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09/03/2017 | BELGIQUE | N°C.15.0253.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 09 mars 2017, C.15.0253.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.15.0253.F

1. G. I.,

2. Y. v. h.,

3. Q. v. h.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES, societe anonyme de droitpublic dont le siege social est etabli à Saint-Gilles, rue de France, 56,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Michele Gregoire, avocat à la Cour d

e cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Regence, 4, ou il estfait election de domicile.

I. La ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.15.0253.F

1. G. I.,

2. Y. v. h.,

3. Q. v. h.,

demandeurs en cassation,

representes par Maitre Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Charleroi, rue de l'Athenee, 9, ou il estfait election de domicile,

contre

SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER BELGES, societe anonyme de droitpublic dont le siege social est etabli à Saint-Gilles, rue de France, 56,

defenderesse en cassation,

representee par Maitre Michele Gregoire, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue de la Regence, 4, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre les jugements rendus les 27fevrier 2013 et 8 janvier 2014 par le tribunal de premiere instance deMons, statuant en degre d'appel.

Le conseiller Marie-Claire Ernotte a fait rapport.

L'avocat general Philippe de Koster a conclu.

II. Le moyen de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, les demandeurs presentent un moyen.

III. La decision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la deuxieme branche :

Conformement à l'article 29bis, S: 1er, alinea 1er, de la loi du 21novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite enmatiere de vehicules automoteurs, en cas d'accident de la circulationimpliquant un ou plusieurs vehicules automoteurs, aux endroits vises àl'article 2, S: 1er, et à l'exception des degats materiels et desdommages subis par le conducteur de chaque vehicule automoteur implique,tous les dommages subis par les victimes et leurs ayants droit etresultant de lesions corporelles ou du deces, y compris les degats auxvetements, sont repares solidairement par les assureurs qui, conformementà cette loi, couvrent la responsabilite du proprietaire, du conducteur oudu detenteur des vehicules automoteurs.

En son alinea 2, l'article 29bis, S: 1er, dispose qu'en cas d'accident dela circulation impliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree,l'obligation de reparer les dommages prevue à l'alinea precedent incombeau proprietaire de ce vehicule.

Il suit de cette disposition que le passager d'un vehicule automoteur lieà une voie ferree implique dans un accident de la circulation beneficiede l'indemnisation prevue, quel que soit le lieu de la survenance de cetaccident, meme s'il s'agit d'une voie ferree completement isolee de lacirculation aux endroits vises à l'article 2, S: 1er, de la loi.

Le jugement attaque du 27 fevrier 2013 enonce que les demandeurs, en leurqualite d'ayants cause, demandent reparation du dommage subi à la suited'« un accident ferroviaire survenu en date du 15 fevrier 2010 àBuizingen dans lequel D. V. H. [...] et J. V. H. [...] ont perdu la viealors qu'ils etaient tous deux passagers d'un des deux convois entres encollision », « ce qui n'est pas conteste par [la defenderesse] ».

En decidant qu'il ne peut « faire en l'espece application de l'article29bis de la loi du 21 novembre 1989 » au motif que « l'accident estsurvenu en site propre », le jugement attaque du 27 fevrier 2013 viole ladisposition legale precitee.

Le moyen, en cette branche, est fonde.

La cassation du jugement attaque du 27 fevrier 2013 entraine l'annulationdu jugement du 8 janvier 2014 qui en est la suite.

Sur les autres griefs :

Il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs du moyen, qui ne sauraiententrainer une cassation plus etendue.

Par ces motifs,

La Cour

Casse le jugement attaque du 27 fevrier 2013, sauf en tant qu'il rec,oitles appels et dit le declinatoire de competence non fonde ;

Annule le jugement du 8 janvier 2014 ;

Ordonne que mention du present arret sera faite en marge du jugementpartiellement casse et du jugement annule ;

Reserve les depens pour qu'il soit statue sur ceux-ci par le juge dufond ;

Renvoie la cause, ainsi limitee, devant le tribunal de premiere instancedu Brabant wallon, siegeant en degre d'appel.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Albert Fettweis, president, lepresident de section Martine Regout, les conseillers Michel Lemal,Marie-Claire Ernotte et Sabine Geubel, et prononce en audience publique duneuf mars deux mille dix-sept par le president de section Albert Fettweis,en presence de l'avocat general Philippe de Koster, avec l'assistance dugreffier Fabienne Gobert.

+----------------------------------------+
| F. Gobert | S. Geubel | M.-Cl. Ernotte |
|-----------+-----------+----------------|
| M. Lemal | M. Regout | A. Fettweis |
+----------------------------------------+

* Requete

Requete en cassation

Pour

I. G.,

V. H. Y.,

V. H. Q.,

demandeurs en cassation,

assistes et representes par Me Franc,ois T'Kint, avocat à la Cour decassation soussigne, dont le cabinet est etabli à 6000 Charleroi, rue del'Athenee, 9, ou il est elu domicile.

Contre

Societe nationale des Chemins de Fer Belge (en abrege SNCB), anciennementdenommee Societe nationale des Chemins de Fer Belge - Holding (en abregeSNCB-Holding), societe anonyme, dont le siege social est etabli àSaint-Gilles, rue de France, 56, inscrite à la banque-carrefour desentreprises sous le numero 0203 430 576,

defenderesse en cassation.

A Messieurs les premier president et president, Mesdames et Messieurs lesconseillers qui composent la Cour de cassation,

Messieurs,

Mesdames,

Les demandeurs ont l'honneur de soumettre à votre censure les jugementsrendus par la premiere chambre du tribunal de premiere instance de Monsstatuant en degre d'appel les 27 fevrier 2013 et 8 janvier 2014 (rolegeneral 12 223 A).

La defenderesse actuelle est aux droits et obligations de SocieteNationale des Chemins de Fer Belge (en abrege SNCB), societe anonyme,partie defenderesse et intimee (au principal) devant le juge du fond, dontle siege social etait etabli à Saint-Gilles, avenue de la Porte de Hal,40, inscrite à la banque-carrefour des entreprises sous le numero 0869763 069, cette societe ayant ete absorbee par la defenderesse alorsdenommee Societe Nationale des Chemins de Fer Belge - Holding (en abregeSNCB - Holding), et ce aux termes de deux actes rec,us par le notaire T.Carnewal de residence à Bruxelles, le 20 decembre 2013, deposes au greffedu tribunal de commerce de Bruxelles le 7 janvier 2014, la defenderesseayant ulterieurement modifie sa denomination en adoptant la denominationde la societe absorbee. Dans la redaction du pourvoi, la SNCB designe lapartie defenderesse devant le juge du fond.

Les faits de la cause et les antecedents de la procedure, tels qu'ilsresultent des pieces auxquelles votre Cour peut avoir egard, se resumentcomme suit.

Le 15 fevrier 2010, D. V. H., epoux de la demanderesse et pere desdemandeurs, et Y. V. H., fils de la demanderesse et frere des demandeurs,sont decedes alors qu'ils etaient passagers d'un train, entre en collisionavec un autre train, à Buizingen.

Ils ont notamment recherche la responsabilite de la SNCB sur le fondementde l'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assuranceobligatoire de la responsabilite en matiere de vehicules automoteurs, etdemande sa condamnation à les indemniser.

