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26/09/2017 | BELGIQUE | N°P.17.0298.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 26 septembre 2017, P.17.0298.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N°. P.17.0298.N

* G. D.,

* personne à charge de laquelle la remise de pièces est demandée,

* demandeur en cassation,

* Me Jorgen Van Laer, avocat au barreau d'Anvers.











I. la procédure devant la cour













* Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mars 2017 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.

* Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé auprése

nt arrêt, en copie certifiée conforme.

* Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.

* L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.

II. la décision de la cour













* Sur l...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

* N°. P.17.0298.N

* G. D.,

* personne à charge de laquelle la remise de pièces est demandée,

* demandeur en cassation,

* Me Jorgen Van Laer, avocat au barreau d'Anvers.

I. la procédure devant la cour

* Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 2 mars 2017 par lacour d'appel d'Anvers, chambre des mises en accusation.

* Le demandeur invoque deux moyens dans un mémoire annexé auprésent arrêt, en copie certifiée conforme.

* Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.

* L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.

II. la décision de la cour

* Sur le premier moyen :

 1. Le moyen est pris de la violation des articles 6, 8 et 13de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertés fondamentales : c'est à tort que l'arrêttransmet aux autorités judiciaires néerlandaises despièces couvertes par le secret professionnel, sans lescensurer ; ce faisant, il néglige d'examiner lesquelles,parmi ces pièces, sont couvertes par le secretprofessionnel et, par conséquent, sont insaisissables etne peuvent faire l'objet d'une remise à ces autorités ; ilconsidère que les droits de la défense, le droit à la vieprivée et le droit à un recours effectif du demandeur n'ensont pas pour autant violés de manière irrévocable, dèslors que le demandeur pourra se prévaloir aux Pays-Bas dela protection juridique offerte par la Convention, qu'ilreviendra aux autorités néerlandaises de procéder àl'évaluation nécessaire et qu'un écrit de l'officier dejustice néerlandais fait apparaître que ces autoritésoffrent des garanties formelles en matière de respect dela confidentialité des pièces potentiellement couvertespar le secret professionnel de l'avocat ; or, les droitsdu demandeur seront effectivement violés de manièreirrévocable en cas de remise non censurée ; en effet, lademande d'entraide judiciaire n'émane pas d'unjuge-commissaire, mais d'un officier de justice qui, en saqualité de partie au procès, risque d'être mis enpossession des pièces sans réserve afin d'en faire usage àl'encontre du demandeur ; dans son écrit, l'officier dejustice ne garantit pas qu'un juge-commissaire seradésigné, immédiatement et préalablement à tout examen,afin de statuer, selon la procédure néerlandaise, quantaux pièces soumises au secret professionnel ; ainsi, lesgaranties qui existent aux Pays-Bas en matière de respectde la confidentialité de la correspondance échangée entrele demandeur et ses avocats ne sont pas suffisantes, et ledemandeur doit pouvoir exercer en Belgique un recourseffectif consistant en ce que les juridictionsd'instruction belges vérifient quelles pièces sontsoumises au secret professionnel et ne peuvent donc êtresaisies puis transmises aux Pays-Bas ; de surcroît, c'està tort que, de son côté, le juge d'instruction n'a pasdavantage examiné le caractère saisissable des piècesqu'il a saisies.

 2. Dans la mesure où il est dirigé contre l'action du juged'instruction et non contre l'arrêt, le moyen estirrecevable.

 3. L'article 20 du Traité d'extradition et d'entraidejudiciaire en matière pénale entre le Royaume deBelgique, le Grand-Duché de Luxembourg et le Royaume desPays-Bas du 27 juin 1962, dispose :

« 1. À la demande de la Partie requérante, la Partie requisesaisira, dans la mesure permise par sa législation, et remettrales objets :

a) qui peuvent servir de pièces à conviction ;

b) qui, provenant de l'infraction, auraient été trouvés avant ouaprès la remise de la personne arrêtée.

