N° C.16.0483.F
VILLE DE NAMUR, représentée par son collège communal, dont les bureaux sont établis à Namur, Esplanade de l'hôtel de ville,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,
contre
1. P. M.,
2. I. X.,
3. M. T.,
4. G. A.,
5. PIMI, société privée à responsabilité limitée, dont le siège social est établi à Namur (Bouge), chaussée de Louvain, 333,
défendeurs en cassation,
en présence de
RÉGION WALLONNE, représentée par son gouvernement, en la personne du fonctionnaire délégué de la direction générale de l'aménagement du territoire, du logement, du patrimoine et de l'énergie du service public de Wallonie, faisant élection de domicile à Namur, place Léopold, 3,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun,
représentée par Maître Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, rue de la Vallée, 67, où il est fait élection de domicile.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2015 par la cour d'appel de Liège.
Le 15 mai 2018, l'avocat général Philippe de Koster a déposé des conclusions au greffe.
Le conseiller Didier Batselé a fait rapport et l'avocat général Michel Nolet de Brauwere a été entendu en ses conclusions.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.
III. La décision de la Cour
Sur le moyen :
Quant à la première branche :
Quant au premier rameau :
Après avoir rappelé que « la cour [d'appel] doit s'attacher à vérifier en particulier si la demande de réparation du fonctionnaire délégué n'est pas manifestement déraisonnable en fonction notamment de la nature de l'infraction, de l'étendue de l'atteinte portée au bon aménagement du territoire et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise des lieux en leur pristin état par rapport à la charge qu'elle implique pour le contrevenant », l'arrêt considère qu'il résulte des éléments qu'il cite que « la mesure demandée [...] est [...] parfaitement déraisonnable compte tenu de la nature de l'infraction, de l'étendue de la portée au bon aménagement du territoire et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise en état telle que postulée par rapport à la charge et aux inconvénients qui s'ensuivraient pour le contrevenant ».
Il suit manifestement de ces énonciations que l'utilisation des termes « l'étendue de la portée au bon aménagement du territoire » résulte d'une erreur matérielle, que, pour l'examen du moyen, il est au pouvoir de la Cour de rectifier, et que, par ces termes, l'arrêt veut dire « l'étendue de l'atteinte portée au bon aménagement du territoire ».
Quant au second rameau :
L'arrêt relève que « la demande de remise en état consiste en une remise en état pure et simple des lieux, soit par l'enlèvement de l'infrastructure litigieuse (empierrement du parking) et le réengazonnement de la parcelle sur toute sa superficie », que « cette demande se fondait au départ sur [la] base du PCA n° 3bis de Bouge qui classait la parcelle en zone parcs et jardins » et qu'« actuellement, le PCA a été abrogé et [que] seule la notion du bon aménagement est encore soutenue ».
Il considère qu'« il appert des débats et des pièces déposées que l'établissement est assorti d'une aire de stationnement en tarmac située à l'arrière du bâtiment et à laquelle on accède à partir de la chaussée de Louvain par une voie qui longe l'établissement », que « cette aire de stationnement constitue la parcelle cadastrée 121C et [que] sa régularité n'est pas contestée », qu'« au-delà de cette aire en tarmac, parcelle 121C, la parcelle 123D était engazonnée » et que « c'est cette parcelle qui a été transformée en parking complémentaire par un empierrement et qui est donc en prolongement avec la zone de stationnement en tarmac ».
Il considère également qu'« il résulte de ces constats que la mesure demandée est pour partie non fondée sur une infraction constatée (infraction au PCA n° 3bis) et est en outre parfaitement déraisonnable compte tenu de la nature de l'infraction, de l'étendue de [l'atteinte] portée au bon aménagement du territoire et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise en état telle que postulée par rapport à la charge et aux inconvénients qui s'ensuivraient pour le contrevenant ».
Par ces énonciations, l'arrêt répond, en leur opposant son appréciation des éléments de la cause, aux conclusions de la demanderesse et de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun visées au moyen, en ce rameau de cette branche.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la seconde branche :
En vertu de l'article 157, alinéa 1er, du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme et du patrimoine, applicable aux faits, le fonctionnaire délégué ou le collège communal peut poursuivre, devant le tribunal civil, notamment la remise en état des lieux.
