La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/05/2018 | BELGIQUE | N°C.17.0613.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 mai 2018, C.17.0613.N


N° C.17.0613.N
JONCKHEERE SUBCONTRACTING, s.a.,
Me Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassation,

contre

SIMA, s.a.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.


I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 1er mars 2017 par la cour d'appel de Gand.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général André Van Ingelgem a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente

un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la première branche :

1. En vertu de l&ap...

N° C.17.0613.N
JONCKHEERE SUBCONTRACTING, s.a.,
Me Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassation,

contre

SIMA, s.a.,
Me Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 1er mars 2017 par la cour d'appel de Gand.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général André Van Ingelgem a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la première branche :

1. En vertu de l'article 1794 du Code civil, le maître de l'ouvrage peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans cette entreprise.
2. Le maître de l'ouvrage a donc le droit de mettre fin à la convention par un acte juridique unilatéral. La résiliation unilatérale doit, pour pouvoir sortir des effets, être portée à la connaissance de l'entrepreneur. Elle ne doit pas être acceptée par l'entrepreneur. Il s'agit d'un acte juridique informel qui peut avoir lieu aussi bien expressément que tacitement. Ni la validité de la résiliation, ni sa preuve ne requièrent un écrit. Une résiliation tacite ne peut toutefois être déduite que de comportements du maître de l'ouvrage constituant une expression claire et non équivoque de sa volonté et non susceptibles d'une autre interprétation.
Le juge apprécie en fait l'existence de la résiliation unilatérale par le maître de l'ouvrage, pour autant qu'il n'attache pas aux faits des conséquences qui ne peuvent en être déduites ou qui sont incompatibles avec eux.
3. Les juges d'appel ont constaté et considéré, en ce qui concerne la convention du 27 mars 2008 entre la demanderesse en tant que maître de l'ouvrage et la défenderesse en tant qu'entrepreneur, que :
- la ligne de pulvérisation de Kosice, objet de cette convention, n'a pas été installée ;
- il ressort des e-mails échangés entre la demanderesse et la défenderesse au cours de la période allant d'avril à mai 2009 que la demanderesse n'était plus enthousiaste quant à l'exécution du contrat et prônait une résolution amiable de la convention avec un remboursement de l'acompte versé ;
- le 29 avril 2009, la demanderesse écrivait : « Au cours de notre discussion l'année dernière le 07.11.08, j'ai noté qu'à l'exception de certains travaux d'étude, vos sous-traitants et fournisseurs n'ont pas engagé de frais. C'est pourquoi je vous avais proposé lors de la réunion du 09.04.09 de mettre un terme au contrat avec une demande de restitution de l'acompte. Vous alliez réfléchir et nous faire rapport par la suite » ;
- le 8 mai 2009, la défenderesse écrivait : « Je vous ai dit que le montant des pièces à facturer (dont vous devenez propriétaire après paiement) n'est pas trop élevé. C'est le montant qui s'ajoute à l'acompte. Il ne peut en aucune façon être question d'un remboursement » ;
- le 8 mai 2009, la demanderesse répondait : « Le 29.04.09, j'avais clairement exprimé le souhait de vous rencontrer afin de discuter plus en détail des points en suspens tant pour l'installation de laquage à Roulers que pour la problématique concernant Kosice. Dans le message ci-dessous je ne trouve pas de date pour ce rendez-vous » ;
- le 25 mai 2009, le conseil de la défenderesse écrivait : « Ma cliente dispose déjà d'une partie importante des pièces de la ligne de laquage et souhaite effectuer une première livraison dans les semaines à venir. Veuillez faire une proposition à laquelle la première livraison peut avoir lieu » ;
- le 23 juin 2009, la demanderesse répondait : « Permettez-moi d'exprimer ma surprise à la suite de votre lettre du 25 mai dernier, dans laquelle - en pleine discussion au sujet de la ligne de laquage à Roulers - vous intervenez apparemment également au nom de votre cliente pour conclure des accords commerciaux/pratiques concernant la ligne de laquage prévue à Kosice. De plus, je crains que votre cliente vous ait mal informé à ce sujet, puisque votre cliente sait depuis environ un an qu'aucun permis n'a encore été obtenu pour le moment [pour] ce dossier. Je vous promets toutefois de continuer à suivre de près la situation sur place et de l'évaluer sous peu, y compris en ce qui concerne les permis. Je reviendrai sur cette question à ce moment-là » ;
- il ressort des pièces des parties et de leurs conclusions que, depuis l'e-mail de la demanderesse au conseil de la défenderesse en date du 23 juin 2009, il n'y a plus eu ni d'écrit ni de communication d'aucune autre manière ;
- il ressort de ce qui précède que la demanderesse souhaitait être libérée de la convention à partir du 29 avril 2009, que ce courrier électronique ne faisait pas référence à la problématique des permis et qu'il est exact que la demanderesse avait alors fait une proposition, non acceptée par la défenderesse, de résolution amiable de la convention, que la demanderesse n'a pas formellement rompu le contrat et qu'elle a continué à insister sur un arrangement amiable, mais qu'on peut néanmoins en déduire que des problèmes difficiles ou insolubles à l'époque se sont posés et que les responsables de la demanderesse souhaitaient en fait déjà à cette date rompre le contrat ;
- après l'e-mail de la demanderesse du 23 juin 2009, bien que la demanderesse ait eu la main pour prendre l'initiative et fournir des informations, il s'en est suivi un silence radio qui n'a jamais été interrompu ; la demanderesse n'a pas communiqué que les permis avaient été obtenus et elle n'a en aucun cas, si elle avait pourtant souhaité poursuivre et exécuter le contrat, fait savoir que l'on pouvait procéder à la livraison ; au contraire, elle a allégué toutes sortes de raisons, qui ont été rejetées par la cour d'appel, pour ne pas avoir à exécuter la convention, alors que son intention de mettre fin à celle-ci, qui avait déjà pris naissance le 29 avril 2009, est confirmée par son attitude ultérieure et les circonstances ultérieures ;
- les motifs qui ont été invoqués par la demanderesse pour ne pas exécuter la convention et qui ont été rejetés par la cour d'appel portaient sur la nullité de celle-ci en raison d'une erreur sur la personne du contractant et la substance de la chose, ainsi que sur sa résolution du chef d'inexécution par la défenderesse.

4. En décidant par ces motifs que la demanderesse a « résilié » la convention au sens de l'article 1794 du Code civil, et que cette « résiliation » a en tout cas eu lieu le 29 avril 2009, les juges d'appel ont légalement justifié leur décision.
Le moyen, en cette branche, ne saurait être accueilli.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne la demanderesse aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Beatrijs Deconinck, président, le président de section Alain Smetryns, les conseillers Koen Mestdagh, Geert Jocqué et Koenraad Moens, et prononcé en audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit par le président de section Beatrijs Deconinck, en présence de l'avocat général André Van Ingelgem, avec l'assistance du greffier Vanessa Van de Sijpe.

Traduction établie sous le contrôle du conseiller Ariane Jacquemin et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le conseiller,


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.17.0613.N
Date de la décision : 24/05/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-05-24;c.17.0613.n ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award