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20/06/2017 | BELGIQUE | N°P.16.0013.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 20 juin 2017, P.16.0013.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0013.N

C. R.,

prévenu,

demandeur en cassation,

Me Luc Arnou, avocat au barreau de Bruges,

contre

ÉTAT BELGE, spf Finances, représenté par le ministre des Finances,

partie poursuivante,

défendeur en cassation,

Me Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, et StefanDe Vleeschouwer, avocat au barreau de Bruxelles,

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 9 décembre 2015 par la courd'appel d'Anvers, cha

mbre correctionnelle.

Le demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0013.N

C. R.,

prévenu,

demandeur en cassation,

Me Luc Arnou, avocat au barreau de Bruges,

contre

ÉTAT BELGE, spf Finances, représenté par le ministre des Finances,

partie poursuivante,

défendeur en cassation,

Me Geoffroy de Foestraets, avocat à la Cour de cassation, et StefanDe Vleeschouwer, avocat au barreau de Bruxelles,

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 9 décembre 2015 par la courd'appel d'Anvers, chambre correctionnelle.

Le demandeur invoque cinq moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller Filip Van Volsem a fait rapport.

L'avocat général Luc Decreus a conclu. 

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

Quant à la première branche :

1. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 10 de laloi du 11 septembre 1962 relative à l'importation, à l'exportation et autransit des marchandises et de la technologie y afférente, 231, § 2, de laloi générale du 18 juillet 1977 sur les douanes et accises, 1382 du Codecivil et 2, § 2, de l'arrêté royal du 30 décembre 1993 réglementantl'importation, l'exportation et le transit des marchandises et de latechnologie y afférente : en décidant que les constatations des expertsreconnus ont uniquement conduit la douane à procéder à une enquête et endécidant, par ce motif, que les droits de défense du demandeur et sondroit à la contradiction n'ont pas été violés, l'arrêt donne auxconstatations des experts une interprétation et une étendue juridique troplimitées qui ne sont pas conformes à la portée et à l'étendue desdispositions dont la violation est alléguée par le moyen, en cettebranche ; en effet, la détermination de la valeur par les expertsassermentés est nécessaire pour déclarer les préventions établies dès lorsqu'une indication erronée de la valeur représente un élément constitutifde ces préventions ; la détermination de la valeur est également unélément constitutif pour fixer le taux de la peine et pour la condamnationau paiement des diamants non présentés.

2. Les articles 3 et 4 de l'arrêté royal du 30 avril 2004 portant desmesures relatives à la surveillance du secteur du diamant règlent lamanière dont la déclaration de diamants est contrôlée à l'importation et àl'exportation ainsi que le rôle tenu par les experts reconnus. Cesarticles prévoient que :

- pour chaque importation ou exportation extra-communautaire vers ou horsde la Belgique, celui qui se livre au commerce ou à l'industrie dudiamant, est tenu de déclarer auprès du Service Licences notamment lavaleur, le poids et la qualification des diamants importés ou exportés ;

- la valeur, le poids, la qualification à déclarer des diamants importésou exportés, sont constatés par des experts reconnus, comme prévu àl'article 14, § 1^er, de l'arrêté du 30 avril 2004, qui assistent leService Licences ;

- la tâche des experts reconnus, comme prévu à l'article 3, § 1^er, alinéa2, de l'arrêté royal du 30 avril 2004 consiste en l'inspection physiquedes diamants importés et exportés et en la comparaison de ces données aveccelles se trouvant sur les documents comme preuve de la déclaration ;

- lorsqu'un envoi est composé de différents paquets, chaque paquet estouvert et lorsqu'un paquet comprend plusieurs lots, il est vérifié, aumoyen de documents suffisamment détaillés, si tous les lots sont présentsdans l'envoi ou dans le paquet ;

- lors de l'inspection physique, les experts reconnus respectent lesdirectives suivantes : 1° lors de l'importation, les scellés douanierssont contrôlés ; 2° il ne peut y avoir d'écart considérable entre lavaleur déclarée et la valeur d'expertise ; 3° le poids doit être exact ;4° pour tout envoi, la sorte de diamant déclarée doit être exacte etconcorder avec les codes marchandises visés à l'article 1^er, 2° ; 5° lorsde l'exportation, l'envoi est scellé par l'expert reconnu immédiatementaprès l'inspection physique ;

- lorsqu'il constate des irrégularités et des dérogations, l'expertreconnu établit un rapport écrit et le remet au Service Licences ;

- au cas où les dérogations constatées ont des conséquences pour ladéclaration en douane, les agents en douane en sont avisés; ceux-cipeuvent éventuellement procéder à une enquête et engager des poursuites.

3. Il ne résulte ni de ces dispositions ni d'aucune autre disposition del'arrêté royal du 30 avril 2004 que les constatations des experts reconnusquant à la détermination de la valeur seraient contraignantes pourl'administration des douanes. Il ressort uniquement de l'article 4, § 4,de l'arrêté royal du 30 avril 2004 que des dérogations éventuellementétablies par les experts reconnus peuvent conduire l'administration desdouanes à procéder à une enquête et à engager des poursuites.

4. L'article 10, alinéa 1^er, de la loi du 11 septembre 1962 prévoit queles infractions et les tentatives d'infraction aux dispositions prises envertu de cette même loi sont punies conformément à l'article 231 de la loigénérale sur les douanes et accises. L'article 231, § 2, de la loigénérale sur les douanes et accises, tel qu'applicable en l'espèce,dispose que tout usage contraire aux conditions d'utilisation ou devalidité des autorisations d'importation, d'exportation ou de transit desmarchandises visées au § 1^er, est puni d'une amende comprise entre lamoitié de la valeur des marchandises et la valeur totale des marchandises.

