Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.17.0727.N
I. M. A. H.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
Me Walter Damen, avocat au barreau d'Anvers,
contre
1. BAGGERWERKEN DECLOEDT & ZOON, société anonyme,
(…)
18. D. T.,
parties civiles,
défendeurs en cassation.
II. M. M.-A.,
prévenu, détenu,
demandeur en cassation,
Me Maarten Vandermeersch, avocat au barreau de Courtrai.
I. la procédure devant la cour
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 2 juin 2017 par la courd'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur I invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.
Le demandeur II invoque un moyen dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.
Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.
L'avocat général Marc Timperman a conclu.
II. la décision de la cour
(…)
Sur le moyen soulevé d'office concernant le demandeur II :
Disposition légale violée :
* article 203 du Code d'instruction criminelle
8. L'article 203 du Code d'instruction criminelle dispose qu'il y auradéchéance de l'appel, si la déclaration d'appeler n'a pas été faite augreffe du tribunal qui a rendu le jugement, trente jours au plus tardaprès celui où il a été prononcé, s'il concerne un jugement renducontradictoirement.
9. L'article 204, alinéas 1 et 4, du Code d'instruction criminelle prévoitqu'à peine de déchéance, l'appel indique précisément les griefs élevéscontre le jugement et que cette disposition s'applique également auministère public.
10. La saisine de la juridiction d'appel est définie en premier lieu parle contenu de la déclaration d'appel. Dans les limites de la saisine de lajuridiction d'appel déterminée à la lumière de cette déclaration d'appel,cette saisine est par ailleurs définie par les griefs que l'appelantinvoque conformément à l'article 204 du Code d'instruction criminelle.
11. Les griefs que, en vertu de l'article 204 du Code d'instructioncriminelle, l'appelant invoque en dehors de la saisine telle qu'ellerésulte de la déclaration d'appel qu'il a faite, sont irrecevables.
12. Il appartient à la juridiction d'appel de déterminer la portée del'appel et donc la saisine de la juridiction d'appel, sur la base de lateneur de la déclaration d'appel et, ensuite, des griefs formulésconformément à l'article 204 du Code d'instruction criminelle. La Courvérifie si la juridiction d'appel ne déduit pas de ses constatations desconséquences sans lien avec celles-ci ou qu'elles ne sauraient justifier.
13. Il ressort des pièces auxquelles la Cour peut avoir égard que :
- le demandeur II a été acquitté par le jugement dont appel du chef despréventions A, B et C (pour la période courant du 1^er avril 2006 au 31décembre 2007 inclus) et, après que la prévention C (pour la périodecourant du 1^er janvier 2008 au 12 octobre 2013 inclus) a été requalifiéede direction d'une organisation criminelle (infraction à l'article 324ter,§ 4, du Code pénal) en participation à la prise de toute décision dans lecadre des activités d'une organisation criminelle (infraction à l'article324ter, § 3, du Code pénal), il a été condamné à une peined'emprisonnement principale de cinq ans et à une amende de 650,00 euros ;
- le 5 avril 2016, le procureur fédéral a interjeté appel du jugementrendu contradictoirement le 14 mars 2016 en ce qui concerne le demandeurII, en déposant au greffe du tribunal ayant rendu le jugement dont appelune déclaration aux termes de laquelle l'appel était dirigé « contre letaux de la peine et l'absence de décision concernant la confiscationspéciale ».
- le même jour, le procureur fédéral a introduit, au greffe du tribunalayant rendu le jugement dont appel, un formulaire de griefs établi selonle modèle prévu par l'arrêté royal du 18 février 2016, dans lequel lesrubriques 1.4 (taux de peine) et 1.7 (confiscation) ont été cochées en cequi concerne le demandeur II ;
- toujours le 5 avril 2016, le procureur fédéral a également introduit augreffe du tribunal ayant rendu le jugement dont appel une requête d'appeldans laquelle il indiquait, en tenant compte de la rectification d'uneerreur de plume, qu'en ce qui concerne le demandeur II, la décisionrelative à la confiscation et au taux de la peine lui faisait grief, enajoutant : « Mon office a requis un emprisonnement de 10 ans à l'encontre[du demandeur II]. Le tribunal a condamné l'intéressé à 5 ans ».
