Cour de cassation de Belgique
Arret
NDEG S.15.0068.F
F. C.,
demandeur en cassation,
represente par Maitre Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Liege, rue de Chaudfontaine, 11,ou il est fait election de domicile,
contre
FONDS DES MALADIES PROFESSIONNELLES, etablissement public dont le siegeest etabli à Saint-Josse-ten-Noode, avenue de l'Astronomie, 1,
defendeur en cassation,
represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.
I. La procedure devant la Cour
* Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 24 juin2014 par la cour du travail de Mons.
* Le 10 novembre 2016, l'avocat general Jean Marie Genicot a depose desconclusions au greffe.
* Le conseiller Mireille Delange a fait rapport et l'avocat general JeanMarie Genicot a ete entendu en ses conclusions.
* II. Le moyen de cassation
* Dans la requete en cassation, jointe au present arret en copiecertifiee conforme, le demandeur presente un moyen.
III. La decision de la Cour
* * Sur le moyen :
* * Quant à la premiere branche :
* 1. Aux termes de l'article 807 du Code judiciaire, la demande dont lejuge est saisi peut etre etendue ou modifiee, si les conclusionsnouvelles, contradictoirement prises, sont fondees sur un fait ou un acteinvoque dans la citation, meme si leur qualification juridique estdifferente.
L'arret constate que le demandeur a conteste devant le tribunal du travailla decision du Fonds des maladies professionnelles rejetant sa demande dereparation des dommages resultant de la maladie figurant sous le code1.605.03 de l'arrete royal du 28 mars 1969 dressant la liste des maladiesprofessionnelles donnant lieu à reparation et fixant les criteresauxquels doit repondre l'exposition au risque professionnel pour certainesd'entre elles, pris en execution de l'article 30 des lois relatives à laprevention des maladies professionnelles et à la reparation des dommagesresultant de celles-ci, coordonnees le 3 juin 1970.
Le code 1.605.03 precite vise le syndrome radiculaire objective de typesciatique, de la queue de cheval ou du canal lombaire etroit, consecutifà une hernie discale degenerative ou à une spondylose-spondylarthrosedegenerative precoce au niveau des vertebres L4-L5 ou L5-S1, provoqueesous certaines conditions par le port de charges lourdes ou par desvibrations mecaniques transmises au corps par le siege.
En indiquant que la maladie pour laquelle il demandait une indemnisationfigure sur la liste des maladies professionnelles sous ce code, ledemandeur donnait une qualification juridique aux faits qu'il invoquaitdevant le tribunal du travail.
L'arret, qui considere que le « fait invoque dans la citation [pourl'application de l'article 807 du Code judiciaire] est l'existence de lamaladie professionnelle designee [comme etant celle figurant sous le code1.605.03], qui justifie la demande de reparation », viole cettedisposition.
2. En vertu de l'article 2 du Code judiciaire, les regles enoncees dans cecode s'appliquent à toutes les procedures, sauf lorsque celles-ci sontregies par des dispositions legales non expressement abrogees ou par desprincipes de droit dont l'application n'est pas compatible avec celle desdispositions dudit code.
D'une part, les articles 52 et 53 des lois coordonnees, qui disposent quele Fonds des maladies professionnelles statue sur toutes demandes dereparation ainsi que sur toutes demandes de revision des indemnitesacquises et que les contestations concernant les decisions du Fonds sontde la competence du tribunal du travail, et les dispositions de l'arreteroyal du 26 septembre 1996 determinant la maniere dont sont introduites etinstruites par le Fonds des maladies professionnelles les demandes dereparation et de revision des indemnites acquises, specialement lesarticles 8bis et 9 de cet arrete royal, aux termes desquels le Fondslimite l'examen de la demande à l'affection pour laquelle elle estintroduite et les decisions reconnaissant une maladie au sens de l'article30bis des lois coordonnees sont prises apres examen de la demande par lacommission systeme ouvert instituee au sein du Fonds, n'enoncent aucuneregle regissant les demandes incidentes prevues par l'article 807 du Codejudiciaire et il n'existe pas, en matiere de reparation des dommagesresultant des maladies professionnelles, de « principe du prealableadministratif » ou d'autre principe de droit, dont l'application seraitincompatible avec cet article.
L'article 52 et les dispositions de l'arrete royal precites se bornent àdesigner l'autorite administrative chargee de statuer sur les demandesd'indemnisation introduites par la victime d'une maladie professionnelle,ses ayants droit ou mandataires et à determiner les modalitesd'introduction et d'instruction de ces demandes, sans imposer que toutedemande nouvelle formee devant la juridiction du travail saisie, en vertudes articles 579, 1DEG, du Code judiciaire et 53 des lois coordonnees,d'une contestation sur le droit à l'indemnisation soit soumise à uneprocedure administrative prealable.
D'autre part, le juge doit statuer sur les demandes dont il est saisi,telles qu'elles ont ete legalement etendues ou modifiees conformement àl'article 807 du Code judiciaire.
3. L'arret constate que, apres avoir saisi le tribunal du travail de lacontestation de la decision precitee du Fonds des maladiesprofessionnelles, le demandeur a etendu sa demande à la reparation d'unemaladie ne figurant pas sur la liste prevue par l'article 30 mais donnantlieu à reparation en vertu de l'article 30bis des lois coordonnees parcequ'elle trouve sa cause determinante et directe dans l'exercice de laprofession.
En rejetant cette demande incidente aux motifs, qu'il deduit des articles52 et 53 des lois coordonnees et des dispositions de l'arrete royal du 26septembre 1996, specialement des articles 8bis et 9, que « le respect duprealable administratif », defini comme « l'obligation pour lejusticiable de se soumettre à la procedure administrative prevue par [leslois coordonnees] prealablement à la procedure judiciaire, la victimedevant introduire une demande aupres du Fonds des maladiesprofessionnelles et attendre la notification de la decision administrativeavant toute action devant le tribunal du travail », « s'impose [...]pour les demandes [...] incidentes formees au cours de [l'] instance » etque « l'article 807 du Code judiciaire ne peut faire obstacle au principedu prealable administratif », l'arret viole l'ensemble de cesdispositions.
