Cour de cassation de Belgique
Arrêt
* N° S.16.0084.N
* OFFICE NATIONAL DE L'EMPLOI, établissement public,
* Me Caroline De Baets, avocat à la Cour de cassation,
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* contre
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* T. C.,
* Me Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation.
I. La procédure devant la Cour
Le pourvoi en cassation est dirigé contre l'arrêt rendu le 5 septembre2016 par la cour du travail de Gand, division de Gand.
Le 12 septembre 2017, l'avocat général Henri Vanderlinden a déposé desconclusions au greffe.
Le conseiller Koen Mestdagh a fait rapport.
L'avocat général Henri Vanderlinden a conclu.
II. Le moyen de cassation
Dans la requête en cassation, jointe au présent arrêt en copie certifiéeconforme, le demandeur présente un moyen.
III. La décision de la Cour
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Sur le moyen :
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Quant à la première branche :
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1. Les juges d'appel, qui ont considéré qu'il y avait lieu de conclure, auvu de l'ensemble des éléments connus, que le défendeur ne réglait pasprincipalement en commun avec les autres habitants les questionsménagères, ont fondé cette décision sur les constatations effectuées parle CPAS de Gand lors d'une visite à domicile, lesquelles sont reproduitesdans l'arrêt, et sur le fait que le CPAS de Gand avait décidé, sur la basede ces constatations, d'accorder au défendeur un revenu d'intégrationsociale au taux isolé, d'une part, et que le demandeur n'avait pas décidéqu'un autre habitant de la même maison était un travailleur cohabitant,d'autre part.
2. Le moyen qui, en cette branche, est entièrement déduit de ce que lesjuges d'appel ont admis les éléments de fait sur la base desquels ils ontpris leur décision non pas parce que le défendeur en avait apporté lapreuve, mais simplement parce qu'il avait rendu sa version des faits« vraisemblable » grâce aux photographies et aux extraits de comptebancaire qu'il avait produits, procède d'une lecture incomplète del'arrêt.
Le moyen, en cette branche, manque en fait.
Quant à la seconde branche :
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3. En vertu de l'article 110, § 3, de l'arrêté royal du 25 novembre 1991portant réglementation du chômage, il faut entendre par travailleurcohabitant le travailleur qui n'est pas un travailleur ayant charge defamille au sens du paragraphe 1^er et qui n'est pas un travailleur isoléau sens du paragraphe 2.
Aux termes de l'article 110, § 2, de ce même arrêté royal, il fautentendre par travailleur isolé le travailleur qui habite seul, àl'exception du travailleur visé au paragraphe 1^er, 3° à 6°.
L'article 59, alinéa 1^er, de l'arrêté ministériel du 26 novembre 1991portant les modalités d'application de la réglementation du chômagedispose qu'il y a lieu d'entendre par cohabitation le fait, pour deux ouplusieurs personnes, de vivre ensemble sous le même toit et de réglerprincipalement en commun les questions ménagères.
4. Pour pouvoir conclure que deux ou plusieurs personnes vivant ensemblesous le même toit règlent principalement en commun les questions ménagèreset, dès lors, cohabitent, il est nécessaire mais non suffisant qu'ellestirent un avantage économique et financier du partage d'un logement. Ilest également requis qu'elles assument en commun les tâches, activités etautres questions ménagères, comme l'entretien du logement et,éventuellement, son aménagement, les lessives, les courses, la préparationet la prise des repas, et qu'elles apportent éventuellement unecontribution financière à cet effet.
Le juge apprécie en fait si les questions ménagères sont principalementréglées en commun.
5. Les juges d'appel ont constaté, d'une part, que :
- le défendeur habite avec trois autres personnes dans la même maison ;
- le bail a été conclu au nom de l'une de ces trois personnes ;
- le loyer est partagé entre les quatre habitants ;
- le loyer, qui s'élève à 215 euros par personne environ, comprendégalement les charges relatives aux fournitures communes ;
- le défendeur rassemble les parts des autres afin de remettre la sommetotale au locataire principal ;
- chaque habitant dispose d'une chambre séparée avec espace de couchage,mais le salon, la cuisine, la salle de bains et les installationssanitaires sont communs ;
- la maison ne dispose que d'une seule sonnette et d'une seule boîte auxlettres.
Les juges d'appel ont également constaté, d'autre part, que :
- les habitants ne se connaissaient pas au préalable et les diverscontrats de sous-location prennent cours à des dates différentes ;
- la sonnette a été équipée d'un code par habitant ;
- chaque chambre peut être verrouillée séparément ;
- il est possible, dans une certaine mesure, de cuisiner dans la chambregrâce à un petit réchaud et à un four à micro-ondes ;
- les habitants séjournent principalement dans leur chambre et n'utilisentque rarement le salon ;
- chaque habitant dispose, dans la cuisine commune, d'une armoire àprovisions individuelle et d'un espace individuel dans le réfrigérateur ;
- chacun cuisine séparément et achète les ingrédients nécessaires à ceteffet ;
- aucun budget commun n'est prévu pour l'achat de produits et articlesménagers ;
- il n'y a pas de moyen de transport utilisé en commun.
6. Sur la base de ces constatations, les juges d'appel ont pu légalementdécider que le défendeur ne réglait pas principalement en commun avec lesautres habitants les questions ménagères.
Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.
Par ces motifs,
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La Cour
Rejette le pourvoi ;
Condamne le demandeur aux dépens.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient le président de section Christian Storck, président, leprésident de section Alain Smetryns, les conseillers Koen Mestdagh,Mireille Delange et Antoine Lievens, et prononcé en audience publique duneuf octobre deux mille dix-sept par le président de section ChristianStorck, en présence de l'avocat général Henri Vanderlinden, avecl'assistance du greffier Vanessa Van de Sijpe.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Mireille Delange ettranscrite avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.
Le greffier, Le conseiller,
9 OCTOBRE 2017 S.160084.N/1