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24/11/2016 | BELGIQUE | N°C.15.0104.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 24 novembre 2016, C.15.0104.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.15.0104.F

1. AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

2. INTER PARTNER ASSISTANCE, societe anonyme dont le siege social estetabli à Bruxelles, avenue Louise, 166,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ouil est fait election de domicile,

contre

1. BELGIAN SHELL, societe anonyme dont le siege social est

etabli àIxelles, avenue Arnaud Fraiteur, 15-23,

representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.15.0104.F

1. AXA BELGIUM, societe anonyme dont le siege social est etabli àWatermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 25,

2. INTER PARTNER ASSISTANCE, societe anonyme dont le siege social estetabli à Bruxelles, avenue Louise, 166,

demanderesses en cassation,

representees par Maitre Paul Alain Foriers, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 149, ouil est fait election de domicile,

contre

1. BELGIAN SHELL, societe anonyme dont le siege social est etabli àIxelles, avenue Arnaud Fraiteur, 15-23,

representee par Maitre Johan Verbist, avocat à la Cour de cassation, dontle cabinet est etabli à Anvers, Amerikalei, 187/302, ou il est faitelection de domicile,

2. O. S. et consorts,

representes par Maitre Pierre Van Ommeslaghe, avocat à la Cour decassation, dont le cabinet est etabli à Bruxelles, avenue Louise, 106, ouil est fait election de domicile,

defendeurs en cassation.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 6 mai 2014 parla cour d'appel de Bruxelles.

Le conseiller Michel Lemal a fait rapport.

L'avocat general Thierry Werquin a conclu.

II. Les moyens de cassation

Les demanderesses presentent deux moyens libelles dans les termes suivants:

Premier moyen

Dispositions legales violees

- articles 10 et 11 de la Constitution ;

- article 138bis-1, specialement S: 2, de la loi du 25 juin 1992 sur lecontrat d'assurance terrestre, modifie par la loi du 17 juin 2009 et avantson abrogation par la loi du 4 avril 2014 ;

- pour autant que de besoin, articles 138bis-2 à 138bis-11 de la loi du25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, modifies par la loi du17 juin 2009 et avant leur abrogation par la loi du 4 avril 2014, et,quant à l'article 138bis-6, tant avant qu'apres sa modification par laloi du 26 novembre 2011.

Decisions et motifs critiques

L'arret dit l'appel des demanderesses non fonde et l'appel incident desdefendeurs sub 2 à 47 tres partiellement fonde. Il confirme le jugemententrepris en ce qu'il a rec,u les demandes et a dit pour droit que lecontrat d'assurance collective des frais medicaux souscrit par la premieredefenderesse aupres des demanderesses le 22 fevrier 2006 est conclu àvie, que la couverture d'assurance doit etre maintenue et que laresiliation operee par lettre du 18 novembre 2009 etait illicite.

Il met à neant le jugement entrepris pour le surplus et, statuant ànouveau, condamne les demanderesses et la premiere defenderesse àmaintenir la couverture des garanties des defendeurs sub 2 à 47, sous lapolice d'assurance maladie collective souscrite par la premieredefenderesse aupres des demanderesses le 22 fevrier 2006, aux termes etconditions de cette police, etant entendu que les augmentations de primesne pourront s'effectuer que dans le strict cadre autorise par la loi.L'arret condamne egalement les demanderesses et la premiere defenderesseaux depens des defendeurs sub 2 à 47.

Il fonde sa decision sur les motifs qu'il indique, et specialement sur lesmotifs suivants :

« B. Quant à l'appel mu par [les demanderesses]

1. Quant à la resiliation de la convention par [les demanderesses]

[...] La loi du 20 juillet 2007 modifiant, en ce qui concerne les contratsd'assurance maladie-invalidite, la loi du 25 juin 1992 sur le contratd'assurance terrestre et la loi reparatrice du 17 juin 2009 ont introduitd'importantes modifications au cadre legislatif existant, l'objectif dulegislateur etant d'ameliorer et de proteger les droits des assures enmettant en oeuvre un certain nombre de principes dont :

- le droit de poursuivre individuellement une assurance collective dont onperd le benefice,

- la garantie de pouvoir beneficier à vie d'un contrat d'assurance,

- la limitation de l'augmentation des primes (Doc. parl., Ch. repr., sess.ord. 2008/2009, nDEG 52 1662/004, p. 3).

Les dispositions desdites lois sont imperatives et applicables auxcontrats d'assurance conclus avant son entree en vigueur (1er juillet2007), de telle sorte qu'il convient d'examiner leur impact sur le contratd'assurance litigieux notamment quant à la possibilite pour lescompagnies d'assurance d'encore resilier la police d'assurance (ce droitfut-il reconnu, comme en l'espece, par le contrat).

La loi du 20 juillet 2007 a introduit une distinction fondamentale entreles contrats maladie selon qu'ils sont individuels ou collectifs, cettedistinction determinant les regles applicables aux contrats. Ce critere atoutefois ete considere comme inadequat, de telle sorte que la loireparatrice du 17 juin 2009 a substitue à la distinction initiale entrecontrats collectifs et contrats individuels une distinction entre lesassurances `liees à l'activite professionnelle' et les assurances `nonliees à l'activite professionnelle'.

Ces contrats d'assurance sont soumis à des regles distinctes en ce quiconcerne notamment leur duree, les contrats non lies à l'activiteprofessionnelle etant, contrairement aux contrats lies à l'activiteprofessionnelle, conclus à vie et ne pouvant, par consequent, plus fairel'objet d'une resiliation.

Selon les [defendeurs], suivis par le premier juge, la police d'assurancelitigieuse est un contrat non lie à l'activite professionnelle, ce quecontestent [les demanderesses].

Contrairement à ce que soutiennent les [defendeurs], il ne peut etreconsidere que l'arret de la cour d'appel du 21 juin 2011 ait mis un termeau debat relatif à la qualification du contrat. Il convient, en effet, derelever que non seulement [les demanderesses] n'etaient pas parties à laprocedure mais, en outre, que cette decision a ete rendue en refere, soitau provisoire. Cette decision n'est donc pas revetue de l'autorite de lachose jugee à l'egard du juge du fond, de telle sorte que la cour[d'appel] n'est pas liee par ce qui a ete decide dans le cadre de laprocedure mue en refere.

