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22/11/2017 | BELGIQUE | N°P.17.0630.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 22 novembre 2017, P.17.0630.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0630.F

A. Y.

prévenu,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Michel Forges et Benjamin Daro, avocats aubarreau de Bruxelles.

* I. la procédure devant la cour











Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 5 mai 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.

Le demandeur invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Benoît Dejemeppe a fait

rapport.

L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

* II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

Le m...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0630.F

A. Y.

prévenu,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Michel Forges et Benjamin Daro, avocats aubarreau de Bruxelles.

* I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 5 mai 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre correctionnelle.

Le demandeur invoque quatre moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Benoît Dejemeppe a fait rapport.

L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

* II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

Le moyen reproche à l'arrêt de violer la foi due aux témoignages produitspar le demandeur à l'appui de sa défense invoquant la légitime défensepour justifier les coups ou blessures volontairement portés à la victime.

Après avoir considéré que l'attaque alléguée par le demandeur ne résultepas des éléments du dossier, l'arrêt énonce que « même à considérer unetelle attaque ou une telle crainte comme vraisemblable, le [demandeur]avait manifestement d'autres moyens pour se protéger que de porter un coupde poing : esquiver, quitter les lieux, appeler la police… Sa réponse n'adonc manifestement pas été proportionnelle à l'attaque ou à la crainteévoquée. En conséquence, les conditions légales de la légitime défense nesont nullement réunies en l'espèce. »

Ces motifs, que le demandeur ne critique pas, suffisent à justifier ladécision des juges d'appel d'écarter l'exception soulevée.

Le moyen est irrecevable à défaut d'intérêt.

Quant à la deuxième branche :

Le moyen soutient qu'en considérant que le demandeur avait conclu avantl'audience du 22 décembre 2016 et qu'il « n'a sollicité aucun délai pourconclure lors de celle-ci, ni fait état d'un fait nouveau ou pertinentjustifiant de nouvelles conclusions », l'arrêt viole la foi due auprocès-verbal de l'audience du 22 décembre 2016.

Le procès-verbal précité mentionne :

« Le conseil du [demandeur] demande à la cour qu'un témoin soit entendu ouà tout le moins que le ministère public fasse procéder à l'audition de cetémoin ;

Le ministère public précise qu'à ce stade-ci de la procédure, il n'estimepas devoir faire procéder à cette audition, dans la mesure où uneattestation de ce témoin figure déjà au dossier ;

Le conseil du [demandeur] souhaite obtenir un écrit de conclusions duministère public avant son réquisitoire à l'audience ;

Le ministère public déclare ne pas souhaiter conclure dans le cadre decette affaire au stade actuel. »

Il ne résulte pas de ces énonciations que des faits nouveaux aient étéactés lors de l'audience du 22 décembre 2016.

Par la considération critiquée, les juges d'appel n'ont dès lors pasdonné, des énonciations dudit procès-verbal, une interprétationinconciliable avec leurs termes.

Le moyen ne peut être accueilli.

Quant à la troisième branche :

Le demandeur soutient qu'en considérant que, de la « seule circonstance »que le ministère public est placé sur la même estrade que les membres dela cour d'appel, il ne peut se déduire une connivence entre lui et lesmagistrats du siège, l'arrêt viole la foi due à ses conclusions invoquantégalement d'autres circonstances pour justifier l'irrecevabilité despoursuites.

Sous le point « 2.2 La place occupée par le ministère public àl'audience », ces conclusions invoquaient, d'une part, que le président dela chambre de la cour d'appel s'était opposé à ce que le greffier acte quele ministère public refusait de prendre des conclusions et, d'autre part,que la place occupée par le ministère public aux côtés de la cour donnait« le sentiment très désagréable qu'il existe une connivence entre leministère public et la cour ».

Les juges d'appel ont énoncé, d'une part, que, de la seule circonstance dela place du ministère public à l'audience, il ne pouvait se déduire uneconnivence entre lui et les membres de la cour, et d'autre part, que, lorsde l'audience du 22 décembre 2016, il a bien été acté que le ministèrepublic ne désirait pas conclure ni, à ce stade, faire entendre le témoindont la défense demandait l'audition. L'arrêt précise ensuite qu'aucunargument ne peut dès lors être tiré du déroulement de cette audience.

Par la considération critiquée, lue en combinaison avec l'autre motifprécité, les juges d'appel n'ont pas donné, du passage des conclusions dudemandeur, une interprétation inconciliable avec ses termes.

Le moyen ne peut être accueilli.

Sur le deuxième moyen :

Quant à la première branche :

Le moyen est pris de la violation des articles 6.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 152 duCode d'instruction criminelle.

Aucune de ces dispositions n'impose au ministère public de prendre desconclusions écrites avant l'audience. La circonstance que le prévenu adéposé des conclusions est sans incidence à cet égard.

Soutenant le contraire, le moyen manque en droit.

Quant à la seconde branche :

Le moyen soutient qu'en écartant les conclusions additionnelles et desynthèse du demandeur déposées à l'audience du 22 mars 2017, la courd'appel a violé l'article 152 du Code d'instruction criminelle et l'équitédu procès.

