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19/02/2018 | BELGIQUE | N°S.17.0066.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 19 février 2018, S.17.0066.F


N° S.17.0066.F
OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, établissement public, dont le siège est établi à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,

contre

A. E.,
défendeur en cassation.


I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 18 mai 2017 par la cour du travail de Bruxelles.
Le président de se

ction Christian Storck a fait rapport.
L'avocat général Jean Marie Genicot a conclu.
II. Le moyen ...

N° S.17.0066.F
OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, établissement public, dont le siège est établi à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,
demandeur en cassation,
représenté par Maître Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149, où il est fait élection de domicile,

contre

A. E.,
défendeur en cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 18 mai 2017 par la cour du travail de Bruxelles.
Le président de section Christian Storck a fait rapport.
L'avocat général Jean Marie Genicot a conclu.
II. Le moyen de cassation
Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants :

Disposition légale violée

Article 169, spécialement alinéas 1er et 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage

Décisions et motifs critiqués

L'arrêt confirme la décision du demandeur en ce qui concerne le principe de l'exclusion du défendeur du bénéfice des allocations de chômage à partir du 1er avril 2007 mais, lui reconnaissant le bénéfice de la bonne foi, limite le montant de la récupération de l'indu à la somme de 4.565,86 euros, correspondant au montant des revenus bruts imposables recueillis par le défendeur en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse.
L'arrêt fonde sa décision sur les motifs qu'il indique sub B « La récupération des allocations indues », considérés ici comme intégralement reproduits, et plus particulièrement sur les considérations suivantes :

« L'article 169, alinéa[s] 1er et 5, est rédigé comme suit :
‘Toute somme perçue indûment doit être remboursée.
[...] Par dérogation aux alinéas précédents, le montant de la récupération peut être limité au montant brut des revenus dont le chômeur a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec les allocations de chômage, lorsque le chômeur prouve qu'il a perçu de bonne foi des allocations auxquelles il n'avait pas droit, ou lorsque le directeur décide de faire usage de la possibilité de ne donner qu'un avertissement au sens de l'article 157bis' ;
Cette disposition ne définit pas ce qu'il faut entendre par ‘montant brut des revenus' ;
La cour [du travail] estime que cette notion correspond au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles, pour les raisons suivantes :
a) On ne peut confondre, contrairement à ce que fait [le demandeur], le bénéfice brut, qui correspond au chiffre d'affaires, avec des revenus ; pour le travailleur indépendant, constitue seul des revenus, au sens commun comme au sens fiscal, le bénéfice brut diminué de ses charges professionnelles ;
b) L'article 169, alinéa 5, ne distingue pas les revenus selon que l'activité prohibée a pour origine un travail salarié ou un travail indépendant ; compte tenu des modes particuliers à chacun de ces régimes de précompte professionnel et de cotisations sociales, le recours à la notion de revenu brut imposable est celle qui crée le moins de différence, sinon de discrimination, entre salariés et indépendants ;
c) Le bénéfice brut, soit le chiffre d'affaires, d'un travailleur indépendant n'est pas déterminant de ses revenus ; c'est le rapport entre le bénéfice brut et ses charges qui détermine les revenus ou, éventuellement, ses pertes ; si l'on devait se baser uniquement sur le bénéfice brut, on créerait des discriminations injustifiées non seulement entre travailleurs salariés et travailleurs indépendants mais également entre travailleurs indépendants selon que l'activité indépendante exercée génère des frais professionnels plus ou moins importants ;
d) [Le demandeur] lui-même, dans ses propres commentaires administratifs de l'article 169, alinéa 5, écrit : ‘en cas de revenus comme salarié et d'allocations sociales, il est tenu compte du montant brut ; en cas de revenus comme indépendant, il est tenu compte du revenu net imposable' ;
Il y a donc lieu de limiter les sommes à récupérer au montant des revenus bruts imposables recueillis par [le défendeur] en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse, soit 4.565,86 euros ».