Le jugement entrepris fait droit à leur demande, sur ce fondement legal,dans son principe.

Le premier jugement attaque decide au contraire que le tribunal « ne peut(...) faire en l'espece application de l'article 29bis de la loi du 21novembre 1989 », dans un motif decisoire (page 15).

Mais il ordonne la reouverture des debats pour permettre aux parties des'expliquer sur la demande que les demandeurs ont fondee, subsidiairement,sur le fondement de l'article 4 de la loi du 25 aout 1891 sur le contratde transport.

Le second jugement attaque, qui releve que « le tribunal a epuise sajuridiction en ce qu'il y est dit pour droit que le jugement rendu le 15decembre 2011 par le tribunal de police devait ecarter l'article 29bis dela loi du 21 novembre 1989 », fait droit, sur le principe, à la demandesubsidiaire des demandeurs.

A l'encontre des jugements attaques, le demandeur croit pouvoir vousproposer le moyen unique de cassation suivant.

Moyen unique de cassation

Dispositions legales violees

Article 29bis, specialement S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relativeà l'assurance obligatoire de la responsabilite en matiere de vehiculesautomoteurs ;

articles 26 à 30 de la loi speciale du 6 janvier 1989 sur la Courconstitutionnelle ;

articles 2, 19, et 608 à 615 du Code judiciaire ;

articles 416 à 420 du Code d'instruction criminelle ;

articles 10, 11, 147 et 149 de la Constitution ;

principes generaux du droit dits de bonne administration, de securitejuridique et de confiance legitime, le premier incluant les deux derniers.

Decisions attaquees et motifs critiques

Saisi de l'action des demandeurs en reparation du prejudice qu'ils ontsubi à la suite du deces de D. V. H. epoux de la demanderesse et pere desdemandeurs, et de Y. V. H., fils de la demanderesse et frere desdemandeurs, decedes alors qu'ils etaient passagers d'un train, entre encollision avec un autre train, à Buizingen, sur le fondement de l'article29bis de la loi du 21 novembre 1989, le premier jugement attaque, saisides appels des parties du jugement du tribunal de police de Mons du 15decembre 2011, decide que le tribunal « ne peut faire en l'especeapplication » de cette disposition legale et ce dans un motif decisoire.Et le jugement ordonne la reouverture des debats pour permettre auxparties de s'expliquer sur la demande que les demandeurs ont fondee, àtitre subsidiaire, sur l'article 4 de la loi du 25 aout 1891 sur lecontrat de transport.

Le second jugement attaque, statuant en prosecution de cause, releve que« le tribunal a epuise sa juridiction en ce qu'il y est dit pour droitque le jugement rendu le 15 decembre 2011 par le tribunal de police devaitecarter l'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 » et fait droit àla demande subsidiaire des demandeurs.

Le premier jugement attaque est fonde sur les motifs suivants :

« B/ Quant à l'application de l'article 29bis de la Loi du 21 novembre1989.

1.

Attendu que l'article 29bis, S: 1er, de la Loi du 21 novembre 1989relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite en matiere devehicules automoteurs dispose

* en son alinea 1er, qu' `en cas d'accident de la circulation impliquantun ou plusieurs vehicules automoteurs, aux endroits vises à l'article2, S: 1er, et à l'exception des degats materiels et des dommagessubis par le conducteur de chaque vehicule automoteur implique, tousles dommages subis par les victimes et leurs ayants droit et resultantde lesions corporelles ou du deces, y compris les degats auxvetements, sont repares solidairement par les assureurs qui,conformement à la presente loi, couvrent la responsabilite duproprietaire, du conducteur ou du detenteur des vehicules automoteurs'

* et en son alinea 2, qu' `en cas d'accident de la circulationimpliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree, l'obligationde reparer les dommages prevue à l'alinea precedent incombe auproprietaire de ce vehicule' ;

Qu'il ressort donc du libelle de l'article 29bis de la Loi du 21 novembre1989 que la limitation de son champ d'application aux endroits vises àl'article 2, S: 1er, de ladite loi (c'est-à-dire la voie publique, lesterrains ouverts au public et les terrains non publics mais ouverts à uncertain nombre de personnes ayant le droit de les frequenter) ne concernepas les accidents de la circulation impliquant un vehicule automoteur lieà une voie ferree ;

Que les travaux preparatoires de la Loi du 19 janvier 2001 modifiantdiverses dispositions relatives au regime de l'indemnisation automatiquedes usagers de la route les plus vulnerables et des passagers devehicules, inserant un alinea 2 à l'article 29bis, S: 1er, de la Loi du21 novembre 1989 confirment cette interpretation litterale puisqu'ils fontclairement apparaitre que la volonte du Legislateur etait de rendreapplicable cette disposition aux accidents ferroviaires survenus en sitepropre (...) ;

Que, par arret du 11 janvier 2010, la Cour de cassation a ainsi considerequ' `en vertu de l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la loi du 21novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite enmatiere de vehicules automoteurs, en cas d'accident de la circulationimpliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree, l'obligation dereparer les dommages, prevue à l'alinea precedent de ce texte, incombe auproprietaire de ce vehicule .

Il ressort des travaux preparatoires de la loi du 19 janvier 2001modifiant diverses dispositions relatives au regime de l'indemnisationautomatique des usagers de la route les plus vulnerables et des passagersde vehicules, qui a insere l'alinea 2 precite dans l'article 29bis de laloi du 21 novembre 1989, que le legislateur a entendu viser tout accidentimpliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree, dont un usagervulnerable serait victime, quel que soit le lieu de la survenance d'un telaccident.

Le moyen, qui, en cette branche, soutient que cette disposition legale nevise que les accidents se produisant à un endroit ou le vehicule lie àune voie ferree emprunte ou traverse la voie publique, manque en droit.'(...) ;

Que selon cette interpretation l'article 29bis de la Loi du 21 novembre1989 est donc a priori applicable à un accident ferroviaire survenu ensite propre ;

Attendu que la (SNCB) invoque cependant que `toute interpretation del'article 29bis visant à etendre son champ d'application aux accidentspouvant survenir dans des lieux isoles de la circulation est frappeed'inconstitutionnalite.' ;

a.

Attendu que l'article 26, S: 4, alinea 1er, de la Loi speciale du 6janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle dispose que `lorsqu'il estinvoque devant une juridiction qu'une loi, un decret ou une regle visee àl'article 134 de la Constitution viole un droit fondamental garanti demaniere totalement ou partiellement analogue par une disposition du titreII de la Constitution ainsi que par une disposition de droit europeen oude droit international, la juridiction est tenue de poser d'abord à laCour constitutionnelle la question prejudicielle sur la compatibilite avecla disposition du titre II de la Constitution.' ;

Que cependant, l'article 26, S: 4, alinea 2, de ladite Loi specialedispose que `par derogation à l'alinea 1er, l'obligation de poser unequestion prejudicielle à la Cour constitutionnelle ne s'applique pas dansles cas vises aux paragraphes 2 et 3', le paragraphe 2 de l'article 26envisageant, en son 2DEG, l'hypothese dans laquelle `la Courconstitutionnelle a dejà statue sur une question ou un recours ayant unobjet identique' ;

Qu' àlors que dans sa version initiale, l'article 26, S: 2, alinea 2,2DEG, dispensait le juge d'interroger la Cour lorsque celle-ci s'etaitprononcee sur une question ayant `'un meme objet'', une modification a eteapportee par la Loi speciale du 9 mars 2003 aux termes de laquelle il fautque l'objet soit `'identique'', pour que l'exception soit d'application.S'il revient au juge et à lui seul d'interpreter la portee des arretsrendus par la Cour, le Legislateur a voulu l'empecher d'en donner uneinterpretation par analogie' (...) ;

Qu' `il s'agit [des lors] d'interpreter correctement la portee de l'arretque l'on pretend appliquer (...) C'est au juge du fond et à lui seulqu'il appartient de dire quelle est la portee de l'arret de la Cour pourl'espece dont il est saisi' (...) ;

b.

