N° P.18.0383.F
G. A., condamné,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Nathalie Buisseret et Cédric Moisse, avocats au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 20 mars 2018 par le tribunal de l'application des peines de Bruxelles.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Pris de la violation des articles 57 et 68, § 5, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d'exécution de la peine, le moyen reproche au jugement de décider que le demandeur ne pourra introduire avant l'échéance du délai qu'il fixe « toute nouvelle demande devant le tribunal de l'application des peines », alors que le délai d'attente que ce tribunal doit fixer en vertu des dispositions précitées ne concerne que l'introduction d'une nouvelle demande de modalité similaire à celle qui a été refusée ou révoquée.
L'article 68, § 5, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté dispose :
« S'il s'agit d'un jugement de révocation d'une détention limitée ou d'une surveillance électronique, le juge de l'application des peines ou le tribunal de l'application des peines précise que la période au cours de laquelle le condamné était en détention limitée ou sous surveillance électronique est déduite de la partie restante des peines privatives de liberté au moment de l'octroi.
S'il s'agit d'un jugement de révocation d'une libération conditionnelle et d'une mise en liberté provisoire en vue de l'éloignement du territoire, le juge de l'application des peines ou le tribunal de l'application des peines détermine la partie de la peine privative de liberté que doit encore subir le condamné en tenant compte de la période du délai d'épreuve qui s'est bien déroulée et des efforts fournis par le condamné pour respecter les conditions qui lui étaient imposées.
Sauf dans le cas d'une révocation conformément à l'article 64, 1°, le tribunal de l'application des peines fixe dans son jugement la date à laquelle le condamné peut introduire une nouvelle demande.
Ce délai ne peut excéder six mois à compter du jugement lorsque le condamné subit une ou plusieurs peines correctionnelles d'emprisonnement à titre principal dont le total ne dépasse pas cinq ans. Ce délai est d'un an maximum en cas de peines criminelles ou lorsque le total des peines correctionnelles d'emprisonnement principal est supérieur à cinq ans. Ce délai est de six mois minimum et de dix-huit mois maximum si l'affaire concerne une condamnation à une peine privative de liberté de trente ans ou plus ou une peine privative de liberté à perpétuité, assortie d'une mise à disposition du tribunal de l'application des peines conformément aux articles 34ter ou 34quater du Code pénal. »
La nouvelle demande visée par le troisième alinéa de cette disposition est la demande d'une modalité qui a le même objet que celui de la modalité révoquée.
Le jugement attaqué révoque la mesure de libération conditionnelle accordée au demandeur et fixe à 364 jours à compter du prononcé, la date à laquelle le demandeur pourra introduire « toute nouvelle demande devant le tribunal de l'application des peines pour autant qu'il satisfasse toujours aux délais prévus par les articles 23 et 25 de la loi du 17 mai 2006 ».
Dans la mesure où il décide que le demandeur ne peut pas introduire, avant cette date, une demande d'une autre modalité d'exécution de la peine que celle de la libération conditionnelle, le jugement viole l'article 68, § 5, de la loi précitée.
Dans cette mesure, le moyen est fondé.
Sur le second moyen :
Le moyen soutient qu'en n'ayant pas examiné la demande de révocation de libération conditionnelle du ministère public au plus tard dans les quinze jours de sa saisine, le tribunal a méconnu l'article 68, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté.
Aux termes de cette disposition, le ministère public peut saisir le juge de l'application des peines ou le tribunal de l'application des peines en vue d'une révocation, d'une suspension ou d'une révision de la modalité d'exécution de la peine accordée. L'examen de l'affaire a lieu à la première audience utile du juge de l'application des peines ou du tribunal de l'application des peines. Cette audience doit se tenir au plus tard dans les quinze jours de la saisine du juge de l'application des peines ou du tribunal de l'application des peines par le ministère public.
Les délais prévus par cet article sont des délais d'ordre, qui ne sont pas prescrits à peine de nullité.
Le moyen, qui soutient le contraire, manque en droit.
Le contrôle d'office
Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est, sauf l'illégalité à censurer ci-après, conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse le jugement attaqué en tant qu'il décide que le demandeur ne peut pas introduire, avant l'échéance d'un délai de 364 jours à compter du prononcé du jugement, une demande d'une autre modalité d'exécution de la peine que celle de la libération conditionnelle ;
Rejette le pourvoi pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement partiellement cassé ;
Condamne le demandeur à la moitié des frais et laisse l'autre moitié à charge de l'Etat ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi.
Lesdits frais taxés à la somme de six euros onze centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-huit avril deux mille dix-huit par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
F. Gobert F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe