La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/10/2016 | BELGIQUE | N°C.11.0561.F

Belgique | Belgique, Cour de cassation, 17 octobre 2016, C.11.0561.F


Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.11.0561.F

D. D.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

A. M.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cass

ation est dirige contre l'arret rendu le 16 fevrier 2011par la cour d'appel de Mons.

Par ordonnance du 23 septembre ...

Cour de cassation de Belgique

Arret

NDEG C.11.0561.F

D. D.,

demanderesse en cassation,

representee par Maitre Simone Nudelholc, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, boulevard de l'Empereur, 3, ou ilest fait election de domicile,

contre

A. M.,

defendeur en cassation,

represente par Maitre Huguette Geinger, avocat à la Cour de cassation,dont le cabinet est etabli à Bruxelles, rue des Quatre Bras, 6, ou il estfait election de domicile.

I. La procedure devant la Cour

Le pourvoi en cassation est dirige contre l'arret rendu le 16 fevrier 2011par la cour d'appel de Mons.

Par ordonnance du 23 septembre 2016, le premier president a renvoye lacause devant la troisieme chambre.

Le president de section Christian Storck a fait rapport.

L'avocat general delegue Michel Palumbo a conclu.

II. Le moyen de cassation

La demanderesse presente un moyen libelle dans les termes suivants :

Dispositions legales violees

- article 149 de la Constitution ;

- article 1448 du Code civil ;

- articles 1175 et 1183 du Code judiciaire ;

- article 226, alinea 2, du Code penal.

Decisions et motifs critiques

Saisi des conclusions de la demanderesse qui invoquaient que :

« Il resulte du jugement du premier juge du 1er octobre 2008 que [ledefendeur] n'a pas declare sa clientele lors de la vacation d'inventaire qui s'est tenue le 9 mai 2007. Or, la clientele d'une profession liberaleacquise ou constituee durant le mariage depend de la communaute [...]. Ilest incontestable que [le defendeur] devait declarer à l'inventaire lavaleur de l'accroissement de sa clientele realisee durant le mariage. Adefaut de declaration, [le defendeur] s'est rendu coupable de recel civil[...]. Le tribunal [...] relevera que l'omission volontaire [du defendeur]a eu pour consequence que le notaire charge de la liquidation du regimematrimonial n'a pas tenu compte de la valeur de la patientele dansl'etablissement de son etat liquidatif. Par son seul fait, [le defendeur]a donc prive [la demanderesse] de ses droits sur la valeur del'accroissement de la patientele. Par consequent, à defaut de repentiravant la cloture de l'inventaire, [le defendeur] a [...] perdu tout droitsur la valeur de l'accroissement de clientele au profit de la[demanderesse] »,

l'arret dit pour droit que « la condition d'existence du recel faitdefaut » et, en consequence, declare non fondee la demande tendant à cequ'il soit dit pour droit que le defendeur s'est rendu coupable de recelde communaute au sens de l'article 1448 du Code civil et à ce que lavaleur integrale de la clientele acquise durant le mariage soit attribueeà la demanderesse.

L'arret fonde cette decision sur les motifs suivants :

« L'epoux qui a diverti ou recele quelque bien du patrimoine commun estprive de sa part dans ledit bien (article 1448 du Code civil) ;

Le recel ou le divertissement de biens de la communaute s'analyse en toutacte de mauvaise foi par lequel l'epoux commun en biens veut acquerir surles effets de la communaute un avantage illicite aux depens de sescopartageants (voy. notamment Cass., 6 juin 1969, Pas., I, 900) ;

Il appartient à [la demanderesse] de demontrer l'intention frauduleuse oules manoeuvres frauduleuses [du defendeur], qui doit avoir sciemment omisde declarer à l'inventaire l'existence de sa clientele ;

[La demanderesse] n'apporte pas le moindre commencement de preuve del'intention de nuire ou d'une quelconque manoeuvre frauduleuse [dudefendeur] ;

[Le defendeur] a commence à travailler à [...] en 1978 et sa clienteledevait etre acquise au moment du mariage en 1982 ; il est doncvraisemblable que [le defendeur] ait, de bonne foi, considere que saclientele etait un bien propre ; en outre, ni le notaire, qui connaissaitla profession [du defendeur], ni [la demanderesse] n'ont, à aucun moment,souleve la question de cette clientele ;

En l'espece, la condition d'existence du recel fait defaut et la demandeoriginaire de [la demanderesse] doit etre declaree non fondee ».