Attendu que, par arret nDEG 35/2012 du 8 mars 2012, la Courconstitutionnelle a dit pour droit qu' `en ce qu'il n'exclut pas du regimed'indemnisation automatique les accidents de la circulation impliquant untrain qui circule sur une voie ferree qui est completement isolee de lacirculation aux endroits vises à l'article 25, S: 1er, de la loi du 21novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite enmatiere de vehicules automoteurs, l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de lameme loi, modifie par la loi du 19 janvier 2001, viole les articles 10 et11 de la Constitution' (...) ;

Que certes, l'espece ayant donne lieu à cet arret concernait `untravailleur (...) decede sur le chemin du travail apres avoir ete percutepar un train de marchandises à un endroit ou le chemin de fer ne croisepas une voie publique' (...), soit donc un pieton, alors que la presentecause concerne le deces de deux passagers d'un train accidente ;

Que cependant, l'arret dont question repond à la question prejudiciellesuivante : `l'article 29bis de la loi RC-automobile viole-t-il lesarticles 10 et 11 de la Constitution s'il est interprete en ce sens queles assureurs vises au paragraphe 1er, alinea 1er, peuvent seulement etreappeles à reparer le dommage resultant d'un accident de la circulationaux endroits vises à l'article 2, S: 1er, alors que les proprietairesd'un vehicule automoteur lie à une voie ferree, vises au paragraphe 1er,alinea 2, peuvent etre appeles à reparer le dommage resultant d'unaccident de la circulation quel que soit le lieu de l'accident ?' (...) ;Que la question ne distingue donc pas selon que la victime de l'accidentferroviaire survenu en site propre est un pieton ou un passager ; Qu'ellea pour objet la determination de la constitutionnalite de l'article 29bis,S: 1er, alinea 2, en fonction de la localisation de l'accident ferroviaireauquel on pretend l'appliquer ;

Que par ailleurs, la Cour constitutionnelle releve expressement qu' `ilapparait des faits de l'espece soumise au juge a quo que la question qu'ilpose est soulevee à propos d'un accident impliquant un train et survenuà un endroit ou la voie ferree est totalement isolee des voiries ouvertesà la circulation. La Cour limite son examen à cette hypothese.' (...) ;Que la Cour constitutionnelle, lorsqu'elle definit les limites de sonexamen ne distingue donc pas selon que la victime de l'accidentferroviaire survenu `à un endroit ou la voie ferree est totalement isoleedes voiries ouvertes à la circulation' est un pieton ou un passager ;qu'elle ne limite son examen qu'en fonction de la localisation del'accident ferroviaire ;

Que surtout, la motivation de l'arret precite, en particulier sous B.6.2et B.6.3 montre que la Cour constitutionnelle considere que l'article29bis, S: 1er, al. 2, de la Loi du 21 novembre 1989 est discriminatoirelorsqu'il est applique dans l'hypothese d'un accident impliquant un trainsurvenu à un endroit ou la voie ferree est totalement isolee des voiriesouvertes à la circulation sur base de considerations relatives :

* non à la qualite de passager ou de pieton des victimes de l'accidentferroviaire

* mais bien exclusivement à la localisation de celui-ci ;

Qu'en effet, cette motivation se lit comme suit :

`B.5. Dans plusieurs arrets, la Cour a constate que l'exclusion du regimed'indemnisation automatique, qui existait autrefois, lorsqu'un vehiculesur rails etait implique dans l'accident de la circulation, violait lesarticles 10 et 11 de la Constitution. En effet, la circonstance que lesvehicules sur rails roulent en site propre peut certes justifier que cesvehicules n'entrent, en regle generale, pas dans le champ d'application dureglement general sur la police de la circulation routiere, mais ceconstat n'est pas de nature à demontrer à suffisance que les vehiculessur rails, lorsqu'ils font usage de la voie publique ou croisententierement ou partiellement la voie publique, impliquent un risquemoindre à un point tel qu'il se justifierait de prevoir un regime dereparation des dommages fondamentalement different (...).

B.6.1 Lorsqu'il a supprime la discrimination constatee, plus precisementen incluant, par la loi du 19 janvier 2001, les accidents de lacirculation impliquant un vehicule sur rails dans le regimed'indemnisation en cause, le legislateur a pu, en ce qui concerne lesvehicules autres que ceux sur rails, limiter le champ d'applicationratione loci de l'article 29bis aux accidents de la circulation qui ontlieu sur la voie publique, les terrains ouverts au public et les terrainsuniquement ouverts à un certain nombre de personnes ayant le droit de lesfrequenter. L'exclusion des accidents survenus sur un terrain prive,justifiee par le risque d'abus et de fraude (...) n'a pas ete jugeecontraire aux articles 10 et 11 de la Constitution (...).

B.6.2. En ce qui concerne les vehicules sur rails, le legislateur a puprendre en compte le risque qu'ils creent lorsqu'ils circulent en desendroits qui ne sont pas isoles completement des endroits vises àl'article 2, S: 1er, de la loi en cause, des lors que ce risque estanalogue à celui cree par les autres vehicules. Il en va ainsi memelorsque la voie publique est temporairement interdite par l'abaissement debarrieres de securite ou par des feux de signalisation destines àpermettre le passage du train.

B.6.3. Toutefois, lorsque, comme en l'espece, le train circule sur unevoie ferree qui est completement isolee de la circulation sur les endroitsvises à l'article 2, S: 1er, precite, le risque cree par ce vehicule pourl'usager faible de la route doit etre tenu pour essentiellement differentde celui cree pour ce meme usager par des vehicules circulant aux endroitsvises à l'article 2, S: 1er, precite' ;

Que la Cour constitutionnelle considere donc :

* qu'il est justifie d'etendre l'application de l'article 29bis de laLoi du 21 novembre 1989 aux vehicules sur rails pour des accidentssurvenant en des endroits qui ne sont pas isoles completement de lavoie publique, des terrains ouverts au public ou des terrains nonpublics mais ouverts à un certain nombre de personnes ayant le droitde les frequenter au motif qu'à ces endroits, lesdits vehicules surrails participent au risque de la circulation routiere puisqu'ilssont, en ces lieux, susceptibles d'interferer avec elle ;

* qu'en revanche, cette extension n'est pas raisonnablement justifieelorsque l'accident survient à un endroit completement isole de lacirculation routiere au motif qu'à cet endroit, le vehicule sur railne participe pas au risque inherent à cette circulation

* et que par consequent, dans cette seconde hypothese, l'article 29bisde la Loi du 21 novembre 1989 viole les articles 10 et 11 de laConstitution ;

Qu'au regard de ces considerations, la qualite de pieton ou de passager dela victime, selon cette jurisprudence constitutionnelle, demeure sansincidence ; que les (demandeurs), recherchant une liquidation rapide desindemnites, n'ont pas formule de question prejudicielle susceptible dedonner lieu, eu egard aux specificites de l'espece, à une solutiondifferente de celle apportee par la Cour.

