Cour de cassation de Belgique
Arrêt
* N° P.17.0257.F
1. R. F.,
2. R. E.,
prévenus,
demandeurs en cassation,
ayant pour conseil Maître Eric Soccio, avocat au barreau de Mons.
* I. la procédure devant la cour
*
Les pourvois sont dirigés contre un arrêt rendu le 8 février 2017 par lacour d'appel de Mons, chambre pénale sociale.
Les demandeurs invoquent deux moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.
Le conseiller Benoît Dejemeppe a fait rapport.
L'avocat général Damien Vandermeersch a conclu.
* II. la décision de la cour
Sur l'ensemble du second moyen :
Pris de la violation des articles 6.1 de la Convention de sauvegarde desdroits de l'homme et des libertés fondamentales, 14 du Pacte internationalrelatif aux droits civils et politiques, 204 et 206 du Code d'instructioncriminelle, le moyen reproche à l'arrêt de déclarer l'appel des demandeursirrecevable.
L'article 204 du Code d'instruction criminelle impose à l'appelant depréciser les points sur lesquels la décision entreprise doit êtreréformée.
Un grief au sens de l'article 204 du Code d'instruction criminelle estl'indication spécifique dans la requête d'appel d'une décision du jugemententrepris, dont la partie appelante demande la réformation par le juged'appel. Il n'est pas requis que, dans la requête ou le formulaire degriefs, la partie appelante énonce les raisons de son appel ni les moyensqu'elle entend invoquer pour obtenir la réformation de la décision viséepar le grief.
L'indication des griefs est précise au sens de la disposition précitéelorsqu'elle permet au juge et aux parties de déterminer avec certitude ladécision ou les décisions du jugement entrepris, dont la partie appelantedemande la réformation, en d'autres mots de déterminer la saisine de lajuridiction d'appel.
Le juge ne peut conclure à l'imprécision de la requête et déchoirl'appelant de son appel au motif que les griefs indiqués sont sanspertinence. Un tel motif est étranger à l'examen de la précision desgriefs indiqués dans la requête.
Il ressort des pièces de la procédure que les demandeurs ont coché lesmentions suivantes du formulaire de griefs : 1.1 Déclaration deculpabilité ; 1.2 Qualification de l'infraction ; 1.3 Règles concernant leprocédure ; 1.4. Taux de la peine ; 1.6 Non-application du sursis simple -du sursis probatoire - de la supension simple - de la suspensionprobatoire demandée ; 1.9 Prescription ; 1.10 Violation de la CEDH.
L'arrêt constate que, sur la requête d'appel conforme au modèle de griefsannexé à l'arrêté royal du 18 février 2016 portant exécution de l'article204, alinéa 3, du Code d'instruction criminelle, les demandeurs ont cochésept des douze rubriques qu'elle comporte en lien avec l'action publique,ayant été exclues les rubriques relatives à l'internement, à laconfiscation, aux autres mesures, à l'acquittement et « autres ».
Il considère que la quasi-totalité des rubriques relatives à l'actionpublique ont été cochées, dont certaines - telle que la prescription -sont manifestement sans pertinence. Il relève qu'à l'instar d'une partiepoursuivie qui se serait abstenue de déposer une requête d'appel, lesdemandeurs ne permettent pas à la cour d'appel de déterminer le contour desa saisine et aux autres parties de connaître les griefs sur la basedesquels elles seront amenées à assurer la défense de leurs intérêtsrespectifs.
Les juges d'appel en ont conclu que la motivation de la requête d'appel nerespectait pas le prescrit légal et que le fait d'avoir limité les griefsdans des conclusions déposées plus de sept mois après l'expiration dudélai visé à l'article 204 précité, n'était pas de nature à pallier lesmanquements initiaux aux exigences de la loi nouvelle.
Au vu des sept dispositions énumérées par l'arrêt comme ayant été, quant àl'action publique, visées par le recours, la cour d'appel ne s'est pastrouvée empêchée de délimiter sa saisine.
L'article 204 précité ne prive pas non plus le prévenu du droitd'entreprendre l'ensemble du dispositif pénal qui le concerne, quitte àlimiter à l'audience, comme en l'espèce, l'objet de son recours, ainsi quel'article 206, alinéa 6, le permet.
Partant, l'arrêt ne décide pas légalement qu'à défaut d'indiquerprécisément les griefs élevés, les demandeurs doivent être déchus de leurappel.
Le moyen est fondé.
Il n'y a pas lieu d'examiner le premier moyen, qui ne saurait entraînerune cassation sans renvoi.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur la recevabilité de l'appeldes demandeurs ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtpartiellement cassé ;
Réserve les frais pour qu'il soit statué sur ceux-ci par la juridiction derenvoi ;
Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Liège.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz,conseillers, et prononcé en audience publique du vingt-sept septembre deuxmille dix-sept par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction deprésident, en présence de Damien Vandermeersch, avocat général, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.
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| F. Gobert | F. Lugentz | T. Konsek |
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| E. de Formanoir | F. Roggen | B. Dejemeppe |
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27 SEPTEMBRE 2017 P.17.0257.F/2