Le pouvoir judiciaire est compétent pour contrôler la légalité externe et interne d'une telle demande et notamment pour examiner si elle est ou non entachée d'excès ou de détournement de pouvoir, sans qu'il puisse toutefois en apprécier l'opportunité.
Lorsque la légalité de la demande est contestée, le juge doit vérifier si elle n'est pas manifestement déraisonnable, en fonction notamment de la nature de l'infraction, de l'étendue de l'atteinte portée au bon aménagement du territoire et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise des lieux en leur pristin état par rapport à la charge qu'elle implique pour le contrevenant.
L'arrêt, qui, par les motifs reproduits en réponse au second rameau de la première branche du moyen, considère que la demande de remise en état postulée est déraisonnable, non seulement compte tenu « de l'étendue de [l'atteinte] portée au bon aménagement du territoire » mais aussi compte tenu « de la nature de l'infraction » et « de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise en état telle que postulée par rapport à la charge et aux inconvénients qui s'ensuivraient pour le contrevenant », n'était pas tenu, en outre, de constater qu'une mesure moins radicale permettrait également de rétablir un bon aménagement du territoire.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Et le rejet du pourvoi entraîne le rejet de la demande en déclaration d'arrêt commun.
Par ces motifs,
La Cour
Rejette le pourvoi et la demande en déclaration d'arrêt commun ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Les dépens taxés à la somme de huit cent quatre-vingt-cinq euros quinze centimes envers la partie demanderesse.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le conseiller faisant fonction de président Didier Batselé, les conseillers Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du premier juin deux mille dix-huit par le conseiller faisant fonction de président Didier Batselé, en présence de l'avocat général Michel Nolet de Brauwere, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont A. Jacquemin S. Geubel
M.-Cl. Ernotte M. Lemal D. Batselé
Requête
1er feuillet
00160093
REQUETE EN CASSATION
POUR : La VILLE DE NAMUR, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, à ce autorisé par son conseil communal dont les bureaux sont établis en son hôtel de ville, à 5000 Namur, Esplanade de l'hôtel de ville.
demanderesse en cassation,
assistée et représentée par Me Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation soussigné, dont le cabinet est établi à 1050-Bruxelles, avenue Louise, 149 (Bte 20), où il est fait élection de domicile.
CONTRE :
1. P. M.,
2. I. X.,
3. M. T. et
4. G. A.,
5. La SPRL PIMI, dont le siège social est établi à 5004 Bouge, chaussée de Louvain, 333, inscrite à la Banque Carrefour des Entreprises sous le numéro 0479.318.372,
défendeurs en cassation.
ET EN
PRESENCE
DE : La REGION WALLONNE, représentée par son Gouvernement, en la personne de Monsieur Marc Tournay, fonctionnaire-délégué de la Direction Générale de l'Aménagement du Territoire, du Logement et du Patrimoine, Service Public de Wallonie, ayant fait élection de domicilie à 5000 Namur, place Léopold, III,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun. 2ème feuillet
* *
*
A Messieurs les Premier Président et Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers composant la Cour de cassation de Belgique,
Messieurs,
Mesdames,
La demanderesse en cassation a l'honneur de déférer à votre censure l'arrêt rendu contradictoirement en la cause, le 4 décembre 2015, par la douzième chambre civile de la cour d'appel de Liège (RG nos 2013/RG/1676 et 2013/RG/1692).
Cet arrêt est intervenu dans le cadre d'une demande du fonctionnaire de la Région Wallonne tendant, par exploit du 22 octobre 2010, à la remise en état des lieux appartenant aux défendeurs en cassation sub.1 et 2 et loué aux défendeurs en cassation sub.3 à 5, ces derniers ayant, sans permis préalable et en contravention, avec le PCA n°3bis de Bouge, depuis lors abrogé, transformé une parcelle en gazon n°123D se trouvant en zone de cours et jardins, en un parking empierré pour plus de 10 véhicules.
Le tribunal de première instance de Namur devant lequel la demanderesse en cassation était intervenue volontairement afin de demander également la remise en état de la parcelle litigieuse avait, par jugement du 25 juin 2013, dit la demande de remise en état recevable et fondée.