2. La remise est subordonnée à l'accord de la Chambre du Conseildu tribunal du lieu où les perquisitions et saisies ont étéopérées qui décide s'il convient ou non de transmettre en tout oupartie, à la Partie requérante, les objets saisis. Elle peutordonner la restitution des objets qui ne se rattachent pasdirectement au fait imputé au prévenu et statue, le cas échéant,sur la réclamation des tiers détenteurs ou autres ayants droit.

(…) »

 4. Il résulte de cette disposition que la juridictiond'instruction a l'obligation d'examiner si les objetsdont la remise est demandée, se rattachent directement aufait imputé au prévenu et ce, sans préjudice de l'examendes réclamations des tiers ou autres ayants droit.

 5. Lorsque le prévenu soutient que les objets dont la remiseest demandée sont couverts par le secret professionnel etque celle-ci n'est donc pas possible, les articles 6, 8et 13 de la Convention ne requièrent pas que lajuridiction d'instruction statue elle-même sur cettecontestation, pour autant que les informations fourniespar l'État requérant permettent d'établir que le prévenupourra faire valoir ses griefs en la matière devant lesjuridictions de cet Etat.

 6. La seule circonstance que les autorités poursuivantes del'État requérant puissent prendre connaissance de piècescouvertes par le secret professionnel, ne prive pas leprévenu de la possibilité d'invoquer la prétendueirrégularité devant les juridictions de cet État.

 7. Dans la mesure où il est déduit d'une autre prémissejuridique, le moyen, en cette branche, manque en droit.

 8. Par les motifs indiqués aux considérants 3.4 à 3.6,l'arrêt énonce que le demandeur peut faire valoir sesgriefs en rapport avec le secret professionnel devant lesjuridictions de l'État requérant et justifie donclégalement la décision de remettre les pièces.

Dans cette mesure, le moyen ne peut être accueilli.

* Sur le deuxième moyen :

 9. Le moyen, en toutes ses branches, est pris de laviolation de l'article 149 de la Constitution.

10. Ladite disposition ne s'applique pas aux juridictionsd'instruction qui, en vertu de l'article 20 du traitéprécité, statuent sur la remise de pièces à une autoritéjudiciaire étrangère.

* Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

Quant à la première branche :

11. Le moyen, en cette branche, allègue que l'arrêt seréfère aux motifs du réquisitoire du ministère publicet de l'ordonnance entreprise, sans indiquer lesmotifs qu'il reprend ni les citer ; toute décisionjudiciaire doit, à tout le moins, comporter desmotifs propres énonçant les éléments de fait et dedroit qui justifient le dispositif et permettent à laCour d'exercer son contrôle de la légalité ; l'arrêtétant muet à ce sujet, le demandeur ignore quelssont, parmi les motifs repris par la chambre desmises en accusation, ceux qu'elle s'est appropriés ;en outre, l'arrêt ne répond pas à la défense dudemandeur qui dénonce un défaut de motivation par lachambre du conseil ; ainsi, l'arrêt ne répond pas auxconclusions d'appel du demandeur et n'est pas assortid'une motivation permettant de contrôler sa légalité.

12. L'arrêt répond non seulement à la défense dudemandeur en reprenant les motifs du réquisitoire duministère public et de l'ordonnance entreprise, maiségalement en énonçant un ensemble de motifs propresqui étayent la décision.

13. Dans la mesure où le moyen, en cette branche, necritique pas ces motifs indépendants, il ne sauraitentraîner la cassation et est, par conséquent,irrecevable.

14. Le moyen, en cette branche, ne précise pas le défautde motivation par la chambre du conseil que ledemandeur a dénoncé devant la chambre des mises enaccusation.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, est impréciset, partant, irrecevable.

