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18/10/2018 | BELGIQUE | N°C.17.0506.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 octobre 2018, C.17.0506.F


N° C.17.0506.F
AXA BELGIUM, société anonyme, dont le siège social est établi à Bruxelles, place du Trône, 1,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,

contre

COMMUNAUTÉ FRANÇAISE DE BELGIQUE, représentée par son gouvernement, en la personne du ministre-président, dont le cabinet est établi à Bruxelles, place Surlet de Chokier, 15-17,
défenderesse en cassation,
représentée par

Maître Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, av...

N° C.17.0506.F
AXA BELGIUM, société anonyme, dont le siège social est établi à Bruxelles, place du Trône, 1,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,

contre

COMMUNAUTÉ FRANÇAISE DE BELGIQUE, représentée par son gouvernement, en la personne du ministre-président, dont le cabinet est établi à Bruxelles, place Surlet de Chokier, 15-17,
défenderesse en cassation,
représentée par Maître Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,

en présence de

ÉTAT BELGE, représenté par le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, dont le cabinet est établi à Bruxelles, boulevard du Jardin botanique, 50/175,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 31 mars 2017 par le tribunal de première instance francophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le 2 octobre 2018, l'avocat général Thierry Werquin a déposé des conclusions au greffe.
Le président de section Christian Storck a fait rapport et l'avocat général Thierry Werquin a été entendu en ses conclusions.

II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, celui qui, par sa faute, cause à autrui un dommage est tenu de le réparer intégralement, ce qui implique que le préjudicié soit rétabli dans l'état où il serait demeuré si l'acte dont il se plaint n'avait pas été commis.
L'employeur public qui, ensuite de la faute d'un tiers, doit, en vertu de ses obligations légales ou réglementaires, continuer à payer à l'un de ses agents sa rémunération et les charges qui la grèvent sans recevoir de prestations de travail en contrepartie a droit à une indemnité dans la mesure où il subit ainsi un dommage, sauf s'il résulte de la loi ou du règlement que ces décaissements doivent rester définitivement à sa charge.
Le droit de l'employeur à la réparation de ce dommage n'est pas limité au montant de l'indemnité qui serait due en droit commun à la victime du fait de l'incapacité de travail.
L'employeur qui en réclame la réparation doit prouver qu'il restait tenu de payer sa rémunération à la victime pendant une période où elle était, par la faute du tiers, dans l'incapacité de travailler.
Cette preuve peut être apportée par toutes voies de droit.
Il ressort de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en faveur des membres du personnel du secteur public, des dommages résultant des accidents du travail ou des accidents sur le chemin du travail, d'une part, que le service de santé administratif se prononce sur l'application de cette loi à l'agent victime d'un accident ainsi que sur le taux et la durée de l'incapacité de travail qui en résulte, d'autre part, que les décisions de ce service lient l'employeur public et, sous réserve du recours dont il dispose, l'agent victime de l'accident.
Dans le litige entre l'employeur réclamant la réparation de son dommage propre et le responsable de l'accident ou son assureur, ces décisions ne valent qu'à titre de présomptions de l'homme.
Il en résulte que l'employeur public satisfait à la preuve qui lui incombe en se prévalant des décisions du service de santé administratif, à moins que le tiers responsable ou son assureur rapporte la preuve contraire par toutes voies de droit, le cas échéant sur la base d'une expertise que le juge a le pouvoir d'ordonner.
Le jugement attaqué, qui constate que le litige est relatif à un accident de la circulation subi sur le chemin du travail par un agent de la défenderesse et dont la responsabilité incombe à un assuré de la demanderesse, considère que le tribunal est en présence, s'agissant des conséquences de cet accident sur la capacité de travail de la victime, d'un rapport du service de santé administratif et d'un rapport d'expertise amiable établi en droit commun entre la demanderesse et la victime « dont les conclusions diffèrent » et que « les éléments qui lui sont soumis sont insuffisants pour [...] évaluer l'adéquation des conclusions du Medex en vue de déterminer le dommage propre dont la [défenderesse] peut demander réparation [et] pour [...] déterminer si [la demanderesse] est fondée à le contester ».
En considérant que « les faits litigieux sont relatifs [...] à la seule incapacité de travail de [la victime] déterminée conformément aux dispositions de la loi du 3 juillet 1967 et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 » et qu'« une mesure d'expertise n'a d'utilité que pour déterminer si cette incapacité a été correctement évaluée et a pu être à l'origine de l'absence de prestations de travail de [la victime] alors que sa rémunération lui a été payée en son absence par la [défenderesse] », le jugement attaqué justifie légalement sa décision de charger l'expert de déterminer l'incapacité de travail de la victime sur la base des critères de ces dispositions légales et réglementaires.
Le moyen ne peut être accueilli.
Le rejet du pourvoi prive d'intérêt la demande en déclaration d'arrêt commun.
Et il se justifie de condamner la demanderesse aux dépens de cette demande.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi et la demande en déclaration d'arrêt commun ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de cinq cent quatre-vingt-huit euros quarante centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du Fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne, et, pour la demande en déclaration d'arrêt commun, à la somme de cent nonante-cinq euros quarante-huit centimes envers la partie défenderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Didier Batselé, Mireille Delange, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononcé en audience publique du dix-huit octobre deux mille dix-huit par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Thierry Werquin, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont S. Geubel M.-Cl. Ernotte
M. Delange D. Batselé Chr. Storck


