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20/03/2018 | BELGIQUE | N°P.17.0636.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 20 mars 2018, P.17.0636.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0636.N
I. S.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Kurt Stas, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 4 mai 2017 par le tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque sept moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Ilse Couwenberg a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.



r>II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

1. Le moyen est pris de la violation des articles 6 et 13 de la ...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0636.N
I. S.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Kurt Stas, avocat au barreau de Bruxelles.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 4 mai 2017 par le tribunal correctionnel néerlandophone de Bruxelles, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque sept moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Ilse Couwenberg a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

1. Le moyen est pris de la violation des articles 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 13 de la Constitution, 26, § 2, alinéa 3 et 28 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle : le jugement attaqué refuse, à tort, de rouvrir les débats ; par télécopie du 2 mai 2017, le demandeur a fait état d'un jugement rendu par une autre juridiction qui pose à la Cour constitutionnelle les questions préjudicielles que le demandeur a lui-même formulées dans le cadre de cette procédure ; le refus de rouvrir les débats enfreint la logique de la question préjudicielle selon laquelle, lorsqu'est soulevée une question préjudicielle identique à une question déjà posée, il convient d'attendre l'arrêt de la Cour constitutionnelle avant de trancher le litige sur le fond ; par ce refus, les juges d'appel ont également entravé l'accès du demandeur au juge et son droit à un recours effectif puisque, en cas de réponse positive aux questions préjudicielles posées, il ne dispose plus d'aucun recours contre le jugement attaqué.

À titre subsidiaire, le demandeur invite la Cour à poser la question préjudicielle suivante à la Cour constitutionnelle : « Les articles 10, 11 et 13 de la Constitution, 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont-ils violés dans la mesure où le législateur n'a pas prévu, à l'article 10 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle, la possibilité de rétracter une décision pénale passée en force de chose jugée lorsque la Cour constitutionnelle a constaté une lacune intrinsèque dans la législation ou donne une interprétation conforme à la Constitution d'une disposition déterminée qui, le cas échéant, a fait l'objet d'une interprétation inconstitutionnelle par un juge dans le cadre d'un recours en annulation ou d'une procédure préjudicielle devant la Cour, sachant que le législateur a prévu, à l'article 10 de cette même loi spéciale, une possibilité de rétracter [une] décision pénale passée en force de chose jugée lorsque la Cour constitutionnelle procède à l'annulation d'une disposition ayant force de loi ? »
2. Ni l'article 26, § 2, alinéa 2, 2°, ni l'article 28 de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle n'obligent une juridiction devant laquelle est soulevée une question préjudicielle dont le sujet est identique à celui d'une question dont la Cour constitutionnelle est déjà saisie, de réserver sa décision jusqu'à ce que cette cour se soit prononcée sur cette question. Pareille obligation ne découle pas davantage des articles 6 et 13 de la Convention ni de l'article 13 de la Constitution.

Le moyen, qui est déduit d'une autre prémisse juridique, manque en droit.

3. La question préjudicielle procède de la prémisse erronée que le juge qui est invité à poser une question préjudicielle dont le sujet est identique à celui d'une question préjudicielle dont la Cour constitutionnelle est déjà saisie, est tenu de réserver sa décision jusqu'à ce que cette cour ait statué à ce sujet.

Il n'y a pas lieu de poser la question préjudicielle.
(...)
Sur le troisième moyen :
(...)
Quant à la seconde branche :

7. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation des articles 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 22 de la Constitution, 15 à 22 de la loi du 19 mai 2010 portant création de la Banque-Carrefour des véhicules : le jugement attaqué considère, à tort, que la loi du 19 mai 2010 confère aux services de police le pouvoir de procéder à l'identification du titulaire de la plaque d'immatriculation ; ladite loi se borne à régler l'accès à cette banque de données et ne définit pas les conditions dans lesquelles la police peut procéder à l'identification du titulaire de la plaque d'immatriculation ; le fait d'interroger la banque de données pour obtenir des données à caractère personnel liées à une plaque d'immatriculation constitue une atteinte à la vie privée et requiert un fondement juridique exprès autorisant cette ingérence.
8. Conformément à l'article 8 de la loi précitée, la Banque-Carrefour des véhicules tient à jour le répertoire matricule des véhicules prévu aux articles 6, 7, 8 et 9 de l'arrêté royal du 20 juillet 2001 relatif à l'immatriculation de véhicules. Ce répertoire mentionne, entre autres, le numéro de la plaque d'immatriculation du véhicule et les données à caractère personnel du titulaire du certificat d'immatriculation.