Il ne résulte ni de ces articles ni d'aucune autre disposition légale queles valeurs déterminées par les experts reconnus des diamants importés ouexportés sont contraignantes pour le juge pénal s'agissant du calcul del'amende applicable ou de la condamnation au paiement de la contre-valeurdes marchandises non remises qu'il y a lieu de prononcer, ce qui n'empêchepas le juge pénal de prendre en considération les constatations de cesexperts reconnus qu'il n'a pas désignés pour apprécier la culpabilité etla peine.

Dans la mesure où, en cette branche, il est déduit d'autres prémissesjuridiques, le moyen manque en droit.

5. L'arrêt décide que :

- les experts du Diamond Office ne sont pas des experts désignés par lejuge et que le caractère contradictoire des expertises menées par euxn'est pas prescrit ;

- les articles 973 et 978 du Code judiciaire ne leur sont pas applicableset que leur mission est exercée de manière unilatérale et secrète ;

- leurs constatations ne sont pas déterminantes pour asseoir la décisiondu juge pénal et que le demandeur a pu contredire devant le juge du fondleurs constatations, lesquelles doivent être lues et appréciées avecd'autres éléments de preuve obtenus régulièrement, dont le juge appréciesouverainement la valeur probante ;

- le demandeur indique, à tort, que des poursuites ont été engagées sur laseule et unique base de la détermination de la valeur par le DiamondOffice ;

- les constatations des experts ont uniquement conduit la douane àprocéder à une enquête ;

- lorsque les experts ont constaté des différences de valeur des diamantsimportés ou exportés, les diamantaires ont eu l'opportunité de présenterencore des éléments de preuve au spf Économie, à savoir concernant l'achatet la vente définitifs des diamants, une preuve de paiement dans les troismois ;

- la personne concernée signe une convention à cet égard ;

- lorsque les éléments de preuve nécessaires ne sont pas présentés dansles trois mois ou si les pièces produites ne sont pas admises, de sorteque les dérogations constatées peuvent avoir des conséquences pour ladéclaration en douane, le spf Économie en avise la douane qui peutéventuellement procéder à une enquête ;

- l'enquête menée par l'administration des douanes associée auxconstatations des experts reconnus ont conduit à un ensemble deconstatations et, en fin de compte, à l'engagement de poursuites àl'encontre du demandeur.

Par cette décision, l'arrêt ne viole pas la portée et l'étendue desdispositions légales précitées.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

(…)

Quant à la troisième branche :

8. Le moyen, en cette branche, invoque la violation de l'article 6, §1^er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales et la méconnaissance des principes généraux du droitrelatifs aux droits de la défense et au droit à la contradiction : l'arrêtdécide, à tort, que, malgré l'absence d'une contestation effective etefficace des constatations des experts reconnus à l'audience, les droitsde défense du demandeur n'ont pas été violés ; l'arrêté royal du 30 avril2004 portant des mesures relatives à la surveillance du secteur du diamantne prévoit aucune contradiction lors de la détermination de la valeur parles experts reconnus ; cette détermination de la valeur est pourtantdécisive pour déclarer les préventions établies, la fixation du taux légalde la peine et de la contre-valeur ; à l'audience, le demandeur n'a pluspu opposer de contradiction utile dès lors que les diamants n'étaient plusdisponibles, ainsi que le demandeur l'a invoqué dans ses conclusionsd'appel.

9. La violation du droit à un procès équitable ou des droits de ladéfense ne saurait être déduite de la seule circonstance que le prévenun'a pas été impliqué lors de la détermination des valeurs par les expertsreconnus et que, de facto, aucune contre-expertise ne peut encore êtresollicitée et menée lorsque les marchandises ont été libérées. Le droit àla contradiction, en tant qu'élément du droit à un procès équitable et desdroits de la défense, est garanti à suffisance, en ce que :

- la personne concernée a l'opportunité de présenter encore des élémentsde preuve, comme une preuve de paiement, durant une période de trois moissuivant la détermination de la valeur par l'expert reconnu et que ladouane est uniquement avisée si aucune preuve n'est présentée ou si lespièces présentées ne peuvent être admises ;

- concernant les envois non saisis, la personne concernée peut égalementtoujours présenter des documents en cours de procédure, comme la preuve dupaiement effectif de la valeur déclarée ;

- la personne concernée peut toujours contester en cours de procédure lesdéterminations de la valeur par les experts reconnus, lesquels ne sont pasdes experts désignés par le juge pénal.

Dans la mesure où, en cette branche, il est déduit d'une autre prémissejuridique, le moyen manque en droit.

10. Par les motifs qu'il comporte, l'arrêt décide légalement que le droità la contradiction du demandeur est garanti à suffisance.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

(…)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Rejette le pourvoi ;

Condamne le demandeur aux frais.

* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président,Alain Bloch, Peter Hoet, Antoine Lievens et Erwin Francis,conseillers, et prononcé en audience publique du vingt juin deux milledix-sept par le conseiller faisant fonction de président Filip VanVolsem, en présence de l'avocat général Luc Decreus, avec l'assistancedu greffier délégué Véronique Kosynsky.

* Traduction établie sous le contrôle du président de section BenoîtDejemeppe et transcrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.

* Le greffier, Le président de section,

20 JUIN 2017 P.16.0013.N/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.16.0013.N
Date de la décision : 20/06/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-06-20;p.16.0013.n ?
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