Que la question de l'inconstitutionnalite de l'article 29bis de la loi du21 novembre 1989 que souleve la (SNCB) a, nonobstant le fait qu'elle sepose dans l'hypothese de victimes ayant la qualite de passager, un objetidentique à celle à laquelle la Cour constitutionnelle a dejà reponduen ces termes dans son arret n0 35/2012 du 8 mars 2012 :

`en ce qu'il n'exclut pas du regime d'indemnisation automatique lesaccidents de la circulation impliquant un train qui circule sur une voieferree qui est completement isolee de la circulation aux endroits vises àl'article 2, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assuranceobligatoire de la responsabilite en matiere de vehicules automoteurs,l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la meme loi, modifie par la loi du19 janvier 2001, viole les articles 10 et 11 de la Constitution.'

Qu'il n'est pas conteste en l'espece que l'accident est survenu en sitepropre ;

Que, `quand le juge entend se prevaloir d'un arret rendu par la Courportant sur un objet identique, la solution donnee par la Cour s'impose entous points à lui et il ne saurait (...) s'en ecarter (...) (...).'(...) ;

Que le Tribunal ne peut donc faire en l'espece application de l'article29bis de la loi du 21 novembre 1989 ».

Le second jugement attaque est notamment fonde sur les motifs suivants :

« Par un premier jugement rendu le 27 fevrier 2013, le tribunal de ceansa notamment dit pour droit

* sur la these principale des (demandeurs), ne pouvoir faire applicationde l'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989, conformement àl'arret de la Cour constitutionnelle nDEG 35/2012 du 8 mars 2012

* (...)

Par un arret nDEG 116/2013 du 31 juillet 2013 dont il a ete question àl'audience du 11 decembre 2013, la Cour constitutionnelle a dit pourdroit :

- que la reponse donnee par la Cour à la question posee dans l'arret nDEG35/2012 ne peut etre retenue s'agissant des passagers du transportferroviaire

- qu'en ce qu'il n'exclut pas du regime d'indemnisation automatique lesaccidents de la circulation impliquant un vehicule qui circule sur unevoie ferree qui est completement isolee de la circulation aux endroitsvises à l'article 2, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relative àl'assurance obligatoire de la responsabilite en matiere de vehiculesautomoteurs, lorsque la victime de l'accident est un passager de cevehicule, l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la meme loi, modifie parla loi du 19 janvier 2001, ne viole pas les articles 10 et 11 de laConstitution, en particulier pour le motif suivant :

`B.6.3. En revanche, le fait que le vehicule lie à une voie ferree setrouve en un lieu completement isole du reste de la circulation n'a aucuneincidence sur le risque cree par ce vehicule pour les passagers qui setrouvent à l'interieur. Il n'y a des lors aucune justificationraisonnable pour exclure du regime d'indemnisation automatique cree parl'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 les accidents de lacirculation impliquant un vehicule circulant sur une voie ferreecompletement isolee de la circulation sur les endroits vises à l'article2, S: 1er, de la meme loi, lorsque la victime de l'accident est unpassager du vehicule concerne.'

(...)

En ce qui concerne l'autorite de la chose jugee, le tribunal n'a ecartel'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 que par application del'arret de la Cour constitutionnelle nDEG 35/2012, alors que la seulesolution juridique decoulant actuellement de l'arret nDEG 116/2013 seraitde faire application de cette disposition au cas d'espece.

Il n'en reste pas moins que ce jugement est definitif dans la mesure ou ila epuise le pouvoir de juridiction du tribunal de ceans sur la questionlitigieuse, sauf les recours prevus par la loi (article 19, alinea 1 duCode judiciaire) et sans prejudice d'une mediation entre parties sur lesbases dorenavant connues. »

Il se deduit de tous les motifs de chacun des jugements attaques, tenusici pour reproduits et critiques, et de leurs dispositifs que lesdemandeurs sont deboutes de leur demande de condamnation de la SNCB entant qu'elle est fondee sur la disposition legale visee.

Griefs allegues

Premiere branche

S'il appartient aux juridictions judiciaires d'interpreter les arrets dela Cour constitutionnelle, plus precisement de juger de leur applicationaux especes dont elles sont saisies, leurs decisions n'echappent pas aucontrole de votre Cour.

En relevant, reproduisant partiellement une citation d'auteurs qu'il faitsienne, d'une part, qu'il « revient au juge et à lui seul d'interpreterla portee des arrets rendus par la Cour [constitutionnelle] », d'autrepart, que « (c)'est au juge du fond et à lui seul qu'il appartient dedire quelle est la portee de l'arret de la Cour [constitutionnelle] pourl'espece dont il est saisi », le premier jugement attaque laisseincertain s'il exclut, par ces termes, tout controle de votre Cour (le« juge du fond » interpretant « seul » l'arret de la Courconstitutionnelle) - decision qui serait illegale - ou si, par cetteformulation, il se borne à enoncer que les juridictions judiciaires - àl'exclusion de la Cour constitutionnelle elle-meme - ont seules pouvoird'interpreter les arrets de celle-ci au regard des especes qui leur sontsoumises et donc l'application à ces especes de constatd'inconstitutionnalite - ou de constitutionnalite - de ces arrets, maisdans le respect des principes qui reglent le fonctionnement du systemejudiciaire c'est-à-dire sous le controle de votre Cour - decision quiserait alors legalement justifiee.

Ces motifs sont donc equivoques et le premier jugement attaque n'est pasregulierement motive (violation de l'article 149 de la Constitution).

Et, s'il faut retenir la premiere interpretation, le meme jugementmeconnaitrait le pouvoir de controle de votre Cour (violation des articles2 et 608 à 615 du Code judiciaire, des dispositions visees Coded'instruction criminelle et de l'article 147 de la Constitution).

Deuxieme branche

L'article 29bis, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 instaure uneresponsabilite objective en faveur de la victime d'un « accident de lacirculation », s'agissant de son prejudice corporel, ou de ses proches etheritiers en cas de deces, à charge de l'assureur qui couvre laresponsabilite du proprietaire ou du conducteur du vehicule.

Et le texte dispose (2e alinea) : « En cas d'accident de la circulationimpliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree, l'obligation dereparer les dommages prevue à l'alinea precedent incombe au proprietairede ce vehicule ».

Et il n'etait pas conteste que la SNCB etait proprietaire du train danslequel les auteurs des demandeurs etaient passagers et sont decedes à lasuite de l'accident.

Il s'en suit qu'en deboutant les demandeurs de leur demande de reparationfondee sur la disposition legale citee par les motifs critiques, etsingulierement par les motifs que « l'accident est survenu en sitepropre », le premier jugement attaque ne justifie pas legalement sadecision, soumettant l'application du texte legal cite à une conditionqu'il ne contient pas (violation de l'article 29bis, specialement S: 1er,de la loi du 21 novembre 1989).