L'arrêt attaqué statuant sur les appels introduits conjointement par les actuels défendeurs sub. 1 et 2 et par les actuels défendeurs sub.3 à 5, fait droit à ces appels et, tout en admettant la commission de l'infraction, déclare la demande de remise en état non fondée en raison du caractère parfaitement déraisonnable de cette demande.
Au soutien du pourvoi en cassation qu'elle a l'honneur de former contre cet arrêt, la demanderesse en cassation a l'honneur d'invoquer le moyen de cassation ci-après. 3ème feuillet
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
DISPOSITIONS LEGALES VIOLEES
- Articles 149 et 159 de la Constitution coordonnée,
- Article 155, spécialement § 1 et 2, et 157 du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, du patrimoine et de l'énergie du 14 mai 1984, ci-après CWATUPE, ces articles tels que modifiés par le décret wallon du 18 juillet 2002, dans leur version applicable tant avant qu'après leur modification par les décrets wallons des 24 mai 2007 et 30 avril 2009,
- Principe général du droit interdisant à une autorité administrative d'excéder ou de détourner ses pouvoirs consacré notamment par l'article 159 de la Constitution et l'article 14, § 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat et, pour autant que de besoin, violation dudit article 14, § 1er
- Principe général du droit prohibant l'abus de droit.
DECISIONS ET MOTIFS CRITIQUES
L'arrêt attaqué (p. 11) dit les appels fondés, dit non fondée la demande originaire du fonctionnaire délégué et condamne la Ville de Namur et le fonctionnaire délégué aux dépens des appelants.
L'arrêt fonde ces décisions sur les motifs suivants :
«1. L'article 154 du CWATUPE érige en infraction le fait d'exécuter, poursuivre, maintenir des travaux exécutés sans permis et ou en contrariété avec des plans ou règlements.
L'article 157 du CWATUPE permet au fonctionnaire et au Collège communal de poursuivre devant les juridictions civiles une mesure de réparation consistant soit en une remise en état des lieux, soit en l'exécution d'ouvrages ou de travaux d'aménagement, soit en le paiement d'une somme représentant en tout ou en partie la plus-value acquise par le bien à la suite de l'infraction.
L'article 158 § 4 du CWATUPE dispose que le procès-verbal du constat et la décision de confirmation sont notifiés au maître de l'ouvrage, à la personne ou l'entrepreneur qui exécute les travaux, ou à la personne qui fait usage du bâtiment.
2. Il résulte de cette dernière disposition que l'administration peut se contenter comme en l'espèce de notifier le procès-verbal au propriétaire et à la personne qui a réalisé les travaux litigieux. Il n'est pas contesté que les consorts A.-T. soient les auteurs des travaux et que les consorts M.-X. soient les propriétaires du bâtiment litigieux. Ce sont 4ème feuillet
d'ailleurs bien les locataires, auteurs des travaux, qui ont introduit une demande de régularisation. Aucune conséquence ne peut être tirée du fait de l'absence de notification du procès-verbal à une autre locataire des lieux, soit le salon de coiffure ..., même s'il fait également usage du parking querellé. Le procès-verbal est donc régulier.
3.La demande de régularisation formée par les consorts A.-T. ne pouvait qu'être déclarée irrecevable, dès lors qu'elle a été formée après rédaction du procès-verbal du 20 juin 2008.
4. Peu importe que les propriétaires aient ou non été au courant des travaux litigieux ou encore aient ou non donné leur aval pour leur réalisation, l'article 154 alinéa 2 du CWATUPE prévoit «que les infractions commises à l'occasion de l'utilisation d'un terrain (...) peuvent être imputées à celui qui les a placés comme propriétaire qui y a consenti ou qui l'a toléré ». Cette tolérance peut notamment être déduite du fait que les propriétaires n'ont pris aucune initiative pour exiger de leurs locataires une remise en état.
5. La matérialité de l'infraction n'est pas contestée. Les appelants prétendent que la Cour pourrait substituer la mesure préconisée (la remise en état des lieux) par le paiement d'une amende ou d'une transaction. Il convient à cet égard de rappeler que la Cour ne dispose pas d'un pouvoir de substituer une mesure postulée par l'administration par une autre mesure. Elle dispose uniquement du pouvoir de contrôler la légalité de la mesure proposée, d'un pouvoir de censurer la demande de l'autorité si elle s'appuie sur des motifs étrangers à l'aménagement du territoire ou sur une conception du bon aménagement du territoire qui serait manifestement déraisonnable, élément qui s'apprécie au regard du principe de proportionnalité.