Par ailleurs, il convient de souligner que la cour [d'appel] est saisie del'examen d'un contrat particulier qu'il lui appartient d'examiner auregard des elements propres à la cause et non au regard de l'hypothetiqueimpact (la decision etant prise au regard des circonstances particulieresde la cause qui ne sont pas necessairement transposables à d'autressituations) que pourrait, selon [les demanderesses], avoir la decision surle marche de l'assurance, dans le secteur public ou encore en cas defermeture d'entreprise.

En vertu de l'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin 1992, modifiepar la loi du 17 juin 2009, `l'on entend par contrat d'assurance maladielie à l'activite professionnelle : tout contrat d'assurance maladieconclu par un ou plusieurs preneurs d'assurance au profit d'une ouplusieurs personnes liees professionnellement au(x) preneur(s) d'assuranceau moment de l'affiliation' [...].

S'agissant de l'interpretation des mots `liees professionnellement', ilest precise dans les travaux preparatoires que ces termes `visentprincipalement la relation employeur-employe ou entreprise-independant(par exemple dirigeant d'entreprise), autrement dit les cas de relation detravail directe. Ceci n'empeche pas que les mots precites puissentegalement viser des cas de relation de travail moins directes s'inscrivantdans le cadre de l'activite professionnelle. Cela pourrait etre le cas,par exemple, lorsque des commissions paritaires ou des organes deconcertation competents (secteur public) concluent de tels contratsd'assurance maladie au benefice du personnel du secteur. Peuvent egalementetre visees les hypotheses d'une federation professionnelle agissant pourses membres ou d'un contrat d'entreprise. Bref, toute relation entre lepreneur d'assurance et l'assure principal qui permet à ce dernier degenerer des revenus professionnels ou en faciliter l'obtention entre enconsideration. Le gouvernement estime que cette distinction estsuffisamment claire et que le critere de revenus professionnels doitpermettre de trancher les rares cas litigieux' (Doc. parl., Ch. repr.,sess. ord. 2008/2009, nDEG 52 1662/001, p. 6) [...].

Il convient donc d'examiner si, au moment de leur affiliation, [lesdefendeurs sub 2 à 47] entretenaient avec [la premiere defenderesse] unerelation leur permettant de generer des revenus professionnels.

[Les demanderesses] ne peuvent etre suivies lorsqu'elles soutiennent quele moment de l'affiliation dont question dans la disposition legale doitetre situe, non à la date de la souscription de la police d'assurancecollective litigieuse, mais au moment de la premiere affiliation à uneassurance collective soins de sante.

Les dispositions legislatives citees par elles ne permettent, en effet,pas d'aboutir à une telle conclusion meme s'il est exact que la loidistingue àffiliation' et `souscription'. Il ne peut notamment etrededuit des termes àvoir ete affilie de maniere ininterrompue à un ouplusieurs contrats d'assurance maladie successifs souscrits aupres d'uneentreprise d'assurance', repris à l'article 138bis-8 de la loi, relatifau droit de reprise individuel du contrat collectif, que, par les termesàffiliation ininterrompue', le legislateur considere qu'il s'agiraitd'une seule et meme affiliation plutot que d'affiliations successives. Ilen est de meme s'agissant de l'article 138bis-11, 1DEG et 2DEG, quiprevoit qu'en cas de manquement de l'assureur à son devoir d'information,la prime du contrat d'assurance maladie poursuivi individuellement seracalculee en tenant compte de l'age de l'assure au moment de sonaffiliation à l'assurance liee à l'activite professionnelle, rienn'indiquant qu'il faille remonter à la toute premiere affiliation et nonà l'affiliation aupres de l'assurance collective en cours.

Il n'apparait pas non plus qu'une telle conclusion puisse etre deduite dela volonte du legislateur meme si, comme le relevent [les demanderesses],cela peut donner lieu à des situations divergentes selon le moment auquelest souscrit l'eventuel nouveau contrat collectif.

Enfin et surtout, s'il est exact que, lorsque [la premiere defenderesse] asouscrit aupres de Winterthur le premier contrat d'assurance collectif,les [defendeurs sub 2 à 47] travaillaient encore au sein de la societe,il ne peut etre perdu de vue que le contrat liant [la premieredefenderesse] à Winterthur a ete resilie le 28 fevrier 2006.

C'est donc une nouvelle police d'assurance entrainant une nouvelleaffiliation qui a ete contractee par [la premiere defenderesse] aupres[des demanderesses] pour :

- `les membres du personnel beneficiant de la « pension anticipeeShell » qui etaient assures aupres de Winterthur Belgique au 28 fevrier2006,

- les prepensionnes qui etaient assures aupres de Winterthur Belgique au28 fevrier 2006,

- les pensionnes qui etaient assures aupres de Winterthur Belgique au 28fevrier 2006'.

Ceci est confirme par la police d'assurance litigieuse qui, dans sesconditions particulieres, precise, sous le sous-titre `Affiliation' :`l'affiliation est facultative, tant pour la personne faisant partie dela categorie assuree que pour les membres de sa famille, à la prised'effet de la presente police' [...].

Il ne peut, au vu de ces elements, etre considere que tous les pensionnesqui beneficiaient du contrat soins de sante ont ete transferes dans lecontrat d'assurance qui constituerait la `continuation' de la policeinitiale, l'affiliation à ce nouveau contrat etant facultative et lapolice etant, par ailleurs, contractee aupres d'un autre assureur.

Il resulte des developpements qui precedent que l'affiliation des[defendeurs sub 2 à 47] à la police d'assurance litigieuse a eu lieu le1er mars 2006.

A cette date, l'ensemble des [defendeurs sub 2 à 47] etaient pensionneset, en consequence, n'etaient plus en relation de travail avec la[premiere defenderesse] et ne percevaient plus aucun revenu professionnel(les actifs beneficiant, pour leur part, de l'autre police d'assurancecollective).

En effet, meme à supposer que tous les pensionnes touchent une rente depension versee par le fonds de pension Belgian Shell en sa qualited'organisme de pension de [la premiere defenderesse] - ce qui n'est pasdemontre, certains ayant pu faire le choix de percevoir un capital pensionà leur depart -, cette pension ne peut etre consideree comme un revenuprofessionnel lie à une relation de travail existante.

