La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2018 | BELGIQUE | N°C.17.0055.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 02 février 2018, C.17.0055.F


N° C.17.0055.F
XEROX FINANCIAL SERVICES BELUX, société anonyme dont le siège social est établi à Zaventem, Wezembeekstraat, 5,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Lefèbvre, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 480, où il est fait élection de domicile,
contre

M. D.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

en présence de


EURO BUROTIC, société anonyme dont le siège social est établi à Charleroi (Gosselies), rue Auguste Picca...

N° C.17.0055.F
XEROX FINANCIAL SERVICES BELUX, société anonyme dont le siège social est établi à Zaventem, Wezembeekstraat, 5,
demanderesse en cassation,
représentée par Maître Paul Lefèbvre, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 480, où il est fait élection de domicile,
contre

M. D.,
défendeur en cassation,
représenté par Maître Werner Derijcke, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 65, où il est fait élection de domicile,

en présence de

EURO BUROTIC, société anonyme dont le siège social est établi à Charleroi (Gosselies), rue Auguste Piccard, 40,
partie appelée en déclaration d'arrêt commun.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 20 mai 2016 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Ariane Jacquemin a fait rapport.
L'avocat général Philippe de Koster a conclu.

II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, la demanderesse présente un moyen.

III. La décision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la quatrième branche :

La caducité d'une obligation par disparition de son objet suppose qu'il soit devenu définitivement impossible d'exécuter son objet en nature.
L'arrêt constate que le défendeur « ne pouvait pas procéder à la location du copieur litigieux sans conclure un contrat de maintenance auprès d'un revendeur [de la demanderesse] ou agréé par elle [et qu'] il ne pouvait pas non plus, par ailleurs, se fournir, en ce qui concerne les consommables, autre part que chez ce revendeur » et en déduit que « les contrats étaient interdépendants, l'un ne pouvant aller sans l'autre ».
S'il considère « qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance et ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être », l'arrêt, qui ne constate pas qu'il serait devenu définitivement impossible pour la demanderesse, à la date de la résiliation du contrat de maintenance, d'exécuter en nature son obligation de faire jouir paisiblement le défendeur du photocopieur, n'a pu légalement décider que le contrat de location de celui-ci est devenu sans objet à cette date au motif qu'il « serait vain [de prétendre] qu'il aurait fallu [...] que [le défendeur] se trouve un nouveau revendeur acceptant d'assurer la maintenance ».
Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est fondé.

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres branches du moyen, qui ne sauraient entraîner une cassation plus étendue.

Sur la demande en déclaration d'arrêt commun :

La demanderesse a intérêt à ce que l'arrêt soit déclaré commun à la partie appelée à la cause devant la Cour à cette fin.

Par ces motifs,

La Cour

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il décide que le contrat du défendeur avec la demanderesse est devenu sans objet le 1er septembre 2009, qu'il dit la demande de la demanderesse non fondée et qu'il statue sur les dépens entre ces parties ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêt partiellement cassé ;
Déclare le présent arrêt commun à la société anonyme Euro Burotic ;
Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge du fond ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Mons.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Martine Regout, les conseillers Mireille Delange, Michel Lemal, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, et prononcé en audience publique du deux février deux mille dix-huit par le président de section Martine Regout, en présence de l'avocat général Philippe de Koster, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.
P. De Wadripont A. Jacquemin S. Geubel
M. Lemal M. Delange M. Regout


Requête

REQUETE EN CASSATION

POUR : La société anonyme XEROX FINANCIAL SERVICES BELUX, dont le siège social est établi à 1930 Zaventem, Wezembeekstraat, 5, inscrite à la banque carrefour des entreprises sous le numéro 0427.660.330.

Demanderesse en cassation,

Assistée et représentée par Me Paul LEFEBVRE, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à 1050 Bruxelles, avenue Louise 480/9, où il est fait élection de domicile ;

CONTRE : D. M.,

Défenderesse en cassation,

EN PRESENCE
DE : La société anonyme EURO BUROTIC, dont le siège social est établi à 6041 Charleroi (Gosselies), Rue Auguste Piccard, 40, inscrite à la banque carrefour des entreprises sous le numéro 0444.518.039.

Partie appelée en déclaration d'arrêt commun.

* * *

A Monsieur le Premier Président, à Mesdames et Messieurs les Présidents et Conseillers composant la Cour de cassation de Belgique,

Messieurs,
Mesdames,

La demanderesse a l'honneur de déférer à votre censure l'arrêt rendu contradictoirement entre les parties par la 9ème chambre b de la cour d'appel de Bruxelles à l'audience du 20 mai 2016 (n° R.G. 2014/AR/481).

FAITS ET ANTECEDENTS DE LA PROCEDURE

1. Le défendeur souhaita acquérir une imprimante multifonctions couleur dans le cadre de son activité d'indépendant dans le secteur de l'impression professionnelle de documents. Il lança son activité sous la dénomination commerciale « La boîte à couleurs ». Pour ce faire, il fit appel aux services de la demanderesse, spécialisée dans la mise en location d'imprimantes et de copieurs.

Dans ce contexte, le défendeur et la demanderesse conclurent un contrat de location en date du 29 septembre 2008 portant sur une photocopieuse/imprimante de la demanderesse du type DC 242 UTW portant le numéro de série 3512541096.

