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27/02/2018 | BELGIQUE | N°P.17.0593.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 27 février 2018, P.17.0593.N


Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0593.N
1. S. M.,
2. L. B.,
prévenus,
demandeurs en cassation,
Me Ronald Wijnen, avocat au barreau d'Anvers,

contre

1. B. V.,
partie civile,
(...)
4. COLLÈGE DES BOURGMESTRE ET ÉCHEVINS de la VILLE D'ANVERS,
demandeur en réparation,
défendeurs en cassation.


I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 3 mai 2017 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
Les demandeurs invoquent quatre moyens dan

s un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'a...

Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0593.N
1. S. M.,
2. L. B.,
prévenus,
demandeurs en cassation,
Me Ronald Wijnen, avocat au barreau d'Anvers,

contre

1. B. V.,
partie civile,
(...)
4. COLLÈGE DES BOURGMESTRE ET ÉCHEVINS de la VILLE D'ANVERS,
demandeur en réparation,
défendeurs en cassation.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 3 mai 2017 par la cour d'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.
Les demandeurs invoquent quatre moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général Luc Decreus a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR
(...)
Sur le deuxième moyen :

Quant à la première branche :

7. Le moyen, en cette branche, invoque la violation de l'article 3 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale : l'arrêt ordonne, à tort, la réparation se rapportant à l'appartement au rez-de-chaussée à droite et l'appartement au deuxième étage à gauche ; les demandeurs n'ont pas été poursuivis du chef d'infractions en matière d'urbanisme concernant ces appartements, de sorte que les juges d'appel ne pouvaient ordonner la réparation à l'égard de ces appartements ; l'arrêt décide, à tort, que le contenu du dossier répressif montre qu'un lien de causalité unit incontestablement l'augmentation supposée du nombre d'unités d'habitation dans les appartements situés au rez-de-chaussée à gauche et au troisième étage à gauche (préventions B.I et B.II) et l'augmentation du nombre d'unités d'habitation dans les appartements situés au rez-de-chaussée à droite et dans l'appartement au deuxième étage à gauche.

8. Le fondement de l'action en réparation n'est pas l'article 3 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, mais bien l'article 6.1.41, § 1er, alinéa 1er, du Code flamand de l'aménagement du territoire, l'article 44 du Code pénal et les articles 161 et 189 du Code d'instruction criminelle.
Dans la mesure où il invoque la violation de l'article 3 du titre préliminaire du Code de procédure pénale, le moyen, en cette branche, manque en droit.

9. En matière correctionnelle, l'ordonnance de renvoi de la juridiction d'instruction ou la citation saisit le juge du fond des faits tels qu'ils ressortent de l'instruction ou de l'information et fondent l'ordonnance de renvoi ou la citation.

10. L'action en réparation doit se greffer sur les faits qui constituent l'objet d'une prévention déclarée établie. Elle tend à rétablir la légalité pour l'avenir et doit prendre en considération la situation modifiée, le cas échéant.

11. La seule circonstance qu'après la commission des faits poursuivis, des modifications ont été apportées à la construction faisant l'objet des poursuites pénales ou que cette construction a été remplacée par une autre, n'empêche pas que l'action en réparation reste greffée sur les faits des poursuites pénales, quand bien même les modifications à la construction visée ou son remplacement ne font pas l'objet des poursuites pénales. Dès lors qu'un lien de causalité unit la situation illégale, telle qu'elle existe au moment de la décision rendue sur l'action en réparation, et la situation illégale qui constitue l'objet de la prévention, l'action en réparation reste greffée sur les faits de la prévention, nonobstant la modification apportée ou le remplacement.

12. Le juge se prononce souverainement en fait sur l'existence de ce lien de causalité. La Cour vérifie uniquement si le juge ne tire pas de ses constatations des conséquences sans lien avec celles-ci ou qu'elles ne sauraient justifier.