Griefs

1. En vertu de l'article 169, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, toute somme perçue indûment doit être remboursée.
Conformément à l'alinéa 5 du même article, lorsque le chômeur prouve qu'il a perçu de bonne foi des allocations auxquelles il n'avait pas droit, le montant de la récupération peut, par dérogation aux alinéas précédents de cet article, être limité au montant brut des revenus dont il a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec les allocations.
2. Il suit de cette disposition que le chômeur qui a perçu de bonne foi des allocations indues peut bénéficier de la limitation de la récupération au montant brut des revenus générés par son activité.
Le texte fait expressément référence au montant brut des revenus. Il ne faut donc pas se référer au montant net (pour les revenus tirés d'une activité accessoire salariée) ou imposable (pour les revenus tirés d'une activité accessoire d'indépendant).
3. L'arrêt décide qu'en raison de sa bonne foi, le défendeur peut légitimement invoquer l'application de l'article 169, alinéa 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 mais estime que la notion de « montant brut des revenus » correspond au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles.
Dans la mesure où il limite le montant de la récupération des allocations de chômage perçues indûment au montant imposable des revenus recueillis par le défendeur en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse, alors que le texte de l'alinéa 5 de l'article 169 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage se réfère expressément au montant brut des revenus, l'arrêt viole l'article 169, spécialement alinéas 1er et 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage.
III. La décision de la Cour

Aux termes de l'article 169, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, toute somme perçue indûment doit être remboursée.
Conformément à l'alinéa 5 du même article, lorsque le chômeur prouve qu'il a perçu de bonne foi des allocations auxquelles il n'avait pas droit ou lorsque le directeur décide de faire usage de la possibilité de ne donner qu'un avertissement au sens de l'article 157bis, le montant de la récupération peut, par dérogation aux alinéas précédents, être limité au montant brut des revenus dont le chômeur a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec les allocations de chômage.
Il suit des termes mêmes de cette disposition que c'est au montant brut des revenus produits par l'activité du chômeur que la récupération peut être limitée, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon qu'il s'agit d'une activité salariée ou d'une activité indépendante.
L'arrêt, qui, par les motifs que le moyen reproduit et critique, limite la récupération des allocations indûment perçues par le défendeur, à qui il reconnaît le bénéfice de la bonne foi, « au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles », des revenus produits par l'activité indépendante de celui-ci, viole l'article 169, alinéas 1er et 5, précités.
Le moyen est fondé.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il limite la récupération au montant brut imposable des revenus dont le défendeur a bénéficié et qu'il statue sur les dépens ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Vu l'article 1017, alinéa 2, du Code judiciaire, condamne le demandeur aux dépens ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour du travail de Liège.
Les dépens taxés à la somme de cent nonante-six euros septante et un centimes envers la partie demanderesse, y compris la somme de vingt euros au profit du Fonds budgétaire relatif à l'aide juridique de deuxième ligne.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Christian Storck, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononcé en audience publique du dix-neuf février deux mille dix-huit par le président de section Christian Storck, en présence de l'avocat général Jean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.
L. Body S. Geubel M.-Cl. Ernotte
M. Lemal M. Delange Chr. Storck


Requête

1er feuillet

00170558
REQUÊTE EN CASSATION
POUR : L'Office National de l'Emploi, en abrégé O.N.Em., établissement public ayant son siège social à 1000 Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 7,
demandeur en cassation,
assisté et représenté par Me Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation soussigné, dont le cabinet est établi à 1050 Bruxelles, avenue Louise, 149 (Bte 20), où il est fait élection de domicile.
CONTRE : Monsieur A. E.I., ,
défendeur en cassation.
*
A Messieurs les Premier Président et Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers composant la Cour de cassation de Belgique,
Messieurs,
Mesdames,
Le demandeur en cassation a l'honneur de soumettre à votre censure l'arrêt rendu contradictoirement entre les parties le 18 mai 2017 par la cour du travail de Bruxelles (8ème chambre, R.G. n° 2014/AB/842). 2ème feuillet