Griefs

Premiere branche

1. Aux termes de l'article 1448 du Code civil, l'epoux qui a diverti ourecele quelque bien du patrimoine commun est prive de sa part dans leditbien. Selon l'arret de la Cour du 6 juin 1969 (Pas., I, 900), le recel decommunaute, analogue au recel de succession vise à l'article 792 du memecode, « s'analyse en tout acte de mauvaise foi par lequel l'epoux communen biens [...] veut acquerir sur les effets de la communaute [...] unavantage illicite aux depens de ses copartageants ; [l'article 1448] vise[...] ainsi toute fraude tendant à priver les copartageants de ce quileur revient dans le partage ».

L'arret du 12 novembre 2004 (Pas., nDEG 543), qui concernait un recelsuccessoral, precise explicitement que le recel peut resulter del'omission du copartageant de faire les declarations « que la loi luiimpose ».

Il ressort de ces arrets que les termes « fraude » ou « manoeuvre »,souvent utilises par la doctrine pour qualifier le recel de communaute oule recel successoral, ne supposent pas un acte materiel par lequel unbien serait physiquement soustrait à la masse à partager, pas plus qu'uncomportement actif de la part du receleur : une omission qualifiee oucirconstanciee peut etre constitutive de recel.

2. S'il appartient en regle au juge du fond d'apprecier à partir de quandun silence ou une omission est suffisamment circonstancie pour constituerun fait de recel, il en va autrement lorsqu'il s'agit d'une omission dedeclaration dans un inventaire notarie. En effet, l'article 226, alinea 2,du Code penal punit de peines correctionnelles celui qui a fait un fauxserment lors d'une apposition de scelles ou d'un inventaire.

A peine de mettre à mal la coherence de l'ordre juridique, l'article 1448du Code civil doit etre interprete d'une maniere qui tienne compte de laportee donnee au delit penal de faux serment dans un inventaire notarievise à l'article 226, alinea 2, precite. Il serait inconcevable quel'epoux qui a commis une omission constitutive du delit de faux sermentdans un inventaire notarie soit considere comme un epoux de bonne foi pourl'application de l'article 1448 du Code civil. Lorsque l'epoux defendeurà l'action civile en declaration de recel de communaute a prete sermentà l'issue de l'inventaire notarie, apres avoir omis de faire, dans lecadre de cet inventaire, les declarations qui lui etaient imposees par laloi, la bonne foi susceptible d'exclure l'application de la sanctioncivile doit correspondre à une circonstance susceptible de supprimer lecaractere penal de l'omission, telle l'erreur invincible de droit ou defait.

3. Aux termes de l'article 1175 du Code civil, « l'inventaire a pourobjet de determiner la consistance de la succession, ou de la communaute,ou de l'indivision. Il contient notamment la description et l'estimationdes objets mobiliers, l'analyse des titres et papiers, la relation desdeclarations actives et passives faites par les interesses ».