La durée irréductible du contrat fut déterminée pour une période de 60 mois, la date d'échéance étant fixée au 30 novembre 2013.

2. La maintenance de l'équipement loué fut assurée par un concessionnaire de la demanderesse, la partie appelée en déclaration d'arrêt commun, laquelle signa un contrat avec le défendeur le 29 septembre 2008.

3. Le 3 septembre 2009, le défendeur informa la demanderesse de son souhait de mettre fin de manière anticipée au contrat de location signé avec la demanderesse et au contrat de maintenance signé avec la partie appelée en déclaration d'arrêt commun, et ce, exclusivement pour des raisons personnelles.

En effet, aucun dysfonctionnement du photocopieur ne fut invoqué par le défendeur afin de justifier la résiliation anticipée auprès de la demanderesse et les pièces du dossier prouvent qu'il n'y a jamais eu de plaintes de sa part en ce sens.

4. La demanderesse répondit comme suit par courrier du 9 septembre 2009 :

« Monsieur,

Nous avons bien reçu votre mail pour lequel vous manifestiez votre intention de mettre fin au contrat de Renting concernant l'équipement [de la demanderesse] DC242/3512541096.

La date d'échéance dudit contrat est fixée au 30 novembre 2013. Comme il s'agit d'un contrat à durée déterminée et irréductible, celui-ci ne peut prendre fin qu'après paiement d'une indemnité de dédit (conformément aux conditions générales) s'élevant à 26.520 EUR en date du 1er septembre 2009.

Dès réception du montant précité sur notre compte n° 733-0097783-37, nous arrêtons le contrat. Il vous sera possible de faire ramener l'équipement soit par vos soins, soit par nos services.

(...)

Nous tenons également à vous signaler que les factures 07000347 et 08000285 sont impayées à ce jour et restent dues.

A défaut de paiement, le contrat suivra son exécution normale.

(...) ».

Le 28 octobre 2009, le défendeur répondit à ce courrier par un courrier contenant les points suivants : le rappel de n'avoir pas pu tirer les revenus nécessaires à la survie de son entreprise, raison pour laquelle il se voyait dans l'obligation de cesser toutes activités ; l'invocation, pour la première fois, de prétendus défauts de la machine ; le fait de ne pas être en mesure de payer les indemnités réclamées ; la reconnaissance d'être redevable de factures jusqu'au 28 octobre 2009 ; la demande d'une possibilité de trouver un accord afin de diminuer le montant des indemnités.

Les arguments concernant le prétendu dysfonctionnement de la machine étaient dénoués de tout fondement puisque soutenus par aucune pièce du dossier.

Le conseil du défendeur souligna lui-même, par courrier du 16 novembre 2009, que « la machine est en bon état d'entretien ».

5. Le conseil de la demanderesse adressa un courrier officiel au conseil du défendeur le 27 novembre 2009, rappelant que :

« Exceptionnellement et à titre de geste commercial, ma cliente a informé la vôtre qu'elle ne s'opposerait pas à un transfert du contrat à condition que le nouveau contractant soit solvable et ne soit pas un particulier ».

Cependant, le défendeur ne trouva pas de repreneur et n'acquitta pas l'indemnité de rupture due en vertu de l'article 5 des conditions générales du contrat de location.

6. Le contrat et la facturation relative à la location de la machine continuèrent à courir.

Plusieurs factures émises dans le cadre du contrat de location restèrent cependant impayées, malgré les différents rappels de la demanderesse et alors que le défendeur avait expressément reconnu en être redevable.

La demanderesse n'eut alors d'autre choix que d'introduire une procédure judiciaire.

7. Par voie de citation du 3 août 2010, la demanderesse poursuivit la condamnation du défendeur au paiement de 5.474,55 EUR en principal, à titre de factures impayées et au paiement d'une indemnité de rupture s'élevant à 21.840 EUR en date du 1er juin 2010.

La facturation continua à courir étant donné que le défendeur restait en défaut de s'exécuter. Nonobstant le fait que celui-ci ne s'était toujours pas exécuté lors de la procédure en première instance, la demanderesse arrêta la facturation en date du 31 octobre 2010, le montant des factures impayées s'élevant à 8.112,35 EUR à cette date.

8. En première instance, la demanderesse et le défendeur sollicitèrent la jonction de la cause avec celle par laquelle le défendeur avait appelé la partie appelée en déclaration d'arrêt commun en intervention forcée, les demandes étant manifestement connexes puisqu'il s'agissait de l'exécution de deux contrats portant sur la même machine.

9. Par un jugement du 24 juin 2013, le tribunal de commerce de Bruxelles condamna le défendeur au paiement des factures, majorées de la clause pénale de 15% et des intérêts de retard au taux légal, de l'indemnité de résiliation réduite à 9.620,00 EUR et des dépens.

10. Par voie de requête adressée au greffe de la cour d'appel de Bruxelles le 21 février 2014, le défendeur interjeta appel de ce jugement, critiquant les motifs suivants : le défendeur n'a pas payé l'indemnité d'éviction après avoir demandé celle-ci, ce qui a eu pour conséquence que le contrat suivait son cours et n'était pas résilié ; le non-paiement des factures ultérieures a fondé la demanderesse à résilier le contrat de plein droit, en application de ses conditions générales, et moyennant paiement d'une indemnité de résiliation ; et l'exécution forcée du contrat n'était pas abusive.

