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04/01/2018 | BELGIQUE | N°C.16.0374.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 04 janvier 2018, C.16.0374.N


N° C.16.0374.N
1. T. S.,
2. D. S.,
3. B. S.,
4. A. S.,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,

contre

RÉGION FLAMANDE,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 22 décembre 2015 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général Ria Mortier a conclu.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée con

forme, les demandeurs présentent trois moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

1. En vertu d...

N° C.16.0374.N
1. T. S.,
2. D. S.,
3. B. S.,
4. A. S.,
Me Paul Wouters, avocat à la Cour de cassation,

contre

RÉGION FLAMANDE,
Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.

I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 22 décembre 2015 par la cour d'appel de Bruxelles.
Le conseiller Koenraad Moens a fait rapport.
L'avocat général Ria Mortier a conclu.

II. Les moyens de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme, les demandeurs présentent trois moyens.

III. La décision de la Cour

Sur le premier moyen :

1. En vertu de l'article 35, alinéa 1er, du décret du 22 octobre 1996 relatif à l'aménagement du territoire, dans sa version applicable au litige, il y a lieu à indemnité à charge, suivant le cas, de la Région flamande, de l'association intercommunale ou de la commune, lorsque l'interdiction de bâtir ou de lotir résultant d'un plan revêtu de la force obligatoire met fin à l'usage auquel un bien est affecté ou normalement destiné au jour précédant l'entrée en vigueur de ce plan.
En vertu de l'article 35, alinéa 2, de ce décret, la diminution de valeur qui est prise en considération pour l'indemnisation doit être estimée en tant que la différence entre la valeur du bien au moment de l'acquisition, actualisée jusqu'au jour où naît le droit à l'indemnité, majorée des charges et des frais avant l'entrée en vigueur du plan, et la valeur du bien au moment où naît le droit à l'indemnisation après l'entrée en vigueur de ce plan.

En vertu de l'article 35, alinéa 3, du même décret, la valeur du bien au moment de l'acquisition est réputée correspondre au montant ayant servi d'assise pour la perception des droits d'enregistrement ou de succession sur la pleine propriété du bien ou, à défaut de la perception précitée, à la valeur marchande du bien en pleine propriété, au jour de l'acquisition ; la valeur du bien au moment où naît le droit à l'indemnisation est réputée correspondre :
1° en cas de mutation du bien, au montant ayant servi d'assise pour la perception des droits d'enregistrement ou de succession sur la pleine propriété du bien, ou, à défaut de la perception précitée, à la valeur marchande du bien en pleine propriété au jour de l'acquisition, le montant minimum étant égal à la valeur convenue ;
2° en cas de refus du permis de bâtir ou de lotir ou de délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif, à la valeur marchande à cette date.
En vertu de l'article 35, alinéa 4, dudit décret, la valeur du bien au moment de l'acquisition est actualisée en la multipliant par l'indice des prix à la consommation du mois civil précédant celui au cours duquel l'indemnité est fixée et en divisant le résultat ainsi obtenu par l'indice des prix à la consommation moyen de l'année d'acquisition du bien par l'ayant droit de l'indemnité, réduit, le cas échéant, sur la même base que l'indice précité ; ensuite, la valeur actualisée est augmentée des frais d'acquisition et des dépenses faites par l'ayant droit de l'indemnité en vue de donner au bien l'affectation qu'il avait au jour précédant l'entrée en vigueur du plan visé par l'alinéa 1er du même article.
En vertu de l'article 35, alinéa 6, dudit décret, le droit à l'indemnisation naît, soit au moment de la mutation du bien, soit lors du refus d'un permis de bâtir ou de lotir, soit lors de la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif.
En vertu de l'article 35, alinéa 7, du décret, la diminution de la valeur du bien résultant de l'interdiction de bâtir ou de lotir doit toutefois être subie sans indemnité jusqu'à concurrence de vingt pour cent de cette valeur.

