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07/03/2018 | BELGIQUE | N°P.17.0558.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 07 mars 2018, P.17.0558.F


N° P.17.0558.F
C. P.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Christophe Taquin, avocat au barreau de Mons.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 19 avril 2017 par la cour d'appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.



II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premi

er moyen :

1. Le moyen est pris de la violation de l'article 209 du Code pénal social.

Le demandeur a f...

N° P.17.0558.F
C. P.,
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Christophe Taquin, avocat au barreau de Mons.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 19 avril 2017 par la cour d'appel de Mons, chambre pénale sociale.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Eric de Formanoir a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur le premier moyen :

1. Le moyen est pris de la violation de l'article 209 du Code pénal social.

Le demandeur a fait valoir devant la cour d'appel que l'absence de documents sociaux en date du 20 décembre 2013 ne provenait pas d'une volonté de faire obstacle au contrôle. Il soutient qu'en énonçant, pour rejeter cette défense, que l'infraction d'obstacle à la surveillance ne requiert « aucun élément moral ou intentionnel spécifique », l'arrêt viole la disposition visée au moyen, dès lors que cette infraction exige, à titre d'élément moral, la volonté de faire obstacle au contrôle.

2. L'article 209, alinéa 1er, du Code pénal social punit toute personne qui met obstacle à la surveillance organisée en vertu du Code pénal social et de ses arrêtés d'exécution.

L'élément moral de cette infraction, autrement dit la faute que la loi punit, consiste dans le caractère volontaire et conscient de l'entrave mise à la surveillance des inspecteurs sociaux.

La preuve de cet élément peut être déduite du seul constat que le prévenu a empêché la mission des inspecteurs sociaux par une action ou par une abstention caractérisée, sauf à l'auteur à rendre suffisamment plausible qu'en raison d'une cause de justification, comme la force majeure et l'ignorance ou l'erreur invincibles, il n'a commis aucune faute.

3. Pour décider que « c'est donc en vain que le [demandeur] invoque en termes de conclusions que l'absence de documents sociaux [le 20 décembre 2013] ne proviendrait pas d'une volonté de faire obstacle au contrôle » et que les faits de la prévention d'obstacle à la surveillance déclarés établis par le premier juge sont demeurés tels en degré d'appel, l'arrêt considère, en substance, que
- le demandeur n'a pas respecté l'engagement pris à l'égard des inspecteurs sociaux de leur fournir avant la date convenue divers documents, dont des comptes individuels,
- il a manqué les rendez-vous que les inspecteurs sociaux ont fixés par courrier ordinaire ou recommandé,
- le retard de l'inspecteur social à un des rendez-vous ne pouvait justifier l'absence du demandeur, dès lors que ce prétendu retard était d'une durée inférieure à celle prévue pour le contrôle,
- contrairement à ce que le demandeur prétend, la convocation à un autre rendez-vous manqué figure bien au dossier.

4. Par ces considérations, les juges d'appel ont constaté, d'une part, qu'en s'étant abstenu de produire les documents promis et de respecter les rendez-vous fixés, le demandeur avait fait obstacle à la surveillance des inspecteurs sociaux et, d'autre part, que les éléments présentés par ce dernier à l'appui de sa défense soutenant qu'il n'avait pas eu la volonté de faire obstacle au contrôle, n'étaient pas de nature à justifier son comportement.

Ainsi, les juges d'appel ont légalement justifié leur décision de déclarer établie à charge du demandeur l'infraction d'obstacle à la surveillance.

Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le second moyen :

5. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 14.3, g, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

L'arrêt constate que le demandeur a invoqué devant la cour d'appel son droit au silence au motif que le contrôle aurait été motivé par l'instruction d'une plainte à sa charge. Dès lors que le droit de garder le silence et de ne pas s'incriminer s'étend au droit de ne pas produire des documents contre soi-même, le moyen soutient qu'en considérant que « le droit au silence ne peut être invoqué qu'à partir du moment où la personne concernée a répondu aux convocations des services de contrôle en leur laissant l'accès aux locaux et aux documents sociaux », l'arrêt viole les dispositions visées au moyen.

6. Le droit au silence et celui de ne pas s'incriminer ne s'étendent pas à l'usage, dans une procédure pénale, de données que l'on peut obtenir de l'accusé en recourant à des pouvoirs coercitifs mais qui existent indépendamment de la volonté du suspect.

7. En vertu de l'article 28, § 1er, alinéa 1er, du Code pénal social, les inspecteurs sociaux peuvent se faire produire tous les supports d'information qui se trouvent sur les lieux de travail ou d'autres lieux qui sont soumis à leur contrôle. Ce pouvoir est subordonné à la condition que ces supports d'information contiennent soit des données sociales visées à l'article 16, 5°, dudit code, soit n'importe quelles autres données dont l'établissement, la tenue ou la conservation sont prescrits par la législation, même lorsque les inspecteurs sociaux ne sont pas chargés de la surveillance de cette législation.

8. Le compte individuel est un document social dont la tenue est imposée par l'arrêté royal n° 5 du 23 octobre 1978 relatif à la tenue des documents sociaux. L'article 7, alinéa 2, de cet arrêté énonce que les inspecteurs sociaux disposent des pouvoirs visés aux articles 23 à 39 du Code pénal social lorsqu'ils agissent d'initiative ou sur demande dans le cadre de leur mission d'information, de conseil et de surveillance relative au respect des dispositions de l'arrêté précité et de ses arrêtés d'exécution.

9. La cour d'appel a constaté que parmi les documents que les inspecteurs sociaux ont demandés figurent des comptes individuels.

10. Dès lors que les comptes individuels des travailleurs sont des documents sociaux dont la tenue est obligatoire en vertu de la loi, les juges d'appel, par la considération critiquée, n'ont pas violé les dispositions visées au moyen.

Le moyen ne peut être accueilli.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de septante et un euros un centime dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le chevalier Jean de Codt, premier président, Benoît Dejemeppe, président de section, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du sept mars deux mille dix-huit par le chevalier Jean de Codt, premier président, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
F. Gobert F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir B. Dejemeppe J. de Codt


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0558.F
Date de la décision : 07/03/2018

Analyses

INFRACTION ; GENERALITES ; NOTION ; ELEMENT MATERIEL ; ELEMENT MORAL ; UNITE D'INTENTION


Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-03-07;p.17.0558.f ?

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