Devant la cour d'appel, le défendeur demanda, notamment, de : « dire pour droit que c'est à tort que la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a résilié le 10.09.2009, à la date du 01.09.2009, le contrat de maintenance du 29.09.2008 les liant et déclarer caduc ou à tout le moins de nul effet, à la dite date, le contrat de location du 29.09.2008 entre le concluant et la [demanderesse] » et de « dire pour droit que c'est à tort et fautivement que la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a résilié le 10.09.2009, à la date du 01.09.2009, le contrat de maintenance du 29.09.2008 les liant et par conséquent déclarer le dit contrat résilié à ses torts à la dite date ».

La demanderesse demanda, quant à elle, de : « déclarer l'appel recevable mais non-fondé en tous ses points dans le chef de la [demanderesse] », de « l'en débouter » et de « confirmer le jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 24 juin 2013 en tous ses points en ce qui concerne [le défendeur] ».

11. Par un arrêt du 20 mai 2016, la cour d'appel de Bruxelles mit à néant le jugement du tribunal de commerce de Bruxelles et statua à nouveau : la cour dit pour droit que c'est à tort et fautivement que la partie appelée en déclaration d'arrêt commun a résilié en date du 10 septembre, avec effet au 1er septembre 2009, le contrat de maintenance du 29 août 2008 de telle sorte que le contrat a dès lors été résilié aux torts de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun ; constata que le contrat du 29 août 2009 (lire 2008) avec la demanderesse est devenu sans objet au 1er septembre 2009 ; dit la demande de la demanderesse non fondée et l'en débouta ; et dit l'appel incident non fondé.

Contre cet arrêt, la demanderesse estime pouvoir faire valoir les moyens suivants :

MOYEN UNIQUE

Dispositions légales violées

- L'article 149 de la Constitution ;

- l'article 1138, alinéa 2, du Code judiciaire ;

- le principe général du droit interdisant au juge de statuer sur une chose non demandée, dit « principe dispositif » ;

- le principe général du droit relatif au respect dû aux droits de la défense ;

- le principe du contradictoire ;

- le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet ;

- les articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil.

Décision attaquée

La cour d'appel décide, d'une part, que le contrat de location entre la demanderesse et le défendeur est, lui aussi, résilié suite à la résiliation par la partie appelée en déclaration d'arrêt commun du contrat de maintenance entre celle-ci et le défendeur, aux motifs que :

« C'est fautivement, selon [le défendeur], [que la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a procédé à la résiliation du contrat alors qu'il n'était à cette époque, ni en retard de paiement tant auprès d'elle qu'auprès de Xerox et qu'il n'y avait dès lors aucune raison à cette rupture.

9. [La partie appelée en déclaration d'arrêt commun] invoque que c'est [le défendeur] qui a procédé à la résiliation du contrat de maintenance.

Elle se réfère à cet égard à son courrier du 10 septembre 2009 qui précise :
« Nous avons pris bonne note de votre courrier dernier par lequel vous résiliez le contrat d'entretien portant sur la machine...par conséquent nous vous confirmons donc la résiliation de vos contrats à la date du 1er septembre 2009 ».

(...)

14. C'est dès lors à bon droit que le premier juge a considéré que cette résiliation était intervenue de la propre initiative [de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] et sans accord et sans faute [du défendeur].

Le grief à l'égard [de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] est établi.

15. Les contrats de [la demanderesse] et [de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] étant interdépendants, et [le défendeur] ne pouvait se passer [de la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] pour la maintenance et la fourniture des consommables.

16. Il est clair qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] rompait à tort le contrat de maintenance, n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance, ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être.

Il s'est ainsi trouvé, de facto et de jure, conséquemment lui aussi résilié sans faute de la part [du défendeur].

Ce serait vainement que [la demanderesse] aurait plaidé (elle ne le fait d'ailleurs pas) qu'il aurait fallu dans cette hypothèse que [le défendeur] se trouve un nouveau revendeur acceptant d'assurer la maintenance » (p. 8 de l'arrêt attaqué).

La cour d'appel décide, d'autre part, que le contrat de location entre la demanderesse et le défendeur est devenu sans objet au 1er septembre 2009, date à laquelle la partie appelée en déclaration d'arrêt commun a, selon la cour, résilié le contrat de maintenance, aux motifs que :

« 17. La résiliation fautive du contrat de maintenance par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a rendu impossible la poursuite du contrat de location avec [la demanderesse] par suite de l'interdépendance des deux contrats.

(...)

Dit pour droit que c'est à tort et fautivement que la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a résilié en date du 10 septembre 2009, avec effet au 1er septembre 2009, le contrat de maintenance du 29 août 2008 de telle sorte que le contrat a dès lors été résilié aux torts de la [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] à cette date ;

Griefs

Première branche

Premier rameau

L'article 1138, alinéa 2, du Code judiciaire dispose qu'« il n'y a pas d'ouverture de requête civile, mais seulement, et contre les décisions rendues en dernier ressort, possibilité de pourvoi en cassation pour contravention à la loi : (...) 2° s'il a été prononcé sur choses non demandées ou adjugé plus qu'il n'a été demandé ».

