l'arrêt attaqué, ordonner que mention en soit faite en marge de l'arrêt attaqué, renvoyer la cause devant une autre Cour d'appel et statuer comme de droit sur les dépens.

Bruxelles, le 12 avril 2018

Ann Frédérique Belle



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 03/01/2019
Date de l'import : 09/03/2020

Fonds documentaire ?: juridat.be


Numérotation
Numéro d'arrêt : C.18.0175.F
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2019-01-03;c.18.0175.f ?

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