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03/11/2017 | BELGIQUE | N°C.15.0337.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 03 novembre 2017, C.15.0337.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N° C.15.0337.F

* 1. AXA BELGIUM, société anonyme dont le siège social est établi àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* 2. D. B.,

* demanderesses en cassation,

* représentées par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine,11, où il est fait élection de domicile,









* contre









* COMMUNAUTÉ FRANÇAISE DE BELGIQUE, représentée p

ar son gouvernement, enla personne du ministre de l'Éducation, de la Petite Enfance, desCrèches et de la Culture, dont le cabinet est établi à Bruxelles,place Surlet de Cho...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N° C.15.0337.F

* 1. AXA BELGIUM, société anonyme dont le siège social est établi àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

* 2. D. B.,

* demanderesses en cassation,

* représentées par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine,11, où il est fait élection de domicile,

* contre

* COMMUNAUTÉ FRANÇAISE DE BELGIQUE, représentée par son gouvernement, enla personne du ministre de l'Éducation, de la Petite Enfance, desCrèches et de la Culture, dont le cabinet est établi à Bruxelles,place Surlet de Chokier, 15-17,

* défenderesse en cassation,

* représentée par Maître Caroline De Baets, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 149,où il est fait élection de domicile.

I. La procédure devant la Cour

XIII. Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 5mai 2015 par la cour d'appel de Mons.

XIV. Le président de section Christian Storck a fait rapport.

XV. L'avocat général Thierry Werquin a conclu.

XVI. 

II. Le moyen de cassation

XVII. Les demanderesses présentent un moyen libellé dans lestermes suivants :

XVIII. 

XIX. Dispositions légales violées

XX. 

XXI. - articles 1382 et 1383 du Code civil ;

XXII. - articles 25, 26, 27, 29 et 31 de la loi du 29 mai 1959modifiant certaines dispositions de la législation del'enseignement.

XXIII. Décisions et motifs critiqués

* L'arrêt condamne les demanderesses à payer à ladéfenderesse, solidairement avec J.B., la somme de38.169,01 euros majorée des intérêts à partir de la datemoyenne du 1^er mai 1997 et des dépens, par tous ses motifsconsidérés ici comme intégralement reproduits et plusspécialement par les motifs que :

* « La [défenderesse] fonde son action sur le droit propredont elle dispose, en vertu des articles 1382 et suivantsdu Code civil, de réclamer au tiers responsable del'incapacité de travail temporaire de l'enseignant dontelle a continué à supporter le traitement brut pendantcette période la réparation de ce dommage subi suite à safaute ;

* Les [demanderesses] soutiennent que la [défenderesse] n'estpas l'employeur de l'enseignant mais le pouvoir subsidiantet qu'à ce titre, elle ne peut se prévaloir d'un droitpropre puisqu'elle n'a jamais bénéficié des prestations detravail de la victime ; seul un recours subrogatoire luiserait ouvert sur la base de la loi du 3 juillet 1967 surla prévention ou la réparation des dommages résultant desaccidents du travail dans le secteur public ;

* Cette analyse ne peut être suivie : la [défenderesse]supporte constitutionnellement la charge de la rémunérationde tous les enseignants, quel que soit le réseau dans lecadre duquel ils prestent [leur travail] ;

* En cas d'incapacité de travail de ceux-ci résultant de lafaute d'un tiers, elle subit un dommage puisqu'elle doitcontinuer à leur verser leur rémunération sans que desprestations [de travail] soient effectuées ;

* La qualité d'employeur est indifférente à l'existence de cedommage ;

* Les pouvoirs publics qui, à la suite de la faute d'untiers, sont privés des prestations de travail de leursagents et qui, en vertu de leurs obligations légales ouréglementaires, doivent continuer à payer à ceux-ci larémunération correspondant à la période d'incapacitétemporaire subissent en effet un dommage dont la réparationpeut être sollicitée sur la base de l'article 1382 du Codecivil sauf lorsqu'il résulte de la loi, du règlement ou ducontrat que la dépense à intervenir doit resterdéfinitivement à leur charge ;

* De la règle en vertu de laquelle les pouvoirs publicsversent à leurs agents dont l'absence est due à la fauted'un tiers leur traitement d'activité à titre d'avance surl'indemnité due par celui-ci, il peut se déduire que lacharge de ces dépenses n'incombe pas définitivement auxpouvoirs publics (Cass., 23 octobre 2013, R.G.A.R.,15098) ;

* [La défenderesse] est en conséquence fondée à agir sur labase de l'article 1382 du Code civil à charge pour elled'établir les trois éléments fondant la responsabilitécivile de [J.B.] : faute, dommage et lien causal nécessaireet certain entre les deux ».

* Griefs

* Le recours direct de l'employeur fondé sur les articles1382 et 1383 du Code civil ne peut être exercé que par cetemployeur qui, en vertu de dispositions légales ouréglementaires, est tenu de continuer à verser unerémunération à son agent pendant la période d'incapacitétemporaire de travail tout en étant privé de lacontrepartie à cette rémunération, à savoir le travaileffectué contre rémunération sous l'autorité del'employeur, caractéristique de la relation de travail tantcontractuelle que statutaire.

* En vertu de l'article 25 de la loi du 29 mai 1959 modifiantcertaines dispositions de la législation de l'enseignement,l'État (auquel est substituée la défenderesse) accorde auxétablissements subventionnés visés à l'article 24 dessubventions-traitements ; l'article 26 de cette loi imposeà l'employeur, pouvoir organisateur des établissementssubventionnés, d'accorder aux membres de son personnel desrétributions égales aux subventions-traitements accordéespar l'État pour les intéressés ; l'article 27 de la mêmeloi détermine les membres du personnel auxquels sontaccordées des subventions-traitements ; l'article 29prévoit que la subvention-traitement est égale autraitement majoré des allocations diverses auxquellesl'intéressé aurait droit s'il était membre du personnel del'enseignement de l'État. Enfin, en vertu de l'article 36,§ 1^er, les subventions-traitements sont payées directementet mensuellement aux membres du personnel desétablissements concernés.

