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23/11/2017 | BELGIQUE | N°C.16.0538.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 novembre 2017, C.16.0538.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* I

* N° C.16.0538.N

* PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'ANVERS,









* contre

 1. C. S. W.,

 2. Y. C.,

 3. D. C.,

 4. D. C.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation.

* II

* N° C.16.0544.N

* Y. C.,

* Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,









* contre









* PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D

'ANVERS.

I. La procédure devant la Cour

XIV. Les pourvois en cassation sont dirigés contre l'arrêt rendu le 22juin 2016 par la cour d'appel d'Anvers.

L'avocat général André Van Ingelgem a déposé des conclusions écrites le 18septembre 2017.

Le ...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* I

* N° C.16.0538.N

* PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'ANVERS,

* contre

 1. C. S. W.,

 2. Y. C.,

 3. D. C.,

 4. D. C.,

Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation.

* II

* N° C.16.0544.N

* Y. C.,

* Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,

* contre

* PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'ANVERS.

I. La procédure devant la Cour

XIV. Les pourvois en cassation sont dirigés contre l'arrêt rendu le 22juin 2016 par la cour d'appel d'Anvers.

L'avocat général André Van Ingelgem a déposé des conclusions écrites le 18septembre 2017.

Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.

L'avocat général Christian Vandewal a conclu.

II. Le moyen de cassation

Dans la cause C.16.0538.N., le demandeur présente un moyen dans la requêteen cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.

Dans la cause C.16.0544.N, la demanderesse présente un moyen dans larequête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiée conforme.

III. La décision de la Cour

(…)

* B. Sur le pourvoi C.16.0544.N

Quant à la seconde branche :

2. Aux termes de l'article 146bis du Code civil, il n'y a pas de mariagelorsque, bien que les consentements formels aient été donnés en vue decelui-ci, il ressort d'une combinaison de circonstances que l'intention del'un au moins des époux n'est manifestement pas la création d'unecommunauté de vie durable, mais vise uniquement l'obtention d'un avantageen matière de séjour, lié au statut d'époux.

En vertu de l'article 184 du même code, un mariage contracté encontravention à l'article 146bis peut notamment être attaqué par leministère public. Le procureur du Roi poursuit la nullité d'un telmariage.

3. L'article 8, alinéa 1^er, de la Constitution dispose que la qualité deBelge s'acquiert, se conserve et se perd d'après les règles déterminéespar la loi civile.

Aux termes de l'article 2 du Code de la nationalité belge, l'attribution,l'acquisition, la perte ou le recouvrement de la nationalité belge, dequelque cause qu'ils procèdent, ne produisent d'effet que pour l'avenir.

4. L'article 16, § 2, 1°, dudit code, tel qu'il était applicable avant sonabrogation par la loi du 4 décembre 2012, dispose que l'étranger quicontracte mariage avec un conjoint de nationalité belge ou dont leconjoint acquiert la nationalité belge au cours du mariage peut, si lesépoux ont résidé ensemble en Belgique pendant au moins trois ans et tantque dure la vie commune en Belgique, acquérir la nationalité belge pardéclaration faite conformément à l'article 15.

5. Aux termes de l'article 23, § 1^er, 1°, dudit code, dans la versionpostérieure à sa modification par la loi du 27 décembre 2006 et antérieureà sa modification par la loi du 4 décembre 2012, les Belges qui netiennent pas leur nationalité d'un auteur belge au jour de leur naissanceet les Belges qui ne se sont pas vu attribuer leur nationalité en vertu del'article 11 peuvent être déchus de la nationalité belge s'ils ont acquisla nationalité belge sur la base de faits qu'ils ont présentés de manièrealtérée ou qu'ils ont dissimulés, ou sur la base de fausses déclarationsou de documents faux ou falsifiés qui ont été déterminants dans ladécision d'octroi de la nationalité.

Sur la base de cette disposition, la constatation d'un mariage decomplaisance au sens de l'article 146bis du Code civil qui a été contractéaprès le 27 décembre 2006 peut donner lieu à la perte de la nationalitébelge acquise par un conjoint en application de l'article 16, § 2, 1°,précité du Code de la nationalité belge.