Ledit article prescrit, ainsi, que le juge du fond ne peut se prononcer sur des choses non demandées, ni adjuger plus que ce qu'il n'a été demandé.

Cet article consacre le principe dispositif - ou pouvoir de disposition des parties dans l'exercice de l'action devant les juridictions civiles -, dont le statut de principe général de droit est également reconnu.

L'objet de la demande du défendeur est décrit de la façon suivante dans ses conclusions de synthèse (l'argumentation étant identique dans la requête d'appel du défendeur) :

« (...) si à bon droit, les premiers juges ont considéré que c'était fautivement que la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] avait invoqué (...) la résiliation unilatérale du contrat dans le chef du concluant (...), ils n'ont pas, à tort, considéré que dès ce moment là et à cause de cette lettre et de la prise de position de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun], le contrat principal de location soit devenait caduc, soit était altéré par un cas fortuit » (p. 4).

« (...) les premiers juges ont sous-estimé l'influence et les conséquences du geste posé par la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] en adressant au concluant le 10.09.2009 cette lettre de résiliation (...). Dès ce moment là et par la faute de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun], privé de la maintenance, de l'entretien, des fournitures, des consommables (XEROX), nécessaires à son fonctionnement, le photocopieur va être précarisé ce qui va vicier les relations du concluant avec la [la demanderesse], le contrat de location étant privé d'un élément essentiel (l'usage de la machine) ou étant altéré par un cas fortuit (le défaut d'usage de la machine) » (p. 6).

« (...) à tort, les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conclusions de la situation juridique créée par le comportement fautif de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] en ne considérant pas le contrat principal (la location) soit caduc à défaut d'un élément essentiel soit inexécutable en raison d'un cas fortuit avec pour conséquence que plus aucun loyer n'était dû après le 01.09.2009 et avec pour autre conséquence que plus aucune indemnité de résiliation ne pouvait être mise à charge du concluant » (p. 6).

Il ressort de ces extraits que le défendeur n'a nullement invoqué la résiliation du contrat de location conclu avec la demanderesse, mais uniquement la caducité de celui-ci ou son altération par un cas fortuit.

Il importe de souligner que le défendeur qualifia expressément le contrat de location, de surcroît, comme le « contrat principal » ce qui signifie, forcément, qu'il considère le contrat de maintenance comme son accessoire. Cette qualification l'éloigne, dès lors, encore de l'invocation de la résiliation du contrat de maintenance comme entraînant la résiliation du « contrat principal de location ».

La cour d'appel juge qu'« il est clair qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] rompait à tort le contrat de maintenance, n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance, ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être » et qu' « il s'est ainsi trouvé, de facto et de jure, conséquemment lui aussi résilié sans faute de la part [du défendeur]». En prononçant la résiliation du contrat de location dont on demandait la caducité ou l'altération par un cas fortuit, la cour d'appel a modifié l'objet de la demande du défendeur alors que les parties déterminent librement l'objet du litige.

Cette modification de l'objet de la demande ressort d'autant plus lorsque l'arrêt attaqué précise, par rapport à un reproche fait par le défendeur en ce qui concerne le jugement rendu en première instance, que « [le défendeur] reproche au premier juge d'avoir statué ultra petita dans la mesure ou ni [la demanderesse], ni [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] n'ont fait jouer un droit de résiliation de plein droit ni demandé la résiliation judiciaire » et que « ce grief est infondé dans la mesure où le tribunal n'a pas prononcé la résolution ou la résiliation mais a fait droit à ce qui était demandé à savoir le paiement d'arriérés de factures et d'indemnités de résiliation ».

En jugeant qu'« il est clair qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] rompait à tort le contrat de maintenance, n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance, ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être » et qu' « il s'est ainsi trouvé, de facto et de jure, conséquemment lui aussi résilié sans faute de la part [du défendeur] », alors que la résiliation est un mode de dissolution distinct de celui de la caducité et qu'elle n'a pas été demandée par le défendeur, ni dans sa requête d'appel, ni dans ses conclusions de synthèse, qui, au contraire, qualifient le contrat de location de contrat « principal » et le contrat de maintenance nécessairement de contrat accessoire, la cour d'appel a statué ultra petita et viole, partant, le principe dispositif et l'article 1138, alinéa 2, du Code judiciaire.

Second rameau

En insistant sur le fait que le contrat de location était le contrat principal et le contrat de maintenance l'accessoire, le défendeur excluait que la résiliation de l'accessoire puisse causer la résiliation du contrat principal.

Le défendeur avait d'ailleurs fait valoir en conclusions que :

« (...) si à bon droit, les premiers juges ont considéré que c'était fautivement que la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] avait invoqué (...) la résiliation unilatérale du contrat dans le chef du concluant (...), ils n'ont pas, à tort, considéré que dès ce moment là et à cause de cette lettre et de la prise de position de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun], le contrat principal de location soit devenait caduc, soit était altéré par un cas fortuit » (p. 4).

