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11/10/2017 | BELGIQUE | N°P.17.0784.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 11 octobre 2017, P.17.0784.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0784.F

PL. K.

inculpé, détenu,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Guerric Goubau et Isabelle de Ghellinck,avocats au barreau de Bruxelles,

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 16 juin 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.

Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.

L

'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Le moyen invoque la violatio...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0784.F

PL. K.

inculpé, détenu,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Guerric Goubau et Isabelle de Ghellinck,avocats au barreau de Bruxelles,

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 16 juin 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.

Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.

L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Le moyen invoque la violation des articles 6.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 149 de laConstitution et 9, § 1^er, 1°, de la loi du 5 mai 2014 relative àl'internement.

Le demandeur fait grief à l'arrêt, d'une part, de ne pas indiquer demanière précise la raison pour laquelle l'infraction visée à la préventionA porte atteinte à ou menace l'intégrité physique ou psychique de tierset, d'autre part, de faire état d'un motif contraire aux élémentsmatériels du dossier, de sorte que la décision d'ordonner son internementne serait pas régulièrement motivée. Le demandeur reproche notamment auxjuges d'appel de se référer à des conséquences purement hypothétiques del'infraction et de ne pas préciser davantage le risque de propagation dufeu qu'ils ont retenu.

Le juge n'est pas tenu de suivre les parties dans le détail de leurargumentation, ni de donner les motifs de ses motifs.

Ainsi que le demandeur le relève, l'arrêt précise à la page 5 que« l'infraction visée à la prévention A, telle qu'elle a été requalifiée,est de nature à menacer l'intégrité physique et psychique de tiers comptetenu notamment du risque que l'incendie se propage ».

Par ces considérations, l'arrêt motive régulièrement sa décision selonlaquelle la première condition prévue par l'article 9, § 1^er, 1°, de laloi relative à l'internement est remplie, sans que le juge doive constaterque le risque observé s'est effectivement réalisé.

À cet égard, le moyen ne peut être accueilli.

Selon le demandeur, l'arrêt serait en outre empreint de contradiction ence qu'il constate, d'une part, qu'à l'arrivée des policiers, les planchesde bois auxquelles il avait mis le feu étaient déjà consumées et qu'il yavait peu de dommages et, d'autre part, que ces faits étaient de nature àmenacer l'intégrité physique et psychique de tiers en raison du risque depropagation de l'incendie.

Mais la constatation, par les juges d'appel, selon laquelle le faitd'incendier des planches de bois à proximité d'un immeuble recèle undanger en raison du risque de propagation du feu, de sorte que pareilcomportement emporte une menace à l'égard de l'intégrité physique oupsychique de tiers, n'a pas pour effet d'exclure la circonstance qu'enl'espèce, le sinistre ayant pu être maîtrisé ou ne s'étant pas étendu, lesdommages sont demeurés limités.

Ainsi, l'arrêt ne contient pas la contradiction que le moyen dénonce.

Dans cette mesure, le moyen manque en fait.

Enfin, en tant qu'il critique la motivation de l'arrêt au motif qu'elleest erronée, le moyen, qui requiert pour son examen une vérification enfait, laquelle échappe au pouvoir de la Cour, est irrecevable.

Sur le second moyen :

Le moyen invoque la violation des articles 6.1 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 149 de laConstitution, 9, § 1^er, 3°, de la loi du 5 mai 2014 relative àl'internement et de la foi due aux actes.

Quant à la première branche :

Le demandeur reproche à l'arrêt de décider que la condition prévue àl'article 9, § 1^er, 3°, de la loi relative à l'internement est remplie,alors que l'expert psychiatre qui l'a examiné ne s'est pas déterminé en cesens. Selon cette disposition, dont la portée fut rappelée aux termes desconclusions d'appel du demandeur, l'internement ne peut être ordonné ques'il existe un danger que la personne concernée commette de nouveaux faitstels que visés au 1° de cette disposition, en raison de son troublemental, éventuellement combiné avec d'autres facteurs de risque. Selon lemoyen, en s'abstenant d'indiquer en quoi consistait un tel danger, alorsque l'expert psychiatre l'avait qualifié de relatif, les juges d'appeln'ont pas régulièrement motivé ni légalement justifié leur décision.