4. Le moyen, en cette branche, est fonde.
Par ces motifs,
* La Cour
* * Casse l'arret attaque ;
* Ordonne que mention du present arret sera faite en marge de l'arretcasse ;
* Vu l'article 53, alinea 2, des lois coordonnees le 3 juin 1970,condamne le defendeur aux depens ;
* Renvoie la cause devant la cour du travail de Bruxelles.
Les depens taxes à la somme de cent trente-sept euros nonante-cinqcentimes envers la partie demanderesse.
Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillers KoenMestdagh, Mireille Delange, Antoine Lievens et Eric de Formanoir, etprononce en audience publique du douze decembre deux mille seize par lepresident de section Christian Storck, en presence de l'avocat generalJean Marie Genicot, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.
+--------------------------------------------+
| L. Body | E. de Formanoir | A. Lievens |
|------------+-----------------+-------------|
| M. Delange | K. Mestdagh | Chr. Storck |
+--------------------------------------------+
* Requete
1er feuillet
REQUETE EN CASSATION
_________________________
Pour : M. F. C.,
demandeur,
assiste et represente par Me Jacqueline Oosterbosch, avocate à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à 4020 Liege, rue de Chaudfontaine,11, ou il est fait election de domicile,
Contre :
LE FONDS DES MALADIES PROFESSIONNELLES, en abrege F.M.P., dont le siegeest etabli à 1210 Bruxelles, avenue de l'Astronomie, 1,
defendeur,
A Messieurs les Premier President et Presidents, Mesdames et Messieurs lesConseillers composant la Cour de cassation,
Messieurs, Mesdames,
Le demandeur a l'honneur de deferer à votre censure l'arret prononce le24 juin 2014 par la troisieme chambre de la cour du travail de Mons (R.G.nDEG 2013/AM/401).
2eme feuillet
Les faits et antecedents de la cause, tels qu'ils ressortent des piecesauxquelles votre Cour peut avoir egard, peuvent etre brievement resumescomme suit.
Le 31 juillet 2008, le demandeur a introduit aupres du defendeur unedemande d'indemnisation des suites d'une maladie figurant sur la liste desmaladies professionnelles dressee par l'arrete royal du 28 mars 1969 sousle code 1.605.03, à savoir :
"Syndrome mono ou polyradiculaire objective de type sciatique, syndrome dela queue de cheval ou syndrome du canal lombaire etroit :
- consecutif à une hernie discale degenerative provoquee par le port decharges lourdes ou par des vibrations mecaniques transmises au corps parle siege, à la condition que le syndrome radiculaire se produise pendantl'exposition au risque professionnel ou, au plus tard, un an apres la finde cette exposition,
ou
- consecutif à une spondylose-spondylarthrose degenerative precoce auniveau L4-L5 ou L5-S1, provoquee par le port de charges lourdes ou par desvibrations mecaniques transmises au corps par le siege".
Par decision notifiee le 17 novembre 2009, le defendeur a rejete cettedemande au motif que le demandeur n'avait pas ete expose au risque de lamaladie professionnelle invoquee pendant toute ou partie de la periode aucours de laquelle il appartenait à une des categories de personnes viseesà l'article 2 des lois coordonnees du 3 juin 1970.
Par exploit du 25 juin 2010, le demandeur a conteste cette decision devantle tribunal du travail de Charleroi. Dans cette citation, il a sollicitela reconnaissance de la maladie professionnelle visee sous le code 1605.9de la liste. Il a aussi reproduit un rapport du Pr C. du 24 decembre 2009ayant diagnostique "au point de vue articulaire 15.02.2008 syndromedorso-lombaire avec irradiation hernie discale L4-L5 DR" et releve que ledemandeur avait exerce des professions lourdes avec port de charges, entant d'ouvrier chez C. pendant quatre ans puisclarckiste-tourneur-menuisier chez A. Il a precise que ce rapportindiquait l'existence d'un "debord discal survenu lors des activites detourneur". Il a enfin invoque que, dans son formulaire d'evaluation de
3eme feuillet
sante du 9 janvier 2009, ADHESIA avait preconise dans le cadre desrecommandations et propositions du conseiller en prevention medecin dutravail concernant les conditions d'occupation et d'amenagement et lesmesures de prevention concernant le poste de travail ou l'activite :"Eviter si possible la manutention manuelle de charges lourdes et laposition debout statique prolongee."
Par un jugement du 10 mars 2011, le tribunal a designe un expert avec unemission portant sur les conditions d'application de la maladieprofessionnelle portant le code 1605.03.
Le 6 janvier 2012, l'expert-medecin a depose un rapport concluant que ledemandeur a ete soumis au risque d'une arthrose lombaire objectivee àl'age de 49 ans et qu'il a presente une arthrose ayant entraine unelombo-cruralgie mais que cette arthrose n'a entraine ni symptomessubjectifs ni signes objectifs evocateurs d'un syndrome mono oupoly-radiculaire correspondant à la definition de la maladieprofessionnelle dont la reparation etait poursuivie.
A la suite de ce rapport, le demandeur a, par des conclusionsadditionnelles apres expertise prises devant le tribunal, introduit unedemande nouvelle basee sur l'article 807 du Code judiciaire et demande autribunal d'ordonner un complement d'expertise afin que l'expert seprononce egalement dans le cadre du systeme ouvert. Il s'est fonde à cetegard sur ce que l'expert avait mis en evidence l'existence de lesionslombaires et avait confirme qu'il exerc,ait un travail lourd dans le cadreduquel il devait porter de lourdes charges. Il a soutenu que ces faits,mentionnes tant en termes de citation que dans la demande initiale,justifiaient le complement d'expertise.
