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01/06/2017 | BELGIQUE | N°C.16.0485.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 01 juin 2017, C.16.0485.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.16.0485.F

O. J. M.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Montagne, 11, ou il est faitelection de domicile,

contre

1. R. T.,

2. BUREAU BELGE DES ASSUREURS AUTOMOBILES, dont le siege est etabli àSaint-Josse-ten-Noode, rue de la Charite 33/2,

defendeurs en cassation,

en presence de

ALLIANZ BENELUX, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, rue de Laeken,

35,

partie appelee en declaration d'arret commun,

representee par Maitre Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassatio...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.16.0485.F

O. J. M.,

demandeur en cassation,

represente par Maitre Bruno Maes, avocat à la Cour de cassation, dont lecabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Montagne, 11, ou il est faitelection de domicile,

contre

1. R. T.,

2. BUREAU BELGE DES ASSUREURS AUTOMOBILES, dont le siege est etabli àSaint-Josse-ten-Noode, rue de la Charite 33/2,

defendeurs en cassation,

en presence de

ALLIANZ BENELUX, societe anonyme dont le siege social est etabli àBruxelles, rue de Laeken, 35,

partie appelee en declaration d'arret commun,

representee par Maitre Martin Lebbe, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ou il est faitelection de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre le jugement rendu le 9 novembre2015 par le tribunal de police francophone de Bruxelles, statuant endernier ressort.

Le president de section Albert Fettweis a fait rapport.

Le premier avocat general Andre Henkes a conclu.

II. Les moyens de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, le demandeur presente deux moyens.

I. La decision de la Cour

Sur la demande en declaration d'arret commun :

Sur la fin de non-recevoir opposee à cette demande par la partie appeleeen declaration d'arret commun et deduite du defaut d'interet :

Le jugement attaque declare la demande du demandeur contre la partieappelee en declaration d'arret commun, la societe Allianz Benelux,irrecevable au motif que celle-ci n'est le representant en Belgique de lacompagnie Allianz France Iard, assureur du premier defendeur, que pourgerer les indemnisations dans le cadre de reglements amiables.

Aucun moyen de cassation n'est dirige contre cette decision et ledemandeur n'etablit pas avoir interet à ce que le present arret soitdeclare commun à la societe Allianz Benelux.

La fin de non-recevoir est fondee.

Sur les frais de signification du memoire en reponse :

La partie appelee en declaration d'arret commun, la societe AllianzBenelux, a signifie son memoire en reponse au conseil du demandeur.

L'article 1092, alinea 4, du Code judiciaire ne prevoit la significationdu memoire en reponse que lorsqu'il oppose une fin de non-recevoir aupourvoi en cassation.

Une fin de non-recevoir opposee à une demande en declaration d'arretcommun est sans incidence sur la recevabilite du pourvoi. Le memoire enreponse opposant une fin de non-recevoir à pareille demande ne doit pasetre signifie.

Il convient des lors de delaisser à la societe Allianz Belgium les fraisde la signification de son memoire en reponse.

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

Il n'apparait pas des pieces de la procedure qu'une partie ait fait valoirdevant le juge du fond que l'action principale dirigee contre le premierdefendeur n'etait pas recevable au motif que, celui-ci etant assure, c'estuniquement contre son assureur que le demandeur devait diriger sa demande.Il ne ressort pas non plus de ces pieces que les parties ont ete inviteespar le juge du fond à s'expliquer à ce sujet.

Le jugement attaque, qui declare irrecevable la demande du demandeurcontre le premier defendeur sur la base d'un moyen souleve d'office, sansque le demandeur ait eu la possibilite d'exercer la contradiction, violele droit de defense de ce dernier.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

Sur l'etendue de la cassation :

La cassation de la decision rendue sur l'action principale du demandeurcontre le premier defendeur s'etend à la decision rendue sur l'action enintervention du demandeur contre le second defendeur, en raison du lienetabli par le juge du fond entre ces decisions.