En d'autres termes, le pouvoir judiciaire est compétent pour contrôler la légalité externe et interne de la demande du fonctionnaire délégué visant à entendre ordonner l'une des mesures de réparation directes prévues par la CWATUPE et pour examiner si elle est conforme à la loi ou si elle est entachée d'excès ou de détournement de pouvoir, mais il n'appartient pas au juge d'apprécier l'opportunité de pareille demande. Ainsi, la Cour doit s'attacher à vérifier en particulier si la demande de réparation du fonctionnaire délégué n'est pas manifestement déraisonnable en fonction notamment de la nature de l'infraction, de l'étendue de l'atteinte portée au bon aménagement du territoire, et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise des lieux en leur pristin état, par rapport à la charge qu'elle implique pour le contrevenant.
Le pouvoir judiciaire est compétent pour examiner si le choix, par le fonctionnaire délégué, de la remise en état ou d'une mesure de réparation déterminée a été opéré dans le seul but d'un bon aménagement du territoire. Il appartient au juge de ne pas faire droit à une demande qui aurait un caractère manifestement déraisonnable ou qui s'appuierait sur des motifs étranger à cet objectif. 5ème feuillet
L'appréciation ainsi faite ne diffère pas fondamentalement d'une appréciation de pleine juridiction telle qu'elle est généralement reconnue en matière de peine, comme la Cour a déjà eu l'occasion de le préciser (voir notamment Cour d'appel de Liège 3 janvier 2012, JLMB, 12/639), en ce qui concerne l'admissibilité même de la demande de remise en état, la différence peut paraître plus théorique que pratique et ceci dans la mesure où l'appréciation du caractère raisonnable de la mesure est, in fine, une analyse in specie en fonction de différents paramètres qui doivent être mis en balance. Par contre, la différence est incontestable en ce qui concerne la possibilité pour la juridiction ordinaire de substituer à la mesure demandée par le fonctionnaire délégué une autre mesure prévue à l'article 155 ou 157 du CWATUPE.
En l'espèce, la demande de remise en état consiste en une remise en état pure et simple des lieux, soit par l'enlèvement de l'infrastructure litigieuse (empierrement du parking) et le réengazonnement de la parcelle sur toute sa superficie. Cette demande se fondait au départ sur base du PCA n°3bis de Bouge qui classait la parcelle en zone parcs et jardins. Actuellement, le PCA a été abrogé et seule la notion du bon aménagement est encore soutenue.
Il appert des débats et des pièces déposées que l'établissement est assorti d'une aire de stationnement en tarmac située à l'arrière du bâtiment et à laquelle on accède à partir de la chaussée de Louvain par une voie qui longe l'établissement. Cette aire de stationnement constitue la parcelle cadastrée 121C et sa régularité n'est pas contestée. Au-delà de cette aire en tarmac, parcelle 121 C, la parcelle 1230 était engazonnée. C'est cette parcelle qui a été transformée en parking complémentaire par un empierrement et qui est donc en prolongement avec la zone de stationnement en tarmac.
Il résulte de ces constats que la mesure demandée est pour partie non fondée sur une infraction constatée (infraction au PCA n°3bis) et est en outre parfaitement déraisonnable compte tenu de la nature de l'infraction, de l'étendue de la portée au bon aménagement du territoire, et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise en état telle que postulée, par rapport à la charge et aux inconvénients qui s'ensuivraient pour le contrevenant.
Les demandes du fonctionnaire délégué et de la Ville de Namur sont non fondées».
Griefs
Première branche
1. N'est pas régulièrement motivé et viole de ce chef l'article 149 de la Constitution, la décision qui se fonde sur des motifs incompréhensibles ou qui
6ème feuillet
omet de répondre à un moyen ou une défense formulée en termes de conclusions.
2. L'arrêt attaqué se borne à affirmer (pp.9 in fine et 10) que la demande de remise en état demandée est « parfaitement déraisonnable compte tenu de la nature de l'infraction, de l'étendue de la portée au bon aménagement du territoire et de l'avantage résultant pour cet aménagement de la remise en état telle que postulée, par rapport à la charge et aux circonstances qui s'ensuivraient pour le contrevenant».
