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18/04/2018 | BELGIQUE | N°P.18.0125.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 avril 2018, P.18.0125.F


N° P.18.0125.
I. et II. M. Y., prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Séverine Solfrini et Sarah Durant, avocats au barreau de Liège,

le premier pourvoi contre

E. H.S.,
partie civile,
défenderesse en cassation.



I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre deux arrêts rendus le 28 novembre 2017 et le 4 janvier 2018 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur fait valoir deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée confor

me.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II...

N° P.18.0125.
I. et II. M. Y., prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseils Maîtres Séverine Solfrini et Sarah Durant, avocats au barreau de Liège,

le premier pourvoi contre

E. H.S.,
partie civile,
défenderesse en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre deux arrêts rendus le 28 novembre 2017 et le 4 janvier 2018 par la cour d'appel de Liège, chambre correctionnelle.
Le demandeur fait valoir deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

A. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 28 novembre 2017 :

1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action publique :

Sur le second moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2 du septième Protocole, du 22 novembre 1984, à cette Convention, et 3 de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 octobre 2010, relative au droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales. Selon le moyen, à peine de vider de sa substance le droit du demandeur, détenu, à un double degré de juridiction, les juges d'appel ne pouvaient le déclarer déchu de son recours au motif qu'il avait déposé tardivement une requête d'appel contenant ses griefs, alors qu'aucune information à propos de cette obligation de dépôt ne lui avait été communiquée par l'administration pénitentiaire dans une langue qu'il comprend et qu'il n'était pas assisté par un avocat lorsqu'expira le délai pour s'y soumettre.

L'article 3 de la directive précitée dispose :
« 1. Les États membres veillent à ce que les suspects ou les personnes poursuivies qui ne comprennent pas la langue de la procédure pénale concernée bénéficient, dans un délai raisonnable, de la traduction écrite de tous les documents essentiels pour leur permettre d'exercer leurs droits de défense et pour garantir le caractère équitable de la procédure.
2. Parmi ces documents essentiels figurent toute décision privative de liberté, toutes charges ou tout acte d'accusation, et tout jugement.
3. Les autorités compétentes décident cas par cas si tout autre document est essentiel. Les suspects ou les personnes poursuivies, ou leur conseil juridique, peuvent présenter une demande motivée à cet effet.
[...] ».

En application de l'article 204 du Code d'instruction criminelle, à peine de déchéance de l'appel, le prévenu est tenu, dans le délai prévu pour former ce recours, d'indiquer dans une requête les griefs élevés contre le jugement entrepris. Conformément à l'article 204, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle, un formulaire dont le modèle est déterminé par le Roi peut être utilisé à cette fin.

Certes, la loi du 28 octobre 2016 complétant la transposition de la directive 2010/64/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 relative au droit à l'interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales, ne prévoit pas la traduction du formulaire visé à l'article 204, alinéa 3, du code précité, lorsqu'il est remis à un détenu souhaitant interjeter appel, ni la communication d'une information au sujet des formes et délais à respecter à cet égard.

Toutefois, lorsqu'il n'apparaît d'aucune des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que l'obligation de déposer ce formulaire de griefs ou cette requête dans le délai précité a été portée à la connaissance du prévenu, qui n'était pas assisté par un avocat et qui a manifesté son intention d'interjeter appel, dans une langue qu'il comprend, le juge d'appel ne peut le déclarer déchu de ce recours en application de l'article 204 précité, à peine de le priver du droit d'accès à un tribunal.
Écartant la force majeure alléguée par le demandeur, sans avoir égard à pareilles circonstances qu'il avait invoquées, l'arrêt viole l'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans l'interprétation que la Cour européenne lui a donnée.

Le moyen est fondé.

Il n'y a pas lieu d'examiner le premier moyen qui ne saurait entraîner une cassation plus étendue.

2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision rendue sur l'action civile :

Il n'apparaît pas des pièces de la procédure que le demandeur ait fait signifier son pourvoi à la partie contre laquelle il est dirigé.

Le pourvoi est irrecevable.

B. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 4 janvier 2018 :

1. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision qui décrète le désistement d'appel du ministère public :

Pareille décision n'inflige aucun grief au demandeur.

Le pourvoi est, partant, irrecevable.

2. En tant que le pourvoi est dirigé contre la décision qui statue sur les frais de l'appel :

La cassation de la décision rendue le 28 novembre 2017 sur l'action publique entraîne la cassation de celle rendue le 4 janvier 2018, par laquelle il est statué sur la condamnation aux frais d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué du 28 novembre 2017, en tant qu'il statue sur l'action publique, et celui du 4 janvier 2018, en tant qu'il statue sur la condamnation du demandeur aux frais d'appel ;
Rejette les pourvois pour le surplus ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge des arrêts partiellement cassés ;
Condamne le demandeur à la moitié des frais et réserve le surplus pour qu'il soit statué sur celui-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Mons.
Lesdits frais taxés à la somme de deux cent trente-quatre euros cinquante-huit centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, président de section, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-huit avril deux mille dix-huit par Benoît Dejemeppe, président de section, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.

F. Gobert F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : P.18.0125.F
Date de la décision : 18/04/2018
Type d'affaire : Arrêt

Analyses

Appel principal ; forme ; délai


Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-04-18;p.18.0125.f ?

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