« (...) les premiers juges ont sous-estimé l'influence et les conséquences du geste posé par la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] en adressant au concluant le 10.09.2009 cette lettre de résiliation (...). Dès ce moment là et par la faute de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun], privé de la maintenance, de l'entretien, des fournitures, des consommables (XEROX), nécessaires à son fonctionnement, le photocopieur va être précarisé ce qui va vicier les relations du concluant avec la [la demanderesse], le contrat de location étant privé d'un élément essentiel (l'usage de la machine) ou étant altéré par un cas fortuit (le défaut d'usage de la machine) » (p. 6).

« (...) à tort, les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conclusions de la situation juridique créée par le comportement fautif de la [partie appelée en déclaration d'arrêt commun] en ne considérant pas le contrat principal (la location) soit caduc à défaut d'un élément essentiel soit inexécutable en raison d'un cas fortuit avec pour conséquence que plus aucun loyer n'était dû après le 01.09.2009 et avec pour autre conséquence que plus aucune indemnité de résiliation ne pouvait être mise à charge du concluant » (p. 6).

Il ressort de ces extraits que le défendeur n'a nullement invoqué la résiliation du contrat de location conclu avec la demanderesse, mais uniquement la caducité de celui-ci ou son altération par un cas fortuit

En ordonnant la résiliation du contrat de location par suite de la résiliation fautive par la partie appelée en déclaration d'arrêt commun du contrat de maintenance, alors qu'aucune demande n'avait été formulée à ce sujet, les parties n'ont, en outre, pas eu l'occasion de s'expliquer à ce sujet et viole leurs droits de la défense.

Or, le droit des parties de fait valoir leurs observations par rapport à une modification par le juge du fondement de la demande d'une des parties constitue un droit relevant du principe de droit relatif au respect dû aux droits de la défense.

En jugeant qu'« il est clair qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] rompait à tort le contrat de maintenance, n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance, ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être » et qu' « il s'est ainsi trouvé, de facto et de jure, conséquemment lui aussi résilié sans faute de la part [du défendeur]», sans pour autant rouvrir les débats afin d'offrir la possibilité aux parties de faire valoir leurs observations quant à cette modification du fondement de la demande de la défenderesse, la cour d'appel prive la demanderesse de l'occasion de s'expliquer à ce sujet et viole ses droits de la défense.

En jugeant qu'« il est clair qu'à partir du moment où [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] rompait à tort le contrat de maintenance, n'assurait plus la nécessaire et obligatoire maintenance, ne fournissait plus les consommables, le matériel loué n'était plus opérationnel et le contrat de location perdait toute raison d'être » et qu' « il s'est ainsi trouvé, de facto et de jure, conséquemment lui aussi résilié sans faute de la part [du défendeur]», alors que la demanderesse n'a pas eu l'occasion de s'expliquer au sujet d'une éventuelle résiliation du contrat de location en conséquence de la résiliation fautive du contrat de maintenance, la cour d'appel a violé le principe du contradictoire et le principe général du droit relatif au respect dû aux droits de la défense.

Seconde branche

La caducité est un mode de dissolution spécifique des contrats initialement créé par la doctrine et consacrée en tant que principe général de droit.

La perte de l'objet d'une obligation est une cause de caducité. La caducité d'un acte juridique en raison de la perte de son objet trouve son fondement dans l'impossibilité d'exécuter en nature l'obligation. Perte de l'objet et impossibilité d'exécution en nature sont intimement liées : ainsi, il ne peut être question de caducité lorsque l'exécution de la convention est simplement devenue plus difficile, non rentable ou encore déficitaire pour l'une des parties. Il faut donc que l'objet soit perdu matériellement ou juridiquement. Une simple impossibilité d'exécution liée à d'autres éléments ne suffit pas à justifier la caducité.

La caducité vise avant tout la perte d'objet d'une obligation et non du contrat en entier. En outre, la caducité d'une obligation du contrat n'entraîne pas nécessairement la caducité des autres obligations résultant de ce contrat, ni du contrat lui-même.

En d'autres termes, il n'existe pas d'automatisme : la caducité d'une obligation n'aura d'effet sur le contrat que si cette obligation est essentielle, déterminante ou indivisible des autres obligations du contrat.

C'est ainsi que dans le cas d'un contrat de vente, la destruction de la chose vendue entraîne l'extinction d'obligations portant sur cette chose, mais pas nécessairement des autres obligations découlant du contrat.

En l'espèce, en ce que l'arrêt attaqué juge que le contrat de location est devenu caduque par suite de la résiliation fautive par la partie appelée en déclaration d'arrêt commun de son contrat de maintenance, la perte d'objet du contrat ne peut, en aucun cas, être la conséquence automatique de la perte d'objet d'une obligation du contrat. La cour d'appel aurait, en effet, dû vérifier quelle(s) obligation(s) du contrat de location étaient affectées par une impossibilité d'exécution en nature.

La cour d'appel juge que « la résiliation fautive du contrat de maintenance par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a rendu impossible la poursuite du contrat de location avec [la demanderesse] par suite de l'interdépendance des deux contrats » et que « le contrat du 29 août 2009 [lire 2008] avec la [la demanderesse] est devenu sans objet au 1er septembre 2009 ».