Les faits et antécédents de la cause, tels qu'ils ressortent des pièces de la procédure et des constatations de l'arrêt attaqué, sont les suivants :
1. Lors d'une consultation de la banque de données des travailleurs indépendants, l'ONEm a constaté que, tout en bénéficiant des allocations pour les heures de chômage temporaire, M. E. a effectué, à partir du 1er avril 2007, une activité d'indépendant pour son propre compte.
Le 15 octobre 2010, l'ONEm a pris la décision :
- d'exclure M. E. du bénéfice des allocations de chômage à partir du 1er avril 2007 ;
- de récupérer les allocations perçues indûment du 1er octobre 2007 au 31 mai 2010 ;
- de l'exclure du droit aux allocations de chômage à partir du 18 octobre 2010 pendant une période de 7 semaines.
Par formulaire du 5 septembre 2013, le montant de l'indu est fixé à 8.281,11 euro .
2. M. E. a contesté cette décision devant le tribunal du travail francophone de Bruxelles, demandant d'annuler cette décision ou, à titre subsidiaire, de remplacer la sanction par un simple avertissement et de reconnaître sa bonne foi afin de limiter la récupération au montant brut des revenus perçus non cumulables avec les allocations de chômage sur pied de l'article 169, alinéa 5 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991.
Par un jugement du 25 juin 2014, le tribunal du travail francophone de Bruxelles a déclaré la demande recevable et partiellement fondée. Le tribunal a confirmé la décision du 15 octobre 2010 en son principe mais a réduit la récupération à la somme de 2.395,61 euro en application de l'article 169, alinéa 5 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 et a décidé de remplacer la sanction par un avertissement en application de l'article 157bis de l'arrêté royal du 25 novembre 1991. Le jugement a condamné l'ONEM aux dépens de l'instance.
3. L'ONEm a interjeté appel de ce jugement. M. E. a, quant à lui, formé un appel incident. 3ème feuillet

Aux termes de son arrêt du 18 mai 2017, la cour du travail de Bruxelles déclare les appels non fondés, confirme le jugement dont appel dans toutes ses dispositions et condamne l'ONEm à payer à M. E. les frais et dépens des procédures d'instance et d'appel.
*
A l'appui du pourvoi qu'il forme contre cet arrêt, le demandeur a l'honneur d'invoquer le moyen unique de cassation suivant.
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Disposition légale violée
- l'article 169, spécialement alinéas 1er et 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage.
Décision et motifs critiqués
L'arrêt attaqué confirme la décision du demandeur en ce qui concerne le principe de l'exclusion du défendeur du bénéfice des allocations de chômage à partir du 1er avril 2007 mais, lui reconnaissant le bénéfice de la bonne foi, limite le montant de la récupération de l'indu à la somme de 4.565,86 euro , correspondant au montant des revenus bruts imposables recueillis par le défendeur en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse.
L'arrêt attaqué fonde sa décision sur les motifs qu'il indique sub B « La récupération des allocations indues » (p. 6-8), considérés ici comme intégralement reproduits, et plus particulièrement sur les considérations suivantes:
« 3. L'article 169, alinéa 5 est rédigé comme suit :
Toute somme perçue indûment doit être remboursée.
(...) 4ème feuillet