13. Par les préventions B.I et B.II, les demandeurs ont été poursuivis du chef d'infractions en matière d'urbanisme concernant l'appartement situé au rez-de-chaussée à gauche (B.I) et l'appartement situé au troisième étage à gauche, dans un immeuble sis Helmstraat 129/131 et consistant à chaque fois en l'augmentation du nombre d'unités d'habitation de une à quatre.
14. L'arrêt décide que :
- l'action en réparation du défendeur 4 du 8 janvier 2016, qui a été soumise au Conseil supérieur pour l'exécution du maintien le 11 janvier 2016 et a reçu un avis favorable le 9 février 2016, vise l'adaptation de l'immeuble, de sorte que la situation soit conforme à l'autorisation du 7 août 1928 et à l'autorisation du 30 juin 1994, à savoir un logement comportant neuf unités d'habitation, ce qui implique les adaptations suivantes : (1) au rez-de-chaussée le démantèlement des six unités d'habitation indépendantes et des deux chambres et la division du rez-de-chaussée en trois appartements indépendants, conformément à l'autorisation du 30 juin 1994 ; (2) au deuxième étage, le démantèlement des cinq chambres et la création d'un seul appartement indépendant, conformément à l'autorisation du 7 août 1928 ; au troisième étage, le démantèlement des trois chambres et la création d'un seul appartement, conformément à l'autorisation du 7 août 1928 ;
- le contenu du dossier répressif fait apparaître qu'il existe incontestablement un lien de causalité entre, d'une part, les actes posés par les demandeurs (l'augmentation du nombre d'unités d'habitation ou le fait d'y consentir en tant que propriétaires) concernant le rez-de-chaussée à gauche (prévention B.I) et le troisième étage à gauche (prévention B.II) et, d'autre part, les actes posés par les demandeurs concernant les appartements au rez-de-chaussée à droite et l'appartement au deuxième étage à gauche ;
- de plus, annuler l'augmentation des unités d'habitation dans l'appartement au rez-de-chaussée à droite et dans l'appartement au deuxième étage à gauche est nécessaire afin de faire cesser le trouble causé à l'aménagement du territoire par les infractions déclarées établies sous les préventions B.I et B.II ;
- la seule circonstance que des modifications ont été apportées au cours de la procédure aux constructions faisant l'objet des poursuites pénales n'empêche pas que l'action en réparation qui tend à rétablir la légalité pour l'avenir et doit prendre en considération la situation modifiée, reste greffée sur les faits des poursuites pénales sous les préventions B.I et B.II, quand bien même les modifications ne font elles-mêmes pas l'objet des poursuites pénales ;
- dès lors qu'un lien de causalité unit la situation illégale, telle qu'elle existe au moment de la décision rendue sur l'action en réparation, et la situation illégale qui constitue l'objet de la prévention, l'action en réparation reste greffée sur les faits de la prévention, nonobstant les modifications apportées ;
- l'immeuble connu comme habitation plurifamiliale comportant neuf unités d'habitation selon les constatations de décembre 2014 a ensuite été divisé en un bien comportant dix-huit unités d'habitation, ce qui dépasse drastiquement le potentiel habitable intrinsèque de l'immeuble et est inadmissible ;
- cette augmentation du nombre d'unités d'habitation et les transformations et travaux d'adaptation qui y sont liés ont fondamentalement modifié la nature de l'immeuble par l'installation de boîtes aux lettres et de sonnettes supplémentaires, la démolition de murs intérieurs, la pose de nouvelles portes et fenêtres, les adaptations du système électrique, l'installation de nouvelles canalisations pour les sanitaires, l'eau et l'électricité comprenant le perçage de sols et de murs des parties communes, un surplus d'ordures ménagères, etc., les constatations et photographies telles qu'elles figurent dans le rapport d'évaluation du 16 février 2015 pouvant servir de référence à cet égard ;
- compte tenu de leur nature, les actes posés par les demandeurs concernant le rez-de-chaussée à gauche (prévention B.I) et le troisième étage à gauche (prévention B.II) ne peuvent donc être dissociés des actes posés par les demandeurs concernant l'appartement au rez-de-chaussée à droite et l'appartement au deuxième étage à gauche.

