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23/05/2017 | BELGIQUE | N°P.16.0719.N

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 23 mai 2017, P.16.0719.N


Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0719.N

J.-M. B.,

partie civile,

demandeur en cassation,

Me Christophe Marchand, avocat au barreau de Bruxelles,

contre

1. L. N.,

2. N. C.,

inculpés,

défendeurs en cassation.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 31 mai 2016 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, statuant en tantque juridiction de renvoi ensuite d'un arrêt de la Cour du 10 février2015.



Le demandeur invo

que trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.

L'avocat généra...

Cour de cassation de Belgique

Arrêt

N° P.16.0719.N

J.-M. B.,

partie civile,

demandeur en cassation,

Me Christophe Marchand, avocat au barreau de Bruxelles,

contre

1. L. N.,

2. N. C.,

inculpés,

défendeurs en cassation.

I. la procédure devant la cour

Le pourvoi est dirigé contre un arrêt rendu le 31 mai 2016 par la courd'appel de Bruxelles, chambre des mises en accusation, statuant en tantque juridiction de renvoi ensuite d'un arrêt de la Cour du 10 février2015.

Le demandeur invoque trois moyens dans un mémoire annexé au présent arrêt,en copie certifiée conforme.

Le conseiller Erwin Francis a fait rapport.

L'avocat général Luc Decreus a conclu. 

II. la décision de la cour

Sur le premier moyen :

(…)

Quant à la seconde branche :

4. Le moyen, en cette branche, invoque la violation des articles 193,196, 213 et 214 du Code pénal : l'arrêt décide, à tort, que lesdéclarations que les défendeurs ont faites à charge du demandeur neconcernent pas des pièces qui s'imposent à la confiance publique ; déduitde la prémisse que ces déclarations ne peuvent faire l'objet d'un fauxintellectuel en écritures parce qu'un suspect n'est pas tenu de collaborerà l'enquête et ne doit pas dévoiler la vérité, alors qu'une victime donneuniquement sa version des faits qui reste soumise à la contradiction,l'arrêt méconnaît la définition de l'infraction de faux en écritures ; eneffet, ces déclarations peuvent avoir convaincu ceux qui en ont euconnaissance, ont pu, dans une certaine mesure, faire office de preuve etsont consignées dans des procès-verbaux, à savoir des écrits protégés, surla base desquels le demandeur a été condamné par la suite.

5. L'infraction de faux en écritures, telle que visée aux articles 193,196 et 214 du Code pénal, consiste en une altération de la vérité réaliséeavec une intention frauduleuse ou à dessein de nuire, d'une manière prévuepar la loi, dans un écrit protégé par celle-ci, d'où il peut résulter unpréjudice.

Un écrit protégé par la loi est celui pouvant faire preuve dans unecertaine mesure, c'est-à-dire qui s'impose à la confiance publique, desorte que l'autorité ou les particuliers qui en prennent connaissance ouauxquels il est présenté peuvent être convaincus de la réalité de l'acteou du fait juridique établi dans cet écrit ou sont en droit de luiaccorder foi.

6. D'une part, les procès-verbaux comportant les déclarations de lavictime ou du suspect d'une infraction ne s'imposent pas, en règle, à laconfiance publique. En effet, ces personnes ne donnent qu'une versionsubjective des faits, lesquels sont soumis à la contradiction et peuventêtre contrôlés à la lumière des éléments de l'instruction pénale. De plus,un suspect peut, à l'appui de sa défense, invoquer tous les éléments defait qu'il estime utiles, qu'ils soient réels ou non.

7. D'autre part, le faux en écritures est une infraction instantanée. Unécrit qui, au moment de l'éventuelle altération de la vérité, à savoiravant qu'il soit contrôlé, ne s'impose pas à la confiance publique et nepeut, par conséquent, constituer un faux, ne devient pas un écrit protégépénalement parce que l'inexactitude du fait juridique qu'il comporteapparaît après son contrôle.

8. Dans la mesure où, en cette branche, il est déduit d'autres prémissesjuridiques, le moyen manque en droit.

9. Par les motifs qu'il avance en cette branche, le moyen ne méconnaîtpas la définition de l'infraction de faux en écritures, mais il justifielégalement la décision.

Dans cette mesure, le moyen, en cette branche, ne peut être accueilli.