Troisieme branche

Le constat d'inconstitutionnalite qui resulte d'un arret, rendu surquestion prejudicielle, de la Cour constitutionnelle, sans que celle-ciait limite les effets dans le temps de ce constat, est declaratif - et adonc en pratique effet retroactif. La consequence en est que ce constatd'inconstitutionnalite s'impose au juge judiciaire, specialement parapplication des articles 26, S: 2, alinea 2, 2DEG, et 28 de la loispeciale du 6 janvier 1989 : le juge judiciaire ne peut faire application,meme à une situation anterieure à l'arret de la Cour constitutionnelle,d'une disposition legale jugee inconstitutionnelle par celle-ci.

Encore ce pouvoir de la Cour constitutionnelle - exorbitant et de natureà creer l'insecurite juridique - est-il strictement limite par l'especesoumise à la Cour et sur laquelle elle a statue - c'est-à-dire parl'objet de la question prejudicielle.

L'arret de la Cour constitutionnelle du 8 mars 2012 (arret 35/2012) a sansdoute decide, ainsi que le releve le premier jugement attaque, qu' « ence qu'il n'exclut pas du regime d'indemnisation automatique les accidentsde la circulation impliquant un train qui circule sur une voie ferree quiest completement isolee de la circulation aux endroits vises à l'article2, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assuranceobligatoire de la responsabilite en matiere de vehicules automoteurs,l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la meme loi, modifie par la loi du19 janvier 2001, viole les articles 10 et 11 de la Constitution ».

Toutefois, ainsi que le releve le meme jugement, « l'espece ayant donnelieu à cet arret concernait `un travailleur (...) decede sur le chemin dutravail apres avoir ete percute par un train de marchandises à un endroitou le chemin de fer ne croise pas une voie publique' (...), soit donc unpieton, alors que la presente cause concerne le deces de deux passagersd'un train accidente ».

En effet, la question prejudicielle posee à la Cour constitutionnelle,dans cette espece, par la cour d'appel d'Anvers etait redige comme suit(arret, page 2) :

« L'article 29bis de la loi RC - automobile viole-t-il les articles 10 et11 de la Constitution s'il est interprete en ce sens que les assureursvises au paragraphe 1er, alinea 1, peuvent seulement etre appeles àreparer le dommage resultant d'un accident de la circulation aux endroitsvises à l'article 2, S: 1er, alors que les proprietaires d'un vehiculeautomoteur lies à une voie ferree, vises au paragraphe 1er, alinea 2,peuvent etre appeles à reparer le dommage resultant d'un accident de lacirculation quel que soit le lieu de l'accident ? »,

la Cour constitutionnelle relate comme suit « (l)es faits et la procedureanterieurs » (arret, page 3) :

« Un travailleur est decede sur le chemin du travail apres avoir etepercute par un train de marchandises à un endroit ou le chemin de fer necroise pas une voie publique. L'assureur-loi reclame le remboursement deses depenses à la SNCB.

En cas d'accident de la circulation impliquant un vehicule automoteur lieà une voie ferree, l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la loi du 21novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite enmatiere de vehicules automoteurs prevoit que le proprietaire de cevehicule doit reparer le dommage. Le tribunal de premiere instanced'Anvers estime que cette disposition est applicable à tout accidentimpliquant un vehicule lie à une voie ferree, quel que soit le lieu del'accident. Il declare des lors la demande fondee.

La cour d'appel d'Anvers partage la vision du premier juge concernantl'applicabilite de la disposition precitee. Avant de statuer sur lademande, elle pose cependant, à la demande de la SNCB la questionprejudicielle reproduite plus haut. »

Il s'ensuit que le constat d'inconstitutionnalite de la disposition legalecitee par l'arret du 8 mars 2012 est strictement limite : cettedisposition legale est contraire, pour la Cour, aux articles 10 et 11 dela Constitution dans la mesure - et dans la mesure seulement - ou ellepeut etre invoquee par un travailleur, sur le chemin du travail, heurtepar un train « à un endroit ou le chemin de fer ne croise pas une voiepublique ».

Et, meme si le constat d'inconstitutionnalite de la disposition legalecitee peut etre etendu au cas de toute personne circulant sans necessitesur la voie ferree ou au bord de celle-ci, heurtee par un train, il nesaurait l'etre à la situation - radicalement differente - du passager dutrain tue ou blesse à la suite d'un accident ferroviaire, meme sicelui-ci survient « à un endroit ou le chemin de fer ne croise pas unevoie publique ».

Et cette consequence s'impose quels que soient les termes, qui peuventparaitre d'une portee plus generale, du dispositif de l'arret de la Courconstitutionnelle, pour le tribunal : le constat d'inconstitutionnaliteest circonscrit à l'espece soumise à la Cour constitutionnelle et nepeut etre etendu à d'autres situations.

La Cour constitutionnelle relevera au demeurant dans ses motifs qu'elle aeu egard à la situation de « l'usager faible de la route » (voy.rubrique B.6.3, de l'arret reproduit par le tribunal).

En decidant le contraire, par les motifs critiques, et en refusant, enconsequence, de faire application de l'article 29bis, S: 1er, de la loi du21 novembre 1989 invoque par les demandeurs à l'appui de leur demanded'indemnisation en raison du constat d'inconstitutionnalite qui se deduitde l'arret du 8 mars 2012 de la Cour constitutionnelle, alors que la Cours'est prononcee dans une situation etrangere au litige dont il etaitsaisi, le premier jugement attaque viole les articles 26 à 30 de la loispeciale du 6 janvier 1989, et specialement les articles 26, S: 2, 2DEG,et 28, en retenant de l'arret de la Cour constitutionnelle du 8 mars 2012un contenu, une portee et un effet qu'il n'a pas.

Par voie de consequence, le tribunal n'a pu legalement decider que « laquestion de l'inconstitutionnalite de l'article 29bis de la loi du 21novembre 1989 », soumise par la SNCB, a « un objet identique à celle àlaquelle la Cour constitutionnelle a dejà repondu en ces termes dans sonarret nDEG 35/2012 du 8 mars 2012 » (violation des memes dispositionslegales).

Par le fait meme, en declarant inconstitutionnel l'article 29bis de la loidu 21 novembre 1989, il viole les articles 10 et 11 de la Constitution.

Et la circonstance que les demandeurs, devant le tribunal, « n'ont pasformule de question prejudicielle susceptible de donner lieu, eu egard auxspecificites de l'espece, à une solution differente de celle apportee parla Cour » est sans incidence sur l'illegalite de cette decision.

Quatrieme branche (subsidiaire)

Le constat d'inconstitutionnalite qui resulte d'un arret, rendu surquestion prejudicielle, de la Cour constitutionnelle, sans que celle-ciait limite les effets dans le temps de ce constat, est declaratif - et adonc en pratique effet retroactif. La consequence en est que ce constatd'inconstitutionnalite s'impose au juge judiciaire, specialement parapplication des articles 26, S: 2, 2DEG, et 28 de la loi speciale du 6janvier 1989 : le juge judiciaire ne peut faire application, meme à unesituation anterieure à l'arret de la Cour constitutionnelle, d'unedisposition legale jugee inconstitutionnelle par celle-ci.

