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08/10/2018 | BELGIQUE | N°S.14.0006.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 08 octobre 2018, S.14.0006.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
I
N° S.14.0006.N
1. HUNTSMAN ADVANCED MATERIAL (EUROPE), sprl,
2. HUNTSMAN INTERNATIONAL LLC, société de droit américain,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,

contre

M. A.,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation.




II
N° S.14.0059.N
M. A.,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. HUNTSMAN ADVANCED MATERIAL (EUROPE), sprl,
2. HUNTSMAN INTERNATIONAL LLC, société de droit américain,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de ca

ssation.

I. La procédure devant la Cour
Les pourvois en cassation sont dirigés contre l'arrêt interlocutoire rendu le 3 avril 20...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
I
N° S.14.0006.N
1. HUNTSMAN ADVANCED MATERIAL (EUROPE), sprl,
2. HUNTSMAN INTERNATIONAL LLC, société de droit américain,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation,

contre

M. A.,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation.

II
N° S.14.0059.N
M. A.,
Me Willy van Eeckhoutte, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. HUNTSMAN ADVANCED MATERIAL (EUROPE), sprl,
2. HUNTSMAN INTERNATIONAL LLC, société de droit américain,
Me Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation.

I. La procédure devant la Cour
Les pourvois en cassation sont dirigés contre l'arrêt interlocutoire rendu le 3 avril 2012 par la cour du travail de Bruxelles. Le pourvoi I est également dirigé contre l'arrêt définitif rendu le 26 mars 2013 par la cour du travail de Bruxelles.
Le 14 septembre 2018, l'avocat général Henri Vanderlinden a déposé des conclusions dans les deux causes.
Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.
L'avocat général Henri Vanderlinden a conclu.

II. Les moyens de cassation
À l'appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.14.0006.N, les demanderesses présentent cinq moyens dans la requête en cassation jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.
À l'appui du pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.14.0059.N, le demandeur présente un moyen dans la requête en cassation jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.
III. La décision de la Cour

(...)

B. Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.14.0006.N

Sur le premier moyen :

2. L'article 31, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 24 juillet 1987 sur le travail temporaire, le travail intérimaire et la mise de travailleurs à la disposition d'utilisateurs, dans la version applicable au litige, dispose qu'est interdite l'activité exercée, en dehors des règles fixées aux chapitres Ier et II, par une personne physique ou morale qui consiste à mettre des travailleurs qu'elle a engagés à la disposition de tiers qui utilisent ces travailleurs et exercent sur ceux-ci une part quelconque de l'autorité appartenant normalement à l'employeur.
L'article 32, § 1er, alinéa 1er, de la même loi dispose que, par dérogation à l'article 31, un employeur peut, en dehors de son ou de ses activités normales, mettre ses travailleurs permanents pour une durée limitée à la disposition d'un utilisateur s'il a reçu au préalable l'autorisation du fonctionnaire désigné par le Roi.
En ses alinéas 2 et 3, l'article 32, §1er, précité, dispose que l'autorisation préalable visée à l'alinéa 1er n'est toutefois pas requise lorsqu'un travailleur permanent, qui reste lié avec son employeur par son contrat de travail initial, est mis exceptionnellement à la disposition d'un utilisateur : a) dans le cadre de la collaboration entre entreprises d'une même entité économique et financière ; b) en vue de l'exécution momentanée de tâches spécialisées requérant une qualification professionnelle particulière. Dans ces cas, l'utilisateur en avise au moins 24 heures à l'avance le fonctionnaire désigné par le Roi.
Suivant l'article 32, § 2, de ladite loi, les conditions et la durée de la période de mise à la disposition visées au paragraphe 1er doivent être constatées par un écrit signé par l'employeur, l'utilisateur et le travailleur. Cet écrit doit être rédigé avant le début de la mise à la disposition. L'accord écrit du travailleur n'est toutefois pas requis lorsque le consentement tacite est d'usage dans la branche d'industrie qui occupe le travailleur.
3. Il ressort de son libellé que l'article 32 précité instaure une dérogation à l'interdiction énoncée à l'article 31.
Il suit du non-respect des dispositions de l'article 32, §§ 1er et 2, de la loi du 24 juillet 1987 relatives à l'autorisation ou à l'avertissement préalable du fonctionnaire désigné par le Roi et à la constatation préalable par écrit de la convention tripartite que les conditions d'application de la dérogation instaurée par cet article à l'interdiction énoncée à l'article 31, § 1er, ne sont pas remplies, de sorte que cette interdiction reste intégralement applicable.
4. Dans la mesure où il suppose que le non-respect des dispositions dudit article 32, §§ 1er et 2, ne fait pas obstacle à l'application de l'article 32 et que l'interdiction énoncée à l'article 31, § 1er, alinéa 1er, ne vaut pas lorsqu'un travailleur permanent, qui reste lié à son employeur par son contrat de travail initial, est exceptionnellement mis à la disposition d'un utilisateur dans le cadre d'une collaboration entre des entreprises d'une même entité économique et financière, le moyen repose sur un soutènement inexact.
Dans cette mesure, le moyen manque en droit.
5. En vertu de l'article 31, § 2, de la loi du 24 juillet 1987, le contrat par lequel un travailleur a été engagé pour être mis à la disposition d'un utilisateur en violation de la disposition du paragraphe 1er est nul à partir du début de l'exécution du travail.
La sanction de la nullité prévue par cette disposition ne vise que le contrat du travailleur qui est engagé en vue d'être mis à la disposition d'un utilisateur.
6. Aux termes de l'article 31, § 3, alinéa 1er, de cette même loi, lorsqu'un utilisateur fait exécuter des travaux par des travailleurs mis à sa disposition en violation de la disposition du paragraphe 1er, cet utilisateur et ces travailleurs sont considérés comme engagés dans les liens d'un contrat de travail à durée indéterminée dès le début de l'exécution des travaux.
Conformément à l'article 31, § 4, de la loi précitée, l'utilisateur et la personne qui met des travailleurs à la disposition de l'utilisateur en violation des dispositions du paragraphe 1er sont solidairement responsables du paiement des cotisations sociales, rémunérations, indemnités et avantages qui découlent du contrat visé au paragraphe 3.
Les conséquences juridiques ainsi prévues par l'article 31, §§ 3 et 4, s'appliquent chaque fois qu'un utilisateur, en violation des dispositions du paragraphe 1er, fait exécuter des travaux par un travailleur mis à sa disposition, que celui-ci ait ou non été engagé par son employeur initial aux fins de sa mise à disposition.
7. Dans la mesure où il est fondé sur la prémisse que les conséquences juridiques prévues par l'article 31, §§ 3 et 4, ne valent que lorsque le contrat de travail conclu avec l'employeur initial est nul par application de l'article 31, § 2, de sorte que le travailleur ne saurait être lié à la fois à son employeur initial et à un utilisateur, le moyen repose également sur un soutènement inexact et manque, dès lors, en droit.
8. Dans la mesure où il allègue la violation des articles 7 de la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles, 98 de la loi du 16 juillet 2004 portant le Code de droit international privé et 1er à 5 de la loi du 5 mars 2002 concernant les conditions de travail, de rémunération et d'emploi en cas de détachement de travailleurs en Belgique et le respect de celles-ci, qui transpose la directive 96/71/CE, le moyen est tout entier déduit de la violation vainement alléguée des articles 31 et 32 de la loi du 24 juillet 1987.
Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.

