Cour de cassation de Belgique
Arrêt
N° P.14.0605.N
Y. D.,
prévenu,
demandeur en cassation,
contre
CRELAN, société anonyme,
partie civile,
défenderesse en cassation.
I. la procédure devant la cour
Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 4 mars 2014 par la courd'appel de Gand, chambre correctionnelle.
Le demandeur invoque cinq griefs dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.
Le conseiller Peter Hoet a fait rapport.
L'avocat général délégué Alain Winants a conclu.
II. la décision de la cour
(…)
Sur le quatrième grief :
2. Le grief invoque la violation des droits de la défense : l'arrêt statuesans permettre entièrement un débat contradictoire ; le demandeur n'a puêtre présent à l'audience du 3 février 2014 pour des raisons médicales,comme l'atteste un certificat médical du 30 janvier 2014 ; dans sesconclusions, il avait demandé à pouvoir être présent et être entendu enpersonne.
3. L'article 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertés fondamentales garantit à toute personne le droit à ce que sacause soit entendue équitablement lors de l'appréciation du bien-fondéd'une accusation en matière pénale dirigée contre elle.
L'article 6.3.c, de la Convention prévoit que tout accusé a droit à sedéfendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix.
L'article 14.3. d, du Pacte international relatif aux droits civils etpolitiques prévoit que toute personne accusée d'une infraction pénale adroit à être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoirl'assistance d'un défenseur de son choix.
4. Il résulte de ces dispositions et du principe général du droit à unprocès équitable qu'un prévenu a le droit d'être présent au procès pénalmené contre lui et de décider s'il se défendra lui-même, avec ou sansl'assistance d'un conseil, ou s'il se fera représenter par un conseil. Leprévenu doit pouvoir suivre son procès pénal et y participer de façoneffective, s'il le souhaite. Il doit pouvoir se concerter avec sonconseil, pouvoir lui donner des instructions, faire des déclarations etpouvoir contredire les éléments de preuve.
5. Ces droits, dont l'observation doit s'apprécier à la lumière del'ensemble de la procédure, ne sont toutefois pas absolus. La seulecirconstance qu'un prévenu ne soit pas en état, pour des raisonsmédicales, d'assister à la procédure en appel menée sur opposition d'uneaction publique exercée régulièrement contre lui, n'a pas nécessairementpour conséquence que le droit à un procès équitable s'oppose à ce que laprocédure se poursuive, nonobstant cette impossibilité, pour autant queles droits de la défense soient garantis à suffisance. Dans sonappréciation, le juge peut tenir compte de la nécessité du respect dudélai raisonnable.
6. Il appartient au juge de décider si, en tenant compte de tous leséléments concrets de l'ensemble de la procédure, le droit à un procèséquitable et les droits de défense du demandeur sont garantis à suffisancedu fait d'avoir été représenté à l'audience par son conseil au cours de laprocédure en appel sur opposition.
7. Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a fait valoir, en faisantréférence au certificat médical du 30 janvier 2014 déposé à l'audience,qu'il ne pouvait être présent à l'audience du 3 février 2014 pour desraisons médicales et il a demandé aux juges d'appel, après avoir entenduson conseil, de surseoir à statuer en la cause afin de l'entendreégalement.
8. Les juges d'appel qui ont simplement rendu leur arrêt, sans indiquerqu'à la lumière des circonstances concrètes de la cause, l'absenced'audition en personne du demandeur durant le traitement de la cause enprocédure d'appel sur opposition ne viole pas son droit à un procèséquitable et ses droits de défense, ont violé ces droits.
Le grief est fondé.
Sur les autres griefs :
9. Il n'y a pas lieu de répondre aux griefs qui ne peuvent entraîner unecassation sans renvoi.
Sur l'étendue de la cassation :
10. La cassation de la décision rendue sur l'action publique entraîne lacassation de la décision rendue sur l'action civile qu'elle fonde, même sicette décision ne constitue pas une décision définitive au sens del'article 416, alinéa 1^er, du Code d'instruction criminelle applicable enl'espèce.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
Casse l'arrêt attaqué ;
Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtcassé ;
Réserve la décision sur les frais afin qu'il soit statué sur ceux-ci parla juridiction de renvoi ;
Renvoie la cause à la cour d'appel d'Anvers.
Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Filip Van Volsem, conseiller faisant fonction de président,Alain Bloch, Peter Hoet, Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, etprononcé en audience publique du trente mai deux mille dix-sept par leconseiller faisant fonction de président Filip Van Volsem, en présence del'avocat général délégué Alain Winants, avec l'assistance du greffierFrank Adriaensen.
Traduction établie sous le contrôle du conseiller Tamara Konsek ettranscrite avec l'assistance du greffier Fabienne Gobert.
Le greffier, Le conseiller,
30 MAI 2017 P.14.0605.N/1