Il est, à cet egard, indifferent de relever que :

- selon le Code des impots sur les revenus, les pensions, rentes etallocations en tenant lieu sont considerees, sur le plan fiscal, commeconstituant des revenus professionnels (à l'instar d'ailleurs desallocations de chomage) des lors que, pour entrer dans cette categorie,une relation de travail n'est nullement requise ;

- la legislation fiscale reconnaitrait, dans certains cas, le lienprofessionnel sous-jacent aux contrats d'assurance collectifs souscritspar des employeurs au profit de leurs travailleurs pensionnes, lesconcepts de droit fiscal etant autonomes et non automatiquementtransposables en droit civil.

De meme, s'il est indeniable que les pensionnes retirent un avantagefinancier de l'assurance soins de sante collective souscrite par [lapremiere defenderesse], cet avantage ne constitue pas un revenuprofessionnel. Le lien eventuel entre la police d'assurance litigieuse etla police d'assurance souscrite pour les membres actifs n'est pas denature à modifier cette analyse.

Par ailleurs, la reference aux regles applicables en matiere deprescription des actions nees du contrat de travail est irrelevante deslors que, dans la matiere [en cause], le legislateur ne fait pas referenceà un contrat ne d'une relation professionnelle mais au lien professionnelexistant au moment de l'affiliation au contrat.

C'est, en effet, au regard de la loi sur le contrat d'assurance terrestreque doit etre interpretee la notion.

Meme s'il est certain que c'est en raison du lien professionnel ayantexiste entre les [defendeurs sub 2 à 47] et [la premiere defenderesse]qu'a ete souscrite la police d'assurance collective litigieuse, il n'endemeure pas moins que, lors de leur affiliation à celle-ci, moment auquelil faut se placer pour apprecier si le contrat est ou non en lien avecl'activite professionnelle, les [defendeurs sub 2 à 47] n'etaient pluslies professionnellement à [la premiere defenderesse].

Quant aux avis de l'ombudsman des assurances cites par [lesdemanderesses], selon lesquels des contrats collectifs souscrits par unemployeur et beneficiant à des pensionnes sont des contrats lies àl'activite professionnelle, ils n'apparaissent pas pertinents pourl'examen du cas d'espece des lors qu'il n'est pas etabli que, dans les cassoumis à l'ombudsman, les contrats examines avaient, comme le contratlitigieux, ete conclus à un moment ou les assures etaient dejàpensionnes.

En tout etat de cause, ces avis ne lient pas les cours et tribunaux.

Enfin, la circonstance que les representants des travailleurs et desemployeurs d'un secteur aient conclu une convention collective de travailsectorielle au sein de la commission paritaire de la constructionorganisant le benefice d'une assurance soins de sante qu'ils qualifient decontrat d'assurance maladie lie à l'activite professionnelle n'est pasrelevant d'autant que, comme le relevent les [defendeurs], il est permisde s'interroger sur la legalite du mecanisme mis en place (la conventioncollective fut-elle soumise à la sanction royale).

Il resulte des developpements qui precedent que c'est à bon droit que lepremier juge a considere qu'il n'y avait plus, à la conclusion del'assurance, de relation de travail dans le cadre d'une activiteprofessionnelle generant des revenus professionnels entre les [defendeurssub 2 à 47) et la [premiere defenderesse] et qu'en consequence, lecontrat litigieux etait un contrat d'assurance maladie non lie àl'activite professionnelle.

Comme l'a releve le premier juge, cette conclusion apparait conforme à lavolonte du legislateur - dont l'objectif etait de garantir la possibilitepour tous de beneficier d'une assurance soins de sante -, qui a prevu unmecanisme d'amortissement au moyen de paiement de primes complementairespour les contrats d'assurance maladie lies à l'activite professionnellepermettant de limiter les augmentations de prime lors de la poursuiteindividuelle de la police collective, mecanisme qui ne peut jouer si l'onconsidere que le contrat collectif conclu alors que l'ensemble de sesbeneficiaires est dejà pensionne est un contrat lie à l'activiteprofessionnelle.

Des lors qu'il s'agit d'un contrat non lie à l'activite professionnelle,il devrait, en vertu de l'article 138bis-3, etre considere comme conclu àvie.

[...] Il resulte des developpements qui precedent que l'appel principal[des demanderesses] doit etre declare non fonde et qu'il convient deconfirmer [le jugement] entrepris en ce qu'[il] a considere que cessocietes n'etaient pas en droit de resilier la police, le contrat etantconclu à vie de telle sorte que la resiliation etait de nul effet.

[...] L'appel forme à titre infiniment subsidiaire par [lesdemanderesses] n'est par consequent pas fonde et il convient, eu egard auxdeveloppements qui precedent, de confirmer [le jugement] entrepris en cequ'[il] a dit pour droit que le contrat d'assurance collective des fraismedicaux souscrit par [la premiere defenderesse] aupres [desdemanderesses] le 22 fevrier 2006 est conclu à vie, que la couvertured'assurance doit etre maintenue et que la resiliation operee par lettre du18 novembre 2009 etait illicite et de nul effet ».

Griefs

1. Le chapitre IV du titre III de la loi du 25 juin 1992 sur le contratd'assurance terrestre soumet les contrats d'assurance maladie à deuxregimes distincts.

Les contrats d'assurance maladie non lies à l'activite professionnellesont soumis aux articles 138bis-2 à 138bis-7 tandis que les contratsd'assurance maladie lies à l'activite professionnelle sont soumis auxarticles 138bis-8 à 138bis-11.

2. Les premiers sont, en regle, conclus à vie (article 138bis-3, S: 1er,de la loi du 25 juin 1992). Pour les seconds, l'article 138bis-8, S: 1er,de la loi du 25 juin 1992 ouvre seulement aux affilies, en cas de perte dela couverture, un « droit de poursuivre, en tout ou partie, cetteassurance individuellement [...] sans devoir subir un examen medicalsupplementaire ni devoir remplir un nouveau questionnaire medical ».