Par jugement du 12 septembre 2013, la premiere chambre du tribunal adecide que la demande nouvelle ne portant pas sur des faits mentionnesdans la demande originaire, l'article 807 du Code judiciaire ne pouvaitrecevoir application en l'espece et a deboute le demandeur de sa demandeetendue. Les conclusions du rapport d'expertise, qui ne faisaient l'objetd'aucune contestation des parties, ont ete enterinees.
4eme feuillet
Le demandeur a depose à l'encontre de ce jugement une requete d'appeldans laquelle il invitait la cour du travail à ordonner un complementd'expertise afin de permettre à l'expert de se prononcer sur l'existenced'une maladie professionnelle hors liste etant une arthrose lombaire ayantentraine une lombo-cruralgie mais n'ayant pas eu les consequencesmedicales visees expressement au code 1.605.03.
L'arret attaque dit l'appel non fonde et confirme le jugement entrepris entoutes ses dispositions.
A l'appui du pourvoi qu'il forme contre cette decision, le demandeurpropose le moyen unique de cassation suivant.
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Dispositions violees
- les articles 105, 144, 145 et 159 de la Constitution,
- les articles 2, 579, 1DEG, 774, 807, 808 et 1042 du Code judiciaire,
- les articles 52 et 53 des lois coordonnees du 3 juin 1970 relatives àla prevention des maladies
professionnelles et à la reparation des dommages resultant de celles-ci,
- les articles 2, 8bis et 9, de l'arrete royal du 26 septembre 1996determinant la maniere dont sont
introduites et instruites par le Fonds des Maladies Professionnelles, lesdemandes de reparation et de
revision des indemnites acquises,
- les articles 1319, 1320 et 1322, du Code civil,
- le principe general du droit que le juge est tenu de trancher le litigeconformement aux regles juridiques qui lui sont applicables, consacrenotamment par l'article 774 du Code judiciaire,
5eme feuillet
- le principe general du droit consacre par l'article 159 de laConstitution, selon lequel le juge ne peut
appliquer une norme qui viole une disposition superieure ou qui excede lespouvoirs ou competences
qui peuvent etre exerces par l'auteur de la norme.
Decision critiquee
L'arret attaque confirme en toutes ses dispositions le jugement dont appelayant decide qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à la demandenouvelle du demandeur et enterine le rapport d'expertise, aux motifs que :
"(Le demandeur) a introduit le 31 juillet 2008 une demande d'indemnisationdes suites d'une maladie figurant sur la liste des maladiesprofessionnelles dressee par l'arrete royal du 28 mars 1969 sous le code1.605.03, à savoir: « Syndrome mono ou polyradiculaire objective de typesciatique, syndrome de la queue de cheval ou syndrome du canal lombaireetroit:
- consecutif à une hernie discale degenerative provoquee par le port decharges lourdes ou par des vibrations mecaniques transmises au corps parle siege, à la condition que le syndrome radiculaire se produise pendantl'exposition au risque professionnel ou} au plus tard} un an apres la finde cette exposition, ou
- consecutif à une spondylose-spondylarthrose degenerative precoce auniveau L4-LS ou LS-S1, provoquee par le port de charges lourdes ou par desvibrations mecaniques transmises au corps par le siege ».
Par decision notifiee le 17 novembre 2009, le (defendeur) a rejete cettedemande au motif que l'interesse n'avait pas ete expose au risque de lamaladie professionnelle invoquee pendant tout ou partie de la periode aucours de laquelle il appartenait à une des categories de personnes viseesà l'article 2 des lois coordonnees du 3 juin 1970.
Par citation du 25 juin 2010, (le demandeur) a conteste cette decisiondevant le
tribunal du travail de Charleroi.
Par jugement prononce le 10 mars 2011, le premier juge a rec,u la demandeet a
designe un expert en la personne du docteur D. F. L., charge de lamission:
- de reconstituer la carriere professionnelle du (demandeur);
- de fixer les periodes ou il a ete professionnellement amene à porterdes charges lourdes;
- de dire si (le demandeur) a ete soumis au risque de la maladieprofessionnelle portant le code 1.605.03 ;
6eme feuillet
- dans l'affirmative, de dire si l'interesse souffre de la maladieprofessionnelle portant le code 1.605.03.
Au terme de son rapport depose le 6 janvier 2012, le docteur D.F L. aconclu
comme suit:
« ( ..... )
2. Il est admis que (le demandeur) a ete professionnellement amene àporter des
charges lourdes pendant la periode de 1976 à 1988 :
(Le demandeur) assumait des activites professionnelles de fabrication enserie de pieces lourdes en acier dont le poids variait de plusieurs kilosà 50 kg voire 100 kg, sans aide au levage.
De 2000 à 2007, (le demandeur) n'etait plus soumis aux memes contraintesparce qu'il avait à sa disposition des equipements d'aide au levage ainsique l'aide de ses collegues avant d'etre affecte aux travauxadministratifs.
3. Exposition au risque de la maladie professionnelle portant le code1.605.03 :
Il est admis que (le demandeur) avait ete soumis au risque d'une arthroselombaire objectivee à l'age de 49 ans;
Cette arthrose n'a pas entraine ni symptomes subjectifs ni signesobjectifs evocateurs d'un syndrome mono-ou poly-radiculaire qui soit
- consecutif à une hernie discale degenerative provoquee par le port decharges lourdes ou par des vibrations mecaniques transmises au corps parle siege, à la condition que le syndrome radiculaire se produise pendantl'exposition au risque professionnel ou, au plus tard, un an apres la finde cette exposition, ou
- consecutif à une spondylose-spondylarthrose degenerative precoce auniveau L4-L5 ou L5-51, provoquee par le port de charges lourdes ou par desvibrations mecaniques transmises au corps par le siege des vibrationsmecaniques ».
Par jugement prononce le 12 septembre 2013, le premier juge a deboute (ledemandeur) de sa demande et a confirme la decision administrative du 17novembre 2009. Il a enterine le rapport d'expertise et a par ailleursrejete l'extension de demande formee en cours d'instance par (ledemandeur), lequel entendait que l'expert se prononce, dans le cadre d'uncomplement d'expertise, sur l'existence d'une maladie hors liste. Lepremier juge a considere que (le demandeur) devait introduire une nouvelledemande s'il revendiquait l'indemnisation d'une telle maladie, et ce enraison du « prealable administratif ».
OBJET DE L'APPEL
(Le demandeur) a releve appel du jugement prononce le 12 septembre 2013.Il demande à la cour d'ordonner un complement d'expertise afin quel'expert puisse se prononcer sur l'existence d'une maladie professionnellehors liste et de condamner le (defendeur) à lui payer les indemniteslegales
7eme feuillet
calculees à tout le moins à partir du 31 juillet 2008 sous toutesreserves, sur base d'un taux d'IPP de 20% sous toutes reserves compte nontenu des facteurs socio economiques, en fonction d'un salaire de baseplafond 2009 de 36.809,73 EUR, outre les interets au taux legal à daterde l'exigibilite des indemnites, ainsi que les frais et depens des deuxinstances.
DECISION
(...)
Fondement
1. L'article 52 des lois relatives à la reparation des dommages resultantdes maladies professionnelles, coordonnees le 3 juin 1970, dispose que ledefendeur statue sur toutes demandes de reparation ainsi que sur toutesdemandes de revision des indemnites acquises, ces demandes etant adresseespar ecrit et instruites de la maniere determinee par le Roi.
L'arrete royal du 26 septembre 1996 determine la maniere dont sontintroduites et instruites les demandes de reparation et de revision desindemnites.
L'article 53 des lois coordonnees le 3 juin 1970 dispose que lescontestations concernant les decisions du defendeur sont de la competencedu tribunal du travail.
2. Par « prealable administratif», il faut entendre l'obligation pour lejusticiable de se soumettre à la procedure administrative prevue par laloi prealablement à la procedure judiciaire. La victime d'une maladieprofessionnelle doit donc introduire une demande aupres du (defendeur) etattendre la notification de la decision administrative avant toute actiondevant le tribunal du travail.
En consequence une demande de reparation ne peut etre portee directementdevant le juge, à peine d'etre declaree irrecevable
L'article 8bis de l'arrete royal du 26 septembre 1996 dispose que ledefendeur limite l'examen de la demande à l'affection pour laquellecelle-ci est introduite.
3. En l'espece, la demande avait pour objet la reparation des suites de lamaladie professionnelle figurant sur la liste des maladiesprofessionnelles dressee par l'arrete royal du 28 mars 1969 sous le code1.605.03. Dans le formulaire 503 F, le medecin conseil (du demandeur) aindique, sous la rubrique « Diagnostic (et localisation si necessaire) »: Hernie discale L4 L5 droite et a repondu oui à la question «Pensez-vous que la maladie figure sur la liste belge des maladiesprofessionnelles? », en indiquant clairement le code 1.605.03. C'est dansce cadre que l'expert judiciaire a ete invite à se prononcer par jugementdu 10 mars 2011.
4. (Le demandeur) ne conteste pas les conclusions de l'expert en tant quetelles, mais entend soumettre aux juridictions du travail la question del'indemnisation d'une maladie hors liste, non visee par sa demande.
8eme feuillet
Le respect du prealable administratif s'impose, non seulement pour lademande introductive d'instance, mais egalement pour les demandesincidentes formees au cours de cette instance.
5. (Le demandeur) soutient que sa demande nouvelle doit etre admise surbase de l'article 807 du Code judiciaire.
La Cour de cassation a, par deux arrets des 8 decembre 1980 et 18 juin1981, fait application de cette disposition en matiere de maladieprofessionnelle: le juge doit statuer sur les demandes dont il est saisi,telles qu'elles ont ete legalement modifiees conformement aux articles 807et 808 du Code judiciaire, en tenant compte des faits survenus en coursd'instance et qui ont une incidence sur le litige. L'article 52 des loiscoordonnees du 3 juin 1970 qui dispose que le FMP statue sur toutesdemandes en reparation et en revision ainsi que l'arrete royal quidetermine la maniere dont les demandes sont introduites n'enoncent aucuneregle regissant les demandes incidentes prevues par les article 807 et 808du Code judiciaire et il n'existe pas, en matiere de reparation desdommages resultant des maladies professionnelles, de principe de droitdont l'application serait incompatible avec ces articles (Cass., 8decembre 1980, Pas. 1981,399; Cass., 15 juin 1981, Pas. 1981, 1175).
Il convient de relever que dans ces deux causes, le fait nouveauconsistait dans l'aggravation de l'etat de la victime, constateeposterieurement à la citation, à la faveur d'une expertise judiciaire.Il ne s'agissait pas d'une nouvelle demande visant à voir reconnaitre unemaladie professionnelle autre que celle qui avait fait l'objet de lademande initiale.
En l'espece l'article 807 du Code judiciaire ne trouve pas à s'appliquer.La demande nouvelle n'est pas fondee sur un fait invoque dans la citation,ce fait etant l'existence de la maladie professionnelle designee, quijustifie la demande de reparation. l'article 807 ne peut faire obstacle auprincipe du prealable administratif, et ce d'autant plus que l'examend'une demande en reparation est instruite differemment par le Fonds selonqu'il s'agit d'une maladie figurant sur la liste des maladiesprofessionnelles dressee par l'arrete royal du 28 mars 1969 ou d'unemaladie visee par l'article 30bis des lois, coordonnees du 3 juin 1970.Dans ce dernier cas, les decisions reconnaissant une maladie au sens decet article sont prises apres examen de la demande par la « commissionsysteme ouvert » instituee au sein du Fonds (article 9 de L'arrete royaldu 26 septembre 1996).