Mais, par application des memes dispositions legales, il suit tout autantque, lorsque la Cour constitutionnelle a decide, sur questionprejudicielle, que telle ou telle disposition legale ne viole pas laConstitution (et singulierement ses articles 10 et 11), dansl'interpretation qu'elle en retient, ce constat de constitutionnalite est,lui aussi, et plus naturellement encore, declaratif - et a donc un effetretroactif. Et, si un tel constat est en contradiction avec un constatd'inconstitutionnalite retenu par la Cour par une decision anterieure, cepremier constat d'inconstitutionnalite est en quelque sorte efface et lesjuridictions judiciaires ne peuvent declarer inconstitutionnelle ladisposition visee, dans l'interpretation retenue par la Courconstitutionnelle : elles doivent au contraire en faire application memeà une situation anterieure au constat de constitutionnalite.

Or, par ses arrets des 31 juillet 2013 - auquel fait reference le secondjugement attaque - et 6 fevrier 2014, la Cour constitutionnelle a decide(dispositif identique de chacun des arrets ; termes soulignes par lesdemandeurs) qu' interprete en ce sens « qu'il n'exclut pas du regimed'indemnisation automatique les accidents de la circulation impliquant unvehicule qui circule sur une voie ferree qui est completement isolee de lacirculation aux endroits vises à l'article 2, S: 1er, de la loi du 21novembre 1989 relative à l'assurance obligatoire de la responsabilite enmatiere de vehicules automoteurs, lorsque la victime de l'accident est unpassager de ce vehicule, l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la memeloi, modifie par la loi du 19 janvier 2001, ne viole pas les articles 10et 11 de la Constitution ».

Il suit de ces arrets de la Cour constitutionnelle que l'article 29bis, S:1er, de la loi du 21 novembre 1989 ne viole pas les articles 10 et 11 dela Constitution dans la mesure ou il est invoque par le passager d'untrain ou ses heritiers, meme « à un endroit ou le chemin de fer necroise pas une voie publique ».

Et votre Cour est tenue de faire application de ces arrets de la Courconstitutionnelle - et du constat de constitutionnalite de l'article29bis, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 qu'ils contiennent dansl'interpretation retenue par la Cour - et de reconnaitre que ces arretssont declaratifs - et donc ont effet retroactif - et trouvent às'appliquer au present litige - et ce meme s'il fallait considerer que,par son arret anterieur du 8 mars 2012, la Cour s'est prononcee en senscontraire.

Par voie de consequence - precisement en raison de cet effet declaratifdes arrets cites de la Cour constitutionnelle - votre Cour decidera que lepremier jugement attaque ne justifie pas legalement sa decision (violationdes articles 26 à 30 de la loi speciale du 6 janvier 1989 et,specialement, des articles 26, S: 2, 2DEG, et 28 de cette loi) et, parvoie de consequence, des articles 10 et 11 de la Constitution.

Cinquieme branche (subsidiaire)

Les principes generaux du droit dits de bonne administration, etspecialement le principe de securite juridique et le principe de confiancelegitime que le premier principe cite inclut, ne sauraient prevaloir, enregle, sur la loi, et les juridictions judiciaires ne peuvent s'ecarter,sur leur fondement, des textes legaux.

Or il decoule, specialement des articles 26, S: 2, 2DEG, et 28, de la loispeciale du 6 janvier 1989, que le constat d'inconstitutionnalite autantque le constat de constitutionnalite, par la Cour constitutionnelle,statuant sur question prejudicielle, de telle ou telle disposition legaleest declaratif - et a donc effet retroactif.

Mais, lorsque la jurisprudence de la Cour constitutionnelle est changeante- et donc incertaine - cet effet retroactif porte une atteinte grave à lasecurite juridique.

Par exception, dans une telle hypothese, les principes generaux du droitvises au moyen doivent trouver à s'appliquer, meme à l'encontre desarticles 26 à 30 de la loi speciale du 6 janvier 1989, les arretssuccessifs rendus par la Cour constitutionnelle en sens different,s'agissant du respect ou de la violation, par telle ou telle dispositionlegale, notamment des articles 10 et 11 de la Constitution, ecartant, parle fait meme, l'application de ces articles.

Le juge, en effet, ne peut faire application de ces dispositions legalesdans des conditions qui compromettent l'exigence de securite juridique etde legitime confiance.

Il s'ensuit que le premier jugement attaque, qui refuse de faireapplication de l'article 29bis, specialement S: 1er, de la loi du 21novembre 1989, sur le fondement duquel les demandeurs demandaientindemnisation, et ce en raison du constat d'inconstitutionnalite decoulantde l'arret de la Cour constitutionnelle du 8 mars 2012 (arret 35/2012),lequel aurait, pour le tribunal, declare ce texte legal inconstitutionnel(violant les articles 10 et 11 de la Constitution) dans le cas d'espece,c'est-à-dire en cas d'accident ferroviaire survenu « à un endroit ou lavoie ferree est totalement isolee des voies ouvertes à la circulation »,alors que, par ses arrets ulterieurs des 31 juillet 2013 (arret nDEG116/2013) et 6 fevrier 2014 (arret nDEG 25/2014), la Courconstitutionnelle a decide au contraire que, dans la meme situation,l'article 29bis, de la loi du 21 novembre 1989 ne violait pas les articles10 et 11 de la Constitution, ne justifie pas legalement sa decision(violation des principes generaux du droit vises).

Sixieme branche

Les principes generaux du droit dits de bonne administration, etspecialement le principe de securite juridique et le principe de confiancelegitime que le premier principe cite inclut, ne sauraient prevaloir, enregle, sur la loi, et les juridictions judiciaires ne peuvent s'ecarter,sur leur fondement, des textes legaux.

Or il decoule, specialement des articles 26, S: 2, 2DEG, et 28, de la loispeciale du 6 janvier 1989, que le constat d'inconstitutionnalite autantque le constat de constitutionnalite, par la Cour constitutionnelle,statuant sur question prejudicielle, de telle ou telle disposition legaleest declaratif - et a donc effet retroactif.

Mais, lorsque la jurisprudence de la Cour constitutionnelle est changeante- et donc incertaine - cet effet retroactif porte une atteinte grave à lasecurite juridique.

Cette atteinte est d'autant plus grave lorsque, comme en l'espece, lajuridiction a statue, par une premiere decision, sur le fondement de tellejurisprudence de la Cour constitutionnelle alors que, statuant enprosecution de cause apres que cette jurisprudence ait change, elle estsans pouvoir pour revenir sur sa premiere decision en fonction del'evolution de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle, cettepremiere decision etant definitive au sens de l'article 19 du codejudiciaire.

Il s'ensuit que les principes generaux du droits vises au moyen doiventalors trouver à s'appliquer, meme à l'encontre de l'article 19 du Codejudiciaire, les arrets successifs rendus par la Cour constitutionnelle, ensens different s'agissant du respect ou de la violation, par telle outelle disposition legale, notamment des articles 10 et 11 de laConstitution, ecartant, par le fait meme l'application de ce texte legal.

Il s'ensuit que le second jugement attaque qui refuse de faire applicationde l'article 29bis, specialement S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989,sur le fondement duquel les demandeurs demandaient indemnisation, et ce aumotif que le tribunal avait, par le premier jugement attaque, ecartel'application de ces textes juges, alors, inconstitutionnels par la Courconstitutionnelle, ne justifie pas legalement sa decision, des lors que lememe texte est juge conforme à la Constitution par les decisionssubsequentes de la Cour constitutionnelle, rendues apres ce premierjugement (violation de l'article 19 du Code judiciaire et des principesgeneraux du droit vises).

