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18/10/2017 | BELGIQUE | N°P.17.0945.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 18 octobre 2017, P.17.0945.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0945.F

G. A.

étranger, détenu en vue d'extradition,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Fabrice Giovannangeli et Marc Nève, avocats aubarreau de Liège.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 29 août 2017 par la courd'appel de Liège, chambre des mises en accusation.

Le demandeur fait valoir trois moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Frédéric Lugentz a fait

rapport.

L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen et la demande d...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0945.F

G. A.

étranger, détenu en vue d'extradition,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Fabrice Giovannangeli et Marc Nève, avocats aubarreau de Liège.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 29 août 2017 par la courd'appel de Liège, chambre des mises en accusation.

Le demandeur fait valoir trois moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.

L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen et la demande de question préjudicielle :

Le moyen est pris de la violation de l'article 6.1 et 3, a, de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales et de la méconnaissance du principe général du droit relatifau respect des droits de la défense. Selon le demandeur, ces règles ontété violées dans la mesure où, conformément à l'article 3 de la loi du 15mars 1874 sur les extraditions, ni lui, ni son conseil n'ont été convoquésdevant la chambre du conseil appelée à statuer sur l'exequatur du mandatd'arrêt international qui le visait.

Subsidiairement, il invite la Cour à poser à la Cour constitutionnelle unequestion préjudicielle en raison de la différence de traitement quiexisterait entre, d'une part, le justiciable visé par un mandat d'arrêtinternational, qui n'est pas convoqué devant la chambre du conseil chargéede statuer sur l'exequatur de cet acte, et, d'autre part, l'inculpépoursuivi en Belgique, qui est convoqué devant cette juridiction, en vuede procéder au règlement de la procédure.

Il n'apparaît pas de la procédure que le demandeur ait invoqué cettecirconstance devant la cour d'appel ni qu'il y ait sollicité que laquestion préjudicielle soit posée.

Proposé pour la première fois dans l'instance en cassation, le moyen estirrecevable.

Pour les mêmes motifs, il n'y a pas lieu de poser la questionpréjudicielle.

Sur le deuxième moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 2bis, alinéa 2, de la loidu 15 mars 1874 sur les extraditions, 149 de la Constitution, 3 et 6 de laConvention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales. Le demandeur reproche à l'arrêt d'ordonner l'exequatur dumandat d'arrêt délivré en son absence le 15 octobre 2016 par un juge dutribunal d'Urus-Martan (République de Tchétchénie, Fédération de Russie)du chef de participation à des activités terroristes, nonobstant lerisque, pour lui, d'être soumis, en cas d'extradition, à un traitementcontraire, notamment, aux articles 3 et 6 de la Convention.

En vertu de l'article 2bis, alinéa 2, de la loi du 15 mars 1874,l'extradition ne peut être accordée s'il existe des risques sérieux que lapersonne, si elle était extradée, serait soumise dans l'Etat requérant, àun déni flagrant de justice, à des faits de torture ou à des traitementsinhumains et dégradants.

Il appartient à la juridiction d'instruction d'examiner cette cause derefus sur la base d'une appréciation souveraine en fait.

Dans la mesure où il critique cette appréciation en fait, le moyen estirrecevable.

Devant les juges d'appel, le demandeur a fait valoir le risque réel deviolation des droits de l'homme dans les républiques du Caucase du Nord,nonobstant les garanties diplomatiques accordées par les autoritésjudiciaires russes, en prenant appui sur des rapports d'organisationsinternationales dénonçant de tels abus. Il soutient encore que l'arrêtdéduit à tort l'absence de risque concret de violation de ses droitsfondamentaux d'une décision isolée de la Cour européenne des droits del'homme et après avoir écarté la documentation qu'il avait déposée devantla cour d'appel.

Par adoption des motifs du réquisitoire du ministère public et par motifspropres, l'arrêt considère toutefois, respectivement, que les publicationsdéposées par le demandeur n'établissent pas l'existence d'un risqueconcret de violation de ses droits fondamentaux sur le territoire de laFédération de Russie, qu'il n'est fait état que d'atteintes à des droitsde tiers, que le demandeur ne fait lui-même valoir aucun passé politique,militaire ou personnel en dehors de liens avec une personne dont il n'estpas établi qu'elle aurait subi des atteintes à ses droits fondamentaux,que présent dans le Royaume depuis 2009, il ne s'est jamais plaint dediscriminations dont il aurait été la victime en Russie et que leprocureur général de la Fédération de Russie a fourni des garantiesdiplomatiques, circonstance qui fut jugée suffisante pour écarter lerisque dénoncé, selon une décision de la Cour européenne des droits del'homme.

Par les considérations énoncées ci-avant, les juges d'appel ont décidéqu'il n'y a pas de risques sérieux que le demandeur, s'il était extradé,serait soumis dans l'Etat requérant à des faits de torture, à destraitements inhumains et dégradants ou à une atteinte à ses droitsfondamentaux.

À la défense invoquée par le demandeur, ils ont ainsi opposé des élémentsde fait différents ou contraires dont ils ont déduit l'absence de motif derefus d'extradition.

En ce qu'il repose sur une lecture incomplète de l'arrêt, le moyen manqueen fait.

Sur le troisième moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 2bis, alinéas 1^er et 2, dela loi du 15 mars 1874 sur les extraditions, 33 de la Conventioninternationale du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et 9 dela directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de laprotection internationale. Le demandeur reproche à l'arrêt d'ordonnerl'exequatur du mandat d'arrêt extraditionnel précité nonobstant lacirconstance qu'il a introduit en Belgique une demande d'asile, surlaquelle il n'a pas encore été statué.

L'article 1.A.1 de la Convention internationale du 28 juillet 1951détermine quelles personnes ont notamment la qualité de réfugié seloncette convention.

L'article 33.1 de cette même convention prévoit qu'aucun des Etatscontractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit,un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa libertéserait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, deson appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

En vertu de l'article 9.3 de la directive 2013/32/UE, les Etats membresrespectent le principe de non-refoulement en vertu de leurs obligationsinternationales et à l'égard de l'Union.

Ni les dispositions visées au moyen ni aucune autre dispositionconventionnelle ou légale n'obligent la Belgique à refuser l'extraditiond'une personne qui a quitté le pays ayant demandé son extradition et qui aensuite introduit une demande en reconnaissance du statut de réfugié. Cesmêmes dispositions ne l'obligent pas à attendre qu'il ait été statué surles mérites de cette demande.

Soutenant le contraire, à cet égard, le moyen manque en droit.

Pour le surplus, ainsi qu'il a été indiqué en réponse au deuxième moyen,les juges d'appel ont décidé qu'il n'y a pas de risques sérieux que ledemandeur, s'il était extradé, serait soumis dans l'Etat requérant à desfaits de torture, à des traitements inhumains et dégradants ou à uneatteinte à ses droits fondamentaux.

Dans cette mesure, le moyen est irrecevable.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

  LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux frais.

Lesdits frais taxés en totalité à la somme de deux cent six eurosquatre-vingt-un centimes dont nonante-sept euros quarante et un centimesdus et cent neuf euros quarante centimes payés par ce demandeur.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz,conseillers, et prononcé en audience publique du dix-huit octobre deuxmille dix-sept par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction deprésident, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.

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| F. Gobert | F. Lugentz | T. Konsek |
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| E. de Formanoir | F. Roggen | B. Dejemeppe |
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18 OCTOBRE 2017 P.17.0945.F/2


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0945.F
Date de la décision : 18/10/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 18/11/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-10-18;p.17.0945.f ?
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