La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/01/2017 | BELGIQUE | N°S.16.0041.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 30 janvier 2017, S.16.0041.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.16.0041.F

CENTRE INTERCOMMUNAL DE SANTE ARTHUR NAZE, intercommunale à forme desociete cooperative à responsabilite limitee, dont le siege est etablià Colfontaine, rue Grande, 17,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

O. M.-G.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige

contre l'arret rendu le 23 avril 2012par la cour du travail de Mons.

Le conseiller Michel Lemal a fait rapport...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG S.16.0041.F

CENTRE INTERCOMMUNAL DE SANTE ARTHUR NAZE, intercommunale à forme desociete cooperative à responsabilite limitee, dont le siege est etablià Colfontaine, rue Grande, 17,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ou il estfait election de domicile,

contre

O. M.-G.,

defendeur en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 23 avril 2012par la cour du travail de Mons.

Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.

L'avocat general Jean Marie Genicot a conclu.

II. Le moyen de cassation

Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copie certifieeconforme, la demanderesse presente un moyen.

III. La decision de la Cour

Sur le moyen :

Quant à la premiere branche :

Dans ses conclusions d'appel, le defendeur opposait aux conclusions de lademanderesse supputant que l'autorite de tutelle avait receptionne lesactes attaques le 22 juillet 1997, que chacune des decisions de laditeautorite de tutelle mentionnait que « le proces-verbal de [lademanderesse] a ete rec,u au gouvernement wallon le 27 octobre 1997 ».

L'arret attaque considere que « les deliberations du conseild'administration de la [demanderesse] ont fait l'objet de deux arretesministeriels dates du 12 janvier 1998, soit, compte tenu de la prorogationde delai rendue necessaire par le caractere incomplet des dossiersreceptionnes par l'autorite de tutelle en date du 28 octobre 1997, ledernier jour utile dont disposait l'autorite de tutelle pour statuer enapplication des articles 37, 38 et 4 de l'arrete de l'Executif regionalwallon du 28 septembre 1989 reglant les mesures d'execution du decret duConseil regional wallon du 20 juillet 1989 organisant la tutelle sur lescommunes, les provinces et les intercommunales de la Region wallonne ».

Par ces enonciations, l'arret ne considere pas que le delai dans lequell'autorite de tutelle doit se prononcer ou, à tout le moins, prendre unarrete de prorogation de ce delai court à compter de la reception d'undossier complet par cette autorite mais considere que les actes attaquesne sont parvenus à celle-ci que le 27 octobre 1997 et qu'une prorogationde delai a ete rendue necessaire en raison du caractere incomplet desdossiers qui lui ont ete transmis.

Le moyen, qui, en cette branche, procede d'une interpretation inexacte del'arret, manque en fait.

Quant à la deuxieme branche :

Dans ses conclusions d'appel, le defendeur faisait valoir que « le 75ejour apres le 27 octobre 1997 etait le 10 janvier 1998 » et que « cettejournee etant un samedi, le dernier jour est proroge jusqu'au lundi 12janvier 1998, de sorte que, dans le cas d'espece, il y a bien, de fac,ontout à fait legale, vingt-sept jours de prorogation ».

En leur opposant la consideration que le « 12 janvier 1998 » etait,« compte tenu de la prorogation de delai », « le dernier jour utiledont disposait l'autorite de tutelle pour statuer », par laquelle il serallie à l'opinion soutenue devant les juges d'appel par le defendeur,l'arret attaque repond aux conclusions de la demanderesse faisant valoirque l'arrete de prorogation a viole l'article 4 du decret du 20 juillet1989 des lors qu'il a proroge ce delai de vingt-sept jours et non devingt-cinq jours comme le prevoit cette disposition legale.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Quant à la troisieme branche :

Les considerations vainement critiquees par les deux premieres branches dumoyen et celles, non critiquees, que les arretes ministeriels deprorogation etaient regulierement motives constituent un fondementdistinct et suffisant de la decision de l'arret attaque de rejeterl'exception d'illegalite des arretes ministeriels du 12 janvier 1998opposee par la demanderesse.

Dirige contre des considerations surabondantes de l'arret, le moyen, qui,en cette branche, ne saurait entrainer la cassation, est denue d'interet,partant, irrecevable.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de trois cent septante et un euros quaranteet un centimes envers la partie demanderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Martine Regout, les conseillers DidierBatsele, Mireille Delange, Michel Lemal et Sabine Geubel, et prononce enaudience publique du trente janvier deux mille dix-sept par le presidentde section Martine Regout, en presence de l'avocat general Jean MarieGenicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------+
| L. Body | S. Geubel | M. Lemal |
|------------+------------+-----------|
| M. Delange | D. Batsele | M. Regout |
+-------------------------------------+

Requete

1er feuillet

00160021

REQUETE EN CASSATION

POUR : L'intercommunale à forme de societe cooperative à responsabilitelimitee CENTRE INTERCOMMUNAL DE SANTE ARTHUR NAZE, dont le siege socialest etabli à 7340 Colfontaine, rue Grande, 17, et connue à la BCE sousle numero 201.808.696,

demanderesse en cassation,

assistee et representee par Me Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation soussigne, dont le cabinet est etabli à 1050 Bruxelles, avenueLouise, 149 (Bte 20), ou il est fait election de domicile.

CONTRE : M. O. M.,

defendeur en cassation.

* *

*

A Messieurs les Premier President et President, Mesdames et Messieurs lesConseillers composant la Cour de cassation de Belgique,

Messieurs,

Mesdames,

La demanderesse en cassation a l'honneur de deferer à votre censurel'arret rendu contradictoirement entre parties le 23 avril 2012 par lacour du travail de Mons (R.G. 2010/AM/376).

1. Les faits de la cause et les antecedents de la procedure peuvent etreresumes comme suit.

2eme feuillet

2. Monsieur O. M., ici defendeur en cassation, fut au service de la SCRLCentre intercommunal de Sante Arthur Naze, ici demanderesse, en qualited'agent statutaire, ou il exerc,a des fonctions d'ouvrier d'entretien, àcompter du 1er novembre 1988.

Par deux decisions du conseil d'administration de l'intercommunale, du 3juillet 1997, prenant effet le 31 juillet 1997 au soir, il fut decide (i)de supprimer l'emploi d'ouvrier d'entretien et (ii) de mettre M. M. endisponibilite par suppression d'emploi, en fixant par ailleurs sontraitement d'attente.

Selon le conseil d'administration de l'intercommunale, la premieredecision etait motivee par les besoins du service qui ne justifiaient plusson maintien, par l'insuffisance du volume de travail et par la necessitede travaux qui exigeaient des qualifications particulieres et, partant, lerecours à des tiers. La seconde decision etait justifiee par le faitqu'une reaffectation de M. M. n'etait pas possible etant donne qu'iln'existait pas d'emploi equivalent au sein de l'intercommunale.

Le 17 juillet 1997, Monsieur M., par l'intermediaire de son conseil,introduisit une reclamation devant l'autorite de tutelle.

Par arrete du 16 decembre 1997, le ministre des Affaires interieures et dela Fonction publique de la Region wallonne proroga au 12 janvier 1998 ledelai dans lequel il devait se prononcer en sa qualite d'autorite detutelle.

Enfin, par deux arretes du 12 janvier 1998, le ministre des Affairesinterieures et de la Fonction publique decidait, d'une part, de ne pasapprouver la decision du conseil d'administration relative à lasuppression de l'emploi de M. M. et, d'autre part, d'annuler les decisionsdu conseil quant à la mise en disponibilite par suppression d'emploi etfixant le traitement d'attente de m. M.

M. M. perc,ut son traitement jusqu'au 31 juillet 2002. Plus aucun paiementne sera alors effectue jusqu'au 30 septembre 2004. A partir du 1er octobre2004, M. M. sera remis au travail en qualite d'ouvrier, dans les fonctionsde « technicien de surface ». 3eme feuillet

3. Dans l'entretemps, par citation du 27 septembre 2002, devant letribunal du travail de Mons, Monsieur M. demanda la condamnation del'intercommunale au paiement des remunerations qu'il estimait devoir luirevenir depuis le mois d'aout 2002. Par jugement du 14 juin 2010, letribunal du travail de Mons accueillit cette demande.

L'intercommunale interjeta appel de la decision du premier juge parrequete du 18 octobre 2010.

Par arret du 23 avril 2012, la cour du travail de Mons dit l'appel del'intercommunale recevable et avant-dire-droit « [autorisa] M. O. M. àrapporter la preuve par toutes voies de droit, temoignage compris du faitprecis et pertinent suivant : « Le 27 janvier 1998, M. O. M. s'estpresente sur les lieux du travail à 9 heures pour s'entendre prononcerpar la Directrice de ne pas reprendre le travail tant que le Conseild'administration de Centre n'avait pas statue sur cette eventuelle reprisedu travail [...] ».

Dans ses motifs et par decision definitive, cet arret rejetal'argumentation par laquelle l'intercommunale faisait valoir que lesarretes pris en l'espece par l'autorite de tutelle etaient tardifs et nonregulierement motives et des lors illegaux en sorte qu'ils ne pouvaientetre appliques.

Enfin, par arret du 23 novembre 2015, la cour du travail de Mons ditl'appel de l'intercommunale non fonde et confirma le jugement a quo.

4. A l'appui du pourvoi qu'elle forme contre l'arret du 23 avril, lademanderesse a l'honneur d'invoquer le moyen unique suivant.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Dispositions legales violees

- Articles 6 et 1131 du Code civil ;

- Articles 2, 4, 9, 37, 38 et 39 du decret du conseil regional wallon du20 juillet 1989 organisant la tutelle sur les communes, les provinces etles intercommunales de la Region wallonne ;

4eme feuillet

- Article 4 de l'arrete de l'executif regional wallon du 28 septembre 1989reglant les mesures d'execution du decret du Conseil regional wallon du 20juillet 1989 organisant la tutelle sur les communes, les provinces et lesintercommunales de la Region wallonne ;

- Articles 149 et 159 de la Constitution ;

- Principe general du droit interdisant au juge d'appliquer une decision,notamment une norme, contraire à une disposition superieure ;

- Principe general du droit relatif aux renonciations à un droit auxtermes duquel les renonciations sont de stricte interpretation, ne sepresument pas et ne peuvent se deduire que de faits ou d'actes nonsusceptibles d'une autre interpretation.

Decisions et motifs critiques

1. L'arret attaque dit l'appel recevable et decide, avant de poursuivreplus avant l'examen de son fondement, la tenue d'enquetes.

Il decide toutefois dans ses motifs que les arretes ministeriels des 12janvier 1998 refusant d'approuver la deliberation du conseild'administration de la demanderesse du 3 juillet 1997, qui avait decide desupprimer l'emploi d'ouvrier d'entretien, et annulant la deliberation duconseil d'administration de la demanderesse de la meme date, qui avaitdecide de mettre le defendeur en disponibilite par suppression d'emploi,etaient reguliers et devaient des lors etre appliques.

2. L'arret fonde cette decision sur les considerations suivantes.

Il rappelle tout d'abord que :

« Le 1er novembre 1988, [le defendeur en cassation] est entre au servicede la SCRL Centre Intercommunal de Sante Arthur NAZE en qualite d'agentstatutaire au sein de laquelle il occupe le seul emploi d'ouvrierd'entretien.

Par deux decisions du 3 juillet 1997 prenant effet le 31 juillet 1997 ausoir, le conseil d'administration de l'intercommunale a : 5eme feuillet

- d'une part, decide de supprimer l'emploi d'ouvrier d'entretien,

- d'autre part, decide de mettre [le defendeur] en disponibilite parsuppression d'emploi.

A l'estime du conseil d'administration de l'intercommunale, la premieredecision se justifiait par le fait que :

- les besoins du service ne justifiaient plus son maintien,

- le volume du travail etait insuffisant,

- les travaux exigeant des qualifications particulieres necessitaient entout etat de cause le recours à des tiers.

Quant à la seconde decision, elle se justifiait par le fait qu'iln'existait pas d'emploi equivalent au sein de l'intercommunale permettantla reaffectation [du defendeur].

Ces deux deliberations ont ete soumises pour approbation et annulation auxservices de la Division de la tutelle du Ministere de la Region Wallonne.

Ces deliberations ont fait l'objet de deux arretes ministeriels date[s] du12 janvier 1998.

Le premier concernant la suppression de l'emploi d'ouvrier d'entretienenonce que l'autorite de tutelle refuse d'approuver la deliberation duconseil d'administration du 3 juillet 1997 en ce que :

- il a excede ses pouvoirs,

- il n'a pas motive sa decision conformement à la loi du 29 juillet 1991relative à la motivation formelle des actes administratifs,

- dans ses consequences la decision est susceptible de porter atteinte àune situation acquise legalement et legitimement.

Le second arrete ministeriel annule pour sa part la decision du conseild'administration concernant la mise en disponibilite par defaut d'emploien ce que :

- le conseil d'administration a excede ses pouvoirs dans la mesure ou lereglement organique du personnel du 10 octobre 1953 qui doit s'appliqueren l'absence de statut du personnel au sein de l'intercommunale ne prevoitpas la mise en disponibilite par suppression d'emploi,

- cette deliberation porte atteinte à une situation et à des droitsacquis legalement par [le defendeur] » (p. 2 in fine et p. 3).

6eme feuillet

Il ajoute que :

« La SCRL Centre Intercommunal de Sante Arthur NAZE fonde son appel :

- à titre principal, sur l'irregularite des arretes ministeriels du 12janvier 1998 lesquels sont intervenus tardivement et, de surcroit, enapplication d'un arrete de prolongation ne repondant ni au prescrit del'article 6 du decret du 20 juillet 1989 regissant l'exercice du pouvoirde tutelle, ni au prescrit de la loi du 29 aout 1991 relative à lamotivation formelle des actes administratifs. » (p. 5).

L'arret decide enfin que :

« Quant à l'irregularite des arretes ministeriels du 12 janvier 1998

Les deliberations du conseil d'administration de la SCRL CentreIntercommunal de Sante Arthur NAZE ont fait l'objet de deux arretesministeriels date du 12 janvier 1998, soit, compte tenu de la prorogationde delai rendue necessaire par le caractere incomplet des dossiersreceptionnes par l'autorite de tutelle en date du 28 octobre 1997, ledernier jour utile dont disposait l'autorite de tutelle pour statuer enapplication des articles 37, 38 [du decret du 20 juillet 1989] et 4 del'arrete de l'Executif Regional Wallon du 28 septembre 1989 reglant lesmesures d'execution du decret du Conseil Regional wallon du 28 septembre1989 organisant la tutelle sur les intercommunales de la Region Wallonne.» (p. 5 in fine et p. 6).

Il ajoute pour le surplus que :

« [...] l'autorite de tutelle a motive son arrete de prorogation du delaiimparti pour statuer comme suit.

`Considerant l'imperieuse necessite de parfaire l'information desdossiers, d'obtenir le proces-verbal du Conseil d'Administration du 19fevrier 1997, un certain nombre de renseignements et des dossierscomplets'.

La cour considere que cette motivation qui fait notamment etat ducaractere incomplet des dossiers que lui a transmis l'intercommunale etaitclaire, suffisante et par consequent adequate. » (p. 6). 7eme feuillet

Il termine en relevant, par ailleurs, que :

« - le conseil d'administration de l'intercommunale n'a pas forme derecours à l'encontre de ces deux arretes ministeriels ;

- l'intercommunale a maintenu le paiement du traitement de son agentjusqu'au 31 juillet 2002, laissant ainsi perdurer la relation de travailstatutaire ;

- l'intercommunale a remis [le defendeur] au travail en qualite d'ouvrierd'entretien dans une fonction de ``technicien de surface'' à partir du1er octobre 2004 sans que ce ne soit intervenu un nouvel engagementstatutaire ou la signature d'un contrat de travail, ce qui etablit que, àl'estime de l'intercommunale, la relation statutaire à l'egard de sonagent se poursuivait en raison des decisions de non-approbation etd'annulation de tutelle. » (p. 6).

3. L'arret attaque considere ainsi en substance, d'une part, que le delaide cinquante jours dans lequel l'autorite de tutelle devait - sous reserved'une prorogation reguliere intervenue dans ce delai - se prononcer surles deliberations du conseil d'administration de la demanderesse encassation du 3 juillet 1997 courait non à compter de la reception desactes sujets à tutelle d'approbation et d'annulation mais à compter dela reception d'un dossier complet, d'autre part, que l'arrete deprorogation du 16 decembre 1997 etait adequatement motive et, enfin, entoute hypothese, que la demanderesse aurait implicitement renonce à seprevaloir de l'illegalite des arretes des 16 decembre 1997 et 12 janvier1998 en raison notamment de leur tardivite à defaut d'avoir forme unrecours contre ceux-ci tout en maintenant temporairement jusqu'au 3juillet 2002 le payement de la remuneration du defendeur et en lereaffectant à un emploi à compter du 1er octobre 2004 sans nouvelengagement.

Griefs

Premiere branche

1. Aux termes de l'article 37 du decret du 20 juillet 1989 organisant latutelle sur les communes, les provinces et les intercommunales de laRegion wallonne : « l'Executif peut annuler l'acte d'une autorite del'intercommunale qui viole ou blesse l'interet general. Le delaid'annulation est de cinquante jours à partir de la reception de l'actepar l'Executif ». Aux termes par ailleurs de l'article 39 du meme decret,tout arrete de l'Executif pris en vertu de l'article 38 relatif à latutelle speciale d'approbation (portant notamment sur « le cadre et le

8eme feuillet

statut administratif des agents de l'intercommunale » (art. 38, 2DEG) etsur « le statut pecuniaire et les echelles de traitements des agents del'intercommunale » (art. 38, 3DEG)) « doit intervenir dans les cinquantejours de la reception de l'acte soumis à l'approbation ; [p]asse cedelai, l'acte, s'il n'a pas fait l'objet d'un refus d'approbation estexecutoire ».

2. Il suit, par ailleurs, de l'article 2 du decret precite du 20 juillet1989 que c'est « le jour de la reception de l'acte » qui constitue le «point de depart » de l'ensemble des delais prescrits par le decret,l'article 4 du decret du 20 fevrier 1989 n'autorisant l'autorite detutelle à proroger, par arrete, « le delai qui lui est imparti pourexercer son pouvoir » que « d'une duree maximale egale à la moitie dece delai » - soit s'agissant des delais prescrits aux articles 37 et 39,25 jours.

3. L'article 4 de l'arrete de l'Executif regional wallon du 28 septembre1989 vise au moyen ne deroge pas à cette regle.

Il se borne à enoncer que « Doivent etre transmis, dans les quinzejours, au Ministere de la Region wallonne ayant la tutelle dans sesattributions, les proces-verbaux approuves des seances de tous les organesde l'intercommunale ».

4. La demanderesse faisait valoir, en substance, dans ses conclusionsadditionnelles et de synthese prises avant l'arret attaque (pp. 7 à 10,sub 1 à 6, sous le titre IV.I) que des lors que l'autorite de tutelleavait ete saisie, par le defendeur, le 17 juillet 1997 d'un recours contrela deliberation du 3 juillet 1997, l'arrete de prorogation du delai decinquante jours vise aux articles 37 et 39 du decret du 20 juillet 1989pris le 16 decembre 1989 etait tardif en sorte que les arretes du 12janvier 1998 etaient eux-memes tardifs.

Elle soulignait à cet egard qu'ainsi que le Conseil d'Etat l'avait dejàdecide, rien n'interdisait de prendre comme point de depart du delai decinquante jours la reception de la decision litigieuse en annexe à lareclamation introduite par l'interesse, ni meme la reception d'un envoipar telex de cette decision par l'administration communale concerneepourvu que cette reception soit averee (p. 9, 1er alinea).

Elle ajoutait que :

« Des lors, il est evident que le point de depart du delai de 50 joursimparti à l'autorite pour statuer a commence avant la date à laquelle serefere la partie intimee, et donc avant le 27 octobre 1997. 9eme feuillet

Plus precisement encore, la concluante estime qu'on peut egalementraisonnablement admette que l'autorite de tutelle a receptionne laditereclamation et les actes attaques, le 22 juillet 1997, soit 3 joursouvrables apres l'envoi de la reclamation (article 53bis du Codejudiciaire).

Dans cette hypothese, l'autorite avait jusqu'au 10 septembre 1997 pour seprononcer.

Par consequent, lorsque l'autorite de tutelle a decide, le 16 decembre1997, de proroger le delai imparti pour statuer, il convient de constaterqu'elle etait devenue incompetente pour annuler ou approuver les actessoumis à sa censure puisque cette autorite n'a pas statue endeans ledelai de 50 jours qui lui etait pourtant imparti.

L'arrete de prorogation du 16 decembre 1997 est donc bien illegal, et parvoie de consequence, les arretes ministeriels du 12 janvier 1998 le sontegalement.

En effet, ces deux arrets se fondent sur l'arrete de prorogation illegal» (p. 9).

Elle soulignait à cet egard :

« La circonstance pretendue que l'autorite de tutelle ne serait pas enpossession du proces-verbal de la reunion du conseil d'administration dela concluante du 19 fevrier 1997 ne peut justifier que les delaisd'exercice de la tutelle à l'egard d'un acte pris le 3 juillet 1997soient proroges. » (p. 10, alinea 3).

« Enfin, la concluante rappellera, comme expose ci-avant, que lareception et la communication des proces-verbaux n'ont aucune importancesur le point de depart du delai de 50 jours imparti à l'autorite pourstatuer sur un recours en annulation . » (p. 10, alinea 5).

5. Il s'ensuit qu'en rejetant ce moyen d'illegalite que la demanderessededuisait de la tardivite de l'arrete de prorogation du 16 decembre 1997aux motifs que les arretes ministeriels dates du 12 janvier 1998 avaient« compte tenu de la prorogation de delai rendue necessaire par lecaractere incomplet des dossiers receptionnes par l'autorite de tutelle endate du 28 octobre 1997 » ete pris « le dernier jour utile dontdisposait l'autorite de tutelle pour statuer en application des articles37, 38 [du decret du 20 juillet 1989] et 4 de l'arrete de l'Executif de laRegion wallonne du 28 septembre 1989 reglant les mesures

10eme feuillet

d'execution du decret du Conseil Region wallonne du 20 juillet 1989organisant la tutelle sur les intercommunales de la Region wallonne »,l'arret attaque :

1DEG/ fait courir le delai des cinquante jours dans lequel l'autorite detutelle doit se prononcer en vertu des articles 37 et 39 du decret du 20juillet 1989 ou, à tout le moins, prendre un arrete de prorogationconformement à l'article 4 du meme decret, à compter du jour oul'autorite de tutelle a rec,u un dossier complet et non à compter du jourou il a rec,u l'acte sujet à tutelle d'annulation ou d'approbation commele prescrivent les articles 2, 37 et 39 du meme decret auquel l'arretroyal de l'Executif regional wallon du 28 septembre 1989 n'apporte aucunederogation (violation des articles 2, 4, 37, 38 et 39 du decret du 20juillet et de l'article 4 de l'arrete de l'Executif regional wallon du 28septembre 1989) ;

2DEG/ fait application des arretes du 16 decembre et 12 janvier 1998 alorsque ceux-ci etaient illegaux en raison de leur tardivite en sorte qu'ilsne pouvaient etre appliques en vertu de l'article 159 de la Constitutionet du principe general du droit interdisant au juge d'appliquer unedecision, notamment une norme, contraire à une norme superieure(violation dudit article 159 de la Constitution et dudit principe generaldu droit) ;

3DEG/ et des lors ne justifie pas legalement sa decision (violation detoutes les dispositions visees au moyen à l'exception de l'article 149 dela Constitution, des articles 6 et 11311 du Code civil et du principegeneral du droit relatif aux renonciations à un droit).

6. A tout le moins, à defaut d'avoir indique dans ses motifs la date àlaquelle l'autorite de tutelle avait rec,u copie des deliberations du 3juillet 1997 par lesquelles le conseil d'administration de la demanderesseavait decide, d'une part, de supprimer l'emploi d'ouvrier d'entretien et,d'autre part, de mettre le defendeur en disponibilite pour suppressiond'emploi, l'arret attaque met la Cour dans l'impossibilite d'exercer soncontrole de legalite au regard des articles 2, 4, 37, 38 et 39 du decretdu 20 juillet 1989 vises au moyen, de l'article 4 de l'arrete del'Executif regional wallon du 28 septembre 1989 et partant de l'article159 de la Constitution et du principe general du droit interdisant au juged'appliquer une decision, notamment une norme, contraire à unedisposition superieure en sorte qu'il n'est pas regulierement motive(violation de l'article 149 de la Constitution).