Premiere branche

1. L'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin 1992 vise au moyendispose que « l'on entend par contrat d'assurance maladie lie àl'activite professionnelle : tout contrat d'assurance maladie conclu parun ou plusieurs preneurs d'assurance au profit d'une ou plusieurspersonnes liees professionnellement au(x) preneur(s) d'assurance au momentde l'affiliation ».

Constitue, au sens de cette disposition, un contrat d'assurance maladielie à l'activite professionnelle, le contrat souscrit par un employeur etqui trouve sa cause dans les contrats de travail qui le lient à sestravailleurs ou est conclu en execution d'une obligation decoulant de cescontrats ou des regles - notamment les conventions collectives - quipresident à leur execution, sans qu'il faille, en outre, qu'au moment deleur affiliation à la police, les beneficiaires exercent encore aupres deleur employeur une activite professionnelle.

Le contrat d'assurance maladie conclu par un employeur en execution desobligations qui s'imposent à lui en vertu des contrats de travail qu'il aconclus avec ses travailleurs lorsqu'ils etaient en service ou qui trouvesa cause dans ces contrats constitue donc un contrat lie à l'activiteprofessionnelle au sens de l'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin1992, meme s'il a ete conclu exclusivement au profit d'ancienstravailleurs en retraite ou qui sont dans cette situation au moment deleur affiliation à ce contrat d'assurance.

2. L'arret constate que la premiere defenderesse offrait à sestravailleurs, pendant leur vie professionnelle, une couverture soins desante sous la forme d'une police d'assurance collective et que, lors deleur depart à la pension, « les travailleurs de [la premieredefenderesse] se voyaient offrir par cette derniere la possibilite demaintenir une couverture soins de sante moyennant paiement direct desprimes à la compagnie d'assurance, sans intervention de [la premieredefenderesse] ». Il constate par ailleurs qu'il resulte de plusieurselements que « la [premiere defenderesse] s'est engagee à assurer [auxtravailleurs pensionnes à la cause, dont les defendeurs sub 2 à 47] lemaintien d'une couverture d'assurance soins de sante collective, à titrede droit acquis au moment de leur mise à la retraite ».

L'arret admet qu'« il est certain que c'est en raison du lienprofessionnel ayant existe entre les [assures, dont les defendeurs sub 2à 47] et [la premiere defenderesse] qu'a ete souscrite la policed'assurance collective litigieuse ».

L'arret constate ainsi que la police d'assurance litigieuse trouve sacause dans les contrats de travail qui avaient lie les beneficiaires à lapremiere defenderesse avant qu'ils partent à la retraite ou, à tout lemoins, que cette police avait ete conclue en execution d'obligationsdecoulant de ces contrats de travail ou des regles qui presidaient à leurexecution.

Il conclut toutefois que la police litigieuse n'etait pas liee àl'activite professionnelle au sens de l'article 138bis-1, S: 2, de la loidu 25 juin 1992 aux motifs qu'au moment de leur affiliation, l'ensembledes assures, parmi lesquels les defendeurs sub 2 à 47, etaient pensionneset n'etaient donc plus en relation de travail avec la premieredefenderesse et n'en percevaient plus de revenus professionnels autres queleur pension.

3. En considerant de la sorte qu'un contrat d'assurance souscrit par unemployeur qui trouvait sa cause dans les contrats de travail qui l'avaientlie à ses anciens travailleurs à la retraite ou, du moins, qui avait eteconclu en raison d'obligations decoulant de ces contrats ou des reglespresidant à leur execution n'est pas lie à l'activite professionnelleparce que, au moment de leur affiliation à ce contrat d'assurance, tousles beneficiaires etaient à la retraite alors qu'il importe peu qu'aumoment de leur affiliation, les beneficiaires de pareil contrat soientencore actifs ou non, l'arret meconnait la notion legale de contratd'assurance lie à l'activite professionnelle au sens de l'article 138bis,S: 2, de la loi du 25 juin 1992 et viole des lors cette dispositionlegale, telle qu'elle est visee au moyen.

Par suite, l'arret viole les articles 138bis-2 à 138bis-7 de la loi du 25juin 1992 en soumettant la police litigieuse au regime des contratsd'assurance non lies à l'activite professionnelle alors qu'ils ne luietaient pas applicables et les articles 138bis-8 à 138bis-11 de la loi du25 juin 1992 en refusant de les appliquer alors qu'ils etaientapplicables.

Il n'est des lors pas legalement justifie (violation de toutes lesdispositions visees au moyen, à l'exception des articles 10 et 11 de laConstitution).

Deuxieme branche ( subsidiaire)

1. L'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin 1992 definit le « contrat d'assurance maladie lie à l'activite professionnelle » comme «le contrat d'assurance maladie conclu par un ou plusieurs preneursd'assurance au profit d'une ou plusieurs personnes lieesprofessionnellement au(x) preneur(s) d'assurance au moment del'affiliation ».

L'article 138bis-8, S: 1er, de la meme loi enonce :

« Sauf si elle perd le benefice du contrat d'assurance maladie lie àl'activite professionnelle pour des raisons visees aux articles 6, 7, 14,16 et 24 et, de maniere generale, en cas de fraude, toute personneaffiliee à une assurance liee à l'activite professionnelle a le droit depoursuivre, en tout ou en partie, cette assurance individuellementlorsqu'elle perd le benefice de l'assurance liee à l'activiteprofessionnelle, sans devoir subir un examen medical supplementaire nidevoir remplir un nouveau questionnaire medical.

A cet effet, l'assure principal doit, durant les deux annees precedant laperte du contrat d'assurance maladie lie à l'activite professionnelle quiest poursuivi, avoir ete affilie de maniere ininterrompue à un ouplusieurs contrats d'assurance maladie successifs souscrits aupres d'uneentreprise d'assurance au sens de la presente loi ».

Il suit du rapprochement de ces dispositions, et plus specialement durapprochement de l'article 138bis-1, S: 2, et de l'article 138bis-8, S: 1er, alinea 2, que les termes « moment de l'affiliation » desbeneficiaires doivent s'entendre, en cas de contrats d'assurancesuccessifs souscrits par le meme employeur, preneur d'assurance, aupres dumeme assureur ou d'assureurs differents, du moment de la premiereaffiliation des beneficiaires concernes à l'un de ces contrats.