Requête
1er feuillet

REQUETE EN CASSATION
________________________

Pour : la S.A. AXA BELGIUM, inscrite à la BCE sous le n° 0404.483.367,
dont le siège social est établi à 1000 Bruxelles, place du Trône, 1,

demanderesse,

assistée et représentée par Me Jacqueline Oosterbosch, avocate à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à 4020 Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile,

Contre : la COMMUNAUTE FRANCAISE, représentée par son Gouvernement, en
la personne de son Ministre-Président, dont les bureaux sont établis à 1000
Bruxelles, place Surlet de Chokier, 15-17,

défenderesse.

A Messieurs les Premier Président et Présidents, Mesdames et Messieurs les Conseillers composant la Cour de cassation,

Messieurs, Mesdames,

La demanderesse a l'honneur de déférer à votre censure le jugement rendu contradictoirement le 31 mars 2017 par la septante-cinquième chambre civile du tribunal de première instance francophone de Bruxelles statuant en degré d'appel (R.G. n° 2013/15742/A).
2ème feuillet

Les faits et antécédents de la cause, tels qu'ils ressortent des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard, peuvent être ainsi brièvement résumés.

Mme S. G. était enseignante à l'athénée royal de W., lequel est subventionné par la défenderesse lorsque, le 21 mai 2007, elle a été victime d'un accident de roulage sur le chemin du travail. La responsabilité d'un assuré de la demanderesse n'est pas contestée.

Mme G. et la demanderesse sont convenues d'une expertise amiable en droit commun dont les conclusions ont été déposées le 14 janvier 2009.

Ce rapport retient les périodes d'incapacité temporaires suivantes :
- 100% du 22 mai 2007 au 30 juin 2007;
- 50% du 1er juillet 2007 au 31 juillet 2007;
- 25% du 1er août 2007 au 31 août 2007.

La consolidation est fixée le 1er janvier 2008 avec 1% d'incapacité permanente.

Les conclusions du Medex sont datées du 4 mars 2011. Il retient, comme absences imputables à l'accident, une incapacité totale du 22 mai 2007au 27 avril 2009 et une incapacité partielle à 50% du 28 avril 2009 au 30 juin 2009, consolidant le cas le 9 février 2011 avec une incapacité permanente de travail de 3%.

Le 2 mai 2011, la défenderesse a mis en demeure la demanderesse de lui payer la somme de 20.576,45 euro correspondant à la rémunération brute de Mme G. du 22 mai 2007 au 27 avril 2009 et à la moitié de cette rémunération du 28 avril 2009 au 30 juin 2009.

3ème feuillet

Le 9 juin 2011, la demanderesse a versé la somme de 2.239,77 euro , indiquant que ce montant correspondait au dommage de Mme G. établi en droit commun conformément au rapport d'expertise amiable.

Le 9 mai 2012, la défenderesse a assigné la demanderesse et l'Etat belge. Elle sollicitait à titre principal la condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de 20.576,45 euro en principal. Subsidiairement, elle demandait la désignation d'un expert ainsi que la condamnation de l'Etat belge à la garantir pour le cas où une "surévaluation" du Medex l'aurait amenée à payer à Mme G. une rémunération sans recevoir de prestations correspondantes de la part de son agent et ce sans justification.