Selon la jurisprudence de la Cour, « l'inventaire vise par les articles1175 et 1183 du Code judiciaire a pour objet de determiner les elementsactifs et passifs composant la masse indivise ; les parties à uninventaire ont l'obligation de declarer tout bien dont l'existencepourrait rester inconnue ; lorsque, comme en l'espece, l'inventaire a pourobjet de determiner la consistance de la communaute en vue de proceder àla liquidation-partage du regime matrimonial, les parties sont tenues dedeclarer tous les biens qui peuvent influencer la composition de lacommunaute ; tel est le cas des biens et valeurs qui, en vertu d'unedisposition legale, peuvent etre consideres comme communs mais pourlesquels l'un des epoux, en cas de contestation dans le cadre de laprocedure de liquidation-partage, peut fournir la preuve, le cas echeant,qu'ils appartiennent à son patrimoine propre » (Cass., 26 janvier 1999- deux especes -, Pas., nDEGs 42 et 43).

La Cour a confirme, par un arret du 15 juin 1999 (Pas., nDEG 358), quel'inventaire « a pour objet de determiner ce qui appartientrespectivement à la communaute et au patrimoine propre, de sorte que lesepoux sont obliges de declarer tout ce qui fait partie de ces patrimoines».

Cette obligation de declarer tout ce qui est susceptible d'influencer laliquidation du regime matrimonial s'impose meme en l'absenced'interpellation du notaire ou de la partie adverse. La declaration doitetre spontanee (Cass., 24 octobre 1989, Pas., 1990, I, nDEG 118 ; 25novembre 2003, Pas., nDEG 597 ; 29 octobre 1973, Pas., 1974, I, 221, etles conclusions du premier avocat general baron Mahaux, spec. pp. 225, 2ecolonne, antepenultieme alinea, et 227, 1re colonne).

Les arrets precites deduisent de la combinaison des articles 1175 et 1183du Code judiciaire, d'une part, et 226, alinea 2, du Code penal, d'autrepart, que suffit à justifier la condamnation pour infraction à l'article226, alinea 2, precite, la constatation par la juridiction repressive dufait que l'ex-epoux s'est abstenu de declarer spontanement, dans le cadred'un inventaire notarie, un bien commun ou un bien à lui propre, dontl'omission etait susceptible de lui procurer un avantage au detriment deson copartageant.

4. En l'espece, des lors que l'arret admet, de maniere implicite maiscertaine, ou, à tout le moins, ne denie pas qu'ainsi que la demanderessel'invoquait dans ses conclusions d'appel, le defendeur n'a pas declare saclientele lors de la vacation d'inventaire qui s'est tenue le 9 mai 2007,la decision de debouter la demanderesse de la demande tendant à faireprononcer contre le defendeur la sanction prevue par l'article 1448 duCode civil n'est legalement justifiee, ni par le motif « qu'il estvraisemblable que le defendeur ait, de bonne foi, considere que saclientele etait un bien propre », ni par le motif que « ni le notaire,qui connaissait la profession du [defendeur], ni la [demanderesse] n'ont,à aucun moment, souleve la question de cette clientele ».

Devant une juridiction repressive, ces deux circonstances n'auraient pasete elusives de l'infraction reprimee par l'article 226, alinea 2, du Codepenal. En consequence, elles ne peuvent davantage suffire à exclure ledelit civil de recel de communaute, sanctionne par l'article 1448 du Codecivil.

En se fondant sur la double circonstance precitee pour decider que lademanderesse n'a pas « demontr[e] l'intention frauduleuse ou lesmanoeuvres frauduleuses [du defendeur], qui doit avoir sciemment omis dedeclarer à l'inventaire l'existence de sa clientele », et en deduireque « la condition d'existence du recel fait defaut », l'arret meconnait

- l'obligation qui incombe à tout copartageant de declarer spontanementdans le cadre d'un inventaire notarie, sans attendre d'avoir eteinterpelle par le notaire ou une autre partie, tout bien dont l'existencepourrait rester inconnue (violation des articles 1175 et 1183 du Codejudiciaire) ;

- l'obligation qui incombe à tout copartageant de declarer, lors d'uninventaire notarie etabli dans le cadre de la liquidation d'un regimematrimonial, meme les biens que le copartageant estime de bonne foi luietre propres en vertu de la loi ou du contrat de mariage (violation desarticles 1175 et 1183 du Code judiciaire) ;