Premier rameau
3. Les termes « étendue de la portée au bon aménagement du territoire » utilisés par l'arrêt attaqué sont incompréhensibles et perdent dès lors toute valeur de justification de la décision en sorte que l'arrêt n'est pas régulièrement motivé (violation de l'article 149 de la Constitution).
Second rameau
4. L'arrêt attaqué laisse sans réponse les conclusions par lesquelles tant la demanderesse que la Région wallonne faisaient valoir que :
«Initialement, les travaux enfreignaient les prescriptions du plan communal d'aménagement, celui-ci affectant la parcelle litigieuse en zone de cours et jardins. La création d'une zone de parking pour 10 véhicules était incompatible avec une telle affectation.
Depuis le 13 février 2014, il n'y a plus de plan communal d'aménagement s'appliquant à ce quartier de Bouge. Cette modification n'égratigne néanmoins en rien les prétentions de la Ville de Namur qui maintient sa demande de remise en état des lieux.
En effet, l'aménagement d'un tel parking reste inconcevable avec l'affectation générale donnée aux zones situées directement à l'arrière des bâtiments, à savoir des zones destinées au cours et jardins, au calme et à la verdure.
Cette conception est un principe incontournable du bon aménagement des lieux : il convient d'éviter les va-et-vient des véhicules, le bruit et les odeurs engendrées par le parking en zone arrière. Le plan communal d'aménagement ne faisait que formaliser ce principe de bon aménagement des lieux.
L'utilisation actuelle de cette zone comme parking remet manifestement en cause l'effectivité de ce principe, compte-tenu de la configuration concrète des lieux et du voisinage direct. En effet, cette parcelle de parking est entourée d'espace non 7ème feuillet
bâti destiné au jardin (c.f. orthophotoplan déposé par le Fonctionnaire délégué) : l'affecter à l'usage exclusif de parking de commerce est d'autant plus incompatible avec cette destination de cours et jardins que le va-et-vient de dizaines de véhicules tout au long de la journée (et de la soirée) des clients de la brasserie mettrait à mal le calme d'une zone destinée au repos et la quiétude.
Au regard de ce qui précède et de la configuration des lieux, la demande de la Ville de NAMUR reste totalement raisonnable, motivée par des critères cohérents, adéquats appartenant à son appréciation de la conception du bon aménagement des lieux, par ailleurs largement partagée par les autorités en général» (conclusions additionnelles et de synthèse d'appel après réouverture des débats de la demanderesse en cassation, p. 7 ; dans un sens analogue, voy. conclusions d'appel additionnelles et de synthèse (mise en continuation) de la Région wallonne, pp. 8 et 9) et que s'agissant du choix de la mesure de réparation :
«la réalisation des travaux litigieux, sans permis préalable, n'est pas contestée par la partie appelante SPRL PIMI-A.-T. : les lieux ont été aménagés afin de permettre le parking d'une dizaine de véhicules.
C'est au regard du bon aménagement des lieux que le Collège communal de la Ville de Namur a apprécié - de manière discrétionnaire - le choix de la mesure de réparation, afin de répondre au trouble urbanistique dénoncé.
Le Collège communal de la Ville de Namur considère que seule la remise en état des lieux permet d'éviter le trouble urbanistique : en effet, il convient que l'affectation à titre de parking, et donc l'infrastructure le permettant, soit supprimée afin que la zone retrouve sa paisibilité. On ne voit d'ailleurs pas en quoi le paiement d'une plus-value ou des travaux d'aménagement permettrait de remédier aux troubles dénoncés.
Ce sont donc des motifs strictement urbanistiques qui sont invoqués pour justifier le choix de cette mesure de réparation. Ces motifs sont adéquats et raisonnable.
Le choix de la mesure est donc totalement régulier» (mêmes conclusions de la demanderesse en cassation, n° 3-2.3, p. 8, voy. aussi les conclusions précitées de la Région wallonne, n°5, pp. 10 et 11).
L'arrêt n'est dès lors pas régulièrement motivé (violation de l'article 149 de la Constitution).