14. Par les motifs suivants, l'arrêt décide que le procureur fédéral aindiqué qu'il considère faire grief à la décision du fait de larequalification de la prévention C (pour la période déclarée établie) dedirection d'une organisation criminelle en participation à la prise detoute décision dans le cadre également des activités d'une organisationcriminelle, permettant à la juridiction d'appel d'être saisie de cettequalification initiale :
- le procureur fédéral n'a pas invoqué de griefs concernant l'acquittementprononcé du chef des préventions A, B et C (pour la période courant du1^er avril 2006 au 31 décembre 2007 inclus) ;
- le procureur fédéral a bien indiqué qu'il fait grief à la décision, ence qui concerne la prévention C (période déclarée établie), en ce que lepremier juge condamne seulement le demandeur II à une peined'emprisonnement de cinq ans ;
- dès lors que la peine d'emprisonnement maximale encourue pour le crimecorrectionnalisé de participation à la prise de toute décision, quellequ'elle soit, également dans le cadre des activités d'une organisationcriminelle s'élève à cinq ans, le ministère public a ainsi faitnécessairement savoir qu'il faisait grief à la décision, en ce que lepremier juge n'a pas infligé la peine d'emprisonnement maximale pour lecrime correctionnalisé tel qu'initialement qualifié, à savoir directiond'une organisation criminelle, lequel est, sous cette qualification,passible d'une peine d'emprisonnement de dix ans (pour la période courantdu 1^er janvier 2008 au 12 octobre 2013 inclus).
15. Dans sa déclaration d'appel, le procureur fédéral a indiqué que sonappel se limite, en ce qui concerne le demandeur II, au taux de la peineet à la confiscation. Par conséquent, la saisine de la juridiction d'appelest nécessairement limitée à ces décisions et cette juridiction ne peutpas se prononcer sur la culpabilité du demandeur II telle qu'établie parle premier juge en vertu de la qualification à laquelle ce dernier aprocédé. Les juges d'appel qui, sur la base d'une interprétation de larequête d'appel visée à l'article 204 du Code d'instruction criminellecomportant les griefs du procureur fédéral, ont décidé que laqualification du fait déclaré établi par le premier juge leur permetd'être saisis, ont violé la disposition légale susmentionnée.
(…)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué, en tant qu'il décide, en ce qui concerne ledemandeur II, que les juges d'appel peuvent se prononcer sur laqualification de la prévention C déclarée établie, telle qu'elle a étérequalifiée par le premier juge et déclarée établie pour la périodecourant du 1^er janvier 2008 au 12 octobre 2013 inclus, sur la culpabilitédu chef de ces faits et sur la peine prononcée, en ce compris lacontribution au Fonds d'aide aux personnes victimes d'actes intentionnelsde violence ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtcassé ;
Condamne le demandeur I aux frais de son pourvoi ;
Réserve la décision sur les frais du pourvoi du demandeur II afin qu'ilsoit statué sur ceux-ci par la juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Bruxelles.
* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président,Peter Hoet, Antoine Lievens, Sidney Berneman et Ilse Couwenberg,conseillers, et prononcé en audience publique du sept novembre deuxmille dix-sept par le conseiller faisant fonction de président FilipVan Volsem, en présence de l'avocat général Marc Timperman, avecl'assistance du greffier Frank Adriaensen.
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* Traduction établie sous le contrôle du président de section BenoîtDejemeppe et transcrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.
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* Le greffier, Le président de section,
7 NOVEMBRE 2017 P.17.0727.N/1
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