Par jugement du 10 septembre 2013, la troisième chambre civile du tribunal de police de Bruxelles a décidé que la demande en déclaration de jugement commun dirigée par la défenderesse contre l'Etat belge (et basée sur une éventuelle faute du Medex qui aurait surévalué le dommage de Mme G.) était recevable. Le tribunal décide par ailleurs que la défenderesse ne dispose pas d'un recours fondé sur l'article 1382 du Code civil mais du recours subrogatoire prévu par l'article 14, § 3, de la loi du 3 juillet 1967. Il décide aussi que le rapport du Medex n'est pas opposable à la demanderesse et que le rapport de l'expert amiable n'est pas davantage opposable à la défenderesse et désigne un expert chargé notamment de déterminer les périodes d'incapacité temporaire, la date de la consolidation et le taux de l'incapacité permanente.

L'Etat belge a interjeté appel le 26 décembre 2013.

Par un premier jugement rendu le 7 octobre 2016, la septante-cinquième chambre civile du tribunal de première instance francophone de Bruxelles a ordonné une réouverture des débats à la suite d'un débat qui n'avait porté que sur la recevabilité de la demande dirigée par la défenderesse contre l'Etat belge.

Par le jugement attaqué, le tribunal de première instance constate que la défenderesse renonce à sa demande en garantie envers l'Etat belge mais maintient sa demande en déclaration de jugement commun, que l'appel principal de l'Etat belge tend, à titre principal, à
4ème feuillet

entendre déclarer la demande de déclaration de jugement commun irrecevable ou à tout le moins non fondée et, à titre subsidiaire, à entendre désigner un collège d'experts chargés de dire si le Medex s'est comporté en un expert-médecin prudent et diligent. Le tribunal constate que la défenderesse forme un appel incident visant à réformer la décision entreprise en ce qu'elle a dit pour droit que sa demande principale ne devait être accueillie que sur la base de la subrogation prévue par l'article 14, § 3, de la loi du 3 juillet 1967 et non sur la base de l'article 1382 du Code civil, tandis que la demanderesse forme également un appel incident tendant à entendre déclarer la demande de la défenderesse non fondée et, à titre subsidiaire, entendre confirmer la décision entreprise.

Statuant sur l'action de la défenderesse contre la demanderesse, il réforme le jugement entrepris en tant qu'il avait considéré que la défenderesse ne bénéficiait que d'un recours subrogatoire et dit pour droit qu'elle est fondée à invoquer l'article 1382 du Code civil.

Pour le surplus, il réforme le jugement concernant l'identité de l'expert désigné et la mission d'expertise confiée et désigne en qualité d'expert le Dr Nathalie avec pour mission, notamment, de :
"dire si les lésions encourues (par Mme S. G.) sont en relation causale avec les faits survenus le 21 mai 2007" et de "déterminer les périodes et les taux d'incapacité temporaire et la date de consolidation des lésions de (celle-ci) dans l'accident du 21 mai 2007, conformément aux dispositions et critères de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention et la réparation des dommages résultant des accidents du travail, les accidents survenus sur le chemin du travail et les maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en 2007, (...) des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en faveur de membres du personnel du secteur public, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail; de dire si au cours des périodes d'incapacité temporaire qu'il
déterminera le cas échéant, conformément aux dispositions précitées, Mme G. était en mesure de reprendre le travail à 50% et conformément aux mêmes dispositions; de dire si un autre accident que celui du 21 mai 2007 est intervenu dans la détermination de l'incapacité de Mme G. et la date de consolidation de ses lésions, selon les législations dont question ci-dessus et, le cas échéant, déterminer son degré de participation dans ces incapacités".
5ème feuillet

Un jugement rectificatif du 28 avril 2007 rectifie les coordonnées de l'expert.

A l'encontre du jugement rendu le 31 mars 2017, la demanderesse invoque le moyen de cassation suivant.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Dispositions légales violées

- l'article 1382 et 1383 du Code civil.