Et il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs, qui ne sauraiententrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Declare irrecevable la demande en declaration d'arret commun du demandeurcontre la societe Allianz Benelux ;

Casse le jugement attaque en tant qu'il statue sur la demande principaledu demandeur contre le premier defendeur et sur la demande en interventiondu demandeur contre le second defendeur et en tant qu'il statue sur lesdepens afferents à ces demandes ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementpartiellement casse ;

Delaisse à Allianz Benelux les frais de la signification de son memoireen reponse ;

Delaisse au demandeur le tiers de ses depens ;

Reserve le surplus de ceux-ci pour qu'il y soit statue par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant le tribunal de police du Brabantwallon, siegeant en dernier ressort.

Les depens taxes à la somme de six cent quarante-cinq eurosquatre-vingt-deux centimes envers la partie demanderesse et, pour lasignification du memoire en reponse, à la somme de deux cent nonante-cinqeuros quatre-vingt-sept centimes envers la partie appelee en declarationd'arret commun.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, les conseillers MichelLemal, Marie-Claire Ernotte, Sabine Geubel et Ariane Jacquemin, etprononce en audience publique du premier juin deux mille dix-sept par lepresident de section Albert Fettweis, en presence du premier avocatgeneral Andre Henkes, avec l'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

+----------------------------------------------+
| P. De Wadripont | A. Jacquemin | S. Geubel |
|-----------------+--------------+-------------|
| M.-Cl. Ernotte | M. Lemal | A. Fettweis |
+----------------------------------------------+

Requete

REQUETE EN CASSATION

Le demandeur en cassation a l'honneur de soumettre à votre censure lejugement rendu contradictoirement entre parties le 9 novembre 2015 par la8e chambre du tribunal de police francophone de Bruxelles (RG : 14A728).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Dispositions legales et principe general du droit violes

* articles 1382 et 1383 du Code civil

* article 86 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assuranceterrestre (avant son abrogation par la loi du 4 avril 2014 relativeaux assurances) et, pour autant que de besoin, article 150 de laditeloi du 4 avril 2014 relative aux assurances

* articles 17 et 18 du Code judiciaire

* principe general relatif au respect des droits de la defense

Decision attaquee

Le jugement attaque a declare l'action du demandeur contre le premierdefendeur irrecevable sur la base des motifs suivants (jugement attaque,p. 5) :

« [...] En l'espece, [le demandeur] aurait du citer le [deuxiemedefendeur], ou la SA ALLIANZ France Iard, de sorte que l'action dirigeecontre la [partie appelee en declaration d'arret commun] est irrecevable.

Il en va de meme pour l'action dirigee contre [le premier defendeur] deslors que ce dernier est assure, il appartenait [au demandeur] de seretourner contre son assureur.

L'action, initiee par citation du 21 aout 2014 est par consequentirrecevable ».

Griefs

Premiere branche

Le juge qui refuse de faire droit à la demande sans soumettre à lacontradiction le moyen dont le defendeur ne s'est pas prevalu et que lejuge a souleve d'office, viole les droits de defense du demandeur. Il enresulte qu'en vertu du principe general du droit relatif au respect desdroits de la defense, le juge qui souleve d'office une fin de non-recevoirdoit la soumettre à la contradiction des parties.

Le jugement attaque a decide que l'action du demandeur est irrecevable ence qu'elle est dirigee contre le premier defendeur au motif que « deslors que ce dernier est assure, il appartenait [au demandeur] de seretourner contre son assureur » (jugement, p. 5).

Ce faisant, le tribunal, qui a statue « contradictoirement » y comprisà l'egard du premier defendeur « defaillant à l'audience du 5 octobre2015 » (voy. dispositif du jugement attaque), a souleve d'office une finde non-recevoir à l'egard de la demande du demandeur en ce qu'elle estdirigee contre le premier defendeur.

Si le tribunal, statuant contradictoirement, pouvait soulever d'office undefaut d'interet ou de qualite, il lui appartenait toutefois de soumettrece moyen à la contradiction des parties.

En ne soumettant pas cette fin de non-recevoir à la contradiction desparties, le jugement attaque a viole le principe general du droit relatifau respect des droits de la defense.

Deuxieme branche

L'action directe permet à la personne lesee d'exercer directement unrecours contre l'assureur du responsable mais sans la priver de son actioncontre le responsable lui-meme.

Le jugement attaque se fonde, implicitement mais certainement, surl'existence d'une action directe au profit de la personne lesee contrel'assureur du responsable pour en deduire que cette personne leseeperdrait son action contre le responsable lui-meme.

