La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/10/2018 | BELGIQUE | N°P.18.0599.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 octobre 2018, P.18.0599.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.18.0599.N
G. M.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Ben Leyman, avocat au barreau d'Audenaerde.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 avril 2018 par le tribunal correctionnel de Flandre orientale, division Audenarde, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général Marc Timperman a conclu.
r>

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le moyen pris dans son ensemble :

1. Le moyen, en sa première branc...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.18.0599.N
G. M.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Ben Leyman, avocat au barreau d'Audenaerde.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 avril 2018 par le tribunal correctionnel de Flandre orientale, division Audenarde, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général Marc Timperman a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le moyen pris dans son ensemble :

1. Le moyen, en sa première branche, est pris de la violation des articles 203 et 204 du Code d'instruction criminelle : à tort, le jugement attaqué ne déclare pas le ministère public déchu de son appel ; le ministère public a certes indiqué ses griefs avec précision, mais il a omis de déposer l'acte d'appel contenant les griefs au greffe en temps utile, à savoir dans le délai de trente jours prévu à l'article 203 du Code d'instruction criminelle ; il n'apparaît pas que l'acte d'appel du ministère public a été déposé au greffe dans le délai imparti.

Le moyen, en sa seconde branche, est pris de la violation de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : par la considération que le ministère public n'est pas tenu de déposer son acte d'appel dans le délai prévu à l'article 203, § 1er, du Code d'instruction criminelle, le jugement attaqué viole les droits de défense du demandeur ; le ministère public doit être traité de la même manière que les autres parties.

2. L'article 203, § 1er, alinéa 1er, du Code d'instruction criminelle prévoit que, sauf dans le cas prévu à l'article 205 du Code d'instruction criminelle, il y a déchéance de l'appel si la déclaration d'appeler n'a pas été faite au greffe du tribunal qui a rendu le jugement, trente jours au plus tard après celui où il a été prononcé dans le cas d'un jugement contradictoire.

Selon l'article 204 du Code d'instruction criminelle :
- à peine de déchéance de l'appel, la requête indique précisément les griefs élevés contre le jugement et est remise, dans le même délai et au même greffe que la déclaration visée à l'article 203 dudit code ;
- cette requête peut aussi être remise directement au greffe de la juridiction d'appel ;
- ces dispositions s'appliquent également au ministère public.
Suivant l'article 205 du Code d'instruction criminelle, le ministère public près la juridiction d'appel doit, à peine de déchéance, notifier son recours au prévenu dans les quarante jours à compter du prononcé du jugement.

3. Il résulte du texte de ces dispositions, de leurs travaux préparatoires, de leurs objectifs et de leur lien réciproque que si les griefs élevés par le ministère public près la juridiction d'appel figurent dans l'exploit par lequel il notifie son appel au prévenu, l'obligation de communiquer les griefs en temps utile est remplie si l'exploit mentionnant les griefs est notifié dans les quarante jours suivant celui du jugement entrepris et déposé, dans le même délai, au greffe de la juridiction d'appel et ce, à peine de déchéance de l'appel.

4. La circonstance que le ministère public près la juridiction d'appel dispose d'un délai de quarante jours pour déposer l'exploit de notification mentionnant les griefs, alors que le prévenu ne dispose que d'un délai de trente jours, n'est pas contraire à l'article 6 de la Convention. En effet :
- il existe une différence fondamentale entre le ministère public et les autres parties au procès pénal, qui repose sur un critère objectif : le ministère public accomplit des missions de service public, dans l'intérêt de la collectivité, en ce qui concerne la recherche et la poursuite des infractions, et il requiert l'application de la loi pénale, alors que les autres parties au procès défendent leur intérêt personnel ;
- cette différence objective se retrouve tout au long de la procédure pénale ;
- durant la phase de l'action publique qui se déroule devant les juridictions de jugement, il faut également tenir compte du droit à un procès équitable et particulièrement du principe de l'égalité des armes, mais l'étendue de leur portée n'est pas telle qu'elle puisse faire obstacle à toute différence de traitement entre le ministère public et le prévenu ;
- la circonstance que le ministère public près la juridiction d'appel dispose d'un délai plus long que le délai imparti aux autres parties se justifie par l'effet dévolutif de l'appel et par le fait que le ministère public près la juridiction d'appel doit faire notifier son appel par exploit d'huissier de justice et que les autres parties peuvent attendre le dernier jour utile du délai de trente jours pour interjeter appel par simple déclaration.

5. N'est pas légalement justifié le jugement attaqué qui considère qu'il peut statuer sur l'appel que le ministère public près la juridiction d'appel a interjeté par exploit d'huissier de justice, et ce, dans les limites des griefs mentionnés audit exploit, sans toutefois vérifier si ce dernier a été déposé au greffe de la juridiction d'appel en temps utile, à savoir dans le délai susmentionné de quarante jours suivant celui du jugement entrepris.

Dans cette mesure, le moyen est fondé.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse le jugement attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;
Réserve les frais afin qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge de renvoi ;
Renvoie la cause au tribunal correctionnel de Flandre occidentale, siégeant en degré d'appel.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch, Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-huit par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général Henri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier délégué Véronique Kosynsky.

Traduction établie sous le contrôle du président de section Benoît Dejemeppe et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.18.0599.N
Date de la décision : 23/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-10-23;p.18.0599.n ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award