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20/09/2017 | BELGIQUE | N°P.17.0933.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 20 septembre 2017, P.17.0933.F


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0933.F

O. Y.,

étranger, privé de liberté,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Mariana Boutuil et Patrick Huget, avocats aubarreau de Bruxelles,

contre

ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration,dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue de la Loi, 18,

défendeur en cassation.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 21 août 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre de

s mises en accusation.

Le demandeur fait valoir deux moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.17.0933.F

O. Y.,

étranger, privé de liberté,

demandeur en cassation,

ayant pour conseils Maîtres Mariana Boutuil et Patrick Huget, avocats aubarreau de Bruxelles,

contre

ETAT BELGE, représenté par le secrétaire d'Etat à l'Asile et la migration,dont les bureaux sont établis à Bruxelles, rue de la Loi, 18,

défendeur en cassation.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 21 août 2017 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation.

Le demandeur fait valoir deux moyens dans un mémoire annexé au présentarrêt, en copie certifiée conforme.

Le conseiller Frédéric Lugentz a fait rapport.

L'avocat général Michel Nolet de Brauwere a conclu.

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen et la demande de question préjudicielle :

Le moyen soutient qu'il résulte des articles 5.4 de la Convention desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 72, alinéa4, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour,l'établissement et l'éloignement des étrangers, 13 et 15 de la directive2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008relative aux normes et procédures communes applicables dans les Étatsmembres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier,lesquels exigent qu'il soit statué avec célérité sur le pourvoi encassation formé contre la décision qui ordonne la prolongation de ladétention, que la Cour doit se prononcer dans les quinze jours à compterde ce recours.

En outre, selon le demandeur, la Cour est également tenue de statuer dansce délai, en application de l'article 31, § 3, de la loi du 20 juillet1990 relative à la détention préventive.

L'article 72 de la loi du 15 décembre 1980, qui ne fait pas mention dupourvoi en cassation, ne vise que la procédure d'examen des recoursjudiciaires qu'il prévoit et sur lesquels statuent les juridictionsd'instruction. Cette disposition se réfère nécessairement à la loirelative à la détention préventive en vigueur lors de la promulgation dela loi du 15 décembre 1980, à savoir celle du 20 avril 1874, qui necontenait aucune disposition concernant le pourvoi en cassation, lequelétait formé et jugé suivant les règles du Code d'instruction criminelle.

La loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive, qui consacreun chapitre au pourvoi en cassation, n'a pas modifié l'article 72 de laloi du 15 décembre 1980. Dès lors, nonobstant l'entrée en vigueur de laloi du 20 juillet 1990, son article 31 n'est pas applicable au pourvoi encassation formé contre l'arrêt de la chambre des mises en accusation quistatue sur la décision de maintien en détention d'un étranger, ce pourvoiet son jugement demeurant réglés par les dispositions du Coded'instruction criminelle.

La circonstance que la Cour statue dans un délai de plus de quinze jours àdater du pourvoi ne saurait être considérée, en elle-même, commeincompatible avec l'article 5.4 de la Convention ni avec les articles 13et 15 de la directive 2008/115/CE précitée.

Le moyen manque en droit.

Le demandeur considère qu'à défaut pour la Cour de s'estimer tenue destatuer dans le délai précité, il lui incombe d'interroger la Cour deJustice de l'Union européenne à propos du délai que cette dernière estimecompatible avec l'exigence d'un contrôle juridictionnel accéléré.

En vertu de l'article 5.4 de la Convention de sauvegarde des droits del'homme et des libertés fondamentales, toute personne arrêtée ou détenuedans les conditions prévues au paragraphe 1^er, f, de cet article, a ledroit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à brefdélai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si ladétention est illégale.

D'une part, le droit du demandeur à ce que sa cause soit entendue dans undélai raisonnable, garanti par la disposition de la Convention précitée,risquerait d'être violé en l'espèce si une question préjudicielle étaitposée à la Cour de justice de l'Union européenne.

D'autre part, aucune disposition ou principe général du droit de l'Unioneuropéenne ne détermine le délai dans lequel devrait intervenir ladécision de la Cour de cassation et il ne découle d'aucune disposition,notamment visée par le demandeur, que le droit à un recours effectif,qu'il invoque, doive comprendre celui de déférer au contrôle de la Cour decassation l'arrêt de la cour d'appel, chambre des mises en accusation, quia statué sur son recours.