C. Sur le pourvoi inscrit au rôle général sous le numéro S.14.0059.N

Sur le moyen :

Quant à l'ensemble de la seconde branche :

28. La notion de « même employeur » au sens de l'article 82, § 2, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, encore applicable aux faits, vise l'unité économique d'exploitation que constitue l'entreprise, sans égard aux changements de direction ou à la modification de sa nature juridique.
29. La décision, non critiquée, des juges d'appel suivant laquelle le fait que la seconde défenderesse ait mis le demandeur à la disposition de la première défenderesse en violation des dispositions de l'article 31, § 1er, de la loi du 24 juillet 1987 a, par application de l'article 31, § 3, de cette même loi, donné naissance à un contrat de travail à durée indéterminée entre le demandeur et la première défenderesse, implique nécessairement que les deux défenderesses constituent des unités économiques d'exploitation différentes et exclut dès lors qu'elles puissent être considérées comme un même employeur au sens de l'article 82, § 2, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978, tel qu'il était applicable avant son abrogation par la loi du 26 décembre 2013.
Le moyen qui, en cette branche, repose tout entier sur le soutènement contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les pourvois inscrits au rôle général sous les numéros S.14.0006.N et S.14.0059.N ;
Statuant en la cause n° S.14.0006.N :
Casse l'arrêt attaqué du 26 mars 2013 en tant qu'il liquide à 22.000 euros l'indemnité de procédure de première instance incombant au défendeur ;
Rejette le pourvoi des demanderesses pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt du 26 mars 2013 partiellement cassé ;
Condamne les demanderesses aux neuf dixièmes des dépens et réserve le dixième restant pour qu'il soit statué sur celui-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail d'Anvers.
Statuant en la cause n° S.14.0059.N :
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, président, le président de section Alain Smetryns et les conseillers Koen Mestdagh, Mireille Delange et Antoine Lievens, et prononcé en audience publique du huit octobre deux mille dix-huit par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Henri Vanderlinden, avec l'assistance du greffier Mike Van Beneden.

Traduction établie sous le contrôle du conseiller Mireille Delange et transcrite avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.14.0006.N
Date de la décision : 08/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-10-08;s.14.0006.n ?

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