Developpement

Le moyen, en ses cinq premieres branches, est dirige contre le premierjugement attaque.

La cassation de ce premier jugement entrainerait toutefois, par voie deconsequence, l'annulation du second jugement attaque qui en est la suitenecessaire dans la mesure ou le tribunal decide, dans ce second jugement,qu'il « a epuise sa saisine en ce qu'il y est dit pour droit que [lejugement dont appel] devait ecarter l'article 29bis de la loi du 21novembre 1989 (...) ».

Les demandeurs ont cru cependant devoir attaquer, par la sixieme branchedu moyen, le second jugement. Le moyen en cette branche serait denued'interet si le premier jugement attaque etait casse et, en consequence,le second jugement attaque annule dans la mesure indiquee ci-avant.

Le moyen, en sa premiere branche, n'appelle guere de developpement.

En sa deuxieme branche, le moyen fait grief au premier jugement attaqued'avoir ecarte, par les motifs critiques, l'application en l'espece del'article 29bis, alinea 2, de la loi du 21 novembre 1989.

L'article 29bis, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 instaure uneresponsabilite objective en faveur de la victime d'un « accident de lacirculation », s'agissant de son prejudice corporel, ou de ses proches etheritiers en cas de deces, à charge de l'assureur qui couvre laresponsabilite du proprietaire ou du conducteur du vehicule.

Par une modification du 19 janvier 2001 - faisant suite à un arret de laCour d'arbitrage du 15 juillet 1998 (arret 92/98, Moniteur belge, 13octobre 1998) -, le legislateur a ajoute un deuxieme alinea au texte ainsiredige : « En cas d'accident de la circulation impliquant un vehiculeautomoteur lie à une voie ferree, l'obligation de reparer les dommagesprevue à l'alinea precedent incombe au proprietaire de ce vehicule. »

Et votre arret du 11 janvier 2010 (Pas., nDEG 17) decide, en toutelogique, que le texte ainsi modifie est applicable « à tout accidentimpliquant un vehicule automoteur lie à une voie ferree, dont un usagervulnerable serait victime, et ce quel que soit le lieu de la survenanced'un tel accident ».

Et il n'etait pas conteste que la SNCB etait proprietaire du train danslequel les auteurs des demandeurs etaient passagers.

L'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 doit donc trouver às'appliquer.

Le premier jugement attaque reconnait au demeurant (page 9, in fine) que,« selon cette interpretation, l'article 29bis de la loi du 21 novembre1989 est donc a priori applicable à un accident ferroviaire survenu ensite propre ».

Et s'il ecarte ce texte, c'est en se fondant sur l'arret de la Courconstitutionnelle du 8 mars 2012, decision que le moyen critique en sesbranches subsequentes.

Il est vrai que l'arret de votre Cour du 11 janvier 2010 ne statue pas surl'application de l'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 mais del'article 601bis nouveau du Code judiciaire, aux termes duquel « letribunal de police connait de toute demande relative à la reparation d'undommage resultant d'un accident de la circulation meme si celui-ci estsurvenu dans un lieu qui n'est pas accessible au public ».

Et ce texte a ete modifie par une loi du 30 decembre 2009, les termes« ou d'un accident ferroviaire » etant inseres apres les termes« accident de la circulation ».

Il s'agissait donc, pour votre Cour dans cette autre cause, de trancher,sans plus, une question de competence d'attribution.

Et, comme dejà ecrit, elle l'a tranchee dans le sens de l'interpretationla plus large.

Mais cet arret peut etre invoque, aussi, à l'appui de l'interpretationtout aussi large de l'article 29bis, alinea 2, de la loi du 21 novembre1989. Dans les conclusions de l'avocat general J.-M. Genicot, publieessous l'arret du 11 janvier 2010, ce dernier relevait l'assimilation quis'imposait entre l'article 601bis du Code judiciaire et l'article 29bis dela loi du 21 novembre 1989. Et l'avocat general soulignait la necessited'une coherence entre ces deux dispositions.

Le constat d'inconstitutionnalite qui resulte d'un arret, rendu surquestion prejudicielle, de la Cour constitutionnelle, sans que celle-ciait limite les effets dans le temps de ce constat, est declaratif - et adonc en pratique effet retroactif. La consequence en est que ce constatd'inconstitutionnalite s'impose au juge judiciaire, specialement parapplication des articles 26, S: 2, alinea 2, 2DEG, et 28 de la loispeciale du 6 janvier 1989 : le juge judiciaire ne peut faire application,meme à une situation anterieure à l'arret de la Cour constitutionnelle,d'une disposition legale jugee inconstitutionnelle par celle-ci.

Votre Cour a reconnu ce principe - apres des hesitations anterieures (voy.M. Mahieu et G. Pijcke, « Amenagement dans le temps des effets des arretsrendus sur question prejudicielle ; la Cour de cassation a franchi lecap », J.T., 2011, spec. p. 716) - par son arret du 20 novembre 2014 (C13 0435 F), rendu sur les conclusions fouillees - conformes - de l'avocatgeneral Werquin (sur cet arret, voy. J. Kirkpatrick, J.T., 2015, p. 402).

Encore ce pouvoir de la Cour constitutionnelle - exorbitant et de natureà creer l'insecurite juridique - est-il necessairement limite parl'espece soumise à la Cour et sur laquelle elle a statue - c'est-à-direpar l'objet de la question prejudicielle (voy. l'article 26, S: 2, 2DEG,de la loi du 6 janvier 1989 ; Chr. Horevoets et P. Boucquey, Les questionsprejudicielles à la Cour d'arbitrage, Bruylant, 2001, nDEG 280, p. 293 infine et 294, aussi M. Verdussen, La justice constitutionnelle, Larcier,2012, p. 282).

L'arret de la Cour constitutionnelle du 8 mars 2012 (arret 35/2012) a sansdoute decide, ainsi que le releve le premier jugement attaque, qu' « ence qu'il n'exclut pas du regime d'indemnisation automatique les accidentsde la circulation impliquant un train qui circule sur une voie ferree quiest completement isolee de la circulation aux endroits vises à l'article2, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relative à l'assuranceobligatoire de la responsabilite en matiere de vehicules automoteurs,l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la meme loi, modifie par la loi du19 janvier 2001, viole les articles 10 et 11 de la Constitution ».

Toutefois, ainsi que le releve le meme jugement, « l'espece ayant donnelieu à cet arret concernait `un travailleur (...) decede sur le chemin dutravail apres avoir ete percute par un train à un endroit ou le chemin defer ne croise pas une voie publique' (...), soit donc un pieton, alors quela presente cause concerne le deces de deux passagers d'un trainaccidente ».

Il s'ensuit que le constat d'inconstitutionnalite de la disposition legalecitee par l'arret du 8 mars 2012 est strictement limite : cettedisposition legale est contraire, pour la Cour, aux articles 10 et 11 dela Constitution dans la mesure - et dans la mesure seulement - ou ellepeut etre invoquee par un travailleur, sur le chemin du travail, heurtepar un train « à un endroit ou le chemin de fer ne croise pas une voiepublique ».