- la portee du delit penal de faux serment dans un inventaire, enconsiderant implicitement que n'est pas susceptible de constituer le delitprecite, l'omission de declarer, lors de l'inventaire etabli dans le cadrede la liquidation d'un regime matrimonial, un bien que le copartageantestime de bonne foi lui etre propre en vertu de la loi ou du contrat demariage (violation des articles 1175 et 1183 du Code judiciaire combinesavec l'article 226, alinea 2, du Code penal) ;

- la portee du delit penal de faux serment dans un inventaire, enconsiderant implicitement que l'omission de declarer dans l'inventairenotarie tout bien susceptible d'influencer les droits des copartageantsn'est penalement reprimee que si l'auteur de l'omission avait eteprealablement interpelle sur l'existence de ce bien par le notaire ou parun copartageant (violation des articles 1175 et 1183 du Code judiciairecombines avec l'article 226, alinea 2, du Code penal) ;

- la notion de recel de communaute au sens de l'article 1448 du Codecivil, en considerant qu'une omission de declaration susceptible deconstituer le delit penal de faux serment dans un inventaire ne suffit pasà constituer la manoeuvre frauduleuse requise pour caracteriser un telrecel (violation des articles 1448 du Code civil, 1175 et 1183 du Codejudiciaire et 226, alinea 2, du Code penal).

A tout le moins, l'arret meconnait-il la notion de recel de communaute ausens de l'article 1448 du Code civil en considerant que ne suffit pas àconstituer la manoeuvre frauduleuse caracteristique d'un tel recel lefait pour un ex-epoux de ne pas declarer, lors de l'inventaire notarieprealable à la liquidation du regime matrimonial, un bien que cetex-epoux estime de bonne foi lui etre propre (violation de l'article 1448du Code civil et, en tant que de besoin, de toutes les dispositions viseesen tete du moyen, à l'exception de l'article 149 de la Constitution).

L'arret meconnait en outre la notion de recel de communaute au sens del'article 1448 du Code civil en considerant que ne suffit pas àconstituer la manoeuvre frauduleuse caracteristique d'un tel recel le faitpour un ex-epoux de ne pas declarer spontanement lors de l'inventairenotarie, sans attendre d'etre interpelle par le notaire ou par soncopartageant, un bien susceptible d'influencer la liquidation du regime(violation de l'article 1448 du Code civil et, en tant que de besoin, detoutes les dispositions visees en tete du moyen, à l'exception del'article 149 de la Constitution).

Deuxieme branche

1. Si l'arret enonce qu'il est vraisemblable que le defendeur a, de bonnefoi, considere que sa clientele etait un bien propre, il ne constate ni 1DEG que ce defendeur a, de bonne foi, commis une erreur de droit ensupposant qu'il n'avait l'obligation de declarer, lors de l'inventairenotarie, que les seuls biens composant avec certitude le patrimoinecommun, à l'exclusion des biens et valeurs qui, en vertu d'unedisposition legale, peuvent etre consideres comme communs mais pourlesquels l'un des epoux, en cas de contestation dans le cadre de laprocedure de liquidation-partage, peut fournir la preuve, le cas echeant,qu'ils appartiennent à son patrimoine propre, ni 2DEG que le defendeura, de bonne foi, commis une erreur de droit en supposant qu'il n'avait pasl'obligation de declarer spontanement, lors de l'inventaire notarie, lesbiens et les faits susceptibles d'influencer la liquidation du regimematrimonial mais qu'il devait uniquement repondre aux interpellations dunotaire ou de la demanderesse.