Par ces motifs, l'arrêt peut légalement décider que l'action en réparation relative aux appartements situés au rez-de-chaussée à droite et au deuxième étage à gauche est greffée aux actes illégaux dont les demandeurs ont été reconnus coupables sous les préventions B.I et B.II, de sorte qu'un lien de causalité unit la situation illégale, telle qu'elle existe au moment de la décision rendue sur l'action en réparation, et la situation illégale qui fait l'objet des préventions B.I et B.II et que les juges d'appel peuvent faire droit sur l'action en réparation relative aux appartements situés au rez-de-chaussée à droite et au deuxième étage à gauche. Cette décision est légalement justifiée.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
(...)
Sur le quatrième moyen :

Quant à la première branche :

21. Le moyen, en cette branche, invoque la violation de l'article 3 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale : l'arrêt accorde, à tort, des réserves pour la désignation d'un expert judiciaire en vue de déterminer le surplus éventuel du dommage à l'immeuble ; le premier juge avait rejeté la demande de dommages-intérêts pour la perte de valeur de l'appartement ; les défendeurs 1 à 3 n'ont pas interjeté un appel incident en ce qui concerne les postes relatifs à la perte de valeur de l'immeuble ou le dommage à l'immeuble ; ils ont uniquement introduit un appel incident en ce qui concerne le poste de la violation du droit à la paisible propriété-jouissance de leur habitation ; par conséquent, les juges d'appel n'ont plus, concernant ce poste, le pouvoir juridictionnel d'accorder des réserves quant à la désignation d'un expert judiciaire.

22. L'article 203, § 4, du Code d'instruction criminelle dispose que, dans tous les cas où l'action civile sera portée devant la juridiction d'appel, l'intimé pourra, jusqu'à clôture des débats sur l'appel, faire appel incident par conclusions prises à l'audience.

23. Une partie peut uniquement introduire un appel incident contre une partie qui a interjeté un appel principal contre elle-même. La possibilité d'un appel incident ne se limite toutefois pas aux postes de dommage pour lesquels un appel principal a été introduit. Les autres postes de l'action civile peuvent également faire l'objet d'un appel incident.

Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.

24. En ce qui concerne l'action civile dirigée par les défendeurs 1 à 3 contre les demandeurs, il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard ce qui suit :
- le premier juge a rejeté la demande de désignation d'un expert parce qu'il fallait d'abord attendre la réparation et il n'a pas accueilli la demande relative au dommage causé par les nuisances, aux frais, à la perte de jouissance ainsi qu'au dommage résultant des faux commis ;
- les demandeurs ont interjeté appel de toutes les dispositions du jugement et donc également de ce qui concerne la décision rendue sur l'action civile des défendeurs 1 et 3 ;
- l'arrêt constate que les défendeurs 1 à 3 ont, par leurs conclusions d'appel, introduit un appel incident et demandé notamment la désignation d'un expert afin de mesurer le préjudice final au terme des travaux de réparation ;
- l'arrêt décide que cette action est prématurée et il accorde aux défendeurs 1 à 3 des réserves pour la demande de désignation d'un expert judiciaire en vue de déterminer le surplus éventuel du dommage à l'immeuble.

La décision qui déclare recevable l'appel incident des défendeurs 1 et 3 relatif à la désignation d'un expert, est ainsi légalement justifiée.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
(...)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux frais de leurs pourvois.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch, Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept février deux mille dix-huit par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général Luc Decreus, avec l'assistance du greffier délégué Véronique Kosynsky.

Traduction établie sous le contrôle du président de section Benoît Dejemeppe et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0593.N
Date de la décision : 27/02/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-02-27;p.17.0593.n ?

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