Et, meme si le constat d'inconstitutionnalite de la disposition legalecitee peut etre etendu au cas de toute personne circulant sans necessitesur la voie ferree ou au bord de celle-ci, heurtee par un train, il nesaurait l'etre à la situation - radicalement differente - du passager dutrain tue ou blesse à la suite d'un accident ferroviaire, meme sicelui-ci survient « à un endroit ou le chemin de fer ne croise pas unevoie publique ».

Et le principe s'impose quels que soient les termes, qui peuvent paraitred'une portee plus generale, du dispositif de l'arret de la Courconstitutionnelle, pour le tribunal : le constat d'inconstitutionnaliteest circonscrit à l'espece soumise à la Cour constitutionnelle et nepeut etre etendu à d'autres situations.

Si besoin est, confirmation de ce principe peut etre trouvee dans lerecent arret de la Cour constitutionnelle du 28 mai 2015 (nDEG 74/2015)rendu sur question prejudicielle posee par la cour d'appel d'Anvers : laCour decide que l'article 29bis, alinea 2, de la loi du 21 novembre 1989ne viole pas les articles 10 et 11 de la Constitution en n'excluant pas del'indemnisation les personnes « autorisees à se trouver sur la voieferree dans le cadre de leur travail » et ce à un endroit ou celle-ciest separee de la voie publique. Et comparaison est faite, par la Courconstitutionnelle, avec l'arret dejà cite du 8 aout 2012.

En decidant, par les motifs critiques, de faire application de l'article29bis, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 invoque par les demandeurs àl'appui de leur demande d'indemnisation en raison du constatd'inconstitutionnalite qui se deduit de l'arret du 8 mars 2012 de la Courconstitutionnelle, alors que la Cour s'est prononcee dans une situationetrangere au litige dont il etait saisi, le premier jugement attaque violeles articles 26 à 30 de la loi speciale du 6 janvier 1989, etspecialement les articles 26, S: 2, 2DEG, et 28, en retenant de l'arret dela Cour constitutionnelle du 8 mars 2012 un contenu, une portee et uneffet qu'il n'a pas.

Le moyen, en sa troisieme branche, critique cette decision.

Et la circonstance que les demandeurs, devant le tribunal, « n'ont pasformule de question prejudicielle susceptible de donner lieu, eu egard auxspecificites de l'espece, à une solution differente de celle apportee parla Cour » est sans incidence sur l'illegalite de cette decision. Lesdemandeurs n'avaient pas à le faire, des lors qu'ils soutenaient, aucontraire, que, applique à l'espece dont etait saisi le tribunal,l'article 29bis de la loi du 21 novembre 1989 ne violait pas les articles10 et 11 de la Constitution.

Le moyen, en sa quatrieme branche, est propose à titre subsidiaire,precisement en cas de rejet du moyen en sa troisieme branche.

Par application des articles 26, S: 2, 2DEG, et 28 de la loi du 21novembre 1989, il suit que, lorsque la Cour constitutionnelle a decide quetelle ou telle disposition legale ne viole pas la Constitution (etsingulierement ses articles 10 et 11), dans l'interpretation qu'elle enretient, ce constat de constitutionnalite est, lui aussi, et plusnaturellement encore, declaratif - et a donc un effet retroactif. Et, siun tel constat est en contradiction avec un constat d'inconstitutionnaliteretenu par la Cour par une decision anterieure, ce premier constatd'inconstitutionnalite est en quelque sorte efface et les juridictionsjudiciaires ne peuvent declarer inconstitutionnelle la disposition visee,dans l'interpretation retenue par la Cour constitutionnelle : ellesdoivent au contraire en faire application meme à une situation anterieureau constat de constitutionnalite.

Or, par ses arrets des 31 juillet 2013 (arret nDEG 116/2013) - auquel faitreference le second jugement attaque - et 6 fevrier 2014 (arret nDEG25/2014), la Cour constitutionnelle a decide (dispositif identique dechacun des arrets ; termes soulignes par les demandeurs) qu' interprete ence sens « qu'il n'exclut pas du regime d'indemnisation automatique lesaccidents de la circulation impliquant un vehicule qui circule sur unevoie ferree qui est completement isolee de la circulation aux endroitsvises à l'article 2, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 relative àl'assurance obligatoire de la responsabilite en matiere de vehiculesautomoteurs, lorsque la victime de l'accident est un passager de cevehicule, l'article 29bis, S: 1er, alinea 2, de la meme loi, modifie parla loi du 19 janvier 2001, ne viole pas les articles 10 et 11 de laConstitution ».

Il suit de ces arrets de la Cour constitutionnelle que l'article 29bis, S:1er, de la loi du 21 novembre 1989 ne viole pas les articles 10 et 11 dela Constitution dans la mesure ou il est invoque par le passager d'untrain ou ses heritiers, meme « à un endroit ou le chemin de fer necroise pas une voie publique ».

Et votre Cour est tenue de faire application de ces arrets de la Courconstitutionnelle - et du constat de constitutionnalite de l'article29bis, S: 1er, de la loi du 21 novembre 1989 qu'ils contiennent dansl'interpretation retenue par la Cour - et de reconnaitre que ces arretssont declaratifs - et donc ont effet retroactif - et trouvent às'appliquer au present litige.

Le moyen, en ses cinquieme et sixieme branches, vous est propose à titresubsidiaire, precisement en cas de rejet du moyen en ses troisieme etquatrieme branches.

En sa cinquieme branche, le moyen est dirige contre le premier jugementattaque, en sa sixieme branche contre le second jugement (voy. ci-avant,nDEG 1).

Les principes generaux du droit dits de bonne administration, etspecialement le principe de securite juridique et le principe de confiancelegitime que le premier principe cite inclut, ne sauraient prevaloir, enregle, sur la loi, et les juridictions judiciaires ne peuvent s'ecarter,sur leur fondement, des textes legaux.

La regle n'est guere contestee (voy. not., P. Marchal, Principes generauxdu droit, R.P.D.B., 2014, p. 103, et les ref. cit. en note 477).

Elle a ete reaffirmee par votre Cour dans l'arret cite du 20 novembre2014.

Les demandeurs croient pouvoir soutenir cependant, eu egard auxcirconstances tres particulieres de l'espece, que ce principe doit cederlorsque, en raison de la jurisprudence changeante de la Courconstitutionnelle - et du caractere declaratif, en regle, des arretsrendus par cette Cour sur question prejudicielle - il peut etre porte àetre une atteinte grave à la securite juridique.

PAR CES CONSIDERATIONS,

L'avocat à la Cour de cassation soussigne vous prie, Messieurs, Mesdames,casser les jugements attaques, ou, à tout le moins, casser le premierjugement attaque et annuler (dans la meme mesure le second en tant qu'ilconfirme le premier), le second jugement, ordonner que mention de votredecision sera inscrite en marge du ou des jugements casses, renvoyer lacause et les parties devant un autre tribunal de premiere instancestatuant en degre d'appel et statuer comme de droit quant aux depens.

Charleroi, le 29 mars 2017

Annexe :

1. Declaration pro fisco conforme à l'arrete royal du 12 mai 2015

Franc,ois T'Kint

Avocat à la Cour de cassation

9 MARS 2017 C.15.0253.F/1

Requete/32


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0253.F
Date de la décision : 09/03/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-03-09;c.15.0253.f ?
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