2. Il ressort des travaux préparatoires de l'article 35, alinéa 3, du décret du 22 octobre 1996 relatif à l'aménagement du territoire que le législateur souhaitait éviter que la personne réclamant l'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale puisse se prévaloir d'une valeur d'acquisition du bien plus élevée que lorsqu'elle a agi en tant que débiteur ou codébiteur de la perception des droits d'enregistrement ou de succession.
Il résulte de l'intention du législateur décrétal de pénaliser, s'agissant du calcul de l'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale, ceux qui ont sous-estimé le bien immobilier dans une déclaration de succession que le montant qui a servi d'assise pour la perception des droits de succession est pris en considération, non seulement lorsque, après la dévolution successorale, la pleine propriété du bien revient à une ou plusieurs personnes, mais aussi lorsque le demandeur en réparation des dommages résultant de la planification spatiale ou son auteur acquiert la nue-propriété du bien, éventuellement en indivision avec d'autres. La partie proportionnelle du montant qui a servi d'assise pour la perception des droits de succession sur cette partie en nue-propriété, y compris l'usufruit, est alors considérée comme la valeur d'acquisition de la nue-propriété.
3. Le moyen, qui repose sur la prémisse juridique erronée que la valeur d'acquisition visée à l'article 35, alinéas 2, 3 et 4, du décret du 22 octobre 1996 n'est déterminée en fonction du montant qui a servi d'assise pour la perception des droits de succession que si ce bien est dévolu par héritage en pleine propriété à un ou plusieurs propriétaires, manque en droit.

Sur le second moyen :

Quant aux première et deuxième branches :

4. Lorsque les juges d'appel ont refusé de poser à la Cour constitutionnelle une question préjudicielle sur la violation, par la loi, des articles 10 et 11 de la Constitution, et que, dans son pourvoi en cassation, le demandeur critique, non seulement ce refus, mais aussi la décision rendue sur le litige lui-même, qui lui fournit le fondement d'une question préjudicielle, la Cour est en principe tenue de poser elle-même cette question à la Cour constitutionnelle.
5. Le principe général du droit relatif à l'égalité des citoyens devant les charges publiques, qui est consacré notamment par l'article 16 de la Constitution, implique que les pouvoirs publics ne peuvent imposer, sans compensation, des charges qui excèdent la mesure de celles supportées par un particulier dans l'intérêt collectif.
6. La question se pose si, dans la mesure où il part d'une valeur d'acquisition basée, en cas de succession, sur l'assiette prise en considération pour les droits de succession et qui est actualisée sur la base de l'indice des prix à la consommation, le régime forfaitaire d'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale introduit par l'article 35, alinéa 3, du décret du Parlement flamand du 22 octobre 1996 relatif à l'aménagement du territoire n'est pas trop restrictif puisqu'il peut sembler que le mode de calcul forfaire ne présente aucun rapport avec la perte réelle de patrimoine subie par le justiciable. Partant, il y a lieu de vérifier si le régime forfaitaire de l'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale est compatible avec des normes de droit supérieures, telles que les articles 10, 11 et 16 de la Constitution lus en combinaison avec l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Il y a lieu de poser à la Cour constitutionnelle la question posée dans le dispositif.

Par ces motifs,

La Cour

Sursoit à statuer jusqu'à ce que la Cour constitutionnelle ait répondu à la question suivante :
L'article 35 du décret du Parlement flamand du 22 octobre 1996 relatif à l'aménagement du territoire viole-t-il l'article 16 de la Constitution et l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lus en combinaison avec le principe d'égalité et de non-discrimination contenu dans les articles 10 et 11 de la Constitution, dans la mesure où cette disposition impose un calcul forfaitaire de l'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale qui ne tient pas compte ou ne tient pas suffisamment compte de la perte de valeur réelle du bien immobilier à la suite de l'entrée en vigueur de la planification spatiale d'où résulte l'interdiction de bâtir, notamment parce que la valeur d'acquisition n'est actualisée que sur la base de l'indice des prix à la consommation et qu'il est en outre appliqué une déduction de 20 p.c. de l'indemnisation des dommages résultant de la planification spatiale ?
Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président de section Eric Dirix, président, les présidents de section Albert Fettweis et Beatrijs Deconinck, les conseillers Bart Wylleman et Koenraad Moens, et prononcé en audience publique du quatre janvier deux mille dix-huit par le président de section Eric Dirix, en présence de l'avocat général Ria Mortier, avec l'assistance du greffier Kristel Vanden Bossche

Traduction établie sous le contrôle du président de section Christian Storck et transcrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le président de section,


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.16.0374.N
Date de la décision : 04/01/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2020
Fonds documentaire ?: juridat.be
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2018-01-04;c.16.0374.n ?

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