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10/01/2018 | BELGIQUE | N°P.17.0661.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 10 janvier 2018, P.17.0661.F


N° P.17.0661.F
C. L.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Danielle Dechamps, avocat au barreau de Liège.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 mars 2017 par le tribunal correctionnel de Liège, division Liège, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.


II. LA DÉCISION

DE LA COUR

Sur l'ensemble du premier moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la C...

N° P.17.0661.F
C. L.
prévenu,
demandeur en cassation,
ayant pour conseil Maître Danielle Dechamps, avocat au barreau de Liège.

I. LA PROCÉDURE DEVANT LA COUR

Le pourvoi est dirigé contre un jugement rendu le 13 mars 2017 par le tribunal correctionnel de Liège, division Liège, statuant en degré d'appel.
Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.
L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. LA DÉCISION DE LA COUR

Sur l'ensemble du premier moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 2 du Code pénal, ainsi que de la méconnaissance du principe général du droit relatif au respect des droits de la défense et de la notion légale de récidive.

Le demandeur reproche au jugement qui le condamne du chef d'infraction à la réglementation de la vitesse maximale autorisée, d'admettre la circonstance qu'il se trouvait en état de récidive spéciale, alors que celle-ci découle d'une condamnation prononcée le 24 février 2014, soit avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2015, du paragraphe 6 de l'article 38 de la loi relative à la police de la circulation routière, inséré par l'article 9, 4°, de la loi du 9 mars 2014 modifiant la loi précitée. En outre, selon le demandeur, le régime nouveau, découlant de l'entrée en vigueur de cette disposition, est plus sévère que celui applicable aux mêmes faits au moment où la décision qui fonde l'état de récidive a acquis force de chose jugée.

En tant qu'il vise la notion légale de récidive, sans indiquer les dispositions qui auraient été violées ni en quoi elles l'auraient été, le moyen est irrecevable en raison de son imprécision.

En vertu de l'article 2 du Code pénal, nulle infraction ne peut être punie de peines qui n'étaient pas portées par la loi avant que l'infraction fût commise et, si la peine établie au temps du jugement diffère de celle qui était portée au temps de l'infraction, la peine la moins forte sera appliquée.

La personne condamnée ne dispose pas, si elle commet une nouvelle infraction, d'un droit acquis à bénéficier des règles relatives à la récidive en vigueur au moment du jugement qui l'a sanctionnée.

Conformément au principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, pour que le juge soit admis à constater l'état de récidive et à appliquer immédiatement le régime répressif plus sévère qui y est attaché, il suffit que l'infraction constitutive du second terme, qu'il dépend de l'agent de ne pas commettre, soit postérieure à son entrée en vigueur.

Dans cette mesure, reposant sur une prémisse juridique différente, le moyen manque en droit.

Sur le second moyen :

Quant à la première branche :

Le demandeur invite la Cour à interroger à titre préjudiciel la Cour constitutionnelle quant à l'éventuelle discrimination découlant du régime de l'article 38, § 6, alinéa 1er, de la loi relative à la police de la circulation routière, qui est différent selon le type d'infraction qui a donné lieu à la condamnation en état de récidive spéciale. Selon le demandeur, en imposant l'application de la déchéance du droit de conduire et en subordonnant la réintégration dans celui-ci à la réussite de quatre examens lorsque le prévenu est condamné du chef d'infraction à l'article 29, § 3, alinéa 3, de cette loi, l'article 38, § 6, alinéa 1er, précité établit une discrimination, dès lors que ces peine et mesure de sûreté sont seulement facultatives en cas de condamnation du chef d'une infraction visée à l'article 37/1, alinéa 1er.

La Cour n'est pas tenue au renvoi préjudiciel lorsque la question ne dénonce pas une distinction opérée par la loi entre des personnes se trouvant dans la même situation juridique et auxquelles s'appliqueraient des règles différentes.