2. Il s'ensuit que, faudrait-il meme considerer, à l'instar de l'arret,que ne constitue un contrat d'assurance maladie lie à l'activiteprofessionnelle que le contrat conclu au profit des beneficiaires encoreen service au moment de leur affiliation, encore l'arret n'a-t-il pulegalement considerer que le moment de cette affiliation devait s'entendredu moment à partir duquel les beneficiaires ont ete couverts par laderniere police d'assurance en cours (violation des articles 138bis-1, S:2, et 138bis- 8, S: 1er, de la loi du 25 juin 1992 vises au moyen).

Par suite, l'arret viole les articles 138bis-2 à 138bis-7 de la loi du 25juin 1992 vises au moyen en soumettant la police litigieuse au regime descontrats d'assurance non lies à l'activite professionnelle alors qu'ilsne lui etaient pas applicables et les articles 138bis-8 à 138bis-11 de laloi du 25 juin 1992 vises au moyen en refusant de les appliquer alorsqu'ils etaient applicables.

Il n'est des lors pas legalement justifie (violation de toutes lesdispositions visees au moyen, à l'exception des articles 10 et 11 de laConstitution).

Troisieme branche (plus subsidiaire)

1. La regle de l'egalite des Belges devant la loi contenue dans l'article10 de la Constitution et celle de la non-discrimination dans la jouissancedes droits et libertes reconnus aux Belges contenue dans l'article 11 dela Constitution impliquent que tous ceux qui se trouvent dans la memesituation soient traites de la meme maniere mais n'excluent pas qu'unedistinction soit faite entre differentes categories de personnes pourautant que le critere de distinction soit susceptible de justificationobjective et raisonnable ; l'existence d'une telle justification doits'apprecier par rapport au but et aux effets de la mesure prise.

2. Interprete comme excluant de son champ d'application les contratsd'assurance maladie collectifs conclus en raison d'obligations decoulantdu contrat de travail ou des regles presidant à leur execution par un ouplusieurs preneurs d'assurance au profit d'anciens travailleurs admis àla retraite lorsque ces contrats d'assurance collectifs ont ete conclus àune epoque ou tous les beneficiaires etaient dejà à la retraite,l'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin 1992 vise au moyen violeles articles 10 et 11 de la Constitution.

Il conduit en effet à operer une distinction, parmi les contratsd'assurance souscrits en vertu de ses obligations à leur egard par unemployeur au profit d'anciens membres de son personnel admis à laretraite, selon que ces contrats ont ete conclus ou non au moment ou cespersonnes etaient encore actives. Or, cette distinction ne repose suraucune justification raisonnable, la qualification du contrat en causepouvant dependre de la seule circonstance qu'un contrat d'assurance seraitrenouvele ou replace aupres d'un autre assureur offrant de meilleuresconditions.

3. En retenant cette interpretation de l'article 138bis-1, S: 2, de la loidu 25 juin 1992 alors qu'elle ne s'imposait pas et que les interpretationsproposees aux premiere et deuxieme branches du moyen ne conduisaient pasà la discrimination denoncee, l'arret viole les articles 10 et 11 de laConstitution et, pour autant que de besoin, les autres dispositions viseesau moyen.

4. Pour autant que de besoin, les demanderesses invitent la Cour à poserà la Cour constitutionnelle, conformement à l'article 26, specialementS:S: 1er et 2, de la loi speciale sur la Cour constitutionnelle laquestion prejudicielle suivante : « interprete comme excluant de ladefinition des contrats d'assurance maladie lies à l'activiteprofessionnelle les contrats d'assurance conclus par un ou plusieurspreneurs d'assurance en raison de la relation de travail ayant existeentre ces preneurs et les beneficiaires de la couverture s'ils sontconclus à une date à laquelle les beneficiaires sont admis à laretraite, alors que seraient inclus dans cette definition les contratscouvrant des retraites s'ils ont ete conclus alors que les beneficiairesde la couverture etaient encore actifs, l'article 138bis-1, S: 2, de laloi du 25 juin 1992 viole-t-il les articles 10 et 11 de la Constitution» ?

Second moyen

Dispositions legales violees

Article 3, specialement S: 2, alinea 3, de la loi du 20 juillet 2007modifiant, en ce qui concerne les contrats prives d'assurance maladie, laloi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, modifie par laloi du 17 juin 2009

Decisions et motifs critiques

L'arret dit l'appel des demanderesses non fonde et l'appel incident desdefendeurs sub 2 à 47 tres partiellement fonde. Il confirme le jugemententrepris en ce qu'il a rec,u les demandes et a dit pour droit que lecontrat d'assurance collective frais medicaux souscrit par la premieredefenderesse aupres des demanderesses le 22 fevrier 2006 est conclu àvie, que la couverture d'assurance doit etre maintenue et que laresiliation operee par lettre du 18 novembre 2009 etait illicite.

Il met à neant le jugement entrepris pour le surplus et, statuant ànouveau, condamne les demanderesses et la premiere defenderesse àmaintenir la couverture des garanties des defendeurs sub 2 à 47, sous lapolice d'assurance maladie collective souscrite par la premieredefenderesse aupres des demanderesses le 22 fevrier 2006, aux termes etconditions de cette police, etant entendu que les augmentations de primesne pourront s'effectuer que dans le strict cadre autorise par la loi.L'arret condamne egalement les demanderesses et la premiere defenderesseaux depens des defendeurs sub 2 à 47.

Il fonde sa decision sur les motifs qu'il indique et specialement sur lesmotifs suivants :

« [Les demanderesses] estiment toutefois que le contrat tombe sous lechamp d'application de l'article 3, S: 2, alinea 3, de la loi du 20juillet 2007, modifie par l'article 13 de la loi du 17 juin 2009,instaurant un regime transitoire soumettant certains contrats non lies àl'activite professionnelle aux dispositions de la section III du chapitreIV de la loi sur le contrat d'assurance terrestre (section relative audroit de poursuite individuelle d'un contrat d'assurance maladie lie àl'activite professionnelle) et qu'elles conservent, en consequence, ledroit de le resilier.