2. Le recel de communaute, sanctionne par l'article 1448 du Code civil,analogue au recel successoral vise à l'article 792 du meme code,s'analyse en tout acte de mauvaise foi par lequel l'epoux commun en biensveut acquerir sur les effets de la communaute un avantage illicite auxdepens de son copartageant. Le recel ne suppose pas un acte materiel parlequel un bien serait physiquement soustrait à la masse à partager, pasplus qu'un comportement actif de la part du receleur. Il peut consisterdans la simple omission du copartageant de faire les declarations que laloi lui impose, en particulier les declarations que la loi lui imposeavant la cloture de l'inventaire vise aux articles 1175 et 1183 du Codejudiciaire (voy. les arrets de la Cour de cassation des 6 juin 1969 et 12novembre 2004, cites dans la premiere branche du moyen).

Des lors, en considerant qu'il etait requis, pour pouvoir conclure àl'existence d'un recel de communaute, que le defendeur ait « sciemmentomis de declarer à l'inventaire l'existence de sa clientele » et en sefondant sur les motifs precites pour decider que « [la demanderesse]n'apporte pas le moindre commencement de preuve de l'intention de nuireou d'une quelconque manoeuvre frauduleuse [du defendeur] », l'arretmeconnait la regle (qui decoule de la combinaison des articles 1148 duCode civil, 1175 et 1183 du Code judiciaire) selon laquelle, pour exclurel'existence du recel de communaute, l'erreur de droit commise par l'un desex-conjoints doit porter sur l'etendue des obligations de declaration quilui incombent dans le cadre de l'inventaire notarie et non sur lecaractere propre ou commun des biens qu'il a omis de declarer. Enconsequence, les motifs precites ne peuvent suffire à justifierlegalement la decision selon laquelle « la condition d'existence du recelfait defaut ». En fondant sa decision sur les motifs precites, sansconstater que le demandeur a, de bonne foi, commis une erreur de droit ensupposant, d'une part, qu'il n'avait l'obligation de declarer, lors del'inventaire notarie, que les seuls biens composant avec certitude lepatrimoine commun, à l'exclusion des biens et valeurs qu'il estimait luietre propres, d'autre part, qu'il ne devait pas faire de declarationspontanee mais devait attendre d'etre interpelle par le notaire ou par lademanderesse, l'arret meconnait les conditions legales d'existence durecel de communaute (violation des articles 1448 du Code civil, 1175 et1183 du Code judiciaire).

A tout le moins, les motifs de l'arret ne permettent-ils pas de determinersi la cour d'appel a constate que le demandeur avait, de bonne foi,estime, d'une part, qu'il n'avait l'obligation de declarer, lors del'inventaire notarie, que les seuls biens composant avec certitude lepatrimoine commun, à l'exclusion des biens qu'il considerait commepropres et, d'autre part, qu'il ne devait pas faire de declarationspontanee mais devait attendre d'etre interpelle, lors de la dernierevacation d'inventaire precedant la prestation de serment, par le notaireou par la demanderesse. En consequence, les motifs de l'arret nepermettent pas à la Cour de controler la legalite de la decisioncritiquee, de sorte que l'arret n'est pas regulierement motive (violationde l'article 149 de la Constitution).

Troisieme branche (subsidiaire)

A tout le moins, les motifs de l'arret ne permettent-ils pas de determinersi la cour d'appel a admis qu'ainsi que la demanderesse l'invoquait dansses conclusions d'appel, le defendeur avait omis de declarer sa clientelelors d'une vacation d'inventaire notarie.

Des lors, les constatations de l'arret ne rencontrent pas les conclusionsde la demanderesse et ne permettent pas à la Cour de controler lalegalite de la decision critiquee. En consequence, l'arret n'est pasregulierement motive (violation de l'article 149 de la Constitution).

III. La decision de la Cour

Quant à la premiere branche :

Aux termes de l'article 1448 du Code civil, l'epoux qui a diverti ourecele quelque bien du patrimoine commun est prive de sa part dans leditbien.

Le divertissement ou le recel de biens du patrimoine commun s'analyse entout acte de mauvaise foi par lequel l'epoux commun en biens entendacquerir sur les effets de la communaute un avantage illicite aux depensde l'autre epoux.

