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10/10/2018 | BELGIQUE | N°P.18.0751.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 octobre 2018, P.18.0751.F


N° P.18.0751.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE MONS,
demandeur en cassation,

contre

G. I., P.,
prévenu,
défendeur en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 13 juin 2018 par la cour d'appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LES ANTÉCÉDENT

S

Les juges d'appel ont réformé la décision du tribunal correctionnel d'acquitter le défendeur du chef d&a...

N° P.18.0751.F
LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE MONS,
demandeur en cassation,

contre

G. I., P.,
prévenu,
défendeur en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 13 juin 2018 par la cour d'appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LES ANTÉCÉDENTS

Les juges d'appel ont réformé la décision du tribunal correctionnel d'acquitter le défendeur du chef d'abus de biens sociaux, déclaré cette infraction établie et décidé que la suspension simple du prononcé de la condamnation, ordonnée par le premier juge en faveur du défendeur pour d'autres faits, s'appliquait également à l'infraction d'abus de biens sociaux. La cour d'appel a partiellement fait droit aux réquisitions du ministère public tendant à prononcer à charge du défendeur la confiscation de l'équivalent des avantages patrimoniaux tirés directement de cette infraction, en ayant réduit le montant demandé à 50.000 euros.

L'arrêt considère que la durée des poursuites exercées à l'égard du défendeur a dépassé le délai raisonnable et que c'est à juste titre que ce dernier a soutenu que le délai était également dépassé en ce qui concerne la demande de confiscation. L'arrêt considère en outre que le juge qui a fait ce constat peut toujours prononcer une peine complémentaire de confiscation, à condition de vérifier qu'une telle peine ne constitue pas pour le condamné une atteinte disproportionnée au droit de propriété. En conséquence, l'arrêt décide que « le dépassement du délai raisonnable, lequel a pour conséquence de creuser une distance chronologique injustifiée entre la date de la connaissance par le prévenu des accusations portées contre lui et le moment où les faits établis à sa charge font l'objet de sanctions, conduit la cour [d'appel] à faire bénéficier [le défendeur] d'une application plus modérée de la loi pénale, laquelle restera proportionnée par rapport au but légitime poursuivi, sous peine de pouvoir être vue comme constitutive d'une mort civile prohibée par l'article 18 de la Constitution ».

III. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le moyen :

Le moyen soutient que la décision des juges d'appel de réduire le montant de la confiscation n'est pas suffisamment motivée, ni légalement justifiée : dès lors qu'il résulte de l'article 21ter du titre préliminaire du Code de procédure pénale que le constat du dépassement du délai raisonnable doit rester sans effet sur le montant de la confiscation, la seule référence à la « distance chronologique » séparant la connaissance de l'accusation et la condamnation ne suffit pas à rendre compte de la réalité de l'atteinte trop importante que, selon les juges d'appel, la confiscation demandée aurait portée au patrimoine du défendeur.

En vertu de l'article 21ter, alinéa 2, du titre préliminaire du Code de procédure pénale, si le juge prononce la condamnation par simple déclaration de culpabilité, l'inculpé est condamné aux frais et, s'il y a lieu, aux restitutions, et la confiscation spéciale est prononcée.

L'arrêt attaqué ne prononce pas la simple déclaration de culpabilité du défendeur, mais ordonne à son égard la suspension simple du prononcé de la condamnation pendant trois ans.

Dans la mesure où il est fondé sur l'article 21ter, alinéa 2, précité, que les juges d'appel, en raison de leur décision, ne devaient pas appliquer, le moyen manque en droit.

Lorsque le juge constate le dépassement du délai raisonnable dans lequel l'action publique doit être jugée, il peut soit prononcer la condamnation par simple déclaration de culpabilité, soit infliger une peine inférieure à la peine minimale prévue par la loi, conformément à l'article 21ter, alinéa 1er, soit prononcer une peine prévue par la loi qui est réellement et sensiblement inférieure à celle qu'il aurait infligée si la durée des poursuites n'avait pas été déraisonnable.

Il résulte de ce qui précède que le juge qui ordonne la suspension du prononcé de la condamnation en faveur d'un prévenu et qui, en outre, le condamne à la confiscation spéciale d'un avantage patrimonial tiré directement d'une infraction, peut, lorsqu'il constate le dépassement du délai raisonnable, sanctionner l'inobservation de cette garantie procédurale en infligeant une peine de confiscation dont le montant est inférieur à celui qu'il aurait fixé si la durée des poursuites n'avait pas été déraisonnable.

Les juges d'appel ayant légalement décidé de réduire le montant de la confiscation demandée par le ministère public, le surplus du moyen, qui critique l'appréciation des juges d'appel relativement à l'importance des effets de cette peine sur le patrimoine du défendeur, est irrecevable à défaut d'intérêt.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Laisse les frais à charge de l'Etat.
Lesdits frais taxés à la somme de cent nonante et un euros quarante centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du dix octobre deux mille dix-huit par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
F. Gobert F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.18.0751.F
Date de la décision : 10/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-10-10;p.18.0751.f ?

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