L'article 13, S: 2, de la loi du 17 juin 2009 remplac,ant l'article 3 dela loi du 20 juillet 2007 est ainsi redige :

`S: 2. Pour ce qui est des contrats d'assurance maladie existants non liesà l'activite professionnelle, une periode transitoire de deux ans estapplicable à partir du 1er juillet 2007 en ce qui concerne l'applicationde l'article 138bis-4 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assuranceterrestre.

Pour ce qui est des contrats maladie existants non lies à l'activiteprofessionnelle qui, au moment de l'entree en vigueur de la presente loi,ne satisfont pas aux exigences de l'article 138bis-3 de la loi du 25 juin1992 sur le contrat d'assurance terrestre, l'entreprise d'assurancepropose à l'assure principal, au plus tard deux ans à partir du 1erjuillet 2007, un nouveau contrat d'assurance maladie conforme à cesexigences. L'assure principal decide dans les trente jours de la receptionde la proposition d'y souscrire ou de maintenir son contrat d'assurancemaladie en cours pour sa duree restante.

Les contrats d'assurance maladie existants non lies à l'activiteprofessionnelle qui ont ete conclus par un ou plusieurs preneursd'assurance au profit d'un ou plusieurs assures principaux ou d'un ouplusieurs assures secondaires sont soumis, au terme de la periodetransitoire visee à l'alinea 1er, aux dispositions du chapitre IV,section III, de la loi du 25 juin 1992 de la loi sur le contratd'assurance terrestre. Des nouveaux assures principaux ne peuvent pluss'affilier à ces assurances [...]'.

Le libelle de l'article 13, S: 2, alinea 3, parait, de prime abord, denature à confirmer la these [des demanderesses] selon laquelle tous lescontrats collectifs non lies à l'activite professionnelle seraient soumisà la disposition transitoire des lors qu'il est fait mention des`contrats d'assurance maladie existants non lies à l'activiteprofessionnelle qui ont ete conclus par un ou plusieurs preneursd'assurance au profit d'un ou plusieurs assures principaux ou d'un ouplusieurs assures secondaires'.

Il convient toutefois d'etre attentif au fait que, si tel devait etre lecas, cette disposition apparait etre en contradiction avec l'article 13,S: 2, alinea 2, en ce qu'elle prevoit, pour tous les contrats existantsnon lies à l'activite professionnelle - qu'ils soient individuels oucollectifs -, une periode transitoire de deux ans pour permettre àl'assureur de mettre le contrat en conformite avec l'article 138bis-3 (quiprevoit que le contrat d'assurance non lie à l'activite professionnelleest conclu à vie). (Certes, l'article 13, S: 2, alinea 2, a ete abrogepar un arret de la Cour constitutionnelle du 31 mai 2011 mais pour desmotifs etrangers, la Cour considerant que le delai de deux ans etaittheorique, la loi du 27 juin 2009 ayant ete publiee le 8 aout 2009, soitapres l'expiration du delai de deux ans prenant cours au 1er juillet 2007,dont s'agit dans cet article).

Comme le relevent les [defendeurs], le legislateur aurait donc imposel'obligation de convertir tous les contrats d'assurance maladie non liesà l'activite professionnelle - qu'ils soient individuels ou collectifs -en des contrats viagers pour le 1er juillet 2009 au plus tard tout enprevoyant, dans le meme temps, qu'à l'issue de la periode transitoire,les contrats collectifs non lies à l'activite professionnelle perdraientleur caractere viager.

Il resulte, en realite, de l'expose des motifs que le regime transitoireprevu à l'article 13, S: 2, alinea 3, a ete instaure pour les contratsdits d'affinite : `Pour tenir compte d'une situation existanteparticuliere, l'alinea 3 prevoit un regime transitoire specifique pour lescontrats dit d'affinite. Il s'agit de contrats collectifs non lies àl'activite professionnelle. Il est prevu que la section III devienneapplicable aux contrats existants au terme d'un delai de transition dedeux ans. Afin d'eviter que ces contrats ne perdurent indefiniment, il estprecise qu'il ne peut plus y etre affilie de nouveaux assures principaux'(Doc. parl., Ch. repr., sess. ord. 2008/2009, nDEG 52 1662/001, p. 10).

Selon [les demanderesses], tous les contrats collectifs non lies àl'activite professionnelle sont des contrats dits d'affinite, ce qui estconteste par les [defendeurs].

Les contrats d'affinite ne sont pas definis dans les travauxpreparatoires, le legislateur precisant uniquement qu'il s'agitd'assurances conclues avec des groupes dits d'affinite, comme lesassociations de volontaires, les clubs d'investisseurs, etc. (Doc. parl.,Ch. repr., sess. ord. 2008/2009, nDEG 52 1662/001, p. 6).

C'est egalement ce type de contrat qui est designe par les auteurs commecontrats collectifs `Affinity Group' (voir N. Schmitz, `Les modificationsapportees à la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestreen assurance maladie et en solde restant du : trois pas en avant ...', inLa loi sur le contrat d'assurance terrestre. Bilan et perspective apresvingt ans d'application, Bruylant, 2012, p. 281 ; J.-C. Andre-Dumont, `Lesassurances maladie pratiquees par les assureurs prives en Belgique',R.G.A.R, 2010, 14628).

Il apparait donc que, contrairement à ce que soutiennent [lesdemanderesses], les contrats d'affinite ne regroupent pas tous lescontrats collectifs non lies à l'activite professionnelle mais certainsd'entre eux uniquement. Au vu des exemples cites ci-avant, le contratlitigieux ne constitue pas un contrat d'affinite.