En considerant que l'action du demandeur est irrecevable en ce qu'elle estdirigee contre le premier defendeur, le jugement attaque a, ce faisant,meconnu les articles 1382 et 1383 du Code civil ainsi que l'article 86 dela loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre (avant sonabrogation par la loi du 4 avril 2014 relative aux assurances) et, pourautant que de besoin, l'article 150 de la loi du 4 avril 2014 precitee.

Troisieme branche

Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la partie auproces qui pretend etre titulaire d'un droit subjectif a la qualite etl'interet au sens des articles 17 et 18 du Code judiciaire pour introduirela demande, ce droit fut-il conteste et l'examen de l'existence ou de laportee du droit subjectif qui est invoque ne concerne pas la recevabilitemais le caractere fonde de la demande.

Dans la mesure ou le demandeur pretendait, fut-ce succinctement etimplicitement mais certainement, disposer d'un droit subjectif à l'egarddu premier defendeur, le jugement attaque n'a pas pu considerer l'actiondu client irrecevable en ce qu'elle est dirigee contre cette partie, sansvioler les articles 17 et 18 du Code judiciaire.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Dispositions legales violees

* Articles 12, 13, 15, 16 et, pour autant que de besoin, 17 et 18 duCode judiciaire

Decision attaquee

Le jugement attaque a decide que la demande en intervention formee par ledemandeur contre le deuxieme defendeur est irrecevable, sur la base desmotifs suivants (jugement attaque, p. 5-6) :

« [Le demandeur] a, suite aux conclusions de la [partie appelee endeclaration d'arret commun] soulevant la question de l'irrecevabilite deson action dirigee contre elle, lance citation en intervention contre [ledeuxieme defendeur] tout en maintenant sa reclamation initiale àl'encontre de [la partie appelee en declaration d'arret commun] et [lepremier defendeur], puisqu'il sollicite leur condamnation solidaire et/ouin solidum.

[Le deuxieme defendeur] estime que la demande en intervention dirigeecontre lui doit suivre le sort de la demande principale et donc doit etredeclaree irrecevable.

Il existe une relation de dependance de la demande en intervention avec lademande principale. Le sort de la demande en intervention etant lie à lademande principale, il s'en suit que si celle-ci est declaree nulle ouirrecevable, la demande en intervention ne pourra, en principe, etreaccueillie.

Cependant, la Cour de cassation a apporte une attenuation au principe endeclarant que :

`la recevabilite de la demande en intervention tendant la prononciationd'une condamnation est, en principe, independante de la redevabilite del'action principale ; qu'ainsi lorsque la demande en interventionressortit à la competence materielle et territoriale du juge saisi de lademande principale, celui-ci demeure saisi de l'action en interventionquand bien meme l'action principale serait irrecevable, pour autant que lademande en intervention ait pour objet d'obtenir une condamnationindependante de la condamnation à titre principal ; que ces principes nesont ecartes que si la demande en intervention, telle la demande engarantie est inseparable de l'action principale ou subordonnee au sort decelle-ci ; que tel n'est pas le cas d'une demande en intervention forcee,dont l'objet est comme en l'espece, d'obtenir une condamnation principaleet independante contre l'intervenant force' (Cass., 11 mars 1991, Pas.,1991, I, p. 639).

Ainsi, une demande en intervention agressive est recevable lorsque sonobjet est distinct de celui de la demande principale, c'est-à-direlorsque son objet n'est pas de soutenir la demande principale mais desauvegarder les interets des intervenants.

De meme, la demande en intervention agressive reste toujours recevable sil'irrecevabilite de la demande initiale tient à des motifs personnels àson auteur comme c'est le cas du defaut de qualite ou d'interet ou à lasuite de desistement ou d'un acquiescement [...]

En l'espece, la demande en intervention dirigee contre [le deuxiemedefendeur] a le meme objet que la demande principale et y est etroitementliee puisque [le demandeur] sollicite la condamnation des defendeurs auprincipal [la partie appelee en declaration d'arret commun et le premierdefendeur]) et de la defenderesse sur intervention ([le deuxiemedefendeur]) au meme montant.