En jugeant que « la résiliation fautive du contrat de maintenance par [la partie appelée en déclaration d'arrêt commun] a rendu impossible la poursuite du contrat de location avec [la demanderesse] par suite de l'interdépendance des deux contrats » et que « le contrat du 29 août 2009 [lire 2008] avec la [la demanderesse] est devenu sans objet au 1er septembre 2009 » sans vérifier quelles obligations du contrat étaient impossibles à exécuter en nature, alors qu'il n'existe pas d'automatisme entre l'effet de la caducité d'une obligation à celle de l'ensemble du contrat, la cour d'appel viole le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet.

Troisième branche

La perte de l'objet d'une obligation ne peut être appréhendée de manière purement objective. En effet, l'objet d'une obligation même s'il consiste en une chose corporelle ne se réduit jamais à cette chose appréhendée de manière purement objective. Il incorpore nécessairement une dimension subjective.

Perte de l'objet et impossibilité d'exécution en nature sont intimement liées : ainsi, il ne peut être question de caducité lorsque l'exécution de la convention est simplement devenue plus difficile, non rentable ou encore déficitaire pour l'une des parties. Il faut donc que l'objet soit perdu matériellement ou juridiquement. Une simple impossibilité d'exécution liée à d'autres éléments ne suffit pas à justifier la caducité.

L'impossibilité d'exécution découlant d'une perte de l'objet de l'obligation doit s'apprécier de manière raisonnable, à la lumière des diligences qui sont contractuellement attendues du débiteur pour exécuter son obligation en nature.

En l'espèce, la demanderesse soutenait que « la résiliation du contrat de maintenance n'entraîne en effet pas de facto l'impossibilité d'user du photocopieur ou que celle-ci en devienne défectueux », qu' « en l'espèce, [la défenderesse] n'a effectivement jamais invoqué que les problèmes liés à la machine étaient liés à un problème de maintenance » et que « en tout état de cause, il lui était libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers » (p. 11 des conclusions additionnelles et de synthèse de la demanderesse).

Le défendeur soutenait, quant à lui, que : « le contrat de location étant le contrat principal et le contrat de maintenance le contrat accessoire » et qu'ils « étaient à ce point liés que tant juridiquement que concrètement, ils ne pouvaient fonctionner l'un sans l'autre » (p. 4 des conclusions de synthèse du défendeur), que « privé de la maintenance, de l'entretien, des fournitures, des consommables (...), nécessaires à son fonctionnement, le photocopieur va être précarisé ce qui va vicier les relations [du défendeur] avec [la demanderesse], le contrat de location étant privé d'un élément essentiel (l'usage de la machine) ou étant altéré par un cas fortuit (le défaut d'usage de la machine) » (p. 6 conclusions de synthèse du défendeur), et que « les premiers juges ont sous-estimé la fragilité d'un photocopieur haut de gamme » (p. 6 conclusions de synthèse du défendeur).

La demanderesse répondit à cette dernière phrase en soutenant que « cet argument relève d'une pure pétition de principe et n'est nullement prouvé par [le défendeur] » (p. 11 des conclusions additionnelles et de synthèse de la demanderesse).

Le défendeur se contentait, partant, d'avancer que le bien loué ne pourrait - à l'avenir - fonctionner sans le contrat de maintenance, sans en apporter la moindre preuve et se limitant ainsi à une pétition de principe.

Il aurait donc fallu que le défendeur rapporte la preuve concrète que le matériel loué n'était plus opérationnel à la suite de la résiliation du contrat de maintenance. La simple affirmation selon laquelle ce serait le cas ne peut, en aucun cas, suffire puisqu'il y a une dimension subjective à prendre en compte et qu'il faut que l'exécution de la convention ne soit pas simplement devenue plus difficile.

La cour d'appel juge que « la résiliation fautive du contrat de maintenance par [la partie appelée en déclaration commun] a rendu impossible la poursuite du contrat de location avec [la demanderesse] par suite de l'interdépendance des deux contrats » et que « le contrat du 29 août 2009 [lire 2008] avec la [la demanderesse] est devenu sans objet au 1er septembre 2009 » sans examiner s'il y avait preuve concrète que le matériel loué n'était plus opérationnel suite à la résiliation du contrat de maintenance.

En jugeant que « la résiliation fautive du contrat de maintenance par [la partie appelée en déclaration commun] a rendu impossible la poursuite du contrat de location avec [la demanderesse] par suite de l'interdépendance des deux contrats » et que « le contrat du 29 août 2009 [lire 2008] avec la [la demanderesse] est devenu sans objet au 1er septembre 2009 », sans examiner s'il y avait preuve concrète que le matériel loué n'était plus opérationnel suite à la résiliation du contrat de maintenance alors qu'il doit d'abord être démontré que l'obligation est devenue impossible à exécuter en nature et non pas qu'elle est simplement devenue plus difficile à exécuter et que la perte de l'objet d'une obligation doit être appréhendée de façon subjective, la cour d'appel viole le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet, à tout le moins, ne répond pas aux conclusions de la demanderesse (p. 11 des conclusions additionnelles et de synthèse de la demanderesse) sur ce point et viole, partant, l'article 149 de la Constitution en ce qu'il n'est pas légalement motivé.