Enfin, en ce qu'elle concerne la circonstance que les autorités belgespourraient expulser le demandeur sous la contrainte avant qu'il ait étéstatué sur son pourvoi, la question proposée est relative à une hypothèseétrangère au pourvoi.

La demande de question préjudicielle doit, dès lors, être rejetée.

Sur le second moyen :

Le moyen est pris de la violation des articles 149 de la Constitution et780, 3°, du Code judiciaire. Il fait grief aux juges d'appel de n'avoirpas répondu aux conclusions critiquant, respectivement, le refus del'autorité administrative d'envisager l'application de modalités moinscoercitives que la détention et la méconnaissance, par cette autorité, dudroit du demandeur à être entendu avant que soit adoptée à son égard unemesure défavorable à ses intérêts.

L'article 149 de la Constitution n'est pas applicable aux décisions desjuridictions d'instruction qui statuent sur le maintien d'une mesureprivative de liberté prise sur la base de la loi du 15 décembre 1980, cesdécisions ne constituant pas des jugements au sens de cette disposition.

Dans cette mesure, le moyen manque en droit.

Le juge satisfait à l'obligation de motiver les jugements et arrêts et derépondre aux conclusions d'une partie lorsque sa décision comportel'énonciation des éléments de fait ou de droit à l'appui desquels unedemande, une défense ou une exception sont accueillies ou rejetées. Lejuge n'est pas tenu de suivre les parties dans le détail de leurargumentation.

Au feuillet 4 de l'arrêt, les juges d'appel ont constaté que l'autoritéadministrative avait indiqué pourquoi le choix de priver le demandeur desa liberté était justifié et ont précisé qu'aucune disposition n'imposaità cette autorité d'exposer, en outre, les raisons pour lesquelles elleconsidère qu'une mesure moins contraignante serait inapte à rencontrerl'objectif poursuivi.

Au feuillet 6 de leur arrêt, les juges d'appel ont ensuite décidéqu'aucune norme légale belge ou établie par l'Union européenne ne prévoitl'audition d'un étranger en situation irrégulière avant son placement endétention en vue d'une mise à disposition du gouvernement.

Le moyen reproche enfin aux juges d'appel de n'avoir pas répondu auxconclusions qui invoquaient la durée excessive de la détention dudemandeur au motif que c'est à tort que le défendeur considérait qu'ilexistait une possibilité de l'éloigner effectivement dans un délairaisonnable.

Aux feuillets 6 et 7 de leur décision, les juges d'appel, d'une part, ontindiqué les circonstances de la cause, non imputables au défendeur et àses services, qui expliquaient le retard pris par la procédured'éloignement du demandeur et, d'autre part, ont examiné si, en l'espèce,la durée de la détention pouvait être considérée comme excessive au regarddes dispositions du droit européen applicables. Après avoir répondunégativement, ils ont estimé qu'il existait toujours une possibilitéd'éloigner le demandeur dans le délai fixé par la loi.

Ainsi, les juges d'appel ont régulièrement motivé leur décision selonlaquelle la mesure des autorités administratives était légalementjustifiée.

À cet égard, procédant d'une lecture incomplète de l'arrêt, le moyenmanque en fait.

Pour le surplus, revenant, sous le couvert d'une violation de l'obligationimposée au juge de motiver sa décision, à critiquer l'appréciation en faitdes juges d'appel ou exigeant pour son examen une vérification d'élémentsde fait, qui n'est pas au pouvoir de la Cour, le moyen est irrecevable.

Le contrôle d'office

Les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont étéobservées et la décision est conforme à la loi.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux frais.

Lesdits frais taxés à la somme de septante-quatre euros trente et uncentimes dus.

Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction de président,Françoise Roggen, Eric de Formanoir, Tamara Konsek et Frédéric Lugentz,conseillers, et prononcé en audience publique du vingt septembre deuxmille dix-sept par Benoît Dejemeppe, conseiller faisant fonction deprésident, en présence de Michel Nolet de Brauwere, avocat général, avecl'assistance de Fabienne Gobert, greffier.

+------------------------------------------------------------------------+
| F. Gobert | F. Lugentz | T. Konsek |
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| E. de Formanoir | F. Roggen | B. Dejemeppe |
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20 SEPTEMBRE 2017 P.17.0933.F/6


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.17.0933.F
Date de la décision : 20/09/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 30/09/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-09-20;p.17.0933.f ?
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