6. En vertu de l'article 23, §§ 2 et 3, dudit code, dans la versionpostérieure à sa modification par la loi du 27 décembre 2006, la déchéancede la nationalité belge est poursuivie par le ministère public devant lacour d'appel de la résidence principale en Belgique du défendeur ou, àdéfaut, devant la cour d'appel de Bruxelles.

Conformément à l'article 23, § 8, dernier alinéa, dudit code, dans laversion postérieure à sa modification par la loi du 27 décembre 2006, ladéchéance a effet à compter de la transcription sur le registre visé àl'article 25.

En vertu de l'article 23, § 9, dudit code, dans la version postérieure àsa modification par la loi du 27 décembre 2006, dans le cas visé au §1^er, 1°, l'action en déchéance se prescrit par cinq ans à compter de ladate de l'obtention de la nationalité belge par l'intéressé.

7. Il résulte de l'article 23 dudit code, tel que modifié par la loi du 27décembre 2006, qu'un mariage de complaisance ne peut, selon la volonté dulégislateur, entraîner la perte de la nationalité belge que selon lesmodalités reprises dans ces dispositions légales.

Il en résulte que l'application du principe fraus omnia corrumpit ne peutentraîner la perte de la nationalité belge ni rétroactivement ni sous uneforme autrement dérogatoire au prescrit de l'article 23 précité du Code dela nationalité belge.

8. L'arrêt constate que :

- le 11 octobre 2007, la demanderesse a épousé en Chine C. S. W., qui a lanationalité belge ;

- le 3 avril 2008, elle est venue en Belgique dans le cadre d'unregroupement familial, avec les deux filles issues de son mariage avec Z.C., dont elle était divorcée ;

- le 15 juillet 2011, elle a obtenu la nationalité belge en application del'article 16 ancien du Code de la nationalité belge et, par voie deconséquence, ses filles ont obtenu la nationalité belge en application del'article 12bis, § 1^er, 2°, ancien dudit code ;

- la demanderesse et C. S. W. sont séparés de fait depuis 2010 et ontdivorcé le 27 avril 2012 ;

- le 29 août 2012, la demanderesse a déclaré à l'officier de l'état civilde la ville d'Anvers son intention de se remarier avec le père de sesfilles ;

- l'officier de l'état civil a refusé de célébrer le mariage pour cause demariage de complaisance et le recours contre cette décision a été rejetépar ordonnance du 18 novembre 2013, confirmée par la cour d'appel ;

- les 10 et 13 janvier 2014, le procureur du Roi d'Anvers a cité lademanderesse, ses filles et C. S. W. à comparaître devant le tribunal depremière instance d'Anvers, en premier lieu afin d'annuler le mariagecontracté le 11 octobre 2007 pour cause de mariage de complaisance etensuite afin de radier les certificats de nationalité de la demanderesseet de ses filles qui, selon le ministère public, doivent être considéréscomme inexistants ;

- par jugement du 27 mai 2015, le premier juge a d'abord annulé le mariagecontracté le 11 octobre 2007, puis prononcé la déchéance de l'état debelge à l'encontre de la demanderesse, étant entendu qu'un délai maximumd'un an lui a été accordé pour recouvrer la nationalité chinoise, aprèsquoi la déchéance prend effet irrévocablement, et il a enfin rejeté lademande à l'égard des filles de la demanderesse.

9. L'arrêt constate tout d'abord, sans être critiqué, que le mariagecontracté par la demanderesse et C. S. W. le 11 octobre 2007 est frappé denullité absolue, en tant que mariage de complaisance, et confirme lejugement entrepris en ce qui concerne l'annulation de ce mariage et quantà ses effets sur la nationalité belge obtenue par les filles de lademanderesse.