Seconde branche
5. D'une part, l'importance des conséquences que peuvent avoir, pour l'auteur d'une infraction urbanistique du mode de réparation prévu par les articles 155, § 2, alinéa 1er, 1° (devant le tribunal correctionnel) et 157, alinéa 1er, 1°
8ème feuillet
(devant le tribunal civil) du CWATUPE ne porte pas atteinte à la légalité interne de la demande introduite par le fonctionnaire délégué (ou le collège communal) en application de ces articles ni n'entache cette demande d'excès ou de détournement de pouvoir, ou même d'abus de droit.
D'autre part, les articles 155, § 1er et 157, alinéa 1er, 1° du Code wallon de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, du patrimoine et de l'énergie ne permettent pas au juge de décider, par la seule constatation que la mesure de réparation sollicitée n'est pas proportionnée à l'étendue de l'atteinte portée au bon aménagement du territoire, qu'aucune réparation de cette atteinte n'est nécessaire. Afin de pouvoir rejeter la mesure de réparation sollicitée par le fonctionnaire délégué, le juge doit constater qu'une mesure moins radicale permettrait également de rétablir un bon aménagement du territoire, donc d'avoir la même « utilité sociale » en supprimant les conséquences préjudiciables de l'infraction commise (art. 155, §§ 1 et 2 et art. 157 du CWATUPE, article 159 de la Constitution et principes généraux du droit visés au moyen, article 14, des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat).
6. En rejetant la demande de remise des lieux en état formée par le fonctionnaire-délégué sur la base de l'article 157, alinéa 1er, 1° du CWATUPE (et soutenu par la demanderesse) au motif que cette demande de remise en état est « parfaitement déraisonnable » sans constater qu'une mesure moins radicale permettrait également de rétablir un bon aménagement du territoire, l'arrêt attaqué ne justifie pas légalement sa décision (violation de l'article 157, spécialement alinéa 1er , 1°, du CWATUPE et, pour autant que de besoin, violation de l'article 159 de la Constitution et des principes généraux du droit visés au moyen de l'article 14, § 1er des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat, de l'article 155 du CWATUPE auquel l'article 157 se réfère).
A tout le moins, à défaut de comporter pareille constatation, l'arrêt attaqué ne permet pas à Votre Cour d'exercer son contrôle de légalité au regard de l'article 157 du CWATUPE ainsi que de l'article 159 de la Constitution, des principes généraux du droit visés au moyen et de l'article 155 du CWATUPE et de l'article 14, § 1er des lois coordonnées sur le Conseil d'Etat et n'est dès lors pas régulièrement motivé (violation de l'article 149 de la Constitution).
Première branche (premier rameau)
Sur ce que des motifs incompréhensibles sont sans valeur (Cass. 17 novembre 1989, Pas. 1990, I, n°172 et Cass. 30 octobre 1990, Pas. 1991, I, n°118 9ème feuillet
Seconde branche
Voy. : - Cass. 3 mars 2004, Pas. 2004, n°117 ;
- Cass. 25 juin 2014, Pas. 2014, n° 455.
PAR CES CONSIDERATIONS,
l'avocat à la Cour de cassation soussigné, pour le demanderesse en cassation, conclut, Messieurs, Mesdames, qu'il vous plaise, recevant le pourvoi, casser l'arrêt attaqué, ordonner que mention de votre arrêt soit faite en marge de la décision annulée, renvoyer la cause devant une autre cour d'appel, statuer sur les dépens comme de droit.
Bruxelles, le 25 octobre 2016
Pour la demanderesse en cassation,
son conseil,
Paul Alain Foriers
Pièces jointes :
1. Extrait certifié conforme de la délibération du conseil communal de la Ville de Namur du 30 juin 2016 autorisant le collège communal à introduire un pourvoi en cassation contre l'arrêt attaqué.
2. Extrait certifié conforme de la délibération du collège communal de la Ville de Namur du 16 juin 2016 décidant l'introduction du pourvoi contre l'arrêt attaqué et en chargeant Me P.A. Foriers de l'introduction de celui-ci.
3. Il sera joint en outre à la présente requête, lors de son dépôt au greffe de la Cour, l'original de l'exploit constatant sa signification aux défendeurs en cassation et à la partie appelée en déclaration d'arrêt commun.