Quatrième branche

La foi due à un acte est le respect que l'on doit attacher à ce qui y est constaté par écrit. Elle est méconnue lorsque l'interprétation de l'acte est inconciliable avec ses termes. Il en va ainsi lorsque le juge du fond donne de l'acte une interprétation que celui-ci ne comporte pas, selon ses termes et que le juge a fait mentir l'acte en lui prêtant une énonciation qu'il ne contient pas ou en déniant l'existence d'une constatation qui y figure.

L'impossibilité d'exécution en nature qui caractérise la perte d'objet d'une obligation doit être définitive. En effet, si l'impossibilité n'est que temporaire, elle ne donne lieu qu'à la suspension de plein droit de l'obligation en cas d'impossibilité fortuite ou, en cas d'impossibilité fautive, permet au créancier de réclamer des dommages et intérêts, de mettre en œuvre, à certaines conditions, l'exception d'inexécution, ou encore de demander la résolution de la convention à condition que le manquement soit suffisamment grave.

En l'espèce, la demanderesse soutenait que « la résiliation du contrat de maintenance n'entraîne en effet pas de facto l'impossibilité d'user du photocopieur ou que celle-ci en devienne défectueux », qu' « en l'espèce, [la défenderesse] n'a effectivement jamais invoqué que les problèmes liés à la machine étaient liés à un problème de maintenance » et que « en tout état de cause, il lui était libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers » (p. 11 des conclusions additionnelles et de synthèse de la demanderesse), ce qui démontre qu'à supposer qu'il y ait effectivement eu une impossibilité d'exécution (quod non) du fait que le matériel loué n'était plus opérationnel à défaut de maintenance, cette impossibilité d'exécution était inévitablement temporaire puisque le défendeur était « libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers ».

La cour d'appel juge que « ce serait vainement que [la demanderesse] aurait plaidé (et elle ne le fait d'ailleurs pas) qu'il aurait fallu dans cette hypothèse que [le défendeur] se trouve un nouveau revendeur acceptant d'assurer la maintenance ».

En jugeant que « ce serait vainement que [la demanderesse] aurait plaidé (et elle ne le fait d'ailleurs pas) qu'il aurait fallu dans cette hypothèse que [le défendeur] se trouve un nouveau revendeur acceptant d'assurer la maintenance », alors que la demanderesse avait, au contraire, soutenu que « la résiliation du contrat de maintenance n'entraîne en effet pas de facto l'impossibilité d'user du photocopieur ou que celle-ci en devienne défectueux », qu' « en l'espèce, [la défenderesse] n'a effectivement jamais invoqué que les problèmes liés à la machine étaient liés à un problème de maintenance » et que « en tout état de cause, il lui était libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers » (p. 11 des conclusions additionnelles et de synthèse de la demanderesse), ce qui démontre qu'à supposer qu'il y ait effectivement eu une impossibilité d'exécution (quod non) du fait que le matériel loué n'était plus opérationnel à défaut de maintenance, cette impossibilité d'exécution était inévitablement temporaire puisque le défendeur était « libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers » et que l'impossibilité d'exécution d'une obligation doit être définitive pour pouvoir parler de perte d'objet, la cour d'appel viole non seulement la foi due aux conclusions de la demanderesse (articles 1319, 1320 et 1322 du Code civil) en déniant l'existence d'une constatation qui y figure mais également le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet.

Développements

En ce qui concerne les trois dernières branches :

La caducité du contrat est un mode de dissolution créé initialement par la doctrine, à la suite d'une jurisprudence de la Cour de cassation de 1980 .

Votre Cour a reconnu, en 2004, l'existence du principe général du droit « relatif à la caducité des obligations en raison de la disparition de leur objet » .

Le professeur P. VAN OMMESLAGHE enseigne, s'inspirant des travaux de P.-A. FORIERS à ce sujet, que la caducité du contrat pour disparition de son objet est une « cause de dissolution spécifique des contrats » et qu'elle « résulte du fait concret que la disparition de l'objet rend matériellement impossible la poursuite de l'exécution du contrat, quelles que soient les responsabilités éventuelles » .

Au niveau terminologique :

« Si l'on évoque (...) régulièrement la « caducité du contrat », c'est en réalité le résultat d'un raccourci plus ou moins malheureux. Le mécanisme de la caducité concerne, en effet, une des obligations du contrat et la caducité de celle-ci n'entraîne pas nécessairement la caducité des autres obligations résultant de ce contrat ni a fortiori, celle de ce dernier lui-même.

La caducité d'une obligation n'aura en réalité « d'effet sur le contrat que si elle est essentielle, déterminante ou indivisible des autres obligations qui en résultent ». Et lorsqu'on parle de la « caducité du contrat » par la perte de son objet on vise en réalité la dissolution de celui-ci en raison de la caducité de l'obligation essentielle qui le caractérise » .

Cette position doctrinale semble faire l'unanimité :

« Il ne réside pas d'automatisme entre l'effet de la caducité de l'obligation à celle de l'ensemble du contrat. La caducité d'une obligation n'aura d'effet sur le contrat que si cette obligation est « essentielle, déterminante ou indivisible des autres obligations qui en résultent ». Dans ce même sens, la caducité d'une obligation peut se traduire par une dissolution partielle de la convention si celle-ci peut « économiquement et raisonnablement être maintenue pour partie, comme c'est également le cas pour la théorie des risques » » .