11eme feuillet

Deuxieme branche

7. La demanderesse faisait valoir dans ses conclusions additionnelles etde synthese prises avant l'arret attaque qu' « en outre [...] l'arrete deprorogation a meconnu l'article 4 du decret du 20 juillet 1989 precite,dans la mesure ou cet arret a proroge le delai de 27 jours, et non pas de25 jours comme le prevoit la disposition precitee » (p. 9, 8e alineaimmediatement avant le point 5).

8. L'arret attaque laisse ce moyen formule en conclusions sans reponse. Iln'est des lors pas regulierement motive (violation de l'article 149 de laConstitution).

Troisieme branche

9. D'une part, les articles 2, 4, 37, 38 et 39 du decret du 20 juilletorganisant la tutelle sur les communes, les provinces et lesintercommunales de la Region wallonne relevent de l'ordre public. Il enest de meme de l'article 159 de la Constitution et du principe general dudroit interdisant au juge d'appliquer une decision, notamment une norme,contraire à une disposition superieure.

10. D'autre part, celui qui estime etre lese par un acte administratifillegal peut, en regle, à son option, soit exercer les recoursadministratifs qui lui sont ouverts ou saisir le Conseil d'Etat d'unrecours en annulation, soit se prevaloir de l'illegalite de cet actedevant les cours et tribunaux de l'ordre judiciaire par voie d'action oud'exception en demandant qu'il ne soit pas applique conformement àl'article 159 de la Constitution et au principe general du droitinterdisant au juge d'appliquer une decision, notamment une norme,contraire à une disposition superieure.

11. Enfin, nul ne peut valablement renoncer au benefice d'une dispositiond'ordre public (articles 6 et 1131 du Code civil) et les renonciations àun droit sont de stricte interpretation, ne se presument pas et ne peuventse deduire que de faits ou actes non susceptibles d'une autreinterpretation (principe general relatif aux renonciations).

12eme feuillet

12. En l'espece, apres avoir rejete les moyens d'illegalite que lademanderesse formulait à l'endroit de l'arrete de prorogation du 16decembre 1997 et des arretes du 12 janvier 1998 refusant d'approuver lasuppression d'emploi d'ouvrier d'entretien et annulant la mise endisponibilite du defendeur, l'arret constate que, par ailleurs :

« - le conseil d'administration de l'intercommunale n'a pas forme derecours à l'encontre de ces deux arretes ministeriels ;

- l'intercommunale a maintenu le paiement du traitement de son agentjusqu'au 31 juillet 2002, laissant ainsi perdurer la relation de travailstatutaire ;

- l'intercommunale a remis [le defendeur] au travail en qualite d'ouvrierd'entretien dans une fonction de ``technicien de surface'' à partir du1er octobre 2004 sans que ce ne soit intervenu un nouvel engagementstatutaire ou la signature d'un contrat de travail, ce qui etablit que, àl'estime de l'intercommunale, la relation statutaire à l'egard de sonagent se poursuivait en raison des decisions de non-approbation etd'annulation de tutelle ».

Ce faisant il decide ainsi qu'en toute hypothese la demanderesse a renonceà se prevaloir de l'illegalite des arretes du 12 janvier 1998 enn'attaquant pas ceux-ci devant le Conseil d'Etat, en maintenanttemporairement la remuneration du defendeur maintenant ainsi une relationstatutaire et en le remettant, en 2004, dans une fonction de technicien desurface sans nouvel engagement statutaire ou contrat de travail.

13. En statuant de la sorte, l'arret attaque :

1DEG/ admet illegalement que la demanderesse ait pu valablement renoncerà son droit de se prevaloir de l'illegalite des arretes ministeriels des16 decembre et 12 janvier 1998 au regard des articles 2, 4, 37, 38 et 39du decret du 20 juillet 1989 vises au moyen qui, à l'instar de l'article159 de la Constitution et du principe general du droit interdisant au juged'appliquer une decision, notamment une norme, contraire à unedisposition superieure, sont d'ordre public (violation des articles 6 et1131 du Code civil, 2, 4, 37, 38 et 39 du decret du 20 juillet 1989 et del'article 159 de la Constitution ainsi que du principe general du droitinterdisant au juge d'appliquer une decision, notamment une norme) ; 13emefeuillet