Suivant le sort de la demande principale, dont elle a le meme objet, lademande en intervention est par consequent irrecevable ».

Griefs

La demande en justice est, en vertu de l'article 12 du Code judiciaire,introductive d'instance ou incidente. La demande incidente consiste, selonl'article 13 du meme code, dans toute demande formee au cours du proces etqui a pour objet, soit de modifier la demande originaire ou d'introduiredes demandes nouvelles entre parties, soit de faire entrer dans la causedes personnes qui n'y avaient point ete appelees.

L'intervention est, aux termes de l'article 15 du Code judiciaire, uneprocedure par laquelle un tiers devient partie à la cause. Elle tend,soit à la sauvegarde des interets de l'intervenant ou de l'une desparties en cause (intervention conservatoire), soit à faire prononcer unecondamnation ou ordonner une garantie (intervention agressive).

L'intervention est volontaire lorsque le tiers se presente afin dedefendre ses interets. Elle est forcee lorsque le tiers est cite au coursd'une procedure par une ou plusieurs parties (art. 16 C.jud.).

Il ressort de ces dispositions legales qu'une demande en interventionagressive ne suit pas necessairement le sort de la demande principale.

Si la nature de la demande en intervention agressive implique qu'il y aitun lien de connexite entre cette demande incidente et la demandeoriginaire, il n'en resulte pas cependant, à l'inverse d'une interventionconservatoire, une totale dependance.

Ainsi, la demande en intervention forcee, autre que l'appel en garantie,qui tend à faire prononcer une condamnation qui n'est pas subordonnee àcelle qui est postulee par la demande principale, bien que connexe, n'apas un caractere accessoire ; elle peut subsister en tant que demandeprincipale, lorsque la demande principale introductive d'instance estdeclaree irrecevable (en raison par exemple d'un defaut d'interet ou dequalite au sens des articles 17 et 18 du Code judiciaire) ou non fondee.Des lors, meme si la demande principale est irrecevable pour un motifpersonnel au demandeur principal, l'intervention volontaire agressive,satisfaisant à toutes les conditions de recevabilite, y compris deprescription, peut parfaitement subsister.

A l'exception de la demande incidente en garantie, toute demande incidentetendant à obtenir une condamnation qui, bien que liee à la demandeprincipale, n'est pas dependante de la condamnation visee par la demandeprincipale, ne constitue pas une demande subsidiaire.

Une telle demande incidente peut subsister au titre de demande principalelorsque la demande principale introductive d'instance est declareeirrecevable ou non fondee.

Le jugement attaque a considere qu' « en l'espece, la demande enintervention dirigee contre le [deuxieme defendeur] a le meme objet que lademande principale et y est etroitement liee puisque [le demandeur]sollicite la condamnation des defendeurs au principal ([la partie appeleeen declaration d'arret commun et le premier defendeur]) et de ladefenderesse sur intervention ([le deuxieme defendeur]) au mememontant ». Il en a deduit que « suivant le sort de la demandeprincipale, dont elle a le meme objet, la demande en intervention est parconsequent irrecevable » (jugement attaque, p. 5-6).

Le jugement attaque n'a pas pu decider legalement, sur la base de la seuleconstatation que la demande en intervention a le « meme objet » que lademande principale et « y est etroitement liee », que la demande enintervention « [suit] le sort de la demande principale » et est, « parconsequent », « irrecevable ».

Le jugement attaque a, ce faisant, viole les dispositions legales viseesau moyen.

ETENDUE DE LA CASSATION

Une eventuelle cassation du dispositif quant à la demande principale ence qu'elle est dirigee contre le premier defendeur entraineraitl'annulation du dispositif du jugement attaque quant à la demande enintervention contre le deuxieme defendeur.

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de cassation, soussigne, Vous prie, Mesdames,Messieurs, de casser le jugement attaque, ordonner que mention de votrearret soit faite en marge du jugement casse, renvoyer la cause et lesparties devant un autre tribunal de police et statuer comme de droit surles depens.

Bruxelles, le 7 novembre 2016

1er JUIN 2017 C.16.0485.F/2

Requete/7


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.16.0485.F
Date de la décision : 01/06/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-06-01;c.16.0485.f ?
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