Selon l'article 7, alinéas 1 et 2, de la loi du 19 mai 2010, les véhicules enregistrés sont identifiés par un numéro d'identification unique et cet enregistrement s'accompagne, entre autres, de l'indication des données mentionnées dans le certificat de conformité du véhicule et des données d'identification de la personne physique ou morale propriétaire du véhicule.

9. Il résulte de ces dispositions que l'accès aux données à caractère personnel contenues dans la Banque-Carrefour des véhicules implique l'accès aux données permettant d'identifier le titulaire d'une plaque d'immatriculation.

Le moyen qui, en cette branche, procède d'une autre prémisse juridique, manque en droit.

Sur le quatrième moyen :
(...)
Quant à la troisième branche :

14. Le moyen, en cette branche, est pris de la violation de l'article 1er de la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police : le jugement attaqué considère, à tort, que le fait pour la police d'interroger la Banque-Carrefour des véhicules afin d'obtenir des données à caractère personnel dans le cadre de sa mission légale n'est pas une mesure de contrainte ; la notion de mesure de contrainte telle que visée à l'article 1er, alinéa 3, de cette loi ne porte pas seulement sur la contrainte matérielle au sens de violence physique, mais également sur l'atteinte aux libertés individuelles.

15. Le jugement attaqué ne statue pas uniquement comme énoncé au moyen, en cette branche. Il considère également que les irrégularités constatées n'ont pas porté atteinte au droit du demandeur à un procès équitable pour les motifs suivants :
- le fait que les services de police aient demandé les données à caractère personnel sans disposer de l'autorisation requise à cet effet ou avoir fait la déclaration requise ne sont pas des atteintes telles à la personne du contrevenant que son droit à un procès équitable et son droit au respect de sa vie privée s'en voient violés ;
- les irrégularités commises ne sont pas proportionnelles à la gravité des infractions pénales mises à charge du demandeur et n'ont aucune incidence sur le droit ou la liberté qui sont protégés par la norme méconnue ;
- les renseignements ainsi obtenus ont, en outre, été portés à la connaissance du demandeur qui a eu la possibilité de se défendre sur ce point, de sorte que ces éléments de preuve ont été soumis à contradiction.

Le moyen qui, en cette branche, omet d'inclure ces motifs dans sa critique repose sur une lecture incomplète du jugement attaqué et manque en fait.
(...)
Sur le septième moyen :

31. Le moyen est pris de la violation des articles 508/13 et 667 du Code judiciaire, 1319, 1320 et 1322 du Code civil : le jugement attaqué considère, à tort, que les pièces transmises par le demandeur ne convainquent pas le tribunal de sa prétendue situation financière précaire ; dans ses conclusions d'appel, le demandeur a fait état de l'attribution d'une aide juridique de deuxième ligne, le document concerné ayant été joint également à ces conclusions ; en considérant qu'il n'existe aucun élément convaincant à l'appui de la précarité alléguée de sa situation financière, les juges d'appel ont méconnu la force probante des conclusions du demandeur et enfreint les règles relatives à l'aide juridique de deuxième ligne.

32. Par la considération reproduite au moyen, le jugement attaqué n'interprète pas les conclusions du demandeur mais en tire une conséquence juridique.

Dans cette mesure, le moyen manque en fait.

33. L'article 195, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle autorise le juge à prononcer une peine d'amende inférieure au minimum légal si le contrevenant soumet un document qui apporte la preuve de sa situation financière précaire.

Le fait qu'une partie ait droit à une aide juridique de deuxième ligne n'implique pas que cette partie se trouve automatiquement dans une situation financière précaire telle que visée dans la disposition précitée.

Dans la mesure où il procède d'une autre prémisse juridique, le moyen manque en droit.

34. Le juge apprécie souverainement si les documents soumis suffisent à prouver une situation financière précaire au sens de l'article 195, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle.

Dans la mesure où il critique cette appréciation souveraine ou requiert un examen des faits pour lequel la Cour est sans pouvoir, le moyen est irrecevable.

Le contrôle d'office

35. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch, Antoine Lievens et Ilse Couwenberg, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt mars deux mille dix-huit par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général délégué Alain Winants, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.

Traduction établie sous le contrôle du conseiller François Stévenart Meeûs et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

Le greffier, Le conseiller,


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0636.N
Date de la décision : 20/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-03-20;p.17.0636.n ?

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