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17/04/2018 | BELGIQUE | N°P.18.0038.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 avril 2018, P.18.0038.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.18.0038.N
I. D. T.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Pieterjan Van Muysen, avocat au barreau de Gand,

II. A. G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Pieterjan Van Muysen, avocat au barreau de Gand.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 12 décembre 2017 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur I ne présente pas de moyen.
Le demandeur II invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie ce

rtifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.18.0038.N
I. D. T.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Pieterjan Van Muysen, avocat au barreau de Gand,

II. A. G.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Pieterjan Van Muysen, avocat au barreau de Gand.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 12 décembre 2017 par la cour d'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur I ne présente pas de moyen.
Le demandeur II invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur les moyens du demandeur II :

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 6, 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 151, § 1er, de la Constitution et 55 du Code d'instruction criminelle : l'arrêt décide, à tort, que n'éveille pas une apparence de partialité ou de dépendance la signature par le juge d'instruction d'un accord mentionnant l'objectif de rassembler les éléments de preuve et d'en faire usage dans les procédures de poursuites et de confiscation et l'accomplissement d'actes d'instruction afin de faire aboutir les poursuites ; l'article 55 du Code d'instruction criminelle ne fait pas mention de tels actes.

2. Dans la mesure où il n'explicite pas comment et en quoi l'arrêt viole l'article 151, § 1er, de la Constitution, le moyen, en cette branche, est irrecevable, à défaut de précision.

3. L'article 13 de la Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les États membres de l'Union européenne régit la constitution et le fonctionnement d'équipes communes d'enquête. Selon l'article 13.3.a) et b), de cette Convention, une telle équipe intervient conformément au droit de l'État membre sur le territoire duquel elle intervient, les membres de l'équipe exécutent leurs tâches sous la responsabilité du responsable de l'équipe et le responsable de l'équipe agit dans les limites des compétences qui sont les siennes au regard du droit national.

4. Les articles 8 et 9 de la loi du 9 décembre 2004 sur la transmission policière internationale de données à caractère personnel et d'informations à finalité judiciaire, l'entraide judiciaire internationale en matière pénale et modifiant l'article 90ter du Code d'instruction criminelle régissent la constitution et le fonctionnement d'équipes communes d'enquête. Il est notamment prévu auxdits articles que :
- la création d'une équipe commune d'enquête doit faire l'objet d'un accord écrit avec les autres États concernés (article 8, § 4, alinéa 1er) ;
- cet accord est signé, pour la Belgique, par le juge d'instruction, le procureur du Roi ou le procureur fédéral, selon le cas (article 8, § 4, alinéa 1er) ;
- la signature par le juge d'instruction ou par le procureur du Roi a lieu après concertation avec le procureur fédéral sur les modalités de la création de l'équipe commune d'enquête (article 8, § 4, alinéa 1er) ;
- l'accord précise l'objectif de l'équipe commune d'enquête, la composition de celle-ci, la durée pour laquelle elle est constituée, son lieu d'intervention, les moyens à mettre en œuvre ainsi que le nom de chacune des personnes qui, en fonction de l'État sur le territoire duquel l'équipe intervient, exerce l'autorité sur cette équipe (article 8, § 4, alinéa 2) ;
- lorsque l'équipe commune d'enquête intervient sur le territoire belge, ses membres agissent conformément au droit belge et sous l'autorité du procureur fédéral, du procureur du Roi ou du juge d'instruction, selon le cas (article 9, § 1er).

5. L'article 55 du Code d'instruction criminelle prévoit que l'instruction est l'ensemble des actes qui ont pour objet de rechercher les auteurs d'infractions, de rassembler les preuves et de prendre les mesures destinées à permettre aux juridictions de statuer en connaissance de cause. L'article 56, §§ 1er et 2, de ce même Code prévoit que le juge d'instruction :
- assume la responsabilité de l'instruction qui est menée à charge et à décharge ;
- veille à la légalité des moyens de preuve ainsi qu'à la loyauté avec laquelle ils sont rassemblés.

6. Il résulte des dispositions précitées, lues conjointement, que les obligations énoncées dans l'accord écrit ne peuvent conduire à une atteinte aux compétences qui reviennent au juge d'instruction et au ministère public.