6. (Le demandeur) doit, s'il entend obtenir indemnisation des suites d'unemaladie visee à l'article 30bis des lois coordonnees le 3 juin 1970,introduire une demande aupres du F.M.P.
L'appel n'est pas fonde".
9eme feuillet
Griefs
Premiere branche
En vertu de l'article 2 du Code judiciaire, ce code s'applique à toutesles procedures judiciaires sauf lorsque celles-ci sont regies par lesdispositions legales non expressement abrogees ou par des principes dudroit dont l'application n'est pas compatible avec les dispositions duditcode.
Il n'existe, en matiere de maladie professionnelle, aucune dispositionlegale ou principe general du droit qui s'opposerait à l'application desdispositions des articles 807 et 808 du Code judiciaire, auxquelsl'article 1042 du Code judiciaire renvoie pour la procedure en degred'appel.
L'article 52 des lois coordonnees prevoit que le defendeur statue surtoute demande de reparation et que les demandes lui sont adressees parecrit et sont instruites de la maniere determinee par le Roi. Il consacreainsi le prealable administratif defini comme l'obligation pour la victimede se soumettre à la procedure administrative prevue.
L'arrete royal du 26 septembre 1996 se borne à determiner, comme le Roien a rec,u la mission, les modalites de l'instruction administrative de lademande par le FMP. Son article 2 prevoit que, pour etre recevable, lademande administrative doit etre faite notamment au moyen de formulairesdont le modele est etabli par le Comite de gestion, de meme que la demandedoit etre completee, accompagnee des pieces justificatives lorsqu'ellessont demandees et qu'elle doit etre certifiee exacte, datee et signee parla victime. Ses articles 8bis et 9 regissent l'instruction administrativedu dossier et non son instruction judiciaire.
En vertu des articles 144 et 145 de la Constitution, les contestations quiont pour objet des droits sont du ressort des tribunaux. En vertu desl'articles 579, 1DEG, du Code judiciaire et 53 des lois coordonnees du 3juin 1970, le tribunal du travail connait des demandes relatives à lareparation des dommages resultant des maladies professionnelles.
10eme feuillet
Lorsque l'assure social qui pretend à la reparation d'une maladieprofessionnelle a introduit aupres du defendeur une demande sur laquellecelui-ci a ou aurait du statuer, et que cet assure social porte lacontestation devant le tribunal du travail, le lien entre la procedureadministrative et la procedure judiciaire est rompu. Le role desjuridictions du travail ne se limite pas à la verification de la legalitede la decision au moment ou elle a ete prise et en fonction des elementsqui ont ete fournis au defendeur dans le cadre de la procedureadministrative. Chargees de statuer sur le contentieux des droitssubjectifs de l'assure social à la reparation d'une maladieprofessionnelle, les juridictions du travail sont tenues de respecter lesregles du Code judiciaire en ce compris son article 807.
L'assure social qui a, dans sa citation, demande la reparation d'unemaladie professionnelle de la liste au sens de l'article 30 des loiscoordonnees du 3 juin 1970, peut ainsi inviter les juridictions dutravail, si elles devaient decider qu'il ne remplit pas les conditionsrequises pour une indemnisation sur la base de cet article 30, à verifiers'il ne remplit pas les conditions d'une indemnisation dans le systemeouvert de l'article 30bis des lois coordonnees.
Pour qu'un fait soit invoque dans la citation au sens des articles 807 et808 du Code judiciaire, il n'est pas requis que la victime ait tire lesconsequences juridiques qu'elle aurait pu en tirer. Il s'en deduit que leou les fait(s) invoque(s) au sens de cette disposition ne se confond(ent)pas avec le fondement juridique de la pretention à la reparation donneedans la citation.
Le devoir du juge est d'examiner in concreto quels sont le ou les fait(s)invoque(s) et s'il(s) est (sont) susceptible(s), avec d'autres et aubesoin en invitant un expert à l'eclairer, de permettre une indemnisationdans le systeme ouvert. Le principe general du droit vise au moyen que lejuge est tenu de trancher le litige conformement aux regles juridiques quilui sont applicables confirme cette obligation des juridictions dutravail.
L'arret attaque ne verifie pas in concreto quels sont les faits invoquesdans la citation. Il pose en regle que "le respect du prealableadministratif s'impose (...) egalement pour les demandes incidentesformees au cours de (l')instance". Il decide "qu'en l'espece l'article 807du Code judiciaire ne trouve pas à s'appliquer" au motif que le faitinvoque dans la citation est "l'existence de la maladie professionnelledesignee qui justifie la demande de reparation".
11eme feuillet
Il viole, partant, les articles 144 et 145 de la Constitution, 52 et 53des lois coordonnees du 3 juin 1970, 579, 1DEG,807, 808 et 1042, du Codejudiciaire ainsi que le principal general du droit qui impose au juge detrancher le litige conformement aux regles juridiques qui lui sontapplicables et l'article 774 du Code judiciaire qui consacre ce principe.
Deuxieme branche
En vertu de l'article 105 de la Constitution, le pouvoir reglementaired'attribution du Roi est subordonne à l'existence prealable d'une loid'habilitation et ne peut s'exercer que dans les limites de cettehabilitation.
En vertu de l'article 159 de la Constitution qui consacre le principegeneral du droit vise au moyen, le juge doit refuser d'appliquer lesdispositions d'un arrete royal par lesquelles le Roi aurait excede lescompetences qui lui ont ete attribuees.