2DEG/ deduit illegalement une renonciation de la demanderesse à son droitde se prevaloir de l'illegalite des arretes ministeriels des 16 decembreet 12 janvier 1998 par voie d'exception sur la base de l'article 159 de laConstitution de faits et d'actes qui n'impliquent pas necessairementpareille renonciation - l'absence de recours au Conseil d'Etat laissantintact le droit de se prevaloir de l'illegalite de ces actes devant lesjuridictions de l'ordre judiciaire sur pied de l'article 159 de laConstitution ; le versement temporaire d'une remuneration à un agentstatutaire en disponibilite pour suppression d'emploi pouvant s'expliquerpar le fait que la mise en disponibilite laisse subsister une relationstatutaire ; et la remise au travail du defendeur à compter du 1eroctobre 2004 sans nouvel engagement pouvant s'expliquer par des besoinsnouveaux et par la circonstance qu'un agent en disponibilite demeure unagent statutaire - (violation du principe general du droit relatif auxrenonciations à un droit aux termes duquel les renonciations à un droitsont de stricte interpretation, ne se presument pas et ne peuvent sededuire que de faits ou d'actes non susceptibles d'une autreinterpretation) ;

3DEG/ et des lors ne justifie pas legalement sa decision (violation detoutes les dispositions visees au moyen à l'exception de l'article 149 dela Constitution).

Developpements

1) Premiere branche

Aux termes de l'article 2 du decret du 20 juillet 1989, les delais prevuspour permettre à l'autorite de tutelle pour se prononcer courent àcompter du jour de « la reception de l'acte » et non « le jour de lareception par l'autorite de tutelle de l'acte accompagne des piecesjustificatives » comme le prevoit aujourd'hui l'article L3113-1, alinea1er, du Code wallon de la democratie locale et de la decentralisation.

Le Conseil d'Etat a souligne à cet egard que le delai pouvait prendrecours à la reception de l'acte en annexe à une reclamation adressee parl'interesse à l'autorite de tutelle (CE 20 janvier 2000, no 84.776,Chavet/ Ville de Charleroi). 14eme feuillet

L'arret attaque, qui se fonde etrangement sur l'arrete de l'Executifregional wallon du 28 septembre 1989, meconnait ces principes en faisantcourir les delais des articles 37 et 39 du decret wallon du 20 juillet1989 à compter de la reception d'un dossier complet.

A tout le moins, à defaut d'indiquer dans ses motifs la date à laquellel'autorite de tutelle a rec,u l'acte litigieux, l'arret ne permet pas àVotre Cour d'exercer son controle de legalite (voy. sur ce point, Cass.,19 octobre 2000, Pas., 2000, nDEG 562 ; Cass., 7 decembre 2001, Pas.,2001, nDEG 681).

2) Deuxieme branche

La deuxieme branche ne requiert pas de developpement.

3) Troisieme branche

Sur le principe general du droit relatif aux renonciations à un droit :Cass., 24 decembre 2009, Pas., 2009, nDEG 788 ; Cass., 9 novembre 2013,S.2013.42.N ; Cass., 6 decembre 2014, C.2014.121. N.

4) Annulation par voie de consequence de l'arret de la cour du travail deMons du 23 novembre 2015

Il convient d'observer enfin que la cassation de l'arret attaque du 23avril 2012 doit entrainer l'annulation de l'arret de la cour du travail deMons du 23 novembre 2015 qui en est la suite.

*

* *

* 15eme feuillet

PAR CES CONSIDERATIONS,

l'avocat à la Cour de cassation soussigne, pour la demanderesse encassation, conclut, Messieurs, Mesdames, qu'il vous plaise, casser l'arretattaque, ordonner que mention de votre arret soit faite en marge del'arret casse, annuler par voie de consequence l'arret de la cour dutravail de Mons du 23 novembre 2015 qui en est la suite, renvoyer la causedevant une autre cour d'appel et statuer sur les depens comme de droit.

Bruxelles, le 24 juin 2016

Pour la demanderesse en cassation,

son conseil,

Paul Alain Foriers

Piece jointe :

Il sera joint à la presente requete en cassation, lors de son depot augreffe de la Cour, l'original de l'exploit constatant sa signification audefendeur en cassation.

30 JANVIER 2017 S.16.0041.F/4

Requete/15


Synthèse
Numéro d'arrêt : S.16.0041.F
Date de la décision : 30/01/2017

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2017-01-30;s.16.0041.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award