Conformément à l'article 38, § 6, alinéa 1er, précité, sauf dans le cas visé à l'article 37/1, alinéa 1er, le juge doit prononcer la déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur pour une période de trois mois au moins, et subordonner la réintégration dans le droit de conduire à la réussite des quatre examens visés à l'article 38, § 3, alinéa 1er, si le coupable, dans la période de trois ans à compter du jour du prononcé d'un précédent jugement de condamnation coulé en force de chose jugée du chef de l'une des infractions visées aux articles 29, § 1er, alinéa 1er, 29, § 3, alinéa 3, 30, §§ 1er, 2 et 3, 33, §§ 1er et 2, 34, § 2, 35, 37, 37bis, § 1er, 48 et 62bis, commet à nouveau l'une de ces infractions.

L'article 37/1, alinéa 1er, de la loi dispose qu' « en cas de condamnation du chef d'une infraction aux articles 34, § 2, 35 ou 36, le juge peut, s'il ne prononce pas la déchéance définitive du droit de conduire un véhicule à moteur, limiter la validité du permis de conduire du contrevenant, pour une période d'au moins un an à cinq ans au plus ou à titre définitif, aux véhicules à moteur équipés d'un éthylotest antidémarrage à condition que celui-ci remplisse, en tant que conducteur, les conditions du programme d'encadrement visé à l'article 61quinquies, § 3 [...] ».

En cas de conduite en état d'imprégnation alcoolique ou d'ivresse, et dans les hypothèses y assimilées, le législateur a prévu la possibilité, par le recours cumulatif au procédé technique visé à l'article 37/1, alinéa 1er, de la loi, à savoir l'éthylotest antidémarrage, et à l'obligation de remplir les conditions du programme d'encadrement visé à l'article 61quinquies, § 3, de circonvenir le risque particulier que le prévenu réitère de telles infractions.

Dès lors que les conducteurs condamnés en état de récidive spéciale du chef d'une telle infraction constituent une catégorie distincte de celle à laquelle appartiennent les autres conducteurs visés à l'article 38, § 6, alinéa 1er, de la loi relative à la police de la circulation routière, dont ceux qui ont commis un excès de vitesse, de sorte que des mesures plus adaptées pouvaient être envisagées à l'égard des premiers, il n'y a pas lieu de poser la question préjudicielle.

Quant à la seconde branche :

Le demandeur propose à la Cour de poser à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante :

« L'article 38, § 6, tel qu'inséré par l'article 9 de la loi du 9 mars 2014 dans la loi relative à la police de la circulation routière, coordonnée le 16 mars 1968, interprété en ce sens qu'il permet de fonder la récidive sur un jugement de condamnation antérieur à son entrée en vigueur, viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution en ce que les justiciables condamnés avant son entrée en vigueur n'ont pas pu organiser la défense de leurs intérêts en connaissance du fait que l'éventuelle nouvelle condamnation servirait de base à la récidive, alors que les justiciables condamnés après son entrée en vigueur ont la possibilité d'organiser la défense de leurs intérêts en parfaite connaissance de cause ? ».

La différence de traitement alléguée ne résulte pas de l'application immédiate de l'article 38, § 6, de la loi relative à la police de la circulation routière aux faits commis après son entrée en vigueur, mais repose sur une comparaison purement hypothétique, cette disposition n'existant pas au moment du premier terme de la récidive, de sorte qu'elle n'aurait pu servir dans le cadre de l'exercice des droits de la défense à ce moment.

La question préjudicielle ne doit pas être posée.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux frais.
Lesdits frais taxés à la somme de soixante-sept euros septante et un centimes dus.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, où siégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président, Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz, conseillers, et prononcé en audience publique du dix janvier deux mille dix-huit par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avec l'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.
T. Fenaux F. Lugentz T. Konsek
E. de Formanoir F. Roggen B. Dejemeppe


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0661.F
Date de la décision : 10/01/2018

Analyses

ROULAGE, LOI RELATIVE A LA POLICE DE LA CIRCULATION ROUTIERE, DISPOSITIONS LEGALES, Article 38, RECIDIVE


Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-01-10;p.17.0661.f ?

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