L'article 52 des lois coordonnees confere uniquement au Roi le pouvoir dedeterminer la maniere dont les demandes administratives sont instruitesaupres du defendeur et ne l'habilite pas à deroger aux regles quiregissent l'instruction judiciaire de la contestation et plusparticulierement à l'article 807 du Code judicaire.
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il decide que le Roi a pulegalement, par l'arrete royal du 26 septembre 1976 et plus specialementses articles 2, 8bis et 9, interdire au juge d'accueillir une demandenouvelle introduite dans les conditions de l'article 807 du Codejudiciaire visant à modifier le fondement juridique initialement donne àsa pretention à reparation d'une maladie professionnelle - soit l'article30 des lois coordonnees - en se prevalant d'un droit à la reparationd'une maladie hors liste au sens de l'article 30bis desdites lois, ilapplique un arrete royal par lequel le Roi a excede les competences quilui etaient attribuees alors qu'il aurait du refuser d'appliquer cesdispositions.
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Il viole, partant, les articles 105 et 159 de la Constitution et 52 deslois coordonnees du 3 juin 1970 ainsi que le principe general du droitvise au moyen selon lequel le juge ne peut appliquer une norme qui violeune disposition superieure ou qui excede les pouvoirs ou competences quipeuvent etre exerces par l'auteur de la norme.
Troisieme branche
Dans sa citation du 25 juin 2000, le demandeur a invoque un rapport du PrC. du 24 decembre 2009 qui a souligne : "Au point de vue articulaire15.02.2008 syndrome dorso-lombaire avec irradiation hernie discale L4-L5DR" (...) Actuellement, ses plaintes consistent en deborddisco-osteopathique à large rayon de courbure intraforaminal droit enL4-L5 mettant à l'etroit le trajet de la racine L4 homo-laterale.discopathie ayant beneficie d'infiltrations peridurales entre fin 2007 etdebut 2008. Professions lourdes avec port de charges exercees : ouvrierchez C. pendant quatre ans, clarckiste-tourneur-menuisier chez A. Deborddiscal survenu lors des activites de tourneur. Invalidite estimee de 20%(...)" (p. 1).
La citation precise egalement que "dans son formulaire d'evaluation desante du 09.01.2009, ADHESIA preconise dans le cadre des recommandationset propositions du conseiller en prevention medecin du travail, concernantles conditions d'occupation et d'amenagement et les mesures de preventionconcernant le poste de travail ou l'activite : «Eviter si possible lamanutention manuelle de charges lourdes et la position debout statiqueprolongee (...)»" (p. 2).
S'il doit etre interprete en ce sens qu'il decide qu'aucun autre fait quel'existence d'une maladie professionnelle de la liste reprise sous le code1.605.05 n'est invoque dans la citation, l'arret n'y lit pas ce qui s'ytrouve, violant, partant, la foi qui lui est due (violation des articles1319, 1320 et 1322 du Code civil).
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Developpements du moyen unique de cassation
Par la premiere branche du moyen, le demandeur soutient, en substance, quele prealable administratif en matiere de maladie professionnelle estlimite à l'obligation pour l'assure social d'introduire, en vertu del'article 52 des lois coordonnees, une demande dans les conditions viseesà l'article 2 de l'arrete royal du 26 septembre 1996 vise au moyen et dese soumettre à la procedure administrative et que ce prealableadministratif n'est pas applicable à l'instruction judiciaire de lacontestation. Le demandeur soutient egalement que la conception illegaleque donne l'arret attaque du prealable administratif conduit l'arretattaque à violer egalement l'article 807 du Code judiciaire, ainsi qu'aubesoin son article 808, en decidant "c'est l'existence de la maladieprofessionnelle designee qui justifie la demande de reparation"
Sur le prealable administratif en matiere de maladie professionnelle etses limites, le demandeur se refere à vos arrets du 8 decembre 1980(Pas., 1981, I, p. 339) et du 18 juin 1981 (Pas., 1981, I, p. 1175), ayantdecide que l'article 52 des lois coordonnees sur les maladiesprofessionnelles se borne à designer l'autorite administrative chargee destatuer sur les demandes d'indemnisation introduites par la victime d'unemaladie professionnelle, ses ayants droit ou mandataires, sans imposer quetoute demande nouvelle formee devant la juridiction du travail saisied'une contestation sur le droit à l'indemnisation soit soumise à uneprocedure administrative prealable.
Cet article 52 ne deroge en effet pas aux dispositions du Code judiciairequi, en vertu de l'article 2 du meme code, s'appliquent à toutes lesprocedures sauf lorsque celles-ci sont regies par des dispositions legalesnon expressement abrogees ou par des principes du droit dont l'applicationn'est pas compatible avec celles dispositions dudit code. Votre Courdecide que l'article 52 des lois coordonnees n'est pas incompatible avecles articles 807 et 808 du Code judiciaire et qu'il n'existe en la matiereaucun principe du droit dont l'application serait incompatible avec cesarticles.
Le demandeur soutient que c'est à tort que l'arret attaque restreintl'enseignement de ces arrets au cas d'espece d'un fait nouveau consistantdans l'aggravation de l'etat de sante de la victime - soit une extensionde demande au sens de l'article 808 du Code judiciaire - et decide que cetenseignement ne s'applique pas à "une nouvelle demande visant à voirreconnaitre une
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maladie professionnelle autre que celle qui avait fait l'objet de lademande initiale", visee, elle, à l'article 807 de ce code. Ce seraitdonc "par inadvertance" que votre Cour aurait, dans ses arrets des 8decembre 1980 et 18 juin 1981 precites, decide que l'article 52 des loiscoordonnees n'etait pas incompatible avec les articles 807 et 808 du Codejudiciaire.