Décision critiquée

Après avoir constaté que :
"Les régimes d'évaluation des dommages en droit commun de la responsabilité civile ou dans le cadre d'un accident sur le chemin du travail (ci-après «en loi») présentent des différences :
* Chacun des médecins intervenants se base, pour évaluer les séquelles, sur
une législation distincte : la loi du 10 avril 1971 relative aux accidents du
travail ci-après «la loi du 10 avril 1971») pour le dommage en loi et
l'article 1382 du Code civil pour le dommage en droit commun. ll n'y a pas
d'interférence nécessaire entre les deux évaluations (...).
Il se peut ainsi que les dates de consolidation en droit commun et en loi
soient différentes, selon les conclusions des experts respectifs (...).
* En droit commun, il appartient à la victime de prouver l'imputation
d'une lésion à l'accident (selon les règles classiques de preuve) tandis
6ème feuillet

qu'en loi, l'article 9 de la loi du 10 avril 1971 dispose que «lorsque la
victime ou ses ayants droit établissent, outre l'existence d'une lésion,
celle d'un événement soudain, la lésion est présumée, jusqu'à preuve du
contraire, trouver son origine dans un accident» créant de la sorte une
véritable présomption légale de causalité.
* En droit commun, le dommage est réparé intégralement et in concreto tandis
qu'en loi, il est évalué de manière forfaitaire, ce qui se traduit de la manière
suivante :
o L'indemnisation ne couvre que la perte de rémunération résultant de
la réduction de capacité à exercer un travail ;
o l'indemnisation est fixée en fonction de critères prédéterminés : la
perte de rémunération (en incapacité temporaire) et la perte de
capacité concurrentielle sur le marché du travail (en incapacité
permanente);
o pour comparer la situation avant et après l'accident, la capacité
concurrentielle sur le marché du travail qui existait au moment de
l'accident est exprimée par le montant de la rémunération perçue à
cette date ;
o en période d'incapacité permanente, l'indemnisation est accordée sans
examen de la perte réelle de rémunération : le fait que cette perte soit
plus ou moins élevée par rapport à l'indemnisation forfaitaire est
sans incidence ;
o la base de calcul - c'est-à-dire la rémunération - est plafonnée (...).
En revanche, en droit commun, si le dommage résultant de l'incapacité de
travail est lui aussi couvert, il en va de même d'autres dommages comme le
dommage moral résultant de l'invalidité, cette dernière notion étant inconnue
en loi.
* En loi, l'existence d'un état antérieur, dans le cadre du système
forfaitaire mis en place, entraîne une évaluation globale du dommage
sans tenir compte de cet état (...) alors que ce n'est pas nécessairement le

7ème feuillet

cas en droit commun si le responsable démontre que le préjudice se serait
produit tel qu'il s'est réalisé, en raison de cet état, mais sans la faute
(...)".

Le jugement attaqué "réforme le jugement entrepris concernant (...) la mission d'expertise qui lui a été confiée et statuant par voie de dispositions nouvelles quant à ce (...) lui donne la mission (...) de :
- examiner Mme S.G. et décrire les blessures encourues ensuite de l'accident du 21 mai 2007, de même que les traitements médicaux administrés et dire si les lésions encourues sont en relation causale avec les faits survenus le 21 mai 2007;
- déterminer les périodes et les taux d'incapacité temporaire et la date de consolidation des lésions de (Mme S.G.) suite à l'accident du 21 mai 2007, conformément aux dispositions et critères de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en 2007, conformément aux dispositions et critères de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en faveur de membres du personnel du secteur public, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail ",

aux motifs que :
"Comme le relèvent subsidiairement mais à juste titre l'ETAT BELGE et (la défenderesse), la mesure d'expertise décidée par le premier Juge est libellée conformément au droit commun de l'indemnisation du dommage corporel. Elle comprend à ce titre l'examen de différents postes de ce type de dommage tels que le préjudice esthétique, le préjudice ménager ou encore la nécessité de porter des prothèses pour Mme G.
Il n'est pas tenu compte dans cette mission d'expertise des spécificités propres à l'indemnisation des accidents du travail ou sur le chemin du travail dans le secteur public telles que relevées ci-avant au jugement.

