La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2018 | BELGIQUE | N°C.17.0320.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 22 mars 2018, C.17.0320.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.17.0320.N
J. T.,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. L. T.,
2. J. T.,
3. A. T.,

en présence de

1. A. T., et consorts.



I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2016 par la cour d'appel d'Anvers.
L'avocat général Ria Mortier a déposé des conclusions le 29 décembre 2017.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
L'avocat général Ria Mortier a conclu.r>
II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur pré...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° C.17.0320.N
J. T.,
Me Beatrix Vanlerberghe, avocat à la Cour de cassation,

contre

1. L. T.,
2. J. T.,
3. A. T.,

en présence de

1. A. T., et consorts.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 26 octobre 2016 par la cour d'appel d'Anvers.
L'avocat général Ria Mortier a déposé des conclusions le 29 décembre 2017.
Le conseiller Bart Wylleman a fait rapport.
L'avocat général Ria Mortier a conclu.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, le demandeur présente deux moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

1. L'article 1er, alinéas 1er et 2, de la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles en vue d'en promouvoir la continuité dispose :
« Sous réserve des dispositions du Code civil qui fixent les droits du conjoint survivant (et du cohabitant légal survivant), chacun des héritiers en ligne directe descendante a la faculté, lorsqu'une succession comprend pour la totalité ou pour une quotité une exploitation agricole, de reprendre, sur estimation, les biens meubles et immeubles qui constituent l'exploitation agricole.
Pour l'application de la présente loi, il faut entendre par ‘exploitation agricole' l'ensemble des meubles et immeubles affectés à toute activité, liée ou non au sol, qui a trait aux grandes cultures, à l'élevage du bétail, à l'aviculture, aux cultures maraîchères, aux cultures fruitières, à la pisciculture, à l'apiculture, à la viticulture, à la floriculture, à la culture de plantes ornementales, à la culture de semences et de plants, aux pépinières ainsi qu'à la production de sapins de Noël ».
2. L'article 2 de la loi du 23 août 2015 modifiant la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles en vue d'en promouvoir la continuité a ajouté un troisième alinéa à l'article 1er, qui dispose :
« Dans le cas où la succession ne comprend pas pour la totalité ou pour une quotité une exploitation agricole, mais bien des biens immeubles qui faisaient partie de l'exploitation agricole du défunt, et que l'un des héritiers en ligne directe descendante est à ce moment exploitant de ces biens dans le cadre de sa propre exploitation agricole, ce dernier a également la faculté de reprendre ces biens sur estimation, sous réserve des dispositions du Code civil qui fixent les droits du conjoint survivant et du cohabitant légal survivant ».
L'article 4 de la loi précitée du 23 août 2015 dispose que la loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
3. Une loi interprétative est une loi qui, à propos d'un point de la règle de droit qui est incertain ou contesté, donne une solution qui aurait pu être admise par la jurisprudence. Une loi interprétative ne peut toutefois pas modifier, abroger ou compléter la loi interprétée.
4. Il ressort du texte clair de l'article 1er, alinéa 1er, de la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles en vue d'en promouvoir la continuité que le droit de reprise ainsi prévu ne s'applique que lorsque « la succession comprend pour la totalité ou pour une quotité une exploitation agricole », ce qui suppose qu'il s'agit d'une exploitation agricole qui, jusqu'à son décès, était exploitée par le testateur. Il n'apparaît pas que la portée de cette disposition était incertaine ou contestée.
Dans l'exposé des motifs de la proposition de loi modifiant la loi du 29 août 1988 relative au régime successoral des exploitations agricoles, laquelle proposition de loi allait donner lieu à la loi précitée du 23 août 2015, il est dit ce qui suit : « Le fait que l'entreprise doit encore être une exploitation agricole dans le chef du de cujus au moment du décès constitue un élément essentiel pour l'application de la loi actuelle. La loi n'est donc pas applicable dans les situations où l'un des enfants a déjà repris l'exploitation parentale et où le régime successoral ne s'appliquera que beaucoup plus tard à l'égard des immeubles exploités. La ferme familiale est souvent affermée à l'enfant exploitant. En cas de contestation, il devra racheter la part de ses frères et sœurs, éventuellement par le biais d'une licitation. Dans un tel cas, le droit de préemption ne pourra pas non plus s'exercer. La présente proposition de loi s'efforce de remédier à ce problème ».
Dans le commentaire des articles, il est indiqué, en rapport avec l'article 2 : « Cet article élargit le champ d'application de la loi. L'idée qui sous-tendait la loi de 1988 était la continuité des exploitations agricoles et la possibilité pour les successeurs de reprendre l'ensemble de l'exploitation agricole (...). Dans les circonstances actuelles, une exploitation agricole n'est en effet pas toujours exploitée jusqu'au décès, mais est plutôt cédée à un successeur avant le décès. Dans ce contexte, certains immeubles sont cependant conservés, du moins en nue-propriété, par le cédant de l'exploitation agricole et tombent ainsi aussi dans la succession ouverte au moment du décès ».
5. Il ressort de ce qui précède qu'en ajoutant un troisième alinéa à l'article 1er de la loi du 29 août 1988, le législateur a voulu étendre le champ d'application de cette loi aux situations dans lesquelles l'exploitation agricole a déjà été transférée avant le décès à l'un des enfants. Par cette extension du champ d'application, le législateur a souhaité que la loi, à la lumière de l'évolution de la situation sociale, atteigne encore mieux son objectif, à savoir celui de promouvoir le transfert des exploitations agricoles d'une génération à l'autre.
Il s'ensuit que l'article 2 de la loi précitée du 23 août 2015 ne peut être considéré comme une disposition interprétative.
Le moyen, qui est fondé sur le soutènement contraire, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Beatrijs Deconinck, président, le président de section Alain Smetryns, les conseillers Geert Jocqué, Bart Wylleman et Koenraad Moens, et prononcé en audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-huit par le président de section Beatrijs Deconinck, en présence de l'avocat général Ria Mortier, avec l'assistance du greffier Vanessa Van de Sijpe.

Traduction établie sous le contrôle du conseiller Marie-Claire Ernotte et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.17.0320.N
Date de la décision : 22/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-03-22;c.17.0320.n ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award