Cela a ete confirme à l'occasion d'une question parlementaire. Auxquestions suivantes posees par Mme Van der Auwera : `Est-ce que ladisposition transitoire de l'article 13, S: 2, alinea 3, est exclusivementd'application aux contrats d'affinite, donc à l'exclusion de tous lesautres contrats non lies à l'activite professionnelle ? Des contratsd'assurance maladie en faveur de personnes au-delà de 65 ans qui ont eteconclus apres la rupture de leur relation professionnelle valent, jepresume, à vie. Il n'est pas porte prejudice à de tels contrats par ladisposition transitoire telle que je viens de l'enoncer. Ceci peut-il etreprecise expressement dans la loi ?', le ministre Reynders a repondu :`Etant donne que le nouveau regime pour les contrats non lies àl'activite professionnelle etait difficilement applicable aux contratsd'affinite, mais que l'on ne souhaitait neanmoins pas mettre finimmediatement aux contrats existants, il a ete decide d'introduire unregime transitoire pour ces contrats. [...] L'article 13, S: 2, alinea 3,de la loi du 17 juin 2009 est exclusivement applicable aux contratsd'affinite, des contrats d'assurance collectifs qui ont ete souscrits endehors de toute relation professionnelle. [...] L'application limitee dela loi à laquelle reference est faite dans l'expose des motifs appert dutexte de la loi en soi egalement. L'article 13, S: 2, alinea 3, en effet,dit explicitement que les nouveaux assures principaux ne peuvent plus etreaffilies', et Mme Van der Auwera de conclure : `J'ai connaissance decertains cas ou le regime transitoire pour ces contrats est utilise pourdire qu'un contrat d'assurance maladie collectif n'est plus valable pourles pensionnes qui en sont restes beneficiaires. Le ministre confirme doncque ce type de contrat reste valable pendant toute la duree de la vie, quela police soit souscrite avant ou apres l'admission à la pension' (Doc.Parl., Ch. repr., sess. ord. 2011/2012, CRIV 53 COM 339, pp. 20 et 21).

Il resulte des developpements qui precedent que c'est à bon droit que lepremier juge a considere que le champ d'application de l'article 13, S: 2,alinea 3, n'englobait pas des contrats tels que le contrat litigieux maisvisait les contrats dits d'affinite, qui repondent à des criteres biendifferents.

Il resulte des developpements qui precedent que l'appel principal [desdemanderesses] doit etre declare non fonde et qu'il convient de confirmerla decision entreprise en ce qu'elle a considere que ces societesn'etaient pas en droit de resilier la police, le contrat etant conclu àvie, de telle sorte que la resiliation etait de nul effet.

[...] L'appel forme à titre infiniment subsidiaire par [lesdemanderesses] n'est par consequent pas fonde et il convient, eu egard auxdeveloppements qui precedent, de confirmer la decision entreprise en cequ'elle a dit pour droit que le contrat d'assurance collective fraismedicaux souscrit par [la premiere defenderesse] aupres [desdemanderesses] le 22 fevrier 2006 est conclu à vie, que la couvertured'assurance doit etre maintenue et que la resiliation operee par lettre du18 novembre 2009 etait illicite et de nul effet ».

Griefs

1. L'article 3, S: 2, de la loi du 20 juillet 2007 modifiant, en ce quiconcerne les contrats prives d'assurance maladie, la loi du 25 juin 1992sur le contrat d'assurance terrestre, modifie par la loi du 17 juin 2009,et avant l'annulation de son alinea 2 par l'arret de la Courconstitutionnelle du 31 mai 2011 (nDEG 90/2011), disposait :

« S: 2. Pour ce qui est des contrats d'assurance maladie existants nonlies à l'activite professionnelle, une periode transitoire de deux ansest applicable à partir du 1er juillet 2007 en ce qui concernel'application de l'article 138bis-4 de la loi du 25 juin 1992 sur lecontrat d'assurance terrestre.

Pour ce qui est des contrats d'assurance maladie existants non lies àl'activite professionnelle qui, au moment de l'entree en vigueur de lapresente loi, ne satisfont pas aux exigences de l'article 138bis-3 de laloi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, l'entreprised'assurances propose à l'assure principal, au plus tard deux ans àpartir du 1er juillet 2007, un nouveau contrat d'assurance maladieconforme à ces exigences. L'assure principal decide, dans les trentejours de la reception de la proposition, d'y souscrire ou de maintenir soncontrat d'assurance maladie en cours pour sa duree restante.

Les contrats d'assurance maladie existants non lies à l'activiteprofessionnelle qui ont ete conclus par un ou plusieurs preneursd'assurance au profit d'un ou plusieurs assures principaux ou d'un ouplusieurs assures secondaires sont soumis, au terme de la periodetransitoire visee à l'alinea 1er, aux dispositions du chapitre IV,section III, de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assuranceterrestre. Des nouveaux assures principaux ne peuvent plus s'affilier àces assurances ».

2. Il suit de ce texte que les alineas 2 et 3 de l'article 3, S: 2, visentles modalites d'application de l'alinea 1er, l'alinea 2 avant sonannulation par la Cour constitutionnelle visant les contrats maladieindividuels couvrant le preneur lui-meme (« l'assure principal ») et, lecas echeant, certains membres de sa famille, tandis que l'alinea 3 viseles contrats d'assurance maladie collectifs conclus par un ou plusieurspreneurs d'assurance au profit d'un ou plusieurs assures principaux et/ousecondaires.

L'article 3, S: 2, alinea 3, de la loi du 20 juillet 2007 vise au moyen nedistingue pas entre les contrats d'assurance maladie conclus par un ouplusieurs « preneurs d'assurance » au profit d'un ou plusieurs «assures principaux ou secondaires » (non lies à l'activiteprofessionnelle). N'operant aucune distinction, il s'applique donc à tousles contrats entrant dans son champ d'application.

3. L'arret rejette le moyen par lequel les demanderesses faisaient valoir,à titre subsidiaire, dans leurs conclusions additionnelles et de synthesed'appel, qu'elles devaient beneficier du regime transitoire de l'article3, S: 2, alinea 3, de la loi du 20 juillet 2007.

Apres avoir reconnu le caractere collectif du contrat litigieux souscritpar la premiere defenderesse au benefice de ses travailleurs pensionnes,et decide que celui-ci etait un contrat non lie à l'activiteprofessionnelle, l'arret estime, en effet, que l'article 3, S: 2, alinea3, de la loi du 20 juillet 2007, modifie par la loi du 17 juin 2009, netrouve pas application au contrat litigieux des lors que le regimetransitoire ainsi instaure ne l'aurait ete que « pour les contrats ditsd'affinite » et que « le contrat litigieux ne constitue pas un contratdit d'affinite ».