L'article 1448 du Code civil vise ainsi toute fraude tendant à priver lecopartageant de ce qui lui revient dans le partage.

Cette intention frauduleuse, qui est un element essentiel du recel decommunaute, ne se confond pas avec l'element moral du delit de fauxserment vise à l'article 226, alinea 2, du Code penal.

L'arret constate que « les parties se sont mariees le 17 septembre 1982sous le regime de la communaute de biens et sont actuellementdivorcees » ; qu'« un etat liquidatif [de la communaute] a ete dresse le18 fevrier 2008 et un proces-verbal de dires et difficultes, etabli le 9avril 2008 » ; « qu'un jugement prononce le 1er octobre 2008, confirmepar arret du 30 juin 2009, a homologue [cet] etat », et que, « parcitation [du] 28 mai 2009 [...], [la demanderesse] a sollicite qu'il soitdit pour droit que [le defendeur] s'est rendu coupable de recel decommunaute au sens de l'article 1448 du Code civil » et « que la valeurde la clientele acquise par [celui-ci] durant le mariage [...] lui soitattribuee ».

En considerant qu'« il appartient à [la demanderesse] de demontrerl'intention frauduleuse ou les manoeuvres frauduleuses [du defendeur], quidoit avoir sciemment omis de declarer à l'inventaire l'existence de saclientele » ; qu'« elle n'apporte pas le moindre commencement de preuvede l'intention de nuire ou d'une quelconque manoeuvre frauduleuse [dudefendeur] » ; que « [celui-ci] a commence à travailler [...] en 1978et [que] sa clientele devait etre acquise au moment du mariage en 1982 ;qu'il est donc vraisemblable [qu'il] ait, de bonne foi, considere que saclientele etait un bien propre, et qu'en outre, ni le notaire, quiconnaissait [sa] profession, ni [la demanderesse] n'ont, à aucun moment,souleve la question de cette clientele », l'arret, qui donne ainsi àconnaitre que le defendeur n'a pas entendu priver la demanderesse de cequi lui revenait dans le partage, justifie legalement sa decision que« la condition d'existence du recel fait defaut ».

Le moyen, en cette branche, ne peut etre accueilli.

Quant à la deuxieme branche :

Le moyen, qui, en cette branche, repose sur le soutenement que la simpleabstention de faire à l'inventaire une declaration requise suffit àconstituer le delit civil de recel de communaute, alors que celui-cirequiert l'intention frauduleuse precisee en reponse à la premierebranche, manque en droit.

Quant à la troisieme branche :

L'arret ne denie pas que le defendeur n'a pas declare sa clientele lorsd'une vacation d'inventaire notarie.

Le moyen, en cette branche, manque en fait.

Par ces motifs,

La Cour

Rejette le pourvoi ;

Condamne la demanderesse aux depens.

Les depens taxes à la somme de sept cent trente et un euros soixante-neufcentimes envers la partie demanderesse et à la somme de trois cent vingteuros quarante-six centimes envers la partie defenderesse.

Ainsi juge par la Cour de cassation, troisieme chambre, à Bruxelles, ousiegeaient le president de section Christian Storck, les conseillersDidier Batsele, Mireille Delange, Michel Lemal et Marie-Claire Ernotte, etprononce en audience publique du dix-sept octobre deux mille seize par lepresident de section Christian Storck, en presence de l'avocat generaldelegue Michel Palumbo, avec l'assistance du greffier Lutgarde Body.

+-------------------------------------------+
| L. Body | M.-Cl. Ernotte | M. Lemal |
|------------+----------------+-------------|
| M. Delange | D. Batsele | Chr. Storck |
+-------------------------------------------+

17 OCTOBRE 2016 C.11.0561.F/3

Requete/1


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.11.0561.F
Date de la décision : 17/10/2016

Origine de la décision
Date de l'import : 11/11/2016
Identifiant URN:LEX : urn:lex;be;cour.cassation;arret;2016-10-17;c.11.0561.f ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award