Le demandeur se fonde sur plusieurs decisions recentes des cours dutravail ayant exactement defini la portee du prealable administratif enmatiere de maladie professionnelle.
Ainsi, la cour du travail de Mons (C.T. Mons, 2eme ch., 14 fevrier 2011,R.G. nDEG 2010/AM/23, sur Juridat) l'a defini comme «l'obligationimposant au justiciable de se soumettre à la procedure administrativeprevue par la loi, dans les cas qu'elle determine, prealablement àl'action judiciaire. Corollairement, le juge est tenu de declarerirrecevable la demande judiciaire non precedee de l'instanceadministrative...»". Par contre, une fois que le justiciable s'est soumisà la procedure administrative prevue par la loi, "le fait que celle-cin'ait pas envisage son cas sous l'angle du systeme appele «hors liste»ne lui interdit pas par la suite de demander au juge d'analyser sasituation sous cet angle-là. Raisonner autrement interdiraitl'introduction ou l'articulation en cours d'instance de toute demandeincidente fondee sur l'article 807 du Code judiciaire. De meme, raisonnerautrement interdirait au juge du fond, dans le respect des droits de ladefense, et sans modifier l'objet ni la cause de la demande, de donner auxfaits qui lui sont soumis leur qualification exacte, independamment de laqualification qui leur est donnee par les parties, et de determiner lanorme applicable à la demande qui lui est soumise". L'arret se referenotamment aux arrets de votre Cour precites et à une contribution de M.Delange ("Les pouvoirs du juge dans le droit de la securite sociale", in"Questions de droit social, CUP, vol. 56, septembre 2002, p. 31).
La cour du travail de Liege a decide, dans un arret du 15 septembre 2014(division Liege, 9eme ch., R.G. nDEG 2013/AL/605 sur Juridat), qu'aucuneregle propre à la matiere des maladies professionnelles ne deroge à lapossibilite de modification de la demande dans les conditions de l'article807 du Code judiciaire en soulignant que "les regles relatives à lapreuve des conditions d'octroi des prestations sociales, à l'etendue dela saisine des juridictions et à la prise en compte des faits nouveauxsurvenus en cours de litige ou encore à la recevabilite des demandesincidentes,
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specialement les demandes nouvelles, sont incompatibles avec (la)definition large du prealable administratif" entendu comme interdisant auxjuridictions de se prononcer sur des elements qui n'ont pas ete soumisprealablement à l'administration, voire sur lesquels elle ne s'est pasprealablement prononcee".
Le demandeur se refere egalement à la pertinente analyse de M. Verwilghen(Le droit administratif et le droit de la securite sociale, in Regardscroises sur la securite sociale, CUP, 2012, Anthemis, pp. 608 et suiv.),qui se refere à d'autres arrets de cours du travail ayant limite la regledu prealable administratif à l'obligation pour l'assure social de sesoumettre à la procedure administrative prealable.
O. Langlet (La reparation des maladies professionnelles : de la procedureadministrative à la procedure judiciaire, E.P.D.S., 2011/1, pp. 134 etsuiv.) considere que les pouvoirs du juge dependent du caractere precis ouimprecis d'une demande. Cette solution est, à bon droit, critiquee par M.Verwilghen qui releve que "dans la mesure ou l'assure social, sur la basede la jurisprudence de la Cour de cassation, n'a pas l'obligationd'«habiller» juridiquement sa demande, la distinction faite entre lesdemandes claires et celles peu claires ne se justifient pas vraiment"(eodem. cit., p. 609).
Le demandeur fait à cet egard observer que l'arrete royal du 26 septembre1996 et les formulaires de demandes determines par le comite de gestionsur la base de l'article 2 de cet arrete royal n'imposent pas au demandeurde mentionner la base juridique de sa demande de reparation, à savoirsoit une maladie reprise dans la liste des maladies professionnellesdressee par le Roi en application de l'article 30 des lois coordonnees etdans ce cas le code sous lequel cette maladie y est reprise, soit unemaladie hors liste.
Le systeme ouvert permet d'obtenir une reparation si toutes les conditionsremplies pour la qualification de "maladie de la liste" ne sont pasreunies. L'instruction judiciaire de la contestation peut reveler qu'unemaladie est reparable bien qu'elle ne remplisse pas toutes les conditionspour etre une maladie de la liste.
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Le demandeur soutient qu'il serait contraire au principe meme d'un systemeouvert d'interdire au juge de verifier, lorsque la demande de la victimen'est pas fondee sur une maladie de la liste, si l'indemnisation sejustifie sur base de l'article 30bis des lois coordonnees, ou de ne luipermettre que si le medecin de la victime a laisse ouverte la question dufondement juridique de la demande.
Ainsi que le souligne S. Remouchamps, le regime de la liste a, sousl'impulsion europeenne, ete etendu aux maladies qui, ne figurant pas surla liste, trouve leur cause dans l'exercice de la profession, soit lesmaladies dites "hors liste" ou "systeme ouvert". Ainsi "des la premiereRecommandation de la CEE sur la reparation des maladies professionnelles,etait dejà pointee l'insuffisance d'un systeme de reconnaissance etd'indemnisation, sur la seule base d'une liste, notamment eu egard auxconditions limitatives que comprenaient certaines listes des Etatsmembres. La Recommandation visait, à cote de l'introduction des maladiesde la liste europeenne dans les listes nationales, l'introduction du droità la reparation «lorsque la preuve sera suffisamment etablie par letravailleur interesse qu'il a contracte en raison de son travail unemaladie qui ne figure pas sur la liste nationale». En droit belge, cedroit n'a ete concretise qu'avec la loi du 29 decembre 1990 portant desdispositions sociales (qui a introduit l'article 30bis dans les loiscoordonnees) (La preuve en accident du travail et en maladieprofessionnelle, T.S.R./R.D.S., 2013/2, pp. 464 et 465). La conception duprealable administratif adopte par l'arret attaque a comme consequence depriver d'une grande partie de sa portee l'instauration de ce systemed'indemnisation ouvert.