Par dérogation aux alinéas précédents, le montant de la récupération peut être limité au montant brut des revenus dont le chômeur a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec les allocations de chômage, lorsque le chômeur prouve qu'il a perçu de bonne foi des allocations auxquelles il n'avait pas droit, ou lorsque le directeur décide de faire usage de la possibilité de ne donner qu'un avertissement au sens de l'article 157bis.
Cette disposition ne définit pas ce qu'il faut entendre par « montant brut des revenus ».
La Cour estime que cette notion correspond au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles pour les raisons suivantes :
a. on ne peut confondre, contrairement à ce que fait l'ONEm, le bénéfice brut, qui correspond au chiffre d'affaires, avec des revenus ; pour le travailleur indépendant constituent seul des revenus, au sens commun comme au sens fiscal, le bénéfice brut diminué de ses charges professionnelles ;
b. l'article 19, alinéa 5 ne distingue pas les revenus selon que l'activité prohibée a pour origine un travail salarié ou un travail indépendant ; compte tenu des modes particuliers à chacun de ces régimes de précompte professionnel et de cotisations sociales, le recours à la notion de revenu brut imposable est celle qui crée le moins de différence, sinon de discrimination, entre salariés et indépendants.
c. le bénéfice brut, soit le chiffre d'affaires, d'un travailleur indépendant n'est pas déterminant de ses revenus ; c'est le rapport entre le bénéfice brut et ses charges qui détermine les revenus ou, éventuellement, ses pertes ; si l'on devait se baser uniquement sur le bénéfice brut, on créerait des discriminations injustifiées non seulement entre travailleurs salariés et travailleurs indépendants mais également entre travailleurs indépendants selon que l'activité indépendante exercée génère des frais professionnels plus ou moins importants.
d. (le demandeur) lui-même, dans ses propres commentaires administratifs de l'article 169, alinéa 5, écrit :
En cas de revenus comme salarié et d'allocations sociales, il est tenu compte du montant brut ; en cas de revenus comme indépendant, il est tenu compte du revenu net imposable
(...) 5ème feuillet

Il y a donc lieu de limiter les sommes à récupérer au montant des revenus bruts imposables recueillis par (le défendeur) en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse, soit 4.565,86 euro ».
Griefs
1. En vertu de l'article 169, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, toute somme perçue indûment doit être remboursée.
Conformément à l'alinéa 5 de ce même article, lorsque le chômeur prouve qu'il a perçu de bonne foi des allocations auxquelles il n'avait pas droit, le montant de la récupération peut, par dérogation aux alinéas précédents de cet article, être limité au montant brut des revenus dont il a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec les allocations.
2. Il suit de cette disposition que le chômeur qui a perçu de bonne foi des allocations indues peut bénéficier de la limitation de la récupération au montant brut des revenus générés par son activité.
Le texte fait expressément référence au montant brut des revenus. Il ne faut donc pas se référer au montant net (pour les revenus tirés d'une activité accessoire salariée) ou imposable (pour les revenus tirés d'une activité accessoire d'indépendant).
3. En l'espèce, l'arrêt attaqué décide qu'en raison de sa bonne foi, le défendeur peut légitimement invoquer l'application de l'article 169, alinéa 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 mais estime que la notion de « montant brut des revenus » correspond au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles. 6ème feuillet

Dans la mesure où il limite le montant de la récupération des allocations de chômage perçues indûment au montant imposable des revenus recueillis par le défendeur en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse, alors que le texte de l'alinéa 5 de l'article 169 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage se réfère expressément au montant brut des revenus, l'arrêt attaqué viole l'article 169, spécialement alinéas 1er et 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage.
DÉVELOPPEMENTS
1. Conformément à l'article 169 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage, toute somme perçue indûment doit être remboursée, sauf lorsqu'il est établi que le chômeur a perçu de bonne foi les allocations de chômage auxquelles il n'avait pas droit, auquel cas la récupération est limitée au seul montant brut des revenus perçus par le chômeur alors qu'ils n'étaient pas cumulables avec les allocations (alinéa 5).
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité le montant de la récupération de l'indu au montant des revenus bruts imposables recueillis par le défendeur en qualité de travailleur indépendant pendant la période litigieuse, estimant que la notion de montant brut des revenus « correspond au montant brut imposable, soit les recettes brutes diminuées des charges professionnelles ».
Le raisonnement adopté par l'arrêt attaqué en l'espèce, qui consiste à soustraire les frais professionnels du bénéfice brut et donc à ne tenir compte que du résultat net (bénéfice) de l'activité ne peut être suivi. Le texte réglementaire est en effet clair quant au montant à prendre en compte. C'est bien au revenu brut qu'il est expressément fait référence dans le texte de l'article 169, alinéa 5, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991. La jurisprudence confirme également que c'est au revenu brut que doit se limiter la récupération lorsque cette disposition vient à s'appliquer (Voy. not. C. trav. Liège, 1er avril 2014, 2013/AN/94 ; C. trav. Liège, 23 octobre 2012, 2011/AN/111 ; C. trav. Liège, 3 mai 2011, 63/2010 ; C. trav. Liège, 4 mars 2010, 8774/09).
En outre, il est assez logique que l'article 169, alinéa 5 de l'arrêté royal du 25 novembre 1991 limite la récupération au montant brut des revenus et non au montant net (ou imposable) de ceux-ci, dès lors que des revenus nets peu importants peuvent résulter d'une importante déduction de frais. De nombreux travailleurs indépendants ne font pas de bénéfice d'un point de vue fiscal, leurs 7ème feuillet