7. Aucune disposition ne s'oppose à ce que, tenant compte de la répartition des compétences au niveau des recherches et des poursuites entre le juge d'instruction et le ministère public, un accord écrit mentionne tant des obligations qui concernent le ministère public que des obligations qui valent uniquement pour le juge d'instruction. Par la signature de l'accord écrit, le magistrat compétent du ministère public et le juge d'instruction s'engagent uniquement aux actes qu'ils peuvent exécuter conformément au droit belge.

8. La signature conjointe par le juge d'instruction d'un accord écrit qui mentionne notamment comme objectifs qu'il est axé sur le recueil d'informations pertinentes et d'éléments de preuve pouvant être utilisés dans les procédures de poursuites et de confiscation et sur l'accomplissement d'actes d'instruction afin de faire aboutir l'instruction et les poursuites, n'implique pas que le juge d'instruction s'arroge des compétences qui reviennent au ministère public, qu'il n'observe pas ou qu'il ne peut plus observer les obligations qui lui incombent en vertu des articles 55 et 56 du Code d'instruction criminelle, et donc pas davantage qu'il éveille une apparence de partialité et de dépendance.

Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.

9. Par les motifs qu'il comporte (...), l'arrêt justifie légalement la décision selon laquelle la signature par le juge d'instruction de l'accord écrit du 17 décembre 2014 constituant une équipe commune d'enquête ne peut éveiller une apparence de partialité et de dépendance.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Quant à la deuxième branche :

10. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 151, § 1er, de la Constitution et 55 du Code d'instruction criminelle : l'arrêt décide, à tort, que la participation du juge d'instruction à l'équipe d'enquête mixte n'est pas en tant que telle irrégulière et que la récusation du juge d'instruction n'y fait pas obstacle ; le lien entre les deux est établi ; le demandeur I a récusé le juge d'instruction ; il ressort de divers passages dans la correspondance entre le juge d'instruction et les autorités britanniques que le juge d'instruction a personnellement encouragé les poursuites à l'encontre de différents inculpés, dont le demandeur II ; le juge d'instruction a accepté la récusation ; l'objectif de poursuivre apparaît également de l'accord en vue de la création d'une équipe commune d'enquête ; l'arrêt n'apprécie pas concrètement la défense du demandeur.

11. Dans la mesure où il n'explicite ni comment ni en quoi l'arrêt viole l'article 151, § 1er, de la Constitution, le moyen, en cette branche, est irrecevable, à défaut de précision.

12. Dans la mesure où il est déduit de l'illégalité vainement invoquée par le moyen, en sa première branche, le moyen, en cette deuxième branche, est irrecevable.

13. Dans la mesure où il fait valoir qu'il ressort de divers passages dans la correspondance entre le juge d'instruction et les autorités britanniques que le juge d'instruction a personnellement encouragé les poursuites à l'encontre des différents inculpés, dont le demandeur II, le moyen, en cette branche, oblige la Cour à procéder à un examen en fait pour lequel elle est sans pouvoir et il est irrecevable.

14. Il ne résulte pas du simple fait qu'un juge d'instruction accueille une demande de récusation que le juge du fond doit accorder crédit aux faits invoqués à l'appui de la demande de récusation et que le juge d'instruction manque effectivement à son devoir d'impartialité et d'indépendance.

Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.

15. Par les motifs qu'il comporte (...), l'arrêt justifie légalement la décision selon laquelle une apparence de partialité ou de dépendance dans le chef du juge d'instruction ne saurait être déduite de la demande de récusation du 4 mai 2016.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Le contrôle d'office

27. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et les décisions sont conformes à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux frais de leur pourvoi.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président, Alain Bloch, Erwin Francis, Sidney Berneman et Ilse Couwenberg, conseillers, et prononcé en audience publique du dix-sept avril deux mille dix-huit par le conseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence de l'avocat général délégué Alain Winants, avec l'assistance du greffier délégué Véronique Kosynsky.
Traduction établie sous le contrôle du président de section Benoît Dejemeppe et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.18.0038.N
Date de la décision : 17/04/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-04-17;p.18.0038.n ?

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