L'obligation de motiver les jugements et arrêts, prescrite par l'article149 de la Constitution, constitue une règle de forme, étrangère à lavaleur ou à l'exhaustivité de la réponse aux conclusions.

Dès lors, en tant qu'il critique la décision des juges d'appel d'admettrele risque de récidive visé à l'article 9, § 1^er, 3°, de la loi relative àl'internement sur la base de diverses circonstances personnelles audemandeur, le moyen manque en droit.

Il appartient au juge du fond d'apprécier en fait la valeur probante d'uneexpertise qui a été soumise à la libre contradiction des parties, sous laréserve qu'il ne peut attribuer à son auteur une opinion qu'il n'a pasémise ou des constatations qu'il n'a pas faites. Le demandeur n'invoquepas un tel grief contre l'arrêt.

De même, l'état mental d'une personne dont l'internement est requis estsouverainement apprécié par le juge du fond, sur la base des élémentsrégulièrement produits aux débats, sans qu'il soit tenu par lesconclusions d'un rapport d'expertise.

Dans la mesure où il revient à critiquer cette appréciation en fait, lemoyen est irrecevable.

Au feuillet 6 de l'arrêt, les juges d'appel ont considéré qu'il existaitun risque sérieux que le demandeur, s'il n'était pas interné, commette denouveaux faits de même nature. Ils ont, à cet égard, souligné son étatmental, son assuétude à l'alcool, sa situation administrative précaire etla circonstance qu'à deux reprises, il avait mis le feu à des meublesrespectivement situés dans une chambre d'hôpital et dans une cellule.Enfin, les juges d'appel ont considéré que l'internement était nécessaireafin de garantir l'application au demandeur du traitement et del'encadrement dont il a besoin.

Ainsi, les juges d'appel ont régulièrement motivé et légalement justifiéleur décision d'ordonner l'internement du demandeur en raison du danger derécidive visé à l'article 9, § 1^er, 3°, de la loi relative àl'internement.

Quant à la deuxième branche :

Le moyen reproche aux juges d'appel de s'être contredits en énonçant,d'une part et par référence aux conclusions de l'expert psychiatre, quel'état mental du demandeur constitue un danger social relatif découlant desa vie de marginal et, d'autre part, qu'il existe un danger de récidive,compte tenu notamment de son état mental.

La première affirmation ne trouve pas appui dans les motifs énoncés parl'arrêt. En effet, aux termes de la première proposition visée par lemoyen, les juges d'appel n'ont fait que retranscrire les conclusions del'expert. Se fondant sur les éléments du dossier soumis à lacontradiction, ils se sont ensuite prononcés sur le risque de récidive,qu'ils ont jugé réel, de sorte que leur décision ne contient pas lacontradiction dénoncée.

Le moyen manque en fait.

Quant à la troisième branche :

Pris de la violation de la foi due aux actes, le moyen fait grief àl'arrêt d'avoir erronément interprété les conclusions de l'expertpsychiatre en décidant que le risque de récidive mis en évidence était laconséquence de l'état mental du demandeur, alors que le rapportd'expertise ne révélait pas un tel lien causal.

Un grief de violation de la foi due à un acte consiste à désigner unepièce à laquelle la décision attaquée se réfère expressément et àreprocher à celle-ci, soit d'attribuer à cette pièce une affirmationqu'elle ne comporte pas, soit de déclarer qu'elle ne contient pas unemention qui y figure, autrement dit de donner de cette pièce uneinterprétation inconciliable avec ses termes.

Pour apprécier l'existence du risque de récidive et décider que celui-ciest notamment en relation avec l'état mental du demandeur, les jugesd'appel ne se sont pas référés au rapport d'expertise psychiatrique viséau moyen.

Le moyen manque en fait.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

* Rejette le pourvoi ;

* Condamne le demandeur aux frais.

Lesdits frais taxés à la somme de septante-quatre euros trente et uncentimes dus.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz,conseillers, et prononcé en audience publique du onze octobre deux milledix-sept par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avec l'assistance deTatiana Fenaux, greffier.

+------------------------------------------------------------------------+
| T. Fenaux | F. Lugentz | T. Konsek |
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| E. de Formanoir | F. Roggen | B. Dejemeppe |
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11 OCTOBRE 2017 P.17.0784.F/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0784.F
Date de la décision : 11/10/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-10-11;p.17.0784.f ?
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