* Quant à la deuxième branche :

15. Le moyen, en cette branche, soutient quel'arrêt, par les motifs qu'il comporte, nerépond pas à la défense du demandeur selonlaquelle les garanties en matière de respect dela confidentialité de la correspondance échangéeentre le demandeur et son conseil, sontinsuffisantes aux Pays-Bas ; l'arrêt n'abordepas l'écrit du conseil néerlandais du demandeurqui confirme cet état de fait, mais renvoieuniquement à la communication de l'officier dejustice décrivant la procédure à suivre auxPays-Bas ; ce faisant, le demandeur demeure dansl'incertitude quant aux motifs pour lesquelsl'arrêt attache davantage d'importance à lacommunication de l'officier de justice qu'àcelle du conseil du demandeur ; ainsi, l'arrêtne répond pas aux conclusions d'appel dudemandeur et n'est pas assorti d'une motivationpermettant de contrôler sa légalité.

16. Par les motifs indiqués au considérant 3.6,l'arrêt énonce, en se référant notamment àl'écrit de l'officier de justice, les raisonspour lesquelles il considère que des garantiessuffisantes existent aux Pays-Bas en matière derespect de la confidentialité de lacorrespondance entre le demandeur et sonavocat. Ainsi, l'arrêt répond à la défense dudemandeur et est régulièrement motivé, sansêtre tenu de répondre à une communication del'avocat néerlandais du demandeur contredisantcet écrit et sans être tenu de confronter lespièces concernées. Ainsi, il n'est pas faitobstacle au contrôle de la légalité de l'arrêt.

Le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

Quant à la troisième branche :

17. Le moyen, en cette branche, allègue qu'ense référant uniquement aux motifs del'ordonnance entreprise, l'arrêt ne répondpas aux demandes, formulées par ledemandeur, de soumettre des questionspréjudicielles à la Courconstitutionnelle ; le demandeur areformulé la première questionpréjudicielle à la suite de la motivationayant fondé le refus de l'ordonnanceentreprise de poser cette question ; parconséquent, le simple renvoi aux motifs del'ordonnance entreprise n'est plus actuel ;en faisant référence à ces motifs, l'arrêtne répond pas davantage aux deuxième ettroisième questions préjudicielles puisquel'ordonnance entreprise s'est égalementabstenue de le faire ; la motivation del'arrêt ne laisse pas apparaître non plusles raisons pour lesquelles les normes decontrôle n'ont visiblement pas été violéesou pour lesquelles il n'était manifestementpas nécessaire de poser des questionspréjudicielles ; ainsi, l'arrêt ne répondpas aux conclusions d'appel du demandeur etne contient pas une motivation permettantde contrôler sa légalité.

18. En reprenant les motifs de l'ordonnanceentreprise, l'arrêt considère qu'il nerevient pas à la justice belge, mais àl'autorité judiciaire étrangère, dedécider d'écarter les pièceséventuellement couvertes par le secretprofessionnel et que, dans cette optique,il serait naturellement superflu de poserune question préjudicielle à la Courconstitutionnelle. Ainsi, l'arrêtconsidère qu'il n'est manifestement pasnécessaire de poser les questionspréjudicielles proposées aux jugesd'appel, répond à la défense du demandeur,est régulièrement motivé et ne fait pasobstacle au contrôle de sa légalité.

* Le moyen, en cette branche, ne peut êtreaccueilli.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites àpeine de nullité ont été observées et la décisionest conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux frais.

* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxièmechambre, à Bruxelles, où siégeaient PaulMaffei, président, Filip Van Volsem, AntoineLievens, Erwin Francis et Sidney Berneman,conseillers, et prononcé en audience publiquedu vingt-six septembre deux mille dix-septpar le président Paul Maffei, en présence del'avocat général Marc Timperman, avecl'assistance du greffier Frank Adriaensen.

* Traduction établie sous le contrôle duconseiller Eric de Formanoir et transcriteavec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

* Le greffier, Le conseiller,

26 SEPTEMBRE 2017 P.17.0298.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0298.N
Date de la décision : 26/09/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-09-26;p.17.0298.n ?
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