Votre Cour s'est également prononcée en ce sens dans un arrêt du 4 février 2005, jugeant :

« Que dans un contrat de vente la perte de la chose due n'entraîne pas nécessairement l'extinction des autres obligations résultant du contrat;

Qu'en cette branche, le moyen qui est entièrement fondé sur l'hypothèse que la caducité de l'obligation d'une partie en raison de la perte de la chose entraîne l'annulation de l'obligation de l'autre partie, manque en droit » .

Selon P.-A. FORIERS et M.-A. GARNY, « la solution est évidente. Il suffit, en effet, de penser au fait que l'acheteur supporte, en règle, le risque de la perte de la chose vendue et que la disparition de celle-ci ne le dispense pas du paiement du prix (...) » .

Cet arrêt apporte, selon R. JAFFERALI, « une nuance importante à la théorie de la caducité esquissées par l'arrêt du 28 novembre 1980. Celui-ci aurait pu en effet donner l'impression que la perte de l'objet de la convention (en l'occurrence un bail) entraîne automatiquement la caducité de toute la convention. L'arrêt ultérieur montre qu'il n'en va pas nécessairement ainsi (...) » .

En l'espèce, la cour d'appel aurait dû vérifier si la perte de l'objet (à supposer que l'on puisse parler de perte de l'objet (quod non), cfr. ci-dessous) entraînait ou non l'extinction des autres obligations du contrat de location. Or, il y a, dans l'arrêt attaqué, une sorte d'automatisme entre l'effet de la caducité de l'obligation à l'ensemble du contrat, alors que cet automatisme ne peut exister.

Le professeur P.-A. FORIERS et M.-A. GARNY enseignent encore que : « la perte de l'objet d'une obligation ne saurait être appréhendée de manière purement objective. Elle s'apprécie en fonction de l'économie et de l'étendue de l'obligation en cause. L'objet d'une obligation même s'il consiste en une chose corporelle ne se réduit jamais à cette chose appréhendée de manière purement objective. Il incorpore nécessairement une dimension subjective. (...) l'impossibilité d'exécution découlant d'une perte de l'objet de l'obligation après sa naissance doit s'apprécier de manière raisonnable à la lumière des diligences qui sont contractuellement attendues du débiteur pour exécuter son obligation en nature. (...) Il ne peut néanmoins être question de caducité lorsque l'exécution de la convention est simplement devenue plus difficile, non rentable ou encore déficitaire pour l'une des parties » .

Ils poursuivent : « pour qu'il y ait caducité d'une obligation par disparition de son objet, il faut que l'objet soit perdu matériellement ou juridiquement. Une simple impossibilité d'exécution liée à d'autres éléments ne suffit pas à justifier la caducité. La Cour de cassation a souligné à cet égard qu'il n'y avait pas dans notre droit de principe général du droit prohibant la poursuite de l'exécution forcée d'une obligation impossible à exécuter en nature, même si certains textes consacrent cette interdiction ou si la théorie de l'abus de droit peut dans certains cas y mener » .

En l'espèce, il n'est nullement démontré que le contrat de location est devenu impossible à exécuter en nature mais simplement affirmé, par le défendeur, que le matériel loué ne serait plus opérationnel à la suite de la résiliation du contrat de maintenance. En jugeant, sur base de cela, que la résiliation du contrat de maintenance a rendu impossible la poursuite du contrat de location, la cour d'appel omet, en outre, d'appréhender la perte de l'objet de façon subjective et viole, partant, le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet.

Il faut, en outre, que l'impossibilité d'exécution soit définitive. C'est, en effet, une des conditions requises pour qu'il y ait impossibilité d'exécution : « si l'impossibilité n'est que temporaire, elle ne donne lieu qu'à la suspension de plein droit de l'obligation en cas d'impossibilité fortuite ou, en cas d'impossibilité fautive, permet au créancier de réclamer des dommages et intérêts, de mettre en œuvre, à certaines conditions, l'exception d'inexécution, ou encore de demander la résolution de la convention à condition que le manquement soit suffisamment grave » .

En l'espèce, l'impossibilité d'exécution était inévitablement temporaire puisque le défendeur était « libre de demander de l'aide directement à la [demanderesse] ou à un tiers » et l'on ne peut, par conséquent, parler de perte de l'objet puisque, pour exister, l'impossibilité d'exécution liée à la perte de l'objet d'une obligation doit être définitive. La cour d'appel a, partant, violé le principe général du droit relatif à la caducité des obligations, en raison de la disparition de l'objet.

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de cassation soussigné conclut, qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, de casser et annuler l'arrêt attaqué, ordonner que mention en soit faite en marge de la décision annulée, renvoyer la cause et les parties devant une autre cour d'appel et statuer comme de droit sur les dépens de la présente instance.

Bruxelles, le 23 janvier 2017

Pour la demanderesse,
Son conseil,

Paul LEFEBVRE


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.17.0055.F
Date de la décision : 02/02/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-02-02;c.17.0055.f ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award