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25/04/2018 | BELGIQUE | N°P.18.0385.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 25 avril 2018, P.18.0385.F


N° P.18.0385.F
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, chaussée d'Anvers, 59B,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Gautier Matray, avocat au barreau de Liège,

contre

M. S. H.,
étranger, privé de liberté,
défendeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Zouhaier Chihaoui, avocat au barreau de Bruxelles.





I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 27 mars 2018 par la cour d

'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au pré...

N° P.18.0385.F
ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration, dont les bureaux sont établis à Bruxelles, chaussée d'Anvers, 59B,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Gautier Matray, avocat au barreau de Liège,

contre

M. S. H.,
étranger, privé de liberté,
défendeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Zouhaier Chihaoui, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 27 mars 2018 par la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.
Le demandeur invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Françoise Roggen a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 71, alinéas 1 et 2, et 72 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers et 5.4 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le demandeur fait grief à l'arrêt de le débouter de son appel en méconnaissant le caractère autonome du titre de rétention du défendeur soumis au contrôle de la chambre des mises en accusation.

Des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard, il appert que :
- le 2 décembre 2017, le défendeur a introduit une demande de protection internationale à la frontière ;
- le 20 décembre 2017, le commissariat général aux réfugiés et aux apatrides a refusé au défendeur le statut de réfugié ainsi que la protection subsidiaire ;
- le 23 janvier 2018, le défendeur a introduit une deuxième demande d'asile ;

- le 5 février 2018, le conseil du contentieux des étrangers a rejeté le recours formé par le défendeur contre la décision du commissariat général aux réfugiés et aux apatrides qui avait refusé de prendre cette deuxième demande d'asile en considération ;
- le 20 février 2018, le défendeur a déposé une troisième demande d'asile et, le même jour, une troisième décision autonome de maintien dans un lieu déterminé a été prise à son encontre par l'autorité sur la base de l'article 74/5, § 1er, 2°, de la loi du 15 décembre 1980 ; le défendeur a introduit une requête de mise en liberté le 22 février 2018 contre cette décision ;
- le 26 février 2018, le commissariat général aux réfugiés et aux apatrides a refusé de prendre cette troisième demande d'asile en considération ;
- par un arrêt du 13 mars 2018, la chambre des mises en accusation a déclaré que la requête de mise en liberté déposée par le défendeur était devenue sans objet ;
- entretemps, le 27 février 2018, l'Office des étrangers a délivré au défendeur un quatrième titre de rétention à la suite de son refus d'embarquer le même jour à bord d'un avion pour le Bangladesh. Ce titre, qui est celui qui a été déféré au contrôle des juges d'appel, est fondé sur l'article 74/5, § 1er, 1°, de la loi du 15 décembre 1980.

L'article 74/5, § 1er, de la loi du 15 décembre 1980 dispose :
« Peut être maintenu dans un lieu déterminé, situé aux frontières, en attendant l'autorisation d'entrer dans le Royaume ou son refoulement du territoire :
1° l'étranger qui, en application des dispositions de la présente loi, peut être refoulé par les autorités chargées du contrôle aux frontières ;
2° l'étranger qui tente d'entrer dans le Royaume sans remplir les conditions fixées aux articles 2 et 3, et qui présente une demande de protection internationale à la frontière. [...] »

Les fondements respectifs des titres des 20 et 27 février 2018 sont distincts : le premier maintient l'étranger dans un lieu déterminé le temps de l'examen de sa demande d'asile et en vue de son refoulement éventuel tandis que le second le prive de liberté pour assurer son refoulement effectif à la suite du rejet de sa demande de protection internationale et de ses refus répétés de quitter le pays.

La chambre des mises en accusation a considéré que la motivation de la décision du 20 février 2018 ne contenait pas d'appréciation individualisée de la situation du défendeur alors que cette motivation est exigée par l'article 8.3 de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil établissant les normes pour l'accueil des personnes demandant la protection internationale.

L'article 8.3 de la directive 2013/33/UE ne s'applique pas aux étrangers dont, comme en l'espèce, la demande de protection internationale a été rejetée.

En déduisant de la considération précitée que l'illégalité affectant la décision du 20 février 2018 s'étend à celle du 27 février 2018 pour confirmer l'ordonnance de la chambre du conseil qui a fait droit à la requête de mise en liberté du défendeur, les juges d'appel n'ont pas légalement justifié leur décision.

Le moyen est fondé.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt cassé ;
Réserve les frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, autrement composée.
Lesdits frais taxés en totalité à la somme de quatre cent vingt-quatre euros trente-huit centimes dont cent cinquante-neuf euros vingt-huit centimes dus et deux cent soixante-cinq euros dix centimes payés par le demandeur.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-cinq avril deux mille dix-huit par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.
T. Fenaux F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.18.0385.F
Date de la décision : 25/04/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-04-25;p.18.0385.f ?

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