Quant à la violation de l'article 807 du Code judiciaire, le demandeursoutient qu'en decidant que "c'est l'existence de la maladieprofessionnelle designee qui justifie la demande de reparation", l'arretanalyse confond les faits invoques et les consequences juridiques que ledemandeur en aurait tirees dans sa citation.
Selon la jurisprudence de votre Cour, l'article 807 du Code judiciaire, ilest indifferent, pour l'application de l'article 807 du Code judiciaire,que la qualification juridique du fait ou de l'acte ne soit pas la meme,que le demandeur n'ait dans sa citation tire des faits ou des actesinvoques aucune consequence quant au bien-fonde de sa demande. En outre,la demande nouvelle ne doit pas se fonder exclusivement sur les faits ouactes invoques dans la citation (voy. not. Cass., 8 mars 2010, Pas., 2010,nDEG 161 avec les conclusions de l'avocat general Genicot).
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Cette interpretation est conforme au principe general du droit degage parvotre Cour que le juge est tenu de trancher le litige conformement auxregles juridiques qui y sont applicables (voy. Cass., 5 septembre 2013,nDEG 426).
Le demandeur se fonde egalement sur l'enseignement de vos arrets dans lamatiere des allocations aux handicapes, dont la connaissance est attribueeaux juridictions du travail par l'article 582, 1DEG, du Code judiciaire.
Avant la loi du 19 avril 1999, cette disposition prevoyait que lesjuridictions du travail connaissaient des recours contre les decisions duMinistre en matiere d'allocations aux handicapes.
Votre Cour avait deduit de ce texte que "le juge peut uniquement decidersi le ministre a statue conformement aux prescriptions legales en matierede droit aux allocations; que cela implique qu'il ne peut tenir compte quedes elements sur la base desquels le ministre a statue ou aurait dustatuer" (voy. not. Cass., 9 octobre 1995, Pas., nDEG 421).
La loi du 19 avril 1999 a modifie l'article 582, 1DEG, du Code judiciaireen ce sens que les juridictions du travail connaissent "des constatationsrelatives aux droits en matiere d'allocations aux handicapes". A la suitede cette modification, votre Cour, par un arret du 30 octobre 2000 (Pas.,nDEG 588, avec une note sur la jurisprudence anterieure à la modificationdu Code judiciaire et à la portee de cette modification) a decide que"les litiges qui peuvent etre soumis aux juridictions du travail ne selimitent pas au droit aux allocations à propos desquelles le Ministre aou aurait pu decider". Cet arret souligne que : "le lien administratif estrompu en raison de cette modification" et que les dispositions de la loidu 27 fevrier 1987 qui concernent l'instruction administrative desdemandes ne derogent pas aux regles qui precedent. Ce cas d'espececoncernait la responsabilite d'une extension de demande fondee sur unemodification de l'etat de sante du handicape posterieure à l'instructionadministrative.
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L'arret de votre Cour du 8 septembre 2003 (Pas., nDEG 422) est encore plussignificatif des lors qu'il decide que les litiges qui peuvent etre soumisaux juridictions du travail ne se limitent pas aux demandes d'allocationsur lesquelles le Ministre a statue ou aurait du statuer ni aux motifs surla base desquels une revision du droit aux allocations a ete demandee ousur la base desquels il a ete procede à une revision d'office. M. Dumontet N. Malmendier relevent que la decision soumise aux juridictions dutravail dans ce cas d'espece faisait suite à une revision administrativemotivee par une modification des revenus de la personne handicapee alorsque la demande modifiee devant les juridictions du travail visaient àvoir designer un expert en raison d'une modification de l'etat de sante dela victime (les personnes handicapees : G.S.P. Commentaires droit de lasecurite sociale t. IV, Partie III, livre III, titre II, chap. IX, nDEG780).
Le demandeur soutient que l'enseignement de ces arrets est transposable àla matiere des maladies professionnelles, le contenu de l'article 579,1DEG, du Code judiciaire etant identique à celui de son article 582,1DEG.
Par la deuxieme branche du moyen, proposee à titre subsidiaire, ledemandeur envisage l'hypothese que l'arret attaque ait decide quel'article 52 des lois coordonnees permettait au Roi de limiter lespouvoirs du juge saisi d'une contestation lorsque le defendeur a statuesur une demande valablement introduite et la jugee non fondee. Il estcertain que c'est le prealable administratif auquel l'arret attaque donneune interpretation illegalement etendue qui sous-tend le dispositif disantla demande nouvelle du demandeur irrecevable. Il n'est toutefois pas excluqu'il fonde egalement cette decision sur le contenu des articles 8bis et 9de l'arrete royal du 26 septembre 1996 qu'il interpreterait commederogeant aux pouvoirs du juge.
Cette branche n'appelle pas de developpements pas plus que la troisiemebranche du moyen egalement proposee à titre subsidiaire.
19eme et dernier feuillet
PAR CES CONSIDERATIONS,
l'avocate à la Cour de cassation soussignee, pour la demanderesse,conclut qu'il vous plaise, Messieurs, Mesdames, casser l'arret attaque;ordonner que mention de votre arret soit faite en marge de la decisionannulee; renvoyer la cause et les parties devant une autre cour dutravail; statuer comme de droit quant aux depens.
Jacqueline Oosterbosch
Le 10 juin 2015
Pieces jointes pour l'information de la Cour
- Piece jointe nDEG 1 : formulaire 501.F complete par le demandeur
- Piece jointe nDEG 2 : formulaire 503.F complete par le medecin dudemandeur
12 DECEMBRE 2016 S.15.0068.F/5
Requete/23