dépenses excédant leurs revenus. Le fait toutefois d'utiliser tout ou partie du montant brut des revenus générés par l'activité litigieuse en vue de réaliser des frais professionnels ne peut avoir d'impact quant à l'application de l'alinéa 5 de l'article 169 de l'arrêté royal.
L'objectif poursuivi par cette disposition est en effet d'éviter une disproportion entre les sommes perçues des suites de l'exercice de l'activité, lorsqu'elles restent limitées, et les allocations de chômage à restituer (H. Mormont, « La révision des décisions administratives et la récupération des allocations de chômage payées indûment », in La réglementation du chômage : vingt ans d'application de l'arrêté royal du 25 novembre 1991, Kluwer, 2011, p. 685).
Raisonner comme l'a fait l'arrêt attaqué dans le cas d'espèce permettrait aux chômeurs qui n'ont pas déclaré leur activité accessoire de s'exonérer partiellement de la récupération des allocations indûment perçues en engageant de nombreux frais professionnels, qui viendraient ainsi fictivement limiter les revenus générés par l'activité accessoire litigieuse et réduiraient par la même occasion à peau de chagrin l'assiette de récupération à laquelle l'Office peut prétendre. Cela revient à admettre l'utilisation d'un mécanisme qui permet de contourner l'esprit de l'alinéa 5 de l'article 169 de l'arrêté royal, puisqu'il serait alors permis aux chômeurs de faire délibérément usage de tout ou partie du montant brut des revenus générés en vue de réaliser des frais professionnels pour systématiquement donner l'impression que l'activité litigieuse exercée ne génère que des sommes limitées.
La cour du travail de Bruxelles a d'ailleurs fait une application différente de l'article 169, alinéa 5, de l'arrêté royal dans un arrêt du 9 juillet 2014 (C. trav. Bruxelles, 9 juillet 2014, R.G. n° 2012/AB/1210). Dans cet arrêt, elle confirme la limitation de la récupération au montant brut des revenus dont le chômeur a bénéficié et qui n'étaient pas cumulables avec le bénéfice des allocations de chômage et reprend clairement les montants repris en face du poste « bénéfice brut » sur les avertissements extraits de rôle en vue de fixer le montant brut des revenus du chômeur en cause.
2. L'arrêt attaqué encourt donc le grief formulé dans le moyen de cassation. 8ème feuillet

PAR CES CONSIDERATIONS,
l'avocat à la Cour de cassation soussigné, pour le demandeur en cassation, conclut, Messieurs, Mesdames, qu'il vous plaise, recevant le pourvoi, casser l'arrêt attaqué, ordonner que mention de votre arrêt soit faite en marge de l'arrêt cassé, statuer comme de droit sur les dépens et renvoyer la cause devant une autre cour du travail.
Bruxelles, le 1er août 2017
Pour le demandeur en cassation,
Son conseil,
Paul Alain Foriers


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.17.0066.F
Date de la décision : 19/02/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-02-19;s.17.0066.f ?

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