(…)

Sur le troisième moyen, pris dans son ensemble :

16. Le moyen, en sa première branche, invoque la violation de l'article445 du Code pénal : l'arrêt décide que les déclarations des défendeurs neconstituent pas des dénonciations calomnieuses parce que le caractèrespontané requis n'apparaît pas à suffisance ; le fait qu'une déclarationsoit déposée à la suite d'une demande d'audition ou comme défense n'exclutpas son caractère spontané, à savoir que la personne communique deséléments, de sa propre initiative, en vue de porter préjudice à autrui ;dans ses déclarations faites à la police, la défenderesse 1 a spontanémentporté de fausses accusations à l'encontre du demandeur et a fourni de fauxéléments qui n'étaient pas encore connus, cela dans l'intentionmalveillante de nuire et afin d'obtenir un droit de séjour ; le défendeur2 a agi de même à l'égard de son subordonné ; de plus, le cas particulierprévu à l'article 445, alinéa 3, du Code pénal ne requiert pas lecaractère spontané.

Le moyen, en sa seconde branche, invoque la violation de l'article 149 dela Constitution : l'arrêt décide que les déclarations de la défenderesse Ine constituent pas une dénonciation calomnieuse parce que le caractèrespontané requis n'apparaît pas à suffisance ; il n'indique toutefois pasles éléments qui justifient cette décision ; ainsi, la décision n'est pasmotivée et la défense des demandeurs n'a pas obtenu réponse.

17. L'article 445, alinéas 1 et 2, du Code pénal punit celui qui aura faitpar écrit à l'autorité une dénonciation calomnieuse. Cette infractionrequiert notamment comme élément constitutif le fait que l'auteur a faitla dénonciation spontanément, c'est-à-dire de sa propre initiative et sansy être contraint par une obligation légale ou par une question ou uneplainte émanant de l'autorité.

18. Dans la mesure où, en sa première branche, il invoque que lesdéfendeurs ont spontanément accusé le demandeur au sens de cesdispositions, le moyen critique l'arrêt qui décide souverainement lecontraire, ou impose à la Cour un examen des faits pour lequel elle estsans compétence, et est irrecevable.

19. L'article 149 de la Constitution n'est pas applicable aux juridictionsd'instruction qui statuent sur le règlement de la procédure, même dans lecas d'une décision de non-lieu.

Dans la mesure où, en sa seconde branche, il invoque la violation de cettedisposition constitutionnelle, le moyen manque en droit.

20. Si la juridiction d'instruction est certes obligée de motiver sadécision et de répondre aux conclusions des parties, elle n'est pas tenuede donner les motifs de ses motifs.

Dans la mesure où, en cette branche, il est déduit d'une autre prémissejuridique, le moyen manque en droit.

21. L'arrêt décide : « Les déclarations faites par [la défenderesse 1] etpar [le défendeur 2] ne constituent pas des dénonciations calomnieusesparce que le caractère spontané requis n'apparaît pas à suffisance ».Ainsi, il décide que les déclarations faites à la police par lesdéfendeurs ne sont pas spontanées et il répond à la défense du demandeur.

Dans cette mesure, le moyen, en sa seconde branche, ne peut êtreaccueilli.

22. Dans ses conclusions d'appel, le demandeur a soutenu que les faitsqualifiés de calomnie devaient également, en ce qui concerne le défendeur2, être qualifiés du délit visé à l'article 445, alinéa 3, du Code pénal,à savoir l'imputation calomnieuse d'un supérieur à l'égard de sonsubordonné, et que ce délit ne requiert pas un caractère spontané. L'arrêtne répond pas à cette défense.

Dans cette mesure, le moyen, en sa seconde branche, est fondé.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

Casse l'arrêt attaqué, en tant qu'il prononce le non-lieu à l'égard dudéfendeur 2 du chef des faits qualifiés d'imputation calomnieuse telle quevisée à l'article 445, alinéa 3, du Code pénal ;

Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l'arrêtpartiellement cassé ;

Rejette le pourvoi pour le surplus ;

Condamne le demandeur aux quatre cinquièmes des frais, réserve le surplusdes frais afin qu'il soit statué sur celui-ci par la juridiction derenvoi ;

Renvoie la cause, ainsi limitée, à la cour d'appel de Bruxelles, chambredes mises en accusation, autrement composée.

* Ainsi jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre, à Bruxelles, oùsiégeaient Paul Maffei, président, Filip Van Volsem, Alain Bloch,Antoine Lievens et Erwin Francis, conseillers, et prononcé en audiencepublique du vingt-trois mai deux mille dix-sept par le président PaulMaffei, en présence de l'avocat général Luc Decreus, avec l'assistancedu greffier Frank Adriaensen.

* Traduction établie sous le contrôle du conseiller Eric de Formanoir ettranscrite avec l'assistance du greffier Tatiana Fenaux.

* Le greffier, Le conseiller,

23 MAI 2017 P.16.0719.N/2


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.16.0719.N
Date de la décision : 23/05/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2018
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-05-23;p.16.0719.n ?
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