Sur l'appel du défendeur, l'arrêt annule le jugement entrepris en ce quiconcerne les effets de l'annulation du mariage sur la nationalité belgeobtenue par la demanderesse et dit pour droit que la demanderesse estcensée ne jamais avoir obtenu la nationalité belge. Il justifie cettedécision par les motifs que le principe général du droit fraus omniacorrumpit empêche que le dol bénéficie à l'auteur, que le mariage avec unBelge constitue une condition nécessaire à la déclaration de choix denationalité visée à l'article 16, § 2, 1°, du Code de la nationalitébelge, que lorsqu'il est établi ex tunc qu'il n'y a pas de mariage au sensde l'article 146bis du Code civil, la condition prévue à l'article 16, §2, alinéa 1^er, dudit code n'est jamais remplie et que, par conséquent, lademanderesse ne pouvait puiser dans ce mariage un droit à l'obtention et àla conservation de la nationalité belge obtenue par fraude.

10. L'arrêt, qui donne ainsi à l'annulation d'un mariage de complaisancedes effets en matière de nationalité allant à l'encontre de la législationsur la nationalité, viole l'article 8 de la Constitution et les articles2, 16 et 23 du Code de la nationalité belge, dans leur version applicableen l'espèce, et il méconnaît le principe général du droit fraus omniacorrumpit en l'appliquant contra legem.

Le moyen, en cette branche, est fondé.

* C. Sur le pourvoi C.16.0538.N

(…)

Sur le fondement du pourvoi :

13. En tant qu'il invoque la violation de l'article 149 de laConstitution, mais reproche en réalité à l'arrêt, non un défaut demotivation, mais une illégalité, le moyen est irrecevable.

14. En vertu de l'article 12bis, § 1^er, 2°, du Code de la nationalitébelge, dans la version applicable après sa modification par la loi du 27décembre 2006 et avant sa modification par la loi du 4 décembre 2012,l'étranger dont l'un des auteurs possède la nationalité belge au moment dela déclaration peut acquérir la nationalité belge en faisant unedéclaration conformément au paragraphe 2 de cet article, s'il a atteintl'âge de dix-huit ans. Si le déclarant a sa résidence principale àl'étranger, il doit montrer qu'il a conservé des liens effectifs avec sonauteur belge et cet auteur doit avoir fixé sa résidence principale enBelgique au moment de la déclaration.

15. En tant qu'il suppose que la disposition légale précitée requiert undroit de séjour pour l'acquisition de la nationalité belge, le moyenrepose sur un soutènement inexact et, dès lors, manque en droit.

16. Le surplus du moyen suppose tout entier que l'annulation de sonmariage avec le premier défendeur entraîne rétroactivement la perte de lanationalité belge de la seconde défenderesse.

17. Il résulte de la réponse à la seconde branche du moyen dans la causeC.16.0544.N que le moyen repose, dans cette mesure, sur un soutènementinexact.

Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Joint les causes C.16.0538.N et C.16.0544.N. ;

Dans la cause C.16.0538.N :

Rejette le pourvoi ;

Laisse les dépens à charge de l'État belge.

Les dépens taxés pour le demandeur à 50,12 euros.

Dans la cause C.16.0544.N :

Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur la possession de lanationalité belge dans le chef de la demanderesse ;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtpartiellement cassé ;

Réserve les dépens pour qu'il soit statué sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitée, devant la cour d'appel de Bruxelles.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président de section Eric Dirix, président, le président desection Beatrijs Deconinck, les conseillers Koen Mestdagh, Geert Jocquéet Bart Wylleman, et prononcé en audience publique du vingt-trois novembredeux mille dix-sept par le président de section Eric Dirix, en présence del'avocat général Christian Vandewal, avec l'assistance du greffier KristelVanden Bossche.

Traduction établie sous le contrôle du conseiller Mireille Delange ettranscrite avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

Le greffier, Le conseiller,

Requête

23 NOVEMBRE 2017 C.16.0538.N-

C.16.0544.N/1

Requête/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.16.0538.N
Date de la décision : 23/11/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 31/01/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-11-23;c.16.0538.n ?
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