8ème feuillet

(...)
Il ressort des éléments de la cause qu'en l'espèce, les faits litigieux sont relatifs à une période s'étendant du 22 mai 2007 au 30 juin 2009 et à la seule incapacité de travail de Mme G. déterminée conformément aux dispositions de la loi du 3 juillet 1967 et de l'arrêté-royal du 24 janvier 1969, précités.
Une mesure d'expertise n'a d'utilité dans le cadre du présent litige que pour déterminer si cette incapacité a été correctement évaluée et a pu être l'origine de l'absence de prestations de travail de la part de Mme G. en contrepartie de la rémunération qui lui a été versée pendant la période précitée par la (défenderesse).
Partant, il y a lieu de modifier, comme il sera dit au dispositif du présent jugement, la mission d'expertise décidée par le premier Juge en tenant compte des spécificités des réglementations dont question ci-dessus et de son utilité pour solutionner le présent litige.
Par ailleurs, par identité de motifs, il y a lieu de désigner un expert-médecin spécialisé dans le cadre de l'évaluation du dommage «en loi»".

Griefs

En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil, celui qui, par sa faute, cause un dommage à autrui est tenu de réparer intégralement ce dommage, ce qui implique le rétablissement du préjudicié dans l'état où il serait demeuré si l'acte dont il se plaint n'avait pas été commis.

L'employeur public qui, ensuite de la faute d'un tiers, doit continuer à payer à l'un de ses agents la rémunération et les charges grevant la rémunération en vertu d'obligations légales ou réglementaires qui lui incombent, sans recevoir de prestations de travail en contrepartie, a droit à une indemnité dans la mesure où il subit ainsi un dommage.

9ème feuillet

Cet employeur doit prouver le lien de causalité existant entre son dommage et la faute du tiers. Il doit, dès lors, prouver non seulement le montant des rémunérations et des charges qu'il a déboursées, mais aussi qu'elles ont été payées durant une période où, par le fait du tiers, son agent était incapable de travailler alors qu'il restait tenu de les lui payer.

Dans l'interprétation selon laquelle le dommage indemnisable, au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil, est limité aux paiements opérés sans la contrepartie normale de prestations de travail, cette limitation est fondée sur un critère de distinction objectif et pertinent. Lorsque l'employeur public assume, en outre, des prestations relevant d'un régime de sécurité sociale, les dépenses liées à de telles prestations dépassent ce que l'employeur est en droit d'attendre de son agent en raison de l'exécution normale de la relation de travail.

Le dommage propre indemnisable de l'employeur public que le responsable d'un accident de la circulation est tenu de réparer est celui résultant de la rémunération payée pendant les incapacités de travail qui sont en relation causale - au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil - avec la faute et non le surplus du dommage résultant des prestations qui incombent à cet employeur en raison des dispositions d'un régime de sécurité sociale.

Il s'en déduit que l'incapacité de la victime de l'accident - qu'il soit ou non survenu sur le chemin du travail - de nature à priver l'employeur des prestations de travail doit être déterminée au regard du droit commun des articles 1382 et 1383 du Code civil et non au regard des dispositions particulières du régime de sécurité sociale de la protection contre les accidents du travail ou sur le chemin du travail, telles celles relatives à la présomption d'accident du travail, la prise en compte d'un accident antérieur ou même d'un accident postérieur.

En chargeant l'expert désigné de "déterminer les périodes et les taux d'incapacité temporaire et la date de consolidation des lésions de (Mme S.G.) suite à l'accident du 21 mai 2007, conformément aux dispositions et critères de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24

10ème et dernier feuillet

janvier 1969 relatif à la réparation, en 2007, conformément aux dispositions et critères de la loi du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public et de l'arrêté royal du 24 janvier 1969 relatif à la réparation, en faveur de membres du personnel du secteur public, des dommages résultant des accidents du travail et des accidents survenus sur le chemin du travail ", le jugement attaqué viole les articles 1382 et 1383 du Code civil en ce qu'il décide que le dommage subi par la défenderesse, au sens de ces dispositions, doit être déterminé au regard de dispositions légales et réglementaires dérogatoires au droit commun de la responsabilité extracontractuelle telle que régie par les articles 1382 et 1383 du Code civil.

PAR CES CONSIDERATIONS,

l'avocate à la Cour de cassation soussignée, pour la demanderesse, conclut qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, casser le jugement attaqué; ordonner que mention de votre arrêt soit faite en marge de la décision annulée; renvoyer la cause et les parties devant un autre tribunal de première instance siégeant en degré d'appel; statuer comme de droit quant aux dépens;

Jacqueline Oosterbosch

Le 15 septembre 2017


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.17.0506.F
Date de la décision : 18/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-10-18;c.17.0506.f ?

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