Il apparaît de l'arrêt que les juges d'appel ont examiné la défense dudemandeur tant du point de vue de la recevabilité des poursuites que de lacontestation des faits qui lui étaient reprochés. Aucun de ces motifs nerepose sur des éléments qu'il n'a pas pu contredire, puisque chacun d'euxn'est que la réfutation des exceptions invoquées dans lesdites conclusionsd'appel.

Dès lors que la cour d'appel a répondu aux moyens présentés par ledemandeur dans cette instance et qu'elle a ainsi fait ce qu'elle aurait dûfaire si elle n'avait pas écarté les nouvelles conclusions jugéestardives, il n'apparaît pas que le droit à un procès équitable ait étéviolé par cet écartement.

Ne pouvant entraîner la cassation, le moyen est irrecevable à défautd'intérêt.

Sur le troisième moyen :

Le moyen est pris de la violation de l'article 6.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il faitgrief à l'arrêt de considérer que, de la seule circonstance que leministère public est placé sur la même estrade que les membres de la courd'appel, il ne peut se déduire une connivence entre les deux catégories demagistrats, alors que cette position a eu un impact sur la conviction dudemandeur quant au traitement inéquitable qui lui a été réservé.

Le ministère public accomplit, dans l'intérêt de la société, des missionsde service public relatives à la recherche et à la poursuite desinfractions et il exerce l'action publique, intervenant au procès pourproposer au juge une solution de justice tandis que le prévenu défend sonintérêt personnel.

La position surélevée du représentant du ministère public à l'audience parrapport aux autres parties ne suffit pas à mettre en cause l'égalité desarmes, dans la mesure où cette situation ne constitue pas un obstacleconcret pour la défense des intérêts du prévenu.

A cet égard, le moyen manque en droit.

Par ailleurs, le demandeur soutient que le manque d'impartialité des jugesd'appel se déduit également du fait qu'ils ont écarté ses conclusionsadditionnelles et de synthèse « pour violation des droits de la défense duministère public ».

Cette affirmation ne trouve toutefois pas d'appui dans les pièces de laprocédure.

Dans cette mesure, le moyen manque en fait.

Sur le quatrième moyen :

Le demandeur reproche à l'arrêt de méconnaître le droit à un procèséquitable en rejetant sa demande d'audition d'un témoin à décharge dont ilavait déposé une déclaration manuscrite à l'audience de la cour d'appel.

L'article 6.3.d, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertés fondamentales prévoit que toute personne poursuivie du chefd'une infraction a le droit d'interroger ou de faire interroger lestémoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogatoire destémoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge.

Ce droit n'est pas absolu, le juge pouvant accepter ou refuser une telledemande selon qu'elle apparaisse ou non utile à la manifestation de lavérité et dans le respect de l'équité du procès.

Lorsqu'une audition de témoin est demandée, le juge, s'il n'y fait pasdroit, doit y répondre et préciser la raison de l'inutilité de la mesured'instruction sollicitée pour forger sa conviction.

Aux pages 5 à 8 de l'arrêt, les juges d'appel ont détaillé les faits de lacause en s'appuyant sur les déclarations de la victime et des personnesqui l'accompagnaient ainsi que sur la déposition circonstanciée dudemandeur à la police après qu'elle l'a retrouvé dans un local fermé del'établissement où il s'était caché. Ils ont également relevé que, parjugement avant dire droit, le tribunal correctionnel avait ordonné laréouverture des débats en vue de permettre au ministère public de faireentendre deux personnes ayant rédigé des attestations déposées par ledemandeur, mais que ces personnes n'avaient pu être entendues, l'unen'ayant plus d'attaches à l'adresse donnée par elle et l'autre n'ayant pasrépondu aux convocations.

L'arrêt énonce ensuite que le demandeur sollicite, pour la première foisen degré d'appel, l'audition de K.K., agent de sécurité au moment desfaits. A cet égard, il considère que « les faits s'étant déroulés il y après de trois ans, cette audition ne sera manifestement pas de nature àéclairer la cour, d'autant plus qu'il résulte à suffisance des élémentsqui précèdent qu'au contraire de ce que soutient le [demandeur], il étaitmanifestement l'un des agents de sécurité de l'établissement au moment desfaits, ce qui imposerait de considérer avec réserve le témoignage de soncollègue de travail ».

En l'absence de conclusions précisant en quoi le témoignage sollicitéserait contributif à la manifestation de la vérité, les juges d'appel ont,par ces considérations, légalement justifié leur décision de refuser defaire droit à la demande d'audition formulée par le demandeur.

Le moyen ne peut être accueilli.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux frais.

Lesdits frais taxés à la somme de quatre-vingts euros nonante et uncentimes dus.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz,conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-deux novembre deuxmille dix-sept par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction deprésident, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avecl'assistance de Tatiana Fenaux, greffier.

+------------------------------------------------------------------------+
| T. Fenaux | F. Lugentz | T. Konsek |
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| E. de Formanoir | F. Roggen | B. Dejemeppe |
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22 NOVEMBRE 2017 P.17.0630.F/8


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0630.F
Date de la décision : 22/11/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 09/12/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-11-22;p.17.0630.f ?
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