* Ces dispositions légales, pas plus qu'aucune autre, n'ontpour portée de conférer à la défenderesse la qualitéd'employeur des membres du personnel d'un pouvoirorganisateur du réseau subsidié. Elle reste un tiers payeurqui ne peut exercer sur l'enseignant l'autoritécaractéristique du contrat de travail et ne peut donc subirun dommage propre réparable au sens de l'article 1382 duCode civil.

* Il est dès lors indifférent qu'il puisse se déduire del'article 14, § 3, de la loi du 3 juillet 1967 sur laprévention ou la réparation des dommages résultant desaccidents du travail, des accidents survenus sur le chemindu travail et des maladies professionnelles dans le secteurpublic que le législateur n'ait pas eu l'intention demettre les traitements payés pendant l'absence dutravailleur définitivement à charge de l'employeur lorsquecette absence est due à la faute d'un tiers. Cette questionn'a d'incidence que lorsque le droit propre est exercé parun employeur qui est privé des prestations de travail deson agent.

* L'arrêt, qui consacre le droit de la défenderesse d'agircontre les demanderesses sur la base de l'article 1382 duCode civil aux fins de récupérer lessubventions-traitements qu'elle a payées au sieur G., auxmotifs qu'elle supporte constitutionnellement la charge dela rémunération de tous les enseignants quel que soit leréseau dans le cadre duquel ils prestent [leur travail], ensorte qu'en cas d'incapacité d'un enseignant du réseausubsidié résultant de la faute d'un tiers, elle subit undommage au sens de l'article 1382 du Code civil puisqu'elledoit continuer à lui verser sa rémunération sans que desprestations de travail soient effectuées et que la qualitéd'employeur est indifférente à l'existence de ce dommage,viole toutes les dispositions légales visées au moyen.

III. La décision de la Cour

XL. 

XLI. En vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil,celui qui, par sa faute, cause à autrui un dommageest tenu de le réparer intégralement, ce qui impliqueque le préjudicié soit rétabli dans l'état où ilserait demeuré si l'acte dont il se plaint n'avaitpas été commis.

XLII. L'employeur public qui, ensuite de la faute d'untiers, doit, en vertu de ses obligations légales ouréglementaires, continuer à payer à l'un de sesagents la rémunération et les charges qui la grèventsans recevoir de prestations de travail encontrepartie a droit à une indemnité dans la mesureoù il subit ainsi un dommage, sauf s'il résulte dela loi ou du règlement que ces décaissements doiventrester définitivement à sa charge.

XLIII. La défenderesse peut, sur la base desdits articles1382 et 1383, faire valoir un dommage proprelorsqu'elle est tenue de verser une rémunération àun membre du personnel enseignant de son propreréseau d'enseignement qui est absent en raisond'une incapacité de travail temporaire causée parun accident dû à la faute d'un tiers.

XLIV. Le même droit doit, dans les mêmes circonstances,lui être reconnu lorsque, en qualité de pouvoirsubsidiant de l'enseignement subventionné, elle esttenue de payer, via le mécanisme de lasubvention-traitement, une rémunération à unenseignant dont elle n'est pas l'employeur sans quesoient accomplies les prestations de travail pourlesquelles cette rémunération est normalement due.

XLV. Il ressort des motifs du jugement rendu par lepremier juge le 25 octobre 2010, que l'arrêt faitsiens, qu'un professeur d'un établissementd'enseignement libre subventionné a été victime alorsqu'il dispensait un cours d'un accident dû à la fauted'un écolier mineur d'âge dont répond la secondedemanderesse.

XLVI. L'arrêt constate par ses motifs propres que ladéfenderesse « fonde son action sur le droit propredont elle dispose en vertu des articles 1382 et 1383du Code civil de réclamer au tiers responsable del'incapacité de travail temporaire de l'enseignantdont elle a continué à supporter le traitement brutpendant cette période la réparation de ce dommagesubi à la suite de sa faute ».

XLVII. En considérant « qu'en cas d'incapacité de travail[d'un enseignant] résultant de la faute d'untiers », la défenderesse subit un dommage« puisqu'elle doit continuer à [lui] verser [sa]rémunération sans que des prestations [de travail]soient effectuées » et que « la qualité d'employeurest indifférente à l'existence de ce dommage »,l'arrêt fait une exacte application des articles1382 et 1383 du Code civil.

XLVIII. Le moyen ne peut être accueilli.

* Par ces motifs,

* La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demanderesses aux dépens.

Les dépens taxés à la somme de mille deux centseptante-deux euros dix-neuf centimes envers les partiesdemanderesses.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, àBruxelles, où siégeaient le président de section ChristianStorck, président, le président de section Albert Fettweis,les conseillers Michel Lemal, Marie-Claire Ernotte etAriane Jacquemin, et prononcé en audience publique du troisnovembre deux mille dix-sept par le président de sectionChristian Storck, en présence de l'avocat général ThierryWerquin, avec l'assistance du greffier PatriciaDe Wadripont.

+---------------------------------------------------------+
| P. De Wadripont | A. Jacquemin | M.-Cl. Ernotte |
|-------------------+-----------------+-------------------|
| M. Lemal | A. Fettweis | Chr. Storck |
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3 NOVEMBRE 2017 C.15.0337.F/2


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0337.F
Date de la décision : 03/11/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-11-03;c.15.0337.f ?
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