Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0882.N
M. Y.,
prévenu,
demandeur en cassation,
Me Kurt Stas, avocat au barreau de Bruxelles.
I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR
Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 16 juin 2017 par le tribunal correctionnel d'Anvers, division Anvers, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.
II. LA DÉCISION DE LA COUR
Sur le premier moyen :
Quant à la première branche :
1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 13 de la loi du 16 mars 1968 relative à la police de la circulation routière, 1, 5, 69.1 et 80.1 de l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière (ci-après : code de la route) : le jugement attaqué décide qu'un signal d'obligation D1 (obligation de suivre la direction indiquée par la flèche) a force obligatoire lorsqu'il est fixé sur une façade à un carrefour ; un signal d'obligation a force obligatoire lorsqu'il se trouve sur la voie publique ; une façade ne fait pas partie de la voie publique.
2. Il ne résulte d'aucune disposition légale ou réglementaire que les signaux d'obligation doivent être placés sur la voie publique même pour avoir force obligatoire. En vertu de l'article 69.1 du code la route, il est uniquement requis que de tels signaux soient placés à l'endroit où leur visibilité est la mieux assurée. Cela peut être sur la façade d'un immeuble.
Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémisse juridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.
3. Le jugement attaqué décide que le signal d'obligation D1 qui, en l'espèce, est fixé sur une façade, est placé à l'endroit où sa visibilité est la mieux assurée, compte tenu de son emplacement. Ainsi, il justifie légalement sa décision.
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
(...)
Sur le second moyen :
11. Le moyen invoque la violation des articles 7, 8, 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 6, 8, 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 22 et 149 de la Constitution : le jugement attaqué constate que le demandeur allègue que la police s'est arrogé l'accès aux données à caractère personnel de la Banque-Carrefour des Véhicules et confronte ensuite l'élément de preuve aux conditions de l'article 32 de la loi du 17 avril 1878 contenant le Titre préliminaire du Code de procédure pénale concernant l'exclusion de la preuve ; ainsi, le jugement attaqué ne répond pas à la défense du demandeur relative à l'absence d'autorisation de la police pour consulter la Banque-Carrefour des Véhicules et il ne comporte pas les éléments de fait permettant à la Cour d'exercer son contrôle de la légalité ; le jugement attaqué méconnaît, à tout le moins, le droit du demandeur à une réparation en droit effective ; conséquemment au fait que la police ait eu accès, sans l'autorisation requise, aux données à caractère personnel du demandeur contenues dans la Banque-Carrefour des Véhicules, le droit du demandeur au respect de sa vie privée est méconnu ; utiliser néanmoins la preuve illégale, contrairement au droit du demandeur au respect de sa vie privée, prive le demandeur d'un recours effectif contre la violation de son droit fondamental.
12. Les juges d'appel ont résumé la défense du demandeur et ont ensuite confronté la preuve qui leur a été soumise à l'article 32 du Titre préliminaire du Code de procédure pénale, le contrôle indiquant que cette preuve a été obtenue irrégulièrement.
Ainsi, ils ont répondu à la défense du demandeur et ont permis à la Cour d'exercer son contrôle de la légalité.
Dans cette mesure, le moyen manque en fait.
13. Le fait que des éléments de preuve ont été obtenus en violation du droit au respect de la vie privée garanti par les articles 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 8 de la Convention et 22 de la Constitution ou du droit à la protection des données à caractère personnel garanti par l'article 8 de la Charte n'entraîne pas toujours la violation de l'article 6 de la Convention ou du droit à un procès équitable.
14. L'article 32 du Titre préliminaire du Code de procédure pénale dispose que la nullité d'un élément de preuve obtenu irrégulièrement n'est décidée que si le respect des conditions formelles concernées est prescrit à peine de nullité, ou si l'irrégularité commise a entaché la fiabilité de la preuve, ou si l'usage de celle-ci est contraire au droit à un procès équitable.
En vertu de cette disposition, les irrégularités par lesquelles aucune condition de forme prescrite à peine de nullité n'est violée et qui ne satisfont pas davantage aux autres conditions qui y sont mentionnées ne sont pas déclarées nulles ou écartées des débats. Cette règle s'applique à toutes les irrégularités, qu'elles constituent une infraction à un droit garanti conventionnellement ou à un droit garanti par la Constitution qui vise la protection de la vie privée.
15. Le fait que le juge confronte la preuve obtenue irrégulièrement aux conditions de l'article 32 susmentionné implique une réparation en droit effective telle que visée aux articles 47, alinéa 1er, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 13 de la Convention.
16. Dans la mesure où il est déduit d'autres prémisses juridiques, le moyen manque en droit.
Le contrôle d'office
17. Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Paul Maffei, président, Peter Hoet, Antoine Lievens, Erwin Francis et Ilse Couwenberg, conseillers, et prononcé en audience publique du vingt février deux mille dix-huit par le président Paul Maffei, en présence de l'avocat général délégué Alain Winants, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.