En reduisant ainsi la portee de l'article 3, S: 2, alinea 3, de la loi du 20 juillet 2007 vise au moyen, aux seuls contrats « dits d'affinite »,alors qu'il s'applique sans distinction entre les contrats collectifsd'assurance maladie non lies à l'activite professionnelle, l'arret violeledit article 3, S: 2, alinea 3.

III. La decision de la Cour

Sur le premier moyen :

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 138bis-1, S: 2, de la loi du 25 juin 1992 sur lecontrat d'assurance terrestre, dans sa version applicable aux faits, l'onentend par contrat d'assurance maladie lie à l'activite professionnelle :tout contrat d'assurance maladie conclu par un ou plusieurs preneursd'assurance au profit d'une ou plusieurs personnes lieesprofessionnellement aux preneurs d'assurance au moment de l'affiliation.

Une personne est liee professionnellement au sens de cette dispositionlegale lorsque la relation entre le preneur d'assurance et cette personnepermet à cette derniere de recueillir des revenus professionnels.

Il s'ensuit que, pour qu'un contrat d'assurance maladie conclu par un ouplusieurs preneurs d'assurance au profit d'une ou plusieurs personnespuisse etre qualifie de contrat d'assurance maladie lie à l'activiteprofessionnelle, il faut qu'au moment de l'affiliation, il existe entre lepreneur d'assurance et le beneficiaire une relation lui permettant derecueillir des revenus professionnels.

Le moyen, qui, en cette branche, soutient que « constitue un contratd'assurance maladie lie à l'activite professionnelle le contrat souscritpar un employeur et qui trouve sa cause dans les contrats de travail quile lient à ses travailleurs ou est conclu en execution d'une obligationdecoulant de ces contrats ou des regles - notamment les conventionscollectives - qui president à leur execution, sans qu'il faille, enoutre, qu'au moment de leur affiliation à la police, les beneficiairesexercent encore aupres de leur employeur une activite professionnelle »,manque en droit.

Quant à la deuxieme branche :

En vertu de l'article 138bis-8, S: 1er, de la loi du 25 juin 1992, dans saversion applicable au litige, toute personne affiliee à une assuranceliee à l'activite professionnelle a le droit de poursuivre, en tout ou enpartie, cette assurance individuellement lorsqu'elle perd le benefice del'assurance liee à l'activite professionnelle, pour autant que l'assureprincipal ait, durant les deux annees precedant la perte du contratd'assurance maladie lie à l'activite professionnelle qui est poursuivi,ete affilie de maniere ininterrompue à un ou plusieurs contratsd'assurance maladie successifs souscrits aupres d'une entreprised'assurance au sens de cette loi.

Cette disposition legale, qui a pour seul objet de determiner lesconditions auxquelles une personne affiliee à une assurance liee àl'activite professionnelle peut poursuivre cette assuranceindividuellement lorsqu'elle en perd le benefice, est etrangere à ladefinition du contrat d'assurance maladie lie à l'activiteprofessionnelle, qu'elle ne saurait influencer.

Le moyen, qui, en cette branche, repose sur le soutenement contraire,manque en droit.

Quant à la troisieme branche :

Les demanderesses invoquent l'existence d'une difference de traitementcontraire aux articles 10 et 11 de la Constitution entre, d'une part, lesanciens membres du personnel admis à la retraite qui etaient encoreactifs au moment ou leur employeur a souscrit un contrat d'assurancemaladie collectif conclu en raison d'obligations decoulant du contrat detravail ou des regles presidant à leur execution, d'autre part, lesanciens membres du personnel admis à la retraite qui n'etaient plusactifs au moment ou leur employeur a souscrit un tel contrat d'assurancemaladie.

La discrimination alleguee ne repose pas sur une distinction entre desjusticiables se trouvant dans la meme situation juridique auxquelss'appliqueraient des regles differentes mais sur une distinction entre desjusticiables, qui, selon leur qualite de personne active ou non au momentde la souscription par leur employeur d'un contrat d'assurance maladiecollectif, sont dans des situations juridiques differentes.

La question prejudicielle proposee par les demanderesses ne doit, deslors, pas etre soumise à la Cour constitutionnelle.

L'arret decide legalement d'appliquer l'article 138bis-1, S: 2, de la loidu 25 juin 1992 dans l'interpretation vainement critiquee par les autresbranches du moyen.

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Sur le second moyen :

Aux termes de l'article 3, S: 2, alinea 3, de la loi du 20 juillet 2007modifiant, en ce qui concerne les contrats prives d'assurance maladie, laloi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre, modifie parl'article 13 de la loi du 17 juin 2009, les contrats d'assurance maladieexistants non lies à l'activite professionnelle qui ont ete conclus parun ou plusieurs preneurs d'assurance au profit d'un ou plusieurs assuresprincipaux ou d'un ou plusieurs assures secondaires sont soumis, au termede la periode transitoire visee à l'alinea 1er, aux dispositions duchapitre IV, section III, de la loi du 25 juin 1992 sur le contratd'assurance terrestre. De nouveaux assures principaux ne peuvent pluss'affilier à ces assurances.

Il ressort des travaux preparatoires de la loi du 17 juin 2009 que cettedisposition, qui tient compte d'une situation existante particuliere,reserve le regime transitoire specifique qu'elle cree aux seuls contratsdits d'affinite.

Le moyen, qui soutient que cette disposition s'applique sans distinctionà tous les contrats collectifs d'assurance maladie non lies à uneactivite professionnelle, manque en droit.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne les demanderesses aux depens.

Les depens taxes à la somme de trois mille nonante-quatre eurosquarante-sept centimes envers les parties demanderesses.

Ainsi juge par la Cour de cassation, premiere chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, president, lespresidents de section Albert Fettweis et Martine Regout, les conseillersMichel Lemal et Marie-Claire Ernotte, et prononce en audience publique duvingt-quatre novembre deux mille seize par le president de sectionChristian Storck, en presence de l'avocat general Thierry Werquin, avecl'assistance du greffier Patricia De Wadripont.

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| P. De Wadripont | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
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| M. Regout | A. Fettweis | Chr. Storck |
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24 NOVEMBRE 2016 C.15.0104.F/27


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.15.0104.F
Date